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Économie Évolutionniste et Culture d'Entreprise

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Les problèmes organisationnels de conflits 37 <strong>et</strong> d’agence sont au cœur de toute théorie de la firme. La<br />

théorie évolutionniste de la firme chez/<strong>et</strong> à la suite de Nelson <strong>et</strong> Winter semble cependant évacuer ces<br />

problèmes 38 en avançant le mécanisme implicite de trêve (truce) encapsulé dans les routines<br />

organisationnelles activées. Nelson <strong>et</strong> Winter (1982) distinguent clairement la dimension “cognitive” des<br />

routines de leur dimension de “coordination”, tout en se focalisant sur la première. Ils ne vont ainsi<br />

consacrer que cinq p<strong>et</strong>ites pages à l’analyse du côté politique de la coordination dans la section intitulée<br />

“la routine comme trêve” (p. 107-112). L’essentiel de l’information nécessaire pour la coordination est<br />

considéré comme étant encapsulé dans des répertoires de routines.<br />

Nelson <strong>et</strong> Winter représentent la firme comme étant animée par la recherche du profit. La réalisation d’un profit<br />

non-négatif étant le critère de survie des firmes sur le marché. La question de la répartition de la valeur créée à la<br />

fois entre les agents <strong>et</strong> les managers <strong>et</strong> entre les managers <strong>et</strong> les actionnaires est passée sous silence (Coriat <strong>et</strong><br />

Weinstein, 1995) <strong>et</strong> la prise en compte des modes de régulation des conflits <strong>et</strong> encore moins des institutions<br />

demeure insuffisante. Il ne suffit pas d’évoquer un certain contexte social pour que la question de l’articulation de la<br />

technologie, de l’économique <strong>et</strong> du social soit résolue. Tout système technique est doté de modalités de régulation<br />

à la fois économiques, politiques <strong>et</strong> sociales qui assurent sa mise en place, sa diffusion <strong>et</strong> sa généralisation.<br />

L’histoire cognitive de la firme n’explique que partiellement son comportement La théorie évolutionniste de la firme<br />

chez Nelson <strong>et</strong> Winter en est par conséquent altérée.<br />

Nelson <strong>et</strong> Winter (1982, p. 108 f) expliquent leur faible intégration des dimensions de motivation <strong>et</strong> de<br />

conflits intra-organisationnels par le fait qu’elle ait déjà été abordée par d’autres approches économiques<br />

de la firme (Coase, 1937 ; Simon, 1951 ; Doeringer <strong>et</strong> Piore, 1971 ; Ross, 1973 ; Williamson, 1975 <strong>et</strong><br />

Leibenstein, 1976). En neutralisant de la sorte la dimension de coordination par l’hypothèse de trêve,<br />

l’attention est nécessairement focalisée sur la dimension cognitive. Nelson <strong>et</strong> Winter vont réinterpréter la<br />

notion de “quasi-résolution des conflits” chez les auteurs béhavioristes à travers le concept de “trêve”.<br />

L’activation des routines, de façon cohérente <strong>et</strong> structurée, implique que les conflits soient contenus dans<br />

une certaine limite, pour ne pas trop gêner le fonctionnement de la firme.<br />

L’hypothèse de trêve, que nous pouvons qualifier d’hypothèse forte, consiste à considérer que les routines<br />

encapsulent une “trêve” dans les intérêts conflictuels (destructifs) dans l’organisation. Ce qui suppose une<br />

certaine uniformité des comportements des membres de l’organisation dans la mesure où ces<br />

comportements sont puisés dans ces répertoires stables sur le long terme. Ces comportements sont ainsi<br />

pré-déterminés avec de faibles possibilités d’interaction entre les agents. Reynaud (1998) parle d’un eff<strong>et</strong><br />

d’hypnose des routines sur les agents, en raison de leur caractère automatique <strong>et</strong> mécanique, elles évitent<br />

aux acteurs de l’organisation engagés dans une action collective, de s’interroger sur leurs intentions<br />

mutuelles de coopérer (p. 474). Là encore, l’idée de truce, si elle demeure fascinante, n’est pas explicitée.<br />

La cohérence interne de l’organisation est supposée de facto, car comme le soulignent Nelson <strong>et</strong> Winter<br />

eux-mêmes (1982, p. 107-108), si on renonce à c<strong>et</strong>te hypothèse forte, des intérêts divergents des agents <strong>et</strong><br />

des conflits internes (destructeurs) peuvent surgir <strong>et</strong> la représentation néo-Schump<strong>et</strong>erienne de la firme<br />

37 Les conflits dans la firme, qui sont autant des conflits d’intérêt que des conflits dans la vision du monde, sont par<br />

ailleurs en train d’être largement reconsidérés dans une économie basée sur la connaissance (Cf. chapitres 8 <strong>et</strong> 9).<br />

38 Plutôt qu’évacués, ces problèmes semblent plutôt relégués au second plan dans la théorie évolutionniste de la firme pour<br />

se focaliser sur les dimensions cognitives des ressources de la firme, véritables facteurs explicatifs de la croissance des firmes<br />

<strong>et</strong> de leur différentiation.

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