xi eme‐ xiii eme siecles - Université Paris-Sorbonne
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ou comprendre ce qu’il a entendu lire à la messe ; voire, comme Thietmar, porter un regard, appréhender les lieux par la vue et le toucher pour tenter de mieux comprendre, ou tout simplement pour mettre en image ce qui est raconté dans le Nouveau Testament. b) La route côtière et ses monastères Les guides de pèlerinage indiquent la voie à suivre, s’arrêtant çà et là sur les sanctuaires ou les structures d’accueil. L’ensemble est impersonnel et relate, distance à l’appui, tout ce qu’il est possible de voir ou tout ce qui a été, notamment dans l’univers vétéro-testamentaire. Ainsi, trois des textes en ancien-français rapportent-ils les mêmes leçons, dont l’essentiel est mentionné ci-après. Nous constatons que les trajets constituent en soi de micro-pèlerinages puisque ce sont les reliques détenues dans les monastères qui sont mises en relief ou alors les menus objets qui ont participé à la Passion du Christ. Il faut compter quatre lieues pour relier Acre à Cayphas qui se tient au pied de la montagne du Carmel. Là, nous pouvons envisager une première halte puisque une petite chapelle a été édifiée sur le lieu présumé de la naissance de Saint Denis. Puis se trouvent l’abbaye de Sainte Marguerite et une chapelle en souvenir d’Elie. Les pelerinaiges por aler en Iherusalem signalent : « en cele abaïe a de bones reliques 649 ». A ces remarques spatiales s’ajoute la mention de la présence de deux communautés : les frères du Carmes qui sont des ermites latins et des moines Grecs, communautés distantes mutuellement d’une lieue et demi. Le parcours se poursuit à la cité Sainte Anne. Elle a aussi son importance aux yeux des pèlerins car elle est considérée comme le lieu où les clous de la Sainte Croix ont été forgés. Ici encore on donne à voir aux pèlerins comme le laisse entendre l’emploi du verbe de perception : « et encore i apert le lieu où il furent forgiès 650 ». Près de Château Pèlerin, il est possible de se rendre (à Saint-Jean de Tyr) dans « un mostier de griex ou il a de mout beles reliques et [où] fist illuec Saint Iohan de mout beles miracles » 651 . Par ailleurs, dans le même esprit, la ville de Capharnaûm est identifiée comme le lieu de manufucture des trente deniers donnés à Judas pour la dénonciation de Jésus. Par conséquent, les pèlerins s’attachent à visiter des villes qui ont joué un rôle dans la mise à mort du Christ. Nous constatons que la cohérence de ce parcours est davantage thématique que théologique. Mais encore une fois, nous avons là la restitution du trajet à travers le regard du pèlerin. Il 649 Les pelerinaiges por aller en Ierusalem, op. cit., p. 90. 650 Les pelerinaiges por aller en Ierusalem, op. cit., p. 90. 651 Les pelerinaiges por aller en Ierusalem, op. cit., p. 90. 239
se peut tout simplement que la route à suivre soit imposée et que le pèlerin cherche son intérêt spirituel dans ce trajet obligatoire. Château-Pèlerin semble une étape incontournable. La place forte est toujours mentionnée dans les distances proposées par le corpus, que ce soit pour s’y rendre ou pour en partir. A cinq lieues de celle-ci se situe Césarée, intéressante pour les pèlerins à cause de sa pierre de marbre nommée Table de Jésus Christ. A partir de Césarée, les pèlerins mentionnent un lieu dit « Peine perdue » où une chapelle en l’honneur de la Vierge a été édifiée sur un marais, (envahi par de nombreuses poules importées d’Egypte) : « où l’en va moult souvent de Césaire en pelerinage, car il a mout bel lieu et mout devot 652 ». Cet indice nous permet de confirmer que Césarée est un lieu d’étape à partir duquel on organise des pèlerinages. Est-ce pour pallier le défaut de visite d’un lieu plus important dédié à la Vierge ? Les pèlerinages sontils systématiques ? L’itinéraire se poursuit, le parcours entre Césarée et Arsuf s’étend sur neuf lieues, dans un chemin taillé dans la roche, à l’accès difficile. Il passe au nord du château des Hospitaliers, lui-même édifié sur un tertre, la route est dangereuse et mal fréquentée : « un mauvays pays et là se aubergent males gens aucune fois pot tallier le chamin à ceaus qui vont à Iaphe 653 ». A partir de Jaffa, les pèlerins entreprennent la traversée du pays dans sa largeur : Rama, Betenoble, Montjoie, Jérusalem. En revanche, la narration du moine Thietmar est beaucoup plus dynamique. Arrivé par bateau au pied du Mont Carmel, il traverse entre Acre et Haîfa 654 , il mentionne le tombeau du prophète Elisée et les sanctuaires de Haïfa. Il présente brièvement les lieux en insistant sur ce qui existe encore tel le monastère abritant moines Grecs et Syriens et en passant en revue les références très nombreuses à l’Ancien Testament, mais il ne s’apesantit pas. Il effectue ensuite la traversée périlleuse d’un fleuve infesté de crocodiles pour gagner Césarée. Là il va prier dans l’église de Saint Pierre édifiée sur la maison du centurion Corneille, fait étape à Arsûf puis arrive à Jaffa. Associant toujours l’anecdote à l’espace parcouru, le port est l’occasion de raconter l’aventure de Jonas : « Hic erat portus Ione, cum vellet fugere a faie Domini, et auspicium vocabuli videtur alludere rei, et dicitur 652 Les pelerinaiges por aller en Ierusalem, op. cit., p. 90. 653 Les pelerinaiges por aller en Ierusalem, op. cit., p. 92. 654 Thietmar, op. cit., chapitre VIII, p. 20 : « Desiderio autem desiderans desirantissime corpus beate Katerine, sacro sudans oleo, visitare, eoque ardentius, quo id in animo meo proposueram diururnus, totum me, corpus et animam, gracie Dei et beate Katerine submisi auxilio, quelibet pericula et casuales eventus non abhorens. Tanto desiderio inflammatus, Accon igitur iter arripiens, habitu tamquam Georgianus monachus,et longa barba simulavi quod non eram ». 240
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En revanche, la narration du moine Thietmar est beaucoup plus dynamique.<br />
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654 Thietmar, op. cit., chapitre VIII, p. 20 : « Desiderio autem desiderans desirantissime corpus beate Katerine,<br />
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