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Revue celtique - National Library of Scotland

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La Poésie populaire en Bretagne. 47<br />

fois les limites d'un cercle restreint, et nul ne songea à rappeler aux lecteurs<br />

de M. de la Villemarqué le nom importun de Macpherson. La compa-<br />

raison entre les deux livres ne paraissait guère, en effet, laisser place à<br />

la suspicion. Macpherson est certainement un grand artiste, et la poésie<br />

anglaise au xviii*" siècle n'a rien à opposer à certaines pièces détachées<br />

d'Ossian, à l'admirable Nuit d'orage par exemple : mais si on en lit vingt<br />

pages de suite, on est obligé de reconnaître que l'harmonieux auteur n'a<br />

qu'une seule note, et que cette note est un peu passée de mode. On<br />

sent trop souvent qu'il est le contemporain de Volney et qu'il semble<br />

paraphraser certaines pages des Ruines. Or, dans quelque préoccupation<br />

qu'on lise le Barzaz, on n'y trouve pas de trace dominante des goûts<br />

littéraires particuliers à telle ou telle période de l'art contemporain.<br />

L'ensemble de ces strophes n'a pas vieilli depuis trente ans, et quand<br />

M. de la Villemarqué assigne à tels ou tels de ces chants les dates de 580,<br />

de 818 ou de 1527, l'esprit captivé ne songe pas à s'inscrire en faux<br />

contre la vraisemblance littéraire. Les doutes, s'il s'en produit, doivent<br />

donc chercher un autre terrain.<br />

On se demandera quel fut l'accueil fait au Barzaz Breiz par les érudits<br />

et les travailleurs sérieux du pays natal de l'auteur. C'est là en effet un<br />

critérium assez précis. On sait ce que les philologues les plus accrédités<br />

de la France romane pensent de la langue poétique et de la valeur litté-<br />

raire de Jasmin, d'autant plus célèbre à Paris qu'il n'y a pas dix<br />

personnes peut-être dans cette ville qui Paient lu. Ce cap redoutable fut<br />

doublé par M. de la Villemarqué avec un rare bonheur. Le patriotisme<br />

armoricain s'associa passionnément à un succès qui mettait les chants<br />

nationaux des Bretons sur la même ligne que les Sagas de l'Islande et<br />

les Piesmas de l'Illyrie. Les promoteurs nombreux, mais mal organisés,<br />

du mouvement en faveur de la langue et de la littérature <strong>celtique</strong>s<br />

reconnurent avec docilité et même avec empressement M. de la Ville-<br />

marqué pour leur chef d'école. Cette déférence spontanée, il la dut<br />

peut-être moins à la renommée européenne qu'à une circonstance<br />

particulière, faite pourtant pour éveiller de justes défiances : Je veux<br />

parler du système grammatical qui a présidé à la composition du Barzaz.<br />

Quelques explications rétrospectives sont ici nécessaires.<br />

La langue bretonne, telle qu'un peuple de i,?oo,ooo âmes la parle<br />

aujourd'hui depuis l'embouchure de la Villaine jusqu'à l'île d'Ouessant,<br />

est un idiome d'une construction archaïque très-prononcée, aussi proche

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