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xi eme‐ xiii eme siecles - Université Paris-Sorbonne

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Toutefois, pour l’ensemble de ces pèlerins, l’expression de leur dévotion d<strong>eme</strong>ure toute<br />

interne, toute personnelle. Il n’y a pas de marque ostensible dans leur récit de leur parcours<br />

spirituel personnel. La grande majorité des récits examinés montre des références et un<br />

comport<strong>eme</strong>nt quasi similaires. Le fait le plus notoire est l’absence de toute originalité<br />

dans les récits. Nous avons noté précédemment que l’énonciation s’effectuait à la troisième<br />

personne et qu’un parcours assez semblable était mentionné. Mais la narration montre<br />

aussi que les pèlerins s’inscrivent dans une temporalité nouvelle. Ils effacent le monde<br />

contemporain auxquels ils appartiennent pour effectuer un retour dans le passé biblique. Ils<br />

pensent favoriser de la sorte, une identification spirituelle avec les grands évén<strong>eme</strong>nts de<br />

ces temps. Aussi, les villes sans rapport avec la vie du Christ ou des Patriarches ne sontelles<br />

pas mentionnées. Ne prennent vie que les lieux spirituell<strong>eme</strong>nt importants aux yeux<br />

des pèlerins, même si dans la réalité, il n’y a plus rien à visiter 82 . Ils se rendent dans un<br />

espace qui a acquis une sacralité mais dont l’aspect sacré n’e<strong>xi</strong>ste qu’au prix d’une<br />

remémoration. Ainsi, ils gardent leurs distances avec les problèmes politiques du monde<br />

contemporain. La présence d’une « minorité organisée » 83 leur permet de laisser libre<br />

cours à la spiritualité. En effet ce sont leurs hôtes qui lient les contacts nécessaires pour les<br />

visites, qui servent de traducteurs, de transacteurs... Le seul revers à cette solution toute<br />

pratique, c’est la dépendance à ces derniers pour les évén<strong>eme</strong>nts dont ils sont témoins.<br />

Ainsi, leur propre vision des faits est déformée par la perception que leurs hôtes en ont. La<br />

subjectivité de chacun entrant en ligne de compte, dans ces Etats Latins d’Orient où les<br />

disparités e<strong>xi</strong>stent aussi. Ils pensent, par exemple, que les Fatimides puis les Seljoukides<br />

persécutent tous les chrétiens. Ils ont une connaissance restreinte, pour la plupart, des<br />

musulmans et de l’Islam…<br />

Dans la réalité, il n’y a toutefois pas de ségrégation absolue. Une certaine osmose se<br />

dégage et les bienfaits des uns rejaillissent sur les autres et invers<strong>eme</strong>nt. Le récit de<br />

Thietmar en est une preuve constante.<br />

82<br />

Félix Fabri est le seul à faire remarquer qu’il n’y a plus rien à voir depuis longtemps, la situation politique et<br />

religieuse a certes évolué au XV ème siècle, de sorte que la chrétienté y est mise à mal, mais au-delà de ces<br />

aspects propr<strong>eme</strong>nt contemporains nous pouvons souligner qu’il a une vision très précise de la démarche des<br />

pèlerins. Les pèlerins ont par conséquent un effort intellectuel à produire afin d’être plein<strong>eme</strong>nt dans cet espace,<br />

d’où la nécessité de se créer une sphère spatio-temporelle différente. Il s’exprime en ces termes : « Apostolica<br />

namque fides et vita de terra sancta pene defecit […] », Op.cit., p. 20 et « Non ergo remansit in terra sancta, nec<br />

gregum obscura vestiga, vel signa quaedam praeteritorum, vel imitatio vitae sanctorum. », op. cit. , p. 23.<br />

83<br />

L’expression est empruntée à A. Graboïs, dans son article consacré à Jean de Würzsbourg in Studi Medievali<br />

III, 24, 1983.<br />

47

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