JE ME SOUVIENDRAI 2012 Mouvement social au ... - La boîte à bulles

de narcissisme dont ce type de personne
est accablé, mais je trouve tout de même sa
déclaration intéressante.
Parce que depuis 4 mois les gens se battent.
Parce que depuis 4 mois les gens se
mobilisent. Parce que depuis 4 mois les
gens tentent de trouver des moyens de
rallier le plus grand nombre possible.
Pour toutes ces raisons, je trouve qu’il est
important de se souvenir qu’il s’agit d’une
lutte, et non d’un concours de popularité.
Ce n’est pas parce que tu as des ampoules
aux pieds que tu es un “plus meilleur
révolutionnaire”.
Ce n’est pas parce que tu traversais un
nuage de fumée de lacrymo et que tu
n’étais pas en mesure de respirer à plein
poumon un avant-midi que tu es un “plus
meilleur révolutionnaire”. Personne ne
va faire de t-shirt à ton effigie parce que
tu t’es pris une balle de plastique. Che
Guevara, c’est pas son idée, que celle de
commercialiser sa tronche. Ce n’était
pas son objectif, que celui de scotcher sa
gueule sur les torses de jeunes colériques
pré pubères en quête identitaire. Si c’est
des chandails que tu veux, je connais un
Palestinien à St-Laurent qui fait ça pour
pas cher. Et si t’es chanceux, il peut même
te raconter des histoires de son pays, ou de
ce qu’il en reste : il s’est pris des balles et
c’est pas avec ça qu’il se fait un plus grand
nombre d’amis Facebook.
C’est arrivé à plus d’une reprise lors du
dernier mois : à la dernière manif à laquelle
je participais, j’entendais un groupe
“d’activistes” scander des slogans dont
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l’intention était de se moquer de Québec
Solidaire : un des seuls partis qui participent
de manière active au mouvement…
Ils gueulaient quelque chose comme :
“C’est pas Québec Solidaire, c’est Québec
Stationnaire !” Je regarde un des criards et
lui demande : “C’est quoi le but ?”.
— Quoi ?
— L’objectif ! Le projet derrière ce genre de
slogan ?
— Ben, nous on trouve que Québec
Solidaire pourrait en faire plus…
— Tant qu’à y être, achète du poivre de
cayenne pis spray leur la gueule. Si ce sont
des méthodes de divisions qui t’excitent…
— Ta yeule man.
— Ok, man.
À la lumière de cette altercation, je trouve
qu’il est essentiel de se souvenir, de se
ramener à l’ordre, de se répéter que la
glorification de l’activiste parfait ne fait que
ralentir le mouvement. Il n’est en aucun
cas bénéfique de complexer nos confrères
et nos consoeurs de révolution en rabaissant
constamment le niveau d’intensité et
la valeur des actions posées par ceux-ci et
celles-ci. On est pas en train de comparer
la grosseur de nos billes, ou le nombre de
pogs qu’on a gagnés à la récré. Non plus en
train de définir à quel point on est “bad”
parce que cette semaine un tel s’est pris
trois retenues…
Quand j’étais au primaire, je me souviens,
les “amis” se moquaient de moi parce que
je portais de espadrilles de marque Pony,
alors que tous les autres “amis” portaient
des Nike, des Adidas, des Reebok et des
Fila (oui c’était encore hot à l’époque). Je
pouvais marcher autant que ces garçons,
courir avec la même vigueur, me rendre au
même endroit… La seule différence : mes
chaussures étaient moins “flamboyantes”.
On s’en contre-fout de la manière dont
tu t’y rends, pourvu que tu t’y rendes. Ne
faisons pas avec nos idées ce que les gros
vendeurs ont fait avec nos espadrilles. Ne
jouons pas au jeu du “Mon carré est plus
rouge que le tien !”.
“Moi je suis un plus meilleur révolutionnaire
!” c’est aussi utile que de dire “Est-ce
que je peux avoir un autre berlingot ? !”…
Ok, fin de la récré… ou de l’analogie…
peu importe.
Peu importe les couleurs, le costume, le
masque que tu utilises pour personnifier
ton adhésion à la lutte, peu importe si tu
t’es fait charcuter par la police, qu’on t’ait
poivré la figure et qu’on t’ait fait bretter six
heures dans le saladier, peu importe si la
seule chose que tu fais, c’est partager les
vidéos qui évoquent chez toi un sentiment
d’injustice, peu importe si tout ce que tu
fais c’est être en accord et rien de plus…
Peu importe. Il me semble qu’ils font partie
de l’équipe. On porte pas la même marque
de chaussures, mais on vise le même
ballon, non ? Où les mêmes têtes ?
Oh merde, et voilà, je viens de déclarer que
je veux kicker des têtes, ça sent l’arrestation
préventive… À ma défense : pour kicker la
tête d’un dirigeant, faudrait d’abord que
j’trouve le rectum dans lequel ladite tête
est logée.
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