xi eme‐ xiii eme siecles - Université Paris-Sorbonne

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leur assure de la sorte un certain confort dans leurs rencontres éventuelles avec les Autres. Par delà les échanges oraux, les lettres de mission des personnalités ouvrent les portes sans discours préalable. 3) Les moyens de locomotion : Si Egérie ou des pèlerins malades voyagent en litières, nombreux sont les pèlerins présentés dans notre corpus qui se déplacent à pied, accompagnés de mulets pour les bagages. Certains, fatigués de leur périple maritime et des conditions générales de voyage tombent facilement malades ou sont tout simplement épuisés. Ils payent de leur personne et ne se ménagent pas, afin de parcourir dans les temps impartis la distance prévue. Devant de telles extrémités, ils sont transportés dans de grandes corbeilles tressées et fixées sur des chameaux. D’autres vont à dos d’âne pour s’éviter des fatigues ou encore à dos de chameau. Les textes étudiés ne mentionnent pas de chevaux, si ce n’est le chevalier accompagnant la troupe pour la protéger. Mais il n’est pas exclu que certains seigneurs conservent leur monture pour les déplacements d’une ville à l’autre ou qu’ils se procurent une monture plus habituée au vent du désert. Parfois, l’existence des montures est attestée par des témoignages où justement elles font défaut à un moment précis du pèlerinage. Foucher de Chartre note l’absence de mulets et en souligne les conséquences graves puisque ce sont les hommes qui doivent payer de leur personne en se chargeant d’un fardeau, et qui plus est, limités par leur propres forces, ils ne peuvent transporter suffisamment de nourriture et la pénurie est cruelle 452 . Par ailleurs, deux textes du corpus mentionnent un trajet par voie maritime. En effet, l’édition des Sains pèlerinages que l’on doit requerre en la Terre Sainte signale la possibilité de se rendre à Haïfa depuis le port de Saint Jean d’Acre, il est ainsi noté : « si 452 Foucher de Chartres, op. cit. 183

eviegne à Acre et noue d’Acre à Cayphas, où il i a .iiij. liues. » 453 . Thietmar rapporte comment il a voyagé entre ces deux cités portuaires 454 . 4) Un parcours solitaire ou en compagnie ? Même si chaque pèlerin aspire à un idéal de solitude dont le credo « o beata solitudo, sola beatitudo » parcourt les récits de pèlerinage, le voyage se fait plus communément en collectivité. Le pèlerin s’aventure rarement tout seul. Notre corpus permet de constater que le voyage se fait entre gens de la même maisonnée, de la même paroisse, que le domestique suit son seigneur ou que des religieux d’une même communauté font route de conserve. Si le rassemblement n’est pas réalisé dès le lieu d’origine c’est à partir de l’embarquement ou du point de ralliement que le groupe se constitue. Il est par conséquent très rare que deux ou trois personnes parviennent au but fixé sans accompagnement. Sur le plan proprement matériel, un groupe de pèlerin a une plus grande influence et un poid plus conséquent dans les négociations ou lors des prises de décision. De plus, par souci de sécurité, pour le simple besoin de se rassurer, la collectivité réconforte. Enfin, d’un point de vue spirituel, le pèlerinage se vit plus intensément comme expérience collective. Toutefois, ces considérations mises à part, nous nous apercevons que les formalités pour accéder aux lieux saints sont les mêmes pour tous. Aussi, les pèlerins sont forcément rassemblés et vont pérégriner de compagnie. Par conséquent, malgré la tendance à ne raconter que le ressenti spirituel et intérieur propre à une personnalité, enfermant ainsi chaque pèlerin dans une bulle, rares sont ceux qui ont vraiment voyagé seuls. Riccold de Monte Croce, par exemple, mentionne qu’il ne voyage pas en solitaire mais « cum multis cristianis ». Nous pourrions aller jusqu’à imaginer le cri de soutien de ces pèlerins en route, qui sert de refrain dans le poème de départie de Guiot de Dijon. 455 453 Félix Fabri, op. cit., chapitre VI, p. 104. 454 Thietmar, op. cit., Chapitre VIII, p. 23 : « Item a monte Carmelo perveni Cesaream. Et transivi per fluvium, qui fluit de Carmelo, in quo multi sunt cocodrilli ». 455 Guiot de Dijon, op. cit., p.196 : « Dieu quant crieront : « outree », Sire, aidiez au pelerin Pour qui sui espoentée, Car felon sunt Sarrazin ». 184

eviegne à Acre et noue d’Acre à Cayphas, où il i a .iiij. liues. » 453 . Thietmar rapporte<br />

comment il a voyagé entre ces deux cités portuaires 454 .<br />

4) Un parcours solitaire ou en compagnie ?<br />

Même si chaque pèlerin aspire à un idéal de solitude dont le credo « o beata solitudo, sola<br />

beatitudo » parcourt les récits de pèlerinage, le voyage se fait plus communément en<br />

collectivité. Le pèlerin s’aventure rar<strong>eme</strong>nt tout seul. Notre corpus permet de constater<br />

que le voyage se fait entre gens de la même maisonnée, de la même paroisse, que le<br />

domestique suit son seigneur ou que des religieux d’une même communauté font route de<br />

conserve. Si le rassembl<strong>eme</strong>nt n’est pas réalisé dès le lieu d’origine c’est à partir de<br />

l’embarqu<strong>eme</strong>nt ou du point de ralli<strong>eme</strong>nt que le groupe se constitue. Il est par conséquent<br />

très rare que deux ou trois personnes parviennent au but fixé sans accompagn<strong>eme</strong>nt. Sur le<br />

plan propr<strong>eme</strong>nt matériel, un groupe de pèlerin a une plus grande influence et un poid plus<br />

conséquent dans les négociations ou lors des prises de décision. De plus, par souci de<br />

sécurité, pour le simple besoin de se rassurer, la collectivité réconforte. Enfin, d’un point<br />

de vue spirituel, le pèlerinage se vit plus intensément comme expérience collective.<br />

Toutefois, ces considérations mises à part, nous nous apercevons que les formalités pour<br />

accéder aux lieux saints sont les mêmes pour tous. Aussi, les pèlerins sont forcément<br />

rassemblés et vont pérégriner de compagnie. Par conséquent, malgré la tendance à ne<br />

raconter que le ressenti spirituel et intérieur propre à une personnalité, enfermant ainsi<br />

chaque pèlerin dans une bulle, rares sont ceux qui ont vraiment voyagé seuls. Riccold de<br />

Monte Croce, par exemple, mentionne qu’il ne voyage pas en solitaire mais « cum multis<br />

cristianis ». Nous pourrions aller jusqu’à imaginer le cri de soutien de ces pèlerins en<br />

route, qui sert de refrain dans le poème de départie de Guiot de Dijon. 455<br />

453 Félix Fabri, op. cit., chapitre VI, p. 104.<br />

454 Thietmar, op. cit., Chapitre VIII, p. 23 : « Item a monte Carmelo perveni Cesaream. Et transivi per fluvium,<br />

qui fluit de Carmelo, in quo multi sunt cocodrilli ».<br />

455 Guiot de Dijon, op. cit., p.196 : « Dieu quant crieront : « outree »,<br />

Sire, aidiez au pelerin<br />

Pour qui sui espoentée,<br />

Car felon sunt Sarrazin ».<br />

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