xi eme‐ xiii eme siecles - Université Paris-Sorbonne

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16.06.2013 Views

Aujourd’hui c’est le signe d’appartenance à la foi chrétienne. Riccold de Monte Croce et Daniel, entre autres, rappellent la portée de cette pratique afin de faire partager au lecteur cette expérience spirituelle. Autour d’un autel de fortune, la célébration bat son plein et les pèlerins revivent à leur tour la descente de l’Esprit Saint sous la forme d’une colombe (Luc 3 21-22), et Riccold de partager cette ferveur : « […] quod putabamus angelos descendisse de celo et voce querula clamantes nobiscum. » 664 Alors que nous avions signalé que la progression en Galilée pouvait suivre une chronologie identifiable à celle de la jeunesse et des rencontres du Christ, en revanche, il n’y a pas de moment particulier pour cette excursion, elle peut s’effectuer au début comme à la fin du pèlerinage. Le bain au Jourdain, acte hautement symbolique d’un renouvellement, est complémentaire à la visite du Saint Sépulcre mais n’en dispense pas et il ne permet pas la rémission des péchés. Les pèlerins semblent s’y rendre après avoir lavé leur tête et rasé leur barbe à Jérusalem 665 . En terme de calendrier, l’affluence est plus nette au moment de la célébration de l’Epiphanie en souvenir du baptême du Christ mais là encore cet espace symbolique ne connaît pas de répit. Thietmar note à propos du lieu du baptême du Christ : « In quo loco pulchra ecclesia in honore sancti Iohannis baptiste constructa est. In quo loco annuatim in ephyphania solent de longinquins partibus convenire Greci et Suriani cum maxima multitudine et in eodem loco pueros suos baptizare ». 666 Bethléem est tout aussi rapidement passée en revue par les pèlerins du corpus. Le plus souvent elle est envisagée dans sa réalité comme Ernoul le rapporte : « […] est cités mais n’est mie grans, qu’il n’i a c’une rue. », elle est sise à deux lieues de Jérusalem et elle abrite un « moustier, u il a moines gris que on apiele le Gloria in excelsis Deo. Ce fu là ù li angele le canterent, quant Ihésu Crist fu nés 667 . ». Thietmar signale : «[…] et adhuc est integra, nec a Sarracenis destructa » 668 , et il retient que les chrétiens doivent s’acquitter de l’impôt de capitation : « Quam quidem tenent Christiani, Sarracenis subiugales » 669 et que les pèlerins doivent débourser quelques pièces pour passer : « Sunt tamen quidam Sarraceni custodes ad limina monasterii deputati, a peregrinis introeuntibus pedagium accipientes […] » 670 Mais il considére longuement le monastère et la grotte de la nativité, 664 Riccold, op. cit., p. 54. 665 Ernoul, La sainte cité, op. cit., p. 32. 666 Thietmar, op. cit., chapitre XI, p. 31-32. 667 Ernoul, Fragments, op. cit., p. 65-66. 668 Thietmar, op. cit., chapitre X, p. 28. 669 Thietmar, op. cit., chapitre X, p. 28. 670 Thietmar, op. cit., chapitre X, p. 28. 243

un sentiment de fierté et de grand bonheur se dégage de ses paroles : « In qua ego peccator deosculabar presepe, in quo Dominus parvulus vagiit, et adoravi in loco, ubi beata virgo puerpera Deum fudit infantem » 671 . Il emploie l’expression «vidi » à deux reprises signalant comme un refrain l’expérience vécue. Il insiste sur les éléments concrets qu’il a pu toucher : des grottes, l’une dédiée à Saint Jérôme dont il souligne la prouesse traductrice, l’autre dédiée aux Saints Innocents. Saewulf en a une vision plutôt sombre : «Ibi nihil a Sarracenis est remissum habitabile, sed omnia devastata sicut in aliis omnibus sanctis locis extra murum civitatis. » 672 Le pèlerin le plus prolixe sur la ville de la nativité (un chapitre entier lui est dédié) est Riccold de Monte Croce. Formellement, ce chapitre s’insère entre deux descriptions de Jérusalem, l’une consacrée à la ville, l’autre aux alentours. Ainsi, la structure du chapitre peut s’entendre comme une excursion effectuée lors du séjour en Terre Sainte. Le pèlerin s’attache, par une antithèse tirée des Evangiles, à rappeler la dimension spirituelle de la ville : « Civitatem parvulam ubi natus est parvulus ille magnus » 673 . Puis il visite la basilique construite sur la grotte de la nativité. Si Burchard du Mont Sion est attentif à ses mosaïques et à ses ornementations 674 (IX, 10) alors que Jean Phocas attire l’attention sur les réalisations supervisées par l’empereur, Jean de Würzbourg, présent alors que les travaux de la basilique de la nativité ne sont pas encore achevés par les Byzantins, recopie les formules qui composent ces décorations. Il restitue : « In loco nativitatis domini ex musivo opere deaurato hii duo versus leguntur appositi : Angelicae lumen virtutis et eius acumen/ hic natus vere deus est de virgine matre. » 675 En dessous, se trouve la grotte de la nativité, restée en partie nue pour respecter l’humilité originelle, Burchard du Mont Sion y séjourne une nuit, entre ferveur et adoration. Il rapporte : « Ego steti nocte una in hiis duobus locis, nunc istum, nunc illum osculando. Non vidi nec audivi aliquem, qui dixerit se vidisse ecclesiam tam devotam toto orbe terrarum. » 676 671 Thietmar, op. cit., chapitre X, p. 28. 672 Saewulf, op.cit., p. 71, lignes 426-428. 673 Riccold, op.cit., p. 60. 674 Burchard, op. cit., IX-10, p. 78-79 « Est autem capella ista tota interius facta de opere musivo et strata marmore et sumptuose valde facta. Super locum illum, ubi beata virgo peperit, potest dici missa super tabulam marmoream, que strata est ibi. […]Preterea navis ipsa ecclesie desuper columpnas usque ad trabes facta est de opere musivo pulcherrimo et nobilissimo (de omnibus historiis a creatione mundi usque ad adventum Domini ad iudicium) ». 675 Jean de Würzbourg, op. cit., p. 85, lignes 164-168. 676 Burchard, op. cit., chapitre IX, 10, Jerusalem, p.79. 244

un sentiment de fierté et de grand bonheur se dégage de ses paroles : « In qua ego peccator<br />

deosculabar presepe, in quo Dominus parvulus vagiit, et adoravi in loco, ubi beata virgo<br />

puerpera Deum fudit infantem » 671 . Il emploie l’expression «vidi » à deux reprises<br />

signalant comme un refrain l’expérience vécue. Il insiste sur les éléments concrets qu’il a<br />

pu toucher : des grottes, l’une dédiée à Saint Jérôme dont il souligne la prouesse<br />

traductrice, l’autre dédiée aux Saints Innocents. Saewulf en a une vision plutôt<br />

sombre : «Ibi nihil a Sarracenis est remissum habitabile, sed omnia devastata sicut in aliis<br />

omnibus sanctis locis extra murum civitatis. » 672<br />

Le pèlerin le plus prolixe sur la ville de la nativité (un chapitre entier lui est dédié) est<br />

Riccold de Monte Croce. Formell<strong>eme</strong>nt, ce chapitre s’insère entre deux descriptions de<br />

Jérusalem, l’une consacrée à la ville, l’autre aux alentours. Ainsi, la structure du chapitre<br />

peut s’entendre comme une excursion effectuée lors du séjour en Terre Sainte. Le pèlerin<br />

s’attache, par une antithèse tirée des Evangiles, à rappeler la dimension spirituelle de la<br />

ville : « Civitatem parvulam ubi natus est parvulus ille magnus » 673 . Puis il visite la<br />

basilique construite sur la grotte de la nativité. Si Burchard du Mont Sion est attentif à ses<br />

mosaïques et à ses orn<strong>eme</strong>ntations 674 (IX, 10) alors que Jean Phocas attire l’attention sur<br />

les réalisations supervisées par l’empereur, Jean de Würzbourg, présent alors que les<br />

travaux de la basilique de la nativité ne sont pas encore achevés par les Byzantins, recopie<br />

les formules qui composent ces décorations. Il restitue : « In loco nativitatis domini ex<br />

musivo opere deaurato hii duo versus leguntur appositi : Angelicae lumen virtutis et eius<br />

acumen/ hic natus vere deus est de virgine matre. » 675<br />

En dessous, se trouve la grotte de la nativité, restée en partie nue pour respecter<br />

l’humilité originelle, Burchard du Mont Sion y séjourne une nuit, entre ferveur et<br />

adoration. Il rapporte : « Ego steti nocte una in hiis duobus locis, nunc istum, nunc illum<br />

osculando. Non vidi nec audivi aliquem, qui dixerit se vidisse ecclesiam tam devotam toto<br />

orbe terrarum. » 676<br />

671 Thietmar, op. cit., chapitre X, p. 28.<br />

672 Saewulf, op.cit., p. 71, lignes 426-428.<br />

673 Riccold, op.cit., p. 60.<br />

674 Burchard, op. cit., IX-10, p. 78-79 « Est autem capella ista tota interius facta de opere musivo et strata<br />

marmore et sumptuose valde facta. Super locum illum, ubi beata virgo peperit, potest dici missa super tabulam<br />

marmoream, que strata est ibi. […]Preterea navis ipsa ecclesie desuper columpnas usque ad trabes facta est de<br />

opere musivo pulcherrimo et nobilissimo (de omnibus historiis a creatione mundi usque ad adventum Domini ad<br />

iudicium) ».<br />

675 Jean de Würzbourg, op. cit., p. 85, lignes 164-168.<br />

676 Burchard, op. cit., chapitre IX, 10, Jerusalem, p.79.<br />

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