xi eme‐ xiii eme siecles - Université Paris-Sorbonne

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par rapport à un comportement à sanctionner qu’il définit ce qui est bon. D’ailleurs, les pèlerins ne manquent pas d’être punis lorsqu’ils s’écartent de la règle à suivre. C’est la punition divine qui prime dans l’exemplum n°842 rapportée de Terre Sainte : « […] cum multi venissent ad peregrinationem cujusdam sancti, et in via in cantilenis, in verbis corruptis et in materia generalis ignis occupati fuissent ; dum in aurora ad audiendum missam et sacerdos « Gloria in Excelsis » diceret, factus est terremotus et tantum tonitruum, quod visum est sacerdoti quod de genibus suis tangeret super altare ; et tunc simul columna et fulgur intraverunt ecclesiam. At columna protexit illos qui recte et munde peregrinationem fecerant, et fulgur aliquos occidit, aliquibus fregit brachia, aliquibus crura de illis qui inordinate venerant, nec fuit aliquis quin percuteretur a fulgure stante serenitate aeris. » 97 Ensuite, le pèlerinage est qualifié de droit et de franche intention, c'est-à-dire que le pèlerinage doit s’effectuer sans arrière pensée, en l’honneur de Dieu ou de ses saints. Là encore, il ne manque pas de spécifier les écarts de conduite qu’il a pu observer ou qu’on lui a rapporté : « Nec recta intentione vadunt illi qui ad hoc vadunt tempore quadragesime ; vel ut ieiunia frangant, vel ut patriam videant, vel ut voluptuose expendant, ad modum filium prodigii, quod ante vivendo parce adquisierant, vel ut unde se jactent inter vicinos suos habeant » 98 . En cela, il condamne les pèlerins évoqués plus haut. Il va de soi que le pèlerinage doit se réaliser au nom de la foi. Il se rapporte pour cela à la réponse faite par Ittaï le Gittite à David qui lui enjoint de rentrer chez lui avec ses troupes 99 : « L'Éternel est vivant et mon seigneur le roi est vivant ! Au lieu où sera mon seigneur le roi, soit pour mourir, soit pour vivre, là aussi sera ton serviteur. » Par ailleurs, il se fait dans la joie en chantant les louanges de Dieu et il doit se garder de tomber dans la superstition 100 ou la débauche. Il conclut en notant : « Item, debent boni peregrini in peregrinationibus suis cantare justificationes, Dei gratias […] » 101 . 97 Stephani de Borbone, op. cit., Titulus sextus de peregrinatione, primum capitulum, lignes 53- 60, p. 213 et Jean Gobi, Scala coeli,édition CNRS, sous la direction de A-M. Polo de Baulieu, collection source d’histoire médiévale, Paris, 1991, p. 531. 98 Stephani de Borbone, op. cit., Titulus sextus de peregrinatione, primum capitulum, lignes 27-31, p. 212. 99 La Bible de Jérusalem, op. cit., Samuel, 2, XV, 21 . 100 Il développe de nombreux exempla sur des danseurs et des personnes venant troubler les cérémonies par des jeux ou des danses grotesques assimilées à des hérésies parce que non contrôlées, notamment le Cheval jupon. 101 Stephani de Borbone, op. cit., Titulus sextus de peregrinatione, primum capitulum, lignes 99-101, p. 214 . 53

En outre, le pèlerin doit être silencieux. Il lui faut bannir toutes paroles mauvaises et oiseuses. L’exemplum repris par Etienne de Bourbon est extrait de la Vie des Pères. Il rapporte un dialogue entre un abbé expérimenté, l’abbé Lucius, et Longin, un jeune abbé. Le novice désireux de partir en pèlerinage, énonce : « Tres habeo cogitationes. Una est ut ad peregrinationem pergam. » La réponse de l’ancien est la suivante: « Nisi tenueris linguam tuam, ubicumque perrexeris, non eris peregrinus ; sed si refrenaveris hic, hic etiam eris peregrinus » 102 . Elle souligne cette règle de conduite première. Ainsi, l’abbé Lucius lui rappelle que le vœu de silence est primordial. Il permettra, entre autre, de recréer l’isolement monastique dont il a besoin. L’humilité a tout autant sa place dans les qualités requises. Etienne de Bourbon mentionne l’épisode de l’empereur Byzantin, Héraclius premier, arrivant en grande pompe à Jérusalem et qui s’en voit interdire l’accès par une voix (ou un ange, selon les sources) lui disant : « Quando rex regum venit par locum istum in Ierusalem, non intravuit cum habitu superbie sed sedens super asinam ». L’empereur s’éxécute alors : « Tunc imperator, depositis imperialibus, indutus armis humilitatis, cum nudis pedibus et lacrimis, crucem Domini ferens, ad portam accedens, ea Dei miraculo in pristinum statum subito reducta, letus et humiliatus intravit in Ierusalem. » 103 Enfin, il termine sur deux considérations. La première est la probité, il en parle en ces termes : «[…] ut non fiat de alieno capitali vel de rapinis auperum, ut usurariorum et tyrranorum qui de spoliis aliorum suas peregrinationes faciunt » 104 . La seconde est l’exemption de tout meurtre ou forfait grave. Le pèlerinage en effet, il ne doit pas être accompli en état de péché mortel : « munda a crimine, ne fiat in mortali peccato, vel ne in ea homo abstineat a peccato maxime mortali ». Il en va ainsi de l’aventure de trente Lorrains qui se jurent entraide et secours car ils savent que le pèlerinage sera long et douloureux. Or, l’un d’eux se blesse. Ses compagnons le portent durant quinze jours puis l’abandonnent. Un seul reste à ses côtés, mais le blessé succombe à ses plaies. Le dévoué compagnon, désespéré se met à pleurer. Saint-Jacques lui vient en aide. Après avoir fait enterrer le corps à Compostelle, il envoie le fidèle compagnon annoncer à ses camarades, de retour à Langres, combien ils ont péché et qu’il leur faut faire pénitence pour le serment trahi. Dieu ne peut tolérer un pèlerinage entaché par une promesse qui n’a pas été 102 Stephani de Borbone, op. cit., Titulus sextus de peregrinatione, capitulum secundum, lignes 111- 114, p. 215. 103 Stephani de Borbone, op. cit., idem, lignes 134-140, p. 216. 104 Stephani de Borbone, op. cit., idem, lignes 141-143, p. 216. 54

En outre, le pèlerin doit être silencieux. Il lui faut bannir toutes paroles mauvaises et<br />

oiseuses. L’exemplum repris par Etienne de Bourbon est extrait de la Vie des Pères. Il<br />

rapporte un dialogue entre un abbé expérimenté, l’abbé Lucius, et Longin, un jeune abbé.<br />

Le novice désireux de partir en pèlerinage, énonce : « Tres habeo cogitationes. Una est ut<br />

ad peregrinationem pergam. » La réponse de l’ancien est la suivante: « Nisi tenueris<br />

linguam tuam, ubicumque perrexeris, non eris peregrinus ; sed si refrenaveris hic, hic<br />

etiam eris peregrinus » 102 . Elle souligne cette règle de conduite première. Ainsi, l’abbé<br />

Lucius lui rappelle que le vœu de silence est primordial. Il permettra, entre autre, de<br />

recréer l’isol<strong>eme</strong>nt monastique dont il a besoin.<br />

L’humilité a tout autant sa place dans les qualités requises. Etienne de Bourbon mentionne<br />

l’épisode de l’empereur Byzantin, Héraclius premier, arrivant en grande pompe à<br />

Jérusalem et qui s’en voit interdire l’accès par une voix (ou un ange, selon les sources) lui<br />

disant : « Quando rex regum venit par locum istum in Ierusalem, non intravuit cum habitu<br />

superbie sed sedens super asinam ». L’empereur s’éxécute alors : « Tunc imperator,<br />

depositis imperialibus, indutus armis humilitatis, cum nudis pedibus et lacrimis, crucem<br />

Domini ferens, ad portam accedens, ea Dei miraculo in pristinum statum subito reducta,<br />

letus et humiliatus intravit in Ierusalem. » 103<br />

Enfin, il termine sur deux considérations. La première est la probité, il en parle en ces<br />

termes : «[…] ut non fiat de alieno capitali vel de rapinis auperum, ut usurariorum et<br />

tyrranorum qui de spoliis aliorum suas peregrinationes faciunt » 104 . La seconde est<br />

l’exemption de tout meurtre ou forfait grave. Le pèlerinage en effet, il ne doit pas être<br />

accompli en état de péché mortel : « munda a crimine, ne fiat in mortali peccato, vel ne in<br />

ea homo abstineat a peccato ma<strong>xi</strong>me mortali ». Il en va ainsi de l’aventure de trente<br />

Lorrains qui se jurent entraide et secours car ils savent que le pèlerinage sera long et<br />

douloureux. Or, l’un d’eux se blesse. Ses compagnons le portent durant quinze jours puis<br />

l’abandonnent. Un seul reste à ses côtés, mais le blessé succombe à ses plaies. Le dévoué<br />

compagnon, désespéré se met à pleurer. Saint-Jacques lui vient en aide. Après avoir fait<br />

enterrer le corps à Compostelle, il envoie le fidèle compagnon annoncer à ses camarades,<br />

de retour à Langres, combien ils ont péché et qu’il leur faut faire pénitence pour le serment<br />

trahi. Dieu ne peut tolérer un pèlerinage entaché par une promesse qui n’a pas été<br />

102 Stephani de Borbone, op. cit., Titulus sextus de peregrinatione, capitulum secundum, lignes 111- 114, p. 215.<br />

103 Stephani de Borbone, op. cit., idem, lignes 134-140, p. 216.<br />

104 Stephani de Borbone, op. cit., idem, lignes 141-143, p. 216.<br />

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