xi eme‐ xiii eme siecles - Université Paris-Sorbonne

xi eme‐ xiii eme siecles - Université Paris-Sorbonne xi eme‐ xiii eme siecles - Université Paris-Sorbonne

theses.paris.sorbonne.fr
from theses.paris.sorbonne.fr More from this publisher
16.06.2013 Views

Nous nous sommes interrogés sur l’éventuelle présence de guides et sur le lieu de ces rencontres. Il paraît logique que la recherche d’un guide s’effectue dès le débarquement car le pèlerin est peu au fait de la géographie et des coutumes locales, il serait ainsi accompagné dès son arrivée. Il semble que le capitaine du bateau ait entretenu des relations lui permettant d’assurer une prise en charge des arrivants, mais rien ne permet de l’affirmer. Il est fort possible que certaines congrégations religieuses se chargent de guider les pèlerins. De nombreux témoignages du XIV ème siècle rapportent que le Père Gardien et les Franciscains du Mont Sion se chargent de l’accueil et des préparatifs des pèlerinages. Dans tous les cas ce sont des Sarrasins ou des Bédouins qui sont affectés à la lourde tâche de guide, d’accompagnateur voire de bagagiste. Parfois la barrière linguistique est difficile à surmonter et les intentions des uns sont mal perçues des autres, les coutumes orientales pouvant s’avérer peu compatibles avec la pudeur occidentale et inversement. Il paraît logique de s’intéresser à la façon dont les pèlerins vont communiquer avec leurs guides. Deux hypothèses sont à envisager. La première présente l’éventualité où le guide parle la langue du pèlerin. Cette possibilité s’offre comme la plus probable. La seconde permet d’envisager le cas où le pèlerin lui-même parlerait la langue pratiquée dans cette partie du monde. Jean-Claude Faucon dans son étude sur le truchement 432 souligne la confluence de plusieurs facteurs favorisant les échanges linguistiques. Il note bien sûr la présence de nombreux ordres religieux en Palestine, ainsi que les bienfaits des principautés franques qui permettent la transmission des informations. Par ailleurs, le territoire est un emplacement stratégique aux portes de l’Orient au plurilinguisme établi. Il ne faut pas non plus négliger les diverses communautés chrétiennes, bien installées en ce lieu, qui serviraient de traducteurs et d’interprètes 433 . Il en déduit que les contacts linguistiques sont donc établis. 432 Faucon, J-C, « Le truchement soutien et oppresseur du pèlerin médiéval », Miscellanea mediaevalia : mélanges offerts à Philippe Ménard, H. Champion, Paris, 1998, p. 493-512. 433 L’auteur de citer Guillaume de Rubrouckqui est en relation avec des prêtres arméniens ayant une bonne connaissance du turc et de l’arabe. En 1253 d’ailleurs, il fait traduire à Acre les lettres royales dont il est porteur en arabe et en syrien. Est-ce un cas particulier ou un fait établi ? 179

Quant à la connaissance de langue des Sarrasins, elle semble assez répandue. Dans un contexte de croisade, des compatriotes de Joinville la pratiquent 434 . Le frère Thietmar écrit très fréquemment sur les guides qu’il a pu rencontrer et semble même en changer souvent. Il note un certain nombre de rencontres mais ne fait jamais mention de la façon dont il échange avec eux. Par exemple, il écrit dans le chapitre consacré à Saint-Jean d’Acre et à la Galilée : « Arripui iter ab Accon cum quibusdam Surianis et Sarracenis» 435 , ou encore : «[…] et dixit mihi quidam Sarracenus quod […] » 436 . Il est même, à un moment de son pèlerinage, hébergé par une veuve franque lui fournissant maintes informations et dont la générosité va jusqu’à lui recruter des spécialistes du désert : «[…] ubi exceptus fui hospicio a quadam vidua Gallica, que me informavit de itinere et modo itineris per desertum usque ad montem Sinay, et fecit me habere viaticum panem bis coctum, caseos, uvam passam, ficus et vinum. Conduxit mihi eciam Boidewinos cum camelis usque ad montem Sinay, quia aliis non est via nota per desertum. Quos quidem iuratos et fide et sua lege astrictos convenit hoc modo, ut me reducerent vivum vel mortuum.» 437 . Il est possible qu’elle serve de lien entre les interlocuteurs mais une fois en chemin comment communiquer alors ? Guillaume de Boldensele a également eu pour guide un autochtone, « l’interprète Sarrasin » lui donne ponctuellement des conseils, il le dissuade notamment de se rendre sur les bords de la Mer Morte 438 . Ici, il est clairement énoncé dans la dénomination même du personnage qu’il parle la langue de Boldensele. Parfois, les rencontres se font au gré du pèlerinage. La communication peut-être aisée ou inutile comme en témoigne Guillaume de Boldensele : « […] je suis revenu assez près de Jérusalem visiter les tombeaux de plusieurs prophètes et un juif allemand, fin lettré, me tint compagnie. Il était venu en pèlerinage, comme les juifs en ont l’habitude. » 439 . Une autre fois, il se joint à une caravane de pèlerins voyageant en grand nombre ; ainsi sur la route très empruntée de Cana, il remarque: « […] à cet endroit nous rencontrâmes une grande compagnie allant à Acre, nous nous joignâmes à eux avec très grand plaisir 440 . » 434 Joinville, op. cit., §354 « Je demandai a mon seigneur Baudouyn d’Ibelin, qui savoit bien le sarrazinnois, que celle gent disoit ». § 361 et § 363 « […] mestre Nichole d’Acre, qui savoit le sarrazinnois ». §444 et §458 « frere Yves le Breton qui savoit le sarrazinnois ». 435 Thietmar, op. cit., Chapitre I, p. 4. 436 Thietmar, op. cit., Chapitre I, p. 4. 437 Thietmar, op. cit., Chapitre XV, p. 37. 438 Guillaume de Boldensele, op.cit., p. 1023. 439 Guillaume de Boldensele, op.cit., p.1021. 440 Daniel, op. cit., § 95. 180

Quant à la connaissance de langue des Sarrasins, elle semble assez répandue. Dans un<br />

contexte de croisade, des compatriotes de Joinville la pratiquent 434 .<br />

Le frère Thietmar écrit très fréquemment sur les guides qu’il a pu rencontrer et semble<br />

même en changer souvent. Il note un certain nombre de rencontres mais ne fait jamais<br />

mention de la façon dont il échange avec eux. Par exemple, il écrit dans le chapitre<br />

consacré à Saint-Jean d’Acre et à la Galilée : « Arripui iter ab Accon cum quibusdam<br />

Surianis et Sarracenis» 435 , ou encore : «[…] et di<strong>xi</strong>t mihi quidam Sarracenus quod<br />

[…] » 436 . Il est même, à un moment de son pèlerinage, hébergé par une veuve franque lui<br />

fournissant maintes informations et dont la générosité va jusqu’à lui recruter des<br />

spécialistes du désert : «[…] ubi exceptus fui hospicio a quadam vidua Gallica, que me<br />

informavit de itinere et modo itineris per desertum usque ad montem Sinay, et fecit me<br />

habere viaticum panem bis coctum, caseos, uvam passam, ficus et vinum. Condu<strong>xi</strong>t mihi<br />

eciam Boidewinos cum camelis usque ad montem Sinay, quia aliis non est via nota per<br />

desertum. Quos quidem iuratos et fide et sua lege astrictos convenit hoc modo, ut me<br />

reducerent vivum vel mortuum.» 437 . Il est possible qu’elle serve de lien entre les<br />

interlocuteurs mais une fois en chemin comment communiquer alors ? Guillaume de<br />

Boldensele a égal<strong>eme</strong>nt eu pour guide un autochtone, « l’interprète Sarrasin » lui donne<br />

ponctuell<strong>eme</strong>nt des conseils, il le dissuade notamment de se rendre sur les bords de la Mer<br />

Morte 438 . Ici, il est clair<strong>eme</strong>nt énoncé dans la dénomination même du personnage qu’il<br />

parle la langue de Boldensele.<br />

Parfois, les rencontres se font au gré du pèlerinage. La communication peut-être<br />

aisée ou inutile comme en témoigne Guillaume de Boldensele : « […] je suis revenu assez<br />

près de Jérusalem visiter les tombeaux de plusieurs prophètes et un juif allemand, fin lettré,<br />

me tint compagnie. Il était venu en pèlerinage, comme les juifs en ont l’habitude. » 439 . Une<br />

autre fois, il se joint à une caravane de pèlerins voyageant en grand nombre ; ainsi sur la<br />

route très empruntée de Cana, il remarque: « […] à cet endroit nous rencontrâmes une<br />

grande compagnie allant à Acre, nous nous joignâmes à eux avec très grand plaisir 440 . »<br />

434<br />

Joinville, op. cit., §354 « Je demandai a mon seigneur Baudouyn d’Ibelin, qui savoit bien le sarrazinnois, que<br />

celle gent disoit ». § 361 et § 363 « […] mestre Nichole d’Acre, qui savoit le sarrazinnois ». §444 et §458<br />

« frere Yves le Breton qui savoit le sarrazinnois ».<br />

435<br />

Thietmar, op. cit., Chapitre I, p. 4.<br />

436<br />

Thietmar, op. cit., Chapitre I, p. 4.<br />

437<br />

Thietmar, op. cit., Chapitre XV, p. 37.<br />

438<br />

Guillaume de Boldensele, op.cit., p. 1023.<br />

439<br />

Guillaume de Boldensele, op.cit., p.1021.<br />

440<br />

Daniel, op. cit., § 95.<br />

180

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!