xi eme‐ xiii eme siecles - Université Paris-Sorbonne
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Daniel et Saewulf signalent les attaques des musulmans et le danger qui plane aux alentours de la ville de Hébron, quand le pèlerin anglais se rend au tombeau des patriarches ou lors de sa traversée de Jaffa à Jérusalem. Les pèlerins doivent faire face aux taxes et autres tracasseries administratives qui commencent dès leur arrivée au port, comme nous l’avons fait remarquer précédemment. Cependant elles se poursuivent et Thietmar s’en plaint à Damas : «[…] est autem consuetum, ut ab intrantibus Damascum aurum diligenter exquiratur, quia decima auri debetur Soldano. Ubi a me in omnibus rugis tam vestis quam corporis est quesitum, et ab omnibus comitibus meis, tam pauperibus quam divitibus. » 515 Personne n’échappe aux contrôles douaniers et l’humiliation est la même pour tous 516 . Par ailleurs, tout est prétexte à payer une taxe, l’anonyme de Paris ne retient que les dépenses « superflues » et « arbitraires » lors de son débarquement à Beyrouth quelques siècles plus tard 517 . Mais toutes ne sont pas arbitraires et un impôt est prélevé à l’entrée de Damas sur la possession d’or, c’est la « dîme de l’or ». Elle est valable pour tous, quelle que soit l’appartenance religieuse des visiteurs. Les lieux saints sont également « rançonnés » et Thietmar rapporte, à propos de Bethléem : «Sunt tamen quidam Sarraceni custodes ad limina monasterii deputati, a peregrinis introeuntibus pedagium accipientes ; qui tamen ibi residenciam non faciunt. » 518 Les bourses doivent également se délier lors de la visite du Saint Sépulcre ou d’autres lieux saints de Jérusalem. Le continuateur anonyme de Guillaume de Tyr note à ce propos : « Mès sachiez bien de voir que li Crestien pelerin, qui vouloient aler au Sepulcre et aus autrez Sainz leuz, que li Sarrazin avoient granz louierz d’elx et granz services ; li Sarrazin les prisoient bien chascun an à .xxx.m besanz ; mès l’en escoumenia après touz les Crestienz qui louier en donroient par quoi il ne valut mie tant. 519 » Cependant même si le danger est latent (nous analysons la part de danger que représentent les Sarrasins dans le développement afférent), il n’est pas l’objet de toutes les attentions des pèlerins et au final peu d’altercations sont rapportées. Le prix à payer fonctionne comme un leïtmotiv, une pénitence de plus à endurer. 515 Thietmar, op. cit., chapitre III, p. 9. 516 Ibn Jubayr s’est indigné du procédé lors de son embarquement à Saint-Jean d’Acre. 517 Anonyme Parisien, op. cit. 518 Thietmar, op. cit., chapitre X, p. 28. 519 Continuateur chapitre VI, p. 154. 201
3) Le rapport à l’Autre (environnement humain) Les rares mentions qui sont faites des populations locales témoignent d’un sentiment de curiosité plutôt que d’une animosité réelle. Cependant, les rapports demeurent superficiels, ponctuels et sont souvent de nature utilitaire. Nous n’avons pas relevé de liens plus profonds, ceci exigerait sans doute de côtoyer continuellement les mêmes personnes alors que les pèlerins se déplacent constamment. En outre, la communication semble biaisée dès le départ par la barrière linguistique, comme nous l’avons mis en évidence précédemment. Pourtant, les gestes pourraient naturellement se substituer à la parole mais l’interprétation qui est en faite demeure faussée sans doute à cause des mentalités ou du mode de vie. Enfin, une ségrégation s’opère car les pèlerins occidentaux sont hébergés dans des fondations latines. L’isolement, le manque de contact, l’ignorance des réalités contemporaines conduisent à l’absence de mention des autres ou alors à leur critique dénuée de tout fondement et de toute objectivité 520 . Toutefois, plusieurs des pèlerins de notre corpus s’attardent sur leur environnement humain. Une fois encore, ils ne mentionnent pas leurs compagnons de pèlerinage parce qu’ils appartiennent à leur sphère de connaissance mais ils s’intéressent à tous les autres. De ce fait, nous allons définir le regard porté sur l’Autre. Un regard qui se traduit d’abord par la distinction en communautés religieuses puis par une préférence nationale. Ainsi nous examinerons la perception des Sarrasins, des Juifs puis celle des chrétiens d’Orient, ensuite nous passerons en revue les éléments concernant les Bédouins et les Mongols, enfin nous nous arrêterons sur la population chrétienne latine locale. L’Autre peut se résumer en une énumération : il en va ainsi du bilan humain que dresse Jean de Würzbourg à la fin de son périple : « […] sunt namque ibi Greci, latine, Alemanni, Ungari, Scotti, Navarri, Britannii, anglici, (Franci, Rutheni, Boemi, Giorgiani, Armeni, Suriani, Iacobitate, Syri, Nestoriani, Indi, Egyptii, Cephtii, Capheturici, Maroni et alii quam plures, quos longum esset enumerare, sed in his finem huius opusculi faciemus. 521 » Toutefois, à y regarder de plus près, cette simplicité apparente est organisée autour de régions, de religions ; une attention minimale a donc été portée sur l’environnement extérieur au pèlerinage. Par ailleurs, le pèlerin allemand note bien qu’il n’a pris en considération que les éléments estimés comme essentiels, alors qu’il en existe bien d’autres 520 Nicole Chareyron expose parfaitement le phénomène avec les pèlerins des XIV et XV ème siècles confrontés à une réelle hostilité de la population. , op. cit. p. 89-100. 521 Jean de Würzbourg, op. cit. p. 137, lignes 1446-1455. 202
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Le continuateur anonyme de Guillaume de Tyr note à ce propos : « Mès sachiez bien de voir<br />
que li Crestien pelerin, qui vouloient aler au Sepulcre et aus autrez Sainz leuz, que li Sarrazin<br />
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il ne valut mie tant. 519 »<br />
Cependant même si le danger est latent (nous analysons la part de danger que représentent<br />
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Thietmar, op. cit., chapitre III, p. 9.<br />
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Ibn Jubayr s’est indigné du procédé lors de son embarqu<strong>eme</strong>nt à Saint-Jean d’Acre.<br />
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Anonyme <strong>Paris</strong>ien, op. cit.<br />
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Thietmar, op. cit., chapitre X, p. 28.<br />
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Continuateur chapitre VI, p. 154.<br />
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