Économie Évolutionniste et Culture d'Entreprise
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culturelle de la firme. Notre conceptualisation des régimes culturels établit un parallèle avec celle des régimes technologiques que nous avons abordés dans le chapitre 2. 7.2.2 La conceptualisation évolutionniste des régimes technologiques Nous avons vu que les travaux évolutionnistes (Nelson et Winter, 1977 ; Winter, 1984 ; Malerba et Orsenigo, 1995) caractérisent un régime technologique comme un modèle où les choix technologiques sont influencés par une logique qui découle du savoir accumulé, des investissements passés et des pratiques technologiques établies. Un régime technologique décrit une combinaison de facteurs qui sont constitutifs et explicatifs de la dynamique interne d’une industrie. Cette combinaison est constituée d’opportunités technologiques, de mécanismes d’appropriation, de conditions de cumulativité et de caractéristiques de la base de connaissances qui diffèrent pour chaque industrie considérée (Malerba et Orsenigo, 1995). Les modèles de changement technologique sont le produit des différents régimes de sélection et d’apprentissage imposés par la nature même de la technologie. Les contributions évolutionnistes (Winter, 1984 ; Malerba et Orsenigo, 1995) discernent deux régimes technologiques qu’elles rattachent à Schumpeter. Le premier régime (régime entrepreneurial), caractérisé par l’existence d’une multitude de petites firmes constituées de peu d’agents, est délibérément animé par une dynamique d’exploration. Alors que le second (régime routinier), caractérisé par l’existence de grandes firmes oligopolistiques, est animé par une dynamique d’exploitation. En termes de connaissances productives, la dynamique du régime Schumpeterien Mark I est orientée vers l’élargissement de la base de connaissance des firmes, alors que celle du régime Schumpeterien Mark II est orientée vers l’approfondissement de la base de connaissance des firmes. Nous allons avancer ici une conception analogue à celle de Malerba et Orsenigo (1995) pour caractériser les régimes culturels, en discernant clairement deux régimes culturels (Taylorien et post-Taylorien) et en mettant l’accent sur l’autorité, la communication et surtout la connaissance productive et sa répartition comme principaux facteurs caractéristiques des régimes culturels. 7.2.3 Qu’est ce qu’un régime culturel ? Nous définissons un régime culturel comme le mode caractéristique de la construction et de l’évolution de la culture d’entreprise. Un régime culturel correspond ainsi au stéréotype culturel caractéristique d’une part significative des organisations à un stade de développement économique et social. L’intérêt de la conceptualisation en terme de régimes culturels est de décrire les régularités à travers lesquelles les agents construisent et partagent suffisamment de croyances, de valeurs, de significations et de langages pour être reconnus et pour se reconnaître eux-mêmes comme une part d’une culture d’entreprise. Les faits stylisés caractérisant un régime culturel correspondent aux stéréotypes culturels
caractéristiques d’une part de la construction de la culture d’entreprise et d’autre part de l’évolution culturelle de la firme : Taylorisme, Fordisme, Ohnisme, etc. Nous désignerons un régime culturel selon une base tripartie : par rapport à la nature de l’autorité et de la communication dans l’organisation, mais particulièrement par rapport à la distribution de la connaissance productive dans l’organisation qui détermine à notre sens les deux premiers niveaux. 7.3 CONNAISSANCE PRODUCTIVE, AUTORITE ET COMMUNICATION 7.3.1 Connaissance productive Le premier (et le principal) facteur caractéristique d’un régime culturel est la nature et la distribution de la connaissance productive au sein des organisations : comment est-elle intégrée ou dispersée ? Est-elle articulable ou tacite ? etc. Nous avons vu qu’un des principaux enseignements de Hayek est la distribution de la connaissance productive dans l’ordre social : The economic problem of society is … not merely a problem of how to allocate “given” resources − if “given” is taken to mean given to a single mind which deliberately solves the problem set by these ‘data.’ It is rather a problem of how to secure the best use of resources known to any of the members of society, for ends whose relative importance only these individuals know. Or, to put it briefly, it is a problem of the utilization of knowledge which is not given to anyone in its totality. (Hayek, 1945, p. 77-78). Cette connaissance n’est pas seulement dispersée. Elle est également tacite et idiosyncrasique : The problem is aggravated by the fact that much of the important knowledge is tacit, fleeting and subjectively held. Hayek further argues that since centralized planning is fundamentally inefficient in the face of distributed knowledge, our understanding of how social systems cope with distributed knowledge must shift to alternative mechanisms, in particular those mechanisms characterizing marked-based, “great societies” (Hayek 1973), that is, the price system, the private property rights structure, the rule of law, and a morality that is conducive to market organization. To update Hayek somewhat, it may be argued that as socialist central planning has been abandoned in most of the World, coping with the problem posed by distributed knowledge has moved from being a problem for socialist planners to increasingly being a challenge confronted by firms in capitalist economies, as distributed knowledge allegedly clash with hierarchies and firm planning. (Foss et Foss, 2002b, p. 8). L’organisation, par opposition à l’ordre social, est caractérisée par un degré moindre de dispersion de la connaissance. C’est pourquoi une coordination centralisée de la connaissance est possible, d’autant plus que ce sont les agents dans une position entrepreneuriale qui possèdent cette connaissance productive pertinente. C’est le modèle Taylorien et le contexte économique allant du début du siècle au début de la décennie 1970 qui illustrent le mieux cette configuration. La firme Taylorienne s’apparente à un système de
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Nous désignerons un régime culturel selon une base tripartie : par rapport à la nature de l’autorité <strong>et</strong> de la<br />
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The economic problem of soci<strong>et</strong>y is … not merely a problem of how to allocate “given” resources − if “given” is taken to<br />
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secure the best use of resources known to any of the members of soci<strong>et</strong>y, for ends whose relative importance only<br />
these individuals know. Or, to put it briefly, it is a problem of the utilization of knowledge which is not given to anyone in<br />
its totality. (Hayek, 1945, p. 77-78).<br />
C<strong>et</strong>te connaissance n’est pas seulement dispersée. Elle est également tacite <strong>et</strong> idiosyncrasique :<br />
The problem is aggravated by the fact that much of the important knowledge is tacit, fle<strong>et</strong>ing and subjectively held.<br />
Hayek further argues that since centralized planning is fundamentally inefficient in the face of distributed<br />
knowledge, our understanding of how social systems cope with distributed knowledge must shift to alternative<br />
mechanisms, in particular those mechanisms characterizing marked-based, “great soci<strong>et</strong>ies” (Hayek 1973), that is,<br />
the price system, the private property rights structure, the rule of law, and a morality that is conducive to mark<strong>et</strong><br />
organization. To update Hayek somewhat, it may be argued that as socialist central planning has been abandoned<br />
in most of the World, coping with the problem posed by distributed knowledge has moved from being a problem for<br />
socialist planners to increasingly being a challenge confronted by firms in capitalist economies, as distributed<br />
knowledge allegedly clash with hierarchies and firm planning. (Foss <strong>et</strong> Foss, 2002b, p. 8).<br />
L’organisation, par opposition à l’ordre social, est caractérisée par un degré moindre de dispersion de la<br />
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que ce sont les agents dans une position entrepreneuriale qui possèdent c<strong>et</strong>te connaissance productive<br />
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C’est le modèle Taylorien <strong>et</strong> le contexte économique allant du début du siècle au début de la décennie<br />
1970 qui illustrent le mieux c<strong>et</strong>te configuration. La firme Taylorienne s’apparente à un système de