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Une histoire racontée à Sophie - La Flute

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dont dépend l’École de médecine. S’en suivent six années consacrées<br />

<strong>à</strong> l’étude des différentes disciplines médicales et aux stages dans les<br />

hôpitaux. C’est ainsi que d’un bout <strong>à</strong> l’autre sont menées de front<br />

la théorie et la pratique (le matin le stage, l’après-midi les cours).<br />

À la fin de chaque année, un examen de passage permet d’accéder <strong>à</strong><br />

l’année suivante. En première année, mon premier stage clinique se<br />

fait en chirurgie chez le professeur Henri Mondor. Un personnage!...<br />

Esthète et académicien, enthousiaste de Stéphane Mallarmé. Peintre<br />

<strong>à</strong> ces heures, les roses ajoutant <strong>à</strong> sa renommée. Les citations pleuvent<br />

sur les «stagiaires ignares» comme il se plait <strong>à</strong> nous qualifier (même<br />

pendant qu’il opère). Les dits stagiaires ignares sont juchés debout<br />

tout autour de la table d’opération sur des sortes de gradins, comme<br />

<strong>à</strong> un match.<br />

Le premier jour de ce premier stage, dans un couloir, je me heurte<br />

<strong>à</strong> un type chauve. Je le prends pour une «huile». Il me détrompe<br />

et m’explique qu’il est stagiaire lui aussi, qu’il débute aujourd’hui,<br />

tout comme moi… C’est Jean Richard. Sa calvitie? <strong>Une</strong> séquelle de<br />

typhoïde, m’expliquera-t-il. Jean devait devenir un de mes meilleurs<br />

amis et plus tard le parrain de Valérie. Le lendemain, nous faisons plus<br />

ample connaissance autour de l’archaïque «masque d’Ombredane»<br />

(anesthésie au chloroforme-éther) que d’autorité nous met entre<br />

les mains une infirmière pressée, appelée <strong>à</strong> quelque autre tâche, plus<br />

pressante. Elle le fait moyennant tout de même quelques explications<br />

sommaires. Bien qu’«ignares», on s’en tire, la malade aussi! On en<br />

rirait encore si Jean Richard n’était hélas décédé il y a quelques années<br />

d’un cancer digestif. Marguerite, sa femme, psychiatre d’hôpital,<br />

prend en relais la fonction de marraine.<br />

Du stage suivant, toujours en première année, mais en médecine<br />

cette fois, chez le professeur Moreau, dans les vieux murs de<br />

Bicêtre. De ce stage, je retiens le souvenir vivace et tragique d’une<br />

jeune anorexique mentale, la première qu’il m’a été donné de voir.<br />

Cette jeune personne, intelligente et subtile, comme la plupart des<br />

anorexiques, est déroutante. Elle parle de religion aux médecins et de<br />

médecine <strong>à</strong> l’aumônier! Elle devait décéder d’une grave tuberculose<br />

pulmonaire, comme beaucoup d’anorexiques de l’époque.<br />

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