xi eme‐ xiii eme siecles - Université Paris-Sorbonne

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3) Précautions juridiques. Au regard des dangers qui attendent le pèlerin, la rédaction d’un testament est nécessaire et efficace afin d’assurer ses donations s’il dispose d’une fortune. Durant la longue absence du pèlerin, il permet de donner des ordres de gestion et d’administration de ses biens. De nombreuses formules testamentaires mises à jour permettent de constater que dans la plupart des cas étudiés, les biens du pèlerin restent sous la protection de l’Eglise 234 . Une fois encore, Nompar de Caumont nous permet de comprendre les démarches mises en place. En homme avisé, il laisse des instructions précises pour le soin de sa femme et de ses enfants, et pour la gestion de ses terres. Il note dans les moindres détails la place occupée par chacun ainsi que sa tâche. Il traite de la même façon, sa famille, ses terres et ses gens. Enfin, afin de prévenir tout malentendu sur son éventuel décès, il demande expressement de respecter un délai d’une année afin de considérer comme véritable l’annonce de sa mort : « Par ailleurs, si certains vous rapportaient qu’au cours de mon voyage j’avais trépassé selon la volonté de Notre-Seigneur, ne les croyez pas trop vite. Il se peut que d’aventure on vous dise des mensonges pour vous faire de la peine, ou que des jongleurs cherchent à provoquer en vous tristesse et mélancolie, alors qu’il n’en serait pas ainsi. Quels que soient les bruits qui courent, ne les croyez pas si ce ne sont pas des gens dignes de foi, qui puissent prouver ce qu’ils affirment. Et encore attendez un an révolu avant de croire quoi que ce soit. 235 » Quant à Ludolph de Sudheim, il envisage le problème autrement : la meilleure des précautions juridiques consiste en une autorisation du Pape : « […] si l’on veut aller en Terre sainte, il faut prendre garde à ne pas partir sans une licence du pape, car celui qui entre dans les terres du sultan est excommunié, puisque la terre sainte a été excommuniée quand elle est passée aux mains du sultan. Ceux qui voyagent sans la licence du pape doivent payer le tribut aux Sarrasins, au déshonneur de l’église. La licence du pape mentionne que l’on ne doit rien vendre ni acheter en dehors de ce qui est nécessaire pour vivre et se vêtir. Mais j’ai appris que, dans certains cas, on pouvait partir sans licence, si on est moine, si on a un père, une mère ou un ami malade ou prisonnier, on peut aller les 234 Summa notoriae Aretii composita annis MCCXL-MCCLIII in Bibliotheca Juridica Medii Aevi, tome 3, p.30. Nous avons relevé à titre d’exemple : « Cum inter procellosos undarum concursus ob ventorum rabiem et alios inopinatus eventus trasfretantes de facili periclitari contingat ; vel talis visitaturus Terram Sanctam […] omnia mea bona hoc nuncupativo testamento sine scriptis sic disponere procuravi ». 235 Nompar de Caumont, op. cit., p. 1065. 99

chercher ou les racheter, on encore si on va négocier la paix ». 236 Rappelons cependant que le pèlerin voyage alors que les conditions politiques ne sont plus aussi fastes que celles des pèlerins de notre corpus premier. Enfin, un insigne de pèlerinage tient une place bien réelle dans ces préparatifs. Ce ne sont pas les insignes ostentatoires dont nous avons pu faire mention précédemment, même si elles permettent déjà une identification du pèlerin. Il s’agit, le plus souvent, d’une lettre de recommandation de l’évêque du diocèse auquel appartient le pèlerin. Celle-ci précise l’identité du pèlerin et sa destination de pèlerinage. Ce document souligne bien qu’il n’est pas un vagabond. Le pèlerin prend ainsi la route : « radio inflammante divino propter nomen Domini, ob lucrandam orationem. » En outre, la lettre demande à tous les religieux et à tous les laïcs rencontrés au cours du pèlerinage d’accueillir le pèlerin selon cette formule : « in ipso peregrino Christum pravistis, seu suscepistis me, quod uni ex minimis istis facitis, mihi fecistis 237 ». Nous pouvons constater que le document a force de loi dans la chrétienté. Ces opérations sont à prendre en considération de même que la question du budget et de son financement. 4) Les coûts et le financement du pèlerinage a) Calcul d’un budget prévisionnel Les voyageurs ne s’engagent pas tête baissée dans cette aventure du saint-voyage. Les préparatifs commencent vraisemblablement par une estimation du coût total du pèlerinage afin de prévoir la somme nécessaire aux dépenses. Le pèlerin doit, en effet, prendre en compte sa nourriture, son transport et son hébergement. Bien sûr, il peut recevoir des aumônes mais ce n’est pas un mendiant, aussi doit-il se procurer un petit viatique de départ. Il sera accueilli, logé et nourri chez les congrégations religieuses ou les seigneurs, qui ne manquent pas à leur devoir de charité chrétienne. Cependant, le pèlerinage est un voyage qui n’est pas gratuit et il faut aussi pouvoir faire face aux imprévus. Les personnes 236 Ludolph de Sudheim, texte traduit par Ch. Deluz, Croisades et pèlerinages, op.cit., p. 1032-1056, p. 1033. 237 Chelini et Branthomme, op. cit. deuxième partie : « essor du pèlerinage », chapitre 1, p. 146. 100

chercher ou les racheter, on encore si on va négocier la paix ». 236 Rappelons cependant que<br />

le pèlerin voyage alors que les conditions politiques ne sont plus aussi fastes que celles des<br />

pèlerins de notre corpus premier.<br />

Enfin, un insigne de pèlerinage tient une place bien réelle dans ces préparatifs. Ce ne sont<br />

pas les insignes ostentatoires dont nous avons pu faire mention précédemment, même si<br />

elles permettent déjà une identification du pèlerin. Il s’agit, le plus souvent, d’une lettre de<br />

recommandation de l’évêque du diocèse auquel appartient le pèlerin. Celle-ci précise<br />

l’identité du pèlerin et sa destination de pèlerinage. Ce document souligne bien qu’il n’est<br />

pas un vagabond. Le pèlerin prend ainsi la route : « radio inflammante divino propter<br />

nomen Domini, ob lucrandam orationem. » En outre, la lettre demande à tous les religieux<br />

et à tous les laïcs rencontrés au cours du pèlerinage d’accueillir le pèlerin selon cette<br />

formule : « in ipso peregrino Christum pravistis, seu suscepistis me, quod uni ex minimis<br />

istis facitis, mihi fecistis 237 ». Nous pouvons constater que le document a force de loi dans<br />

la chrétienté.<br />

Ces opérations sont à prendre en considération de même que la question du budget et de<br />

son financ<strong>eme</strong>nt.<br />

4) Les coûts et le financ<strong>eme</strong>nt du pèlerinage<br />

a) Calcul d’un budget prévisionnel<br />

Les voyageurs ne s’engagent pas tête baissée dans cette aventure du saint-voyage. Les<br />

préparatifs commencent vraisemblabl<strong>eme</strong>nt par une estimation du coût total du pèlerinage<br />

afin de prévoir la somme nécessaire aux dépenses. Le pèlerin doit, en effet, prendre en<br />

compte sa nourriture, son transport et son héberg<strong>eme</strong>nt. Bien sûr, il peut recevoir des<br />

aumônes mais ce n’est pas un mendiant, aussi doit-il se procurer un petit viatique de<br />

départ. Il sera accueilli, logé et nourri chez les congrégations religieuses ou les seigneurs,<br />

qui ne manquent pas à leur devoir de charité chrétienne. Cependant, le pèlerinage est un<br />

voyage qui n’est pas gratuit et il faut aussi pouvoir faire face aux imprévus. Les personnes<br />

236 Ludolph de Sudheim, texte traduit par Ch. Deluz, Croisades et pèlerinages, op.cit., p. 1032-1056, p. 1033.<br />

237 Chelini et Branthomme, op. cit. deu<strong>xi</strong>ème partie : « essor du pèlerinage », chapitre 1, p. 146.<br />

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