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<strong>René</strong>-<strong>Pierre</strong> <strong>Bille</strong><br />
LE MONDE SAUVAGE DE L’ALPE
<strong>René</strong>-<strong>Pierre</strong> <strong>Bille</strong><br />
1915 9 août, naissance à Lausanne. Fils de l’artiste peintre-verrier Edmond <strong>Bille</strong> et<br />
de Catherine Tapparel. Passe son enfance à Sierre, puis en partie à Chandolin<br />
où il découvre avec enchantement la faune et la flore montagnarde, ainsi qu’à<br />
Rotzberg ( Nidwald ).<br />
1928-1930 Ecoles secondaires grec-latin à Sion.<br />
1931-1933 Gymnase à Neuchâtel, fait des séjours chez son oncle <strong>René</strong> <strong>Bille</strong> au Landeron,<br />
pour participer aux travaux de la campagne.<br />
1934-1935 Ecole d’agriculture de Châteauneuf.<br />
1935-1936 Séjour au Portugal, en tant que responsable des travaux de réfection à la Quinta,<br />
propriété de son père.<br />
1936-1940 Ecole de recrue et séjours dans les fermes en tant qu’ouvrier ; il se retire <strong>du</strong>rant<br />
des mois à la grotte de Finges (excavation dans le rocher de Varone).<br />
1940-1942 Parution des poèmes Terres sauvages ( 1940 ) et Dégel ( 1942 )<br />
1943 Parution <strong>du</strong> Journal d’un bohème.<br />
1948 S’installe à Chandolin où il écrit des articles et commence la photographie animalière<br />
tout en partageant les travaux agricoles des Anniviards.<br />
1953 Mariage avec Thérèse Lepers, française de Lille. Naissances de Sylvain en 1954,<br />
Geneviève en 1955 et Nicolas en 1964. La famille vit à Chandolin jusqu’en 1958.<br />
1954 Commence à filmer pour réaliser et monter Le Monde sauvage de l’Alpe qui sera<br />
primé à Trento et présenté par l’auteur en France et dans les pays francophones<br />
sous l’égide de « Connaissance <strong>du</strong> monde ». Parution à Paris de La faune de<br />
montagne.<br />
1960 Lors de la tournée de conférences en Belgique, parution <strong>du</strong> livre Le Monde<br />
sauvage de l’Alpe.<br />
1963-1983 Séjours estivaux en famille en France, près de Grignan.<br />
1979-1984 Avec le groupe « Protection de Finges », présentation de l’exposition sur la forêt<br />
de Finges à Sierre, Sion, Lausanne, Loèche Ville, Champittet, Brigue.<br />
1986 Parution de Trésors naturels de Finges.<br />
1992 Parution d’un livre, en collaboration avec sa fille Geneviève : Les animaux de<br />
montagne. Plans-fixes, entretien filmé avec Bertil Galland.<br />
1998 Parution <strong>du</strong> livre Les animaux des forêts, avec sa fille Geneviève.<br />
2002 Présentation <strong>du</strong> Film La faune de Finges, de Anne Zen Ruffinen, à Finges /<br />
Espace Nature – <strong>Valais</strong>.<br />
2003 Parution de Regards sur la nature - Eindrucksvolle Natur en collaboration avec<br />
Jean-Claude Praz
PHOTOGRAPHE ET CINÉASTE ANIMALIER<br />
2003-2004 Exposition à l’Ermitage, Finges, Regards sur la nature - Eindrucksvolle Natur <strong>du</strong><br />
Musée de la nature <strong>du</strong> <strong>Valais</strong><br />
2006 Décès à Sierre<br />
« <strong>René</strong> <strong>Pierre</strong> <strong>Bille</strong> a marqué le monde des naturalistes valaisans : personnalité très affable,<br />
au langage cultivé, l’oeil bleu incisif, le visage haut en couleurs marqué par le soleil<br />
et le froid, couronné d’une barbe fl eurie. Sa carrure impressionnante le plaçait un peu<br />
à l’étroit dans la ville: on comprend qu’il n’ait pu trouver sa place que dans une activité<br />
exigeant une empoignade physique avec la nature !<br />
Par ses conférences, ses fi lms, ses livres, <strong>René</strong>-<strong>Pierre</strong> <strong>Bille</strong> a fait aimer et connaître le<br />
Monde sauvage de l’Alpe. Il a contribué à la prise de conscience de la beauté et de la<br />
fragilité de notre patrimoine naturel. Il a surtout fait rêver des milliers de personnes en les<br />
initiant par l’image à des contacts passionnants avec la faune sauvage […] »<br />
Jean-Claude Praz, Regards sur la nature, p.13<br />
Et c’est peut-être bien au cours de ces merveilleuses balades à Finges ou lors<br />
d’importants pique-niques familiaux sur les bords <strong>du</strong> fl euve vagabond que<br />
mes goûts pour la nature et les bêtes commencèrent à trouver le terrain propice<br />
à leur essor. Certes mes parents étaient encore loin de se douter qu’un<br />
jour de tels goûts joueraient un rôle prépondérant dans mon existence.<br />
Des animaux plein les yeux, p.11
Le Monde<br />
sauvage<br />
de l’Alpe<br />
Après la Mobilisation, en 1948, <strong>René</strong>-<br />
<strong>Pierre</strong> <strong>Bille</strong> s’installe à Chandolin et<br />
s’implique dans la vie de la communauté.<br />
Très vite, il se passionne pour la faune et<br />
la chasse. La braconne se mue chez lui<br />
en un art de vivre. L’affût et le pistage lui<br />
apprennent la vie intime des animaux de<br />
l’alpe. Ses connaissances et son talent<br />
d’écriture en font un auteur prisé, les<br />
demandes de publication se succèdent.<br />
Un jour, il décide d’échanger son fusil<br />
contre un appareil de photographies,<br />
afi n d’illustrer par ses propres clichés<br />
les articles qu’il publie. Le voici donc<br />
chasseur d’images. Si le plaisir de la<br />
traque reste le même, le sentiment de<br />
capture prend lui un goût différent. « La<br />
chasse au fusil me parut à un moment<br />
désenchantée, presque douloureuse. Avec<br />
l’image, j’avais le sentiment profond et<br />
bienfaisant de fi xer à jamais un pur instant<br />
de vie » ( Animaux de montagne, p. 9 ).<br />
Les éditeurs sont très friands d’images<br />
et <strong>René</strong>-<strong>Pierre</strong> <strong>Bille</strong> parvient à vivre de<br />
son travail de photographe animalier.<br />
« J’ai bien connu cet âge d’or de la<br />
photographie de la faune alpine. […]<br />
Certaines photographies, diffi ciles<br />
à réaliser, étaient même retenues à<br />
l’avance, ce qui avait largement amélioré<br />
ma situation fi nancière ». ( Des<br />
animaux plein les yeux, p. 181-182 )<br />
En 1950, par l’entremise d’Ella Maillart,<br />
<strong>René</strong>-<strong>Pierre</strong> <strong>Bille</strong> fait la connaissance de<br />
Samivel, écrivain et cinéaste français.<br />
Celui-ci l’engage comme assistant<br />
sur le tournage de Cimes et Merveilles<br />
( Grand Prix de Festival de fi lms de<br />
montagne de Trento en 1952 ). Ensemble,<br />
ils tournent des images à Louvie, à<br />
Zermatt et au Parc national suisse.<br />
<strong>René</strong>-<strong>Pierre</strong> <strong>Bille</strong> s’initie au maniement de<br />
la caméra. Il est sé<strong>du</strong>it par les possibilités<br />
qu’elle offre de montrer la vie de la<br />
faune sauvage dans sa vivacité et son<br />
intimité. Dès 1954, il ne lâche plus la<br />
caméra, et se met à la réalisation de son<br />
grand fi lm Le Monde sauvage de l’Alpe.<br />
Le tournage initial se déroule sur quatre<br />
ans, en fonction de la météo, des besoins<br />
<strong>du</strong> scénario et surtout des périodes<br />
favorables propres à chaque espèce.
Ayant traversé au cours de mon existence maints déserts de solitude et connu<br />
d’étranges aubes, ayant accepté maintes privations pour satisfaire ma passion<br />
des bêtes libres, je ne puis, en toute bonne foi, renier mes années de<br />
braconnage. Grâce à la chasse, j’ai appris sur la faune des Alpes des choses<br />
essentielles. Sans cette quête quotidienne et en toutes saisons, l’existence<br />
aurait sans doute per<strong>du</strong> pour moi tout sens et toute saveur.<br />
Des animaux plein les yeux, p.206
Un film et<br />
son public<br />
Le Monde sauvage de l’Alpe obtient un<br />
prix au Festival <strong>du</strong> film de montagne<br />
de Trento en 1958. <strong>René</strong>-<strong>Pierre</strong> <strong>Bille</strong><br />
commence alors à présenter son film<br />
dans le cadre de « Connaissance <strong>du</strong><br />
monde ». Le succès est immense. A<br />
Lausanne en 1969, par exemple, on<br />
organise deux séances supplémentaires<br />
tant l’affluence est forte. Ce succès tient<br />
tout à la fois à la beauté des images,<br />
au commentaire dit en direct et aussi<br />
à la personnalité de <strong>René</strong>-<strong>Pierre</strong> <strong>Bille</strong>.<br />
Cultivé, affable, il sait comme nul autre<br />
communiquer son enthousiasme et son<br />
amour pour la nature sauvage des alpes.<br />
Son discours d’intro<strong>du</strong>ction à la projection<br />
débute par ces mots : « Je suis venu ce<br />
soir vous parler un peu <strong>du</strong> Monde sauvage<br />
de l’Alpe et j’espère vous apporter à<br />
tous une bonne petite bouffée d’air des<br />
montagnes. […] Je vous dirai tout de suite<br />
qu’il m’a fallu à peu près quatre années de<br />
travail solitaire – et quelle solitude ! ( à voir<br />
tant de visages devant moi ce soir, j’en<br />
prends mieux la mesure ) quatre années<br />
de travail pour mener à bien cette entreprise.<br />
Je n’ai pas travaillé tous les jours, je<br />
n’ai pas filmé tous les jours – non, loin de<br />
là – j’ai surtout utilisé les périodes favorables.<br />
Et quelles sont – pour une faune<br />
aussi sauvage, aussi fuyante que celle des<br />
montagnes et des Alpes en particuliers<br />
– quelles sont les périodes favorables ?<br />
Ce sont les périodes où les bêtes sont<br />
distraites… et sont distraites pourquoi ?<br />
( Je vous vois sourire, vous avez deviné ! )<br />
Tout simplement par l’amour, autrement<br />
dit par l’instinct de repro<strong>du</strong>ction ».<br />
Pendant près de trente ans, des<br />
spectateurs de Suisse, de France,<br />
<strong>du</strong> Luxembourg, de Belgique et <strong>du</strong><br />
Canada le verront sans se lasser. On<br />
estime qu’un million de personnes ont<br />
vu Le Monde sauvage de l’Alpe !
A tant rouler sa bosse, <strong>René</strong>-<strong>Pierre</strong> est devenu homme <strong>du</strong> monde. Il n’a rien<br />
per<strong>du</strong>, dans ses allures de patriarche barbu et d’enfant malicieux, de sa voix<br />
tonitruante, de ses jugements tranchés, de ses professions de foi sonorement<br />
pensées, mais il trousse l’anecdote, il sait caresser ou intriguer un public.<br />
Jean Bühler, « <strong>René</strong>-<strong>Pierre</strong> <strong>Bille</strong>, l’infatigable homme des Alpes », in L’Illustré<br />
Quand ses tournées lui en laissent le<br />
temps, <strong>René</strong>-<strong>Pierre</strong> <strong>Bille</strong> continue à filmer<br />
et à améliorer son film. De nouvelles<br />
séquences sont intro<strong>du</strong>ites, remplaçant<br />
d’autres qu’il trouvait moins bonnes.<br />
Le commentaire s’adapte lui aussi<br />
constamment. Dans un document pour un<br />
commentateur de langue allemande, <strong>Bille</strong><br />
donne ces conseils : « Pour la chrysalide,<br />
je te conseille de taper ton texte<br />
allemand et simplement de le lire, lors de<br />
la séance, grâce à une lampe de poche,<br />
tu n’as qu’à parler tranquillement, sans<br />
t’arrêter et ça doit coller avec les images.<br />
Pour le reste et surtout pour l’automne,<br />
il n’y a pas de grandes difficultés et les<br />
images parlent d’elles-mêmes, c’est-àdire<br />
tu verras tout de suite où tu en es ».<br />
Le Monde sauvage de l’Alpe est l’œuvre<br />
de toute une vie, ainsi que le rappelle<br />
le journaliste Jean Bühler dans l’Illustré.<br />
« Parmi les cinéastes abonnés aux<br />
tournées de « Connaissance <strong>du</strong> monde », il<br />
est un cas unique. Les autres organisent<br />
une expédition, enregistrent, développent<br />
et montent leur bande, la présentent<br />
de Paris à Bruxelles, voire Munich, de<br />
Zurich à Bordeaux, puis repartent l’année<br />
suivante et « font » un autre sujet. Pour<br />
<strong>René</strong>-<strong>Pierre</strong>, c’est différent. Il est l’homme<br />
d’un lieu : les Alpes. Il a une vocation :<br />
épouser la nature en se laissant couler<br />
au fond d’elle ; et l’exprimer <strong>du</strong> dedans,<br />
ne dire et ne montrer rien qui n’ait été<br />
profondément vécu, senti, éprouvé,<br />
contrôlé. Dix fois, il reviendra au geai<br />
parce qu’une nuance <strong>du</strong> cou ou de l’aile<br />
ne le satisfait pas. Il ira se bâtir un abri<br />
au-dessus de Vallorbe pour mieux saisir la<br />
danse nuptiale <strong>du</strong> grand tétras. […] D’où<br />
un film éternellement le même et toujours<br />
enrichi par quelque appoint où les astuces<br />
techniques, les déclenchements automatiques<br />
<strong>du</strong> flash dans la nuit, les jeux<br />
de diaphragmes et de vitesses de pose<br />
permettent d’approcher toujours mieux les<br />
mystères de la vie animale et les dimensions<br />
de la patrie de <strong>Bille</strong> : Les Alpes. »
« C’est une curieuse histoire et un merveilleux<br />
documentaire en couleurs que<br />
vous contera prochainement <strong>René</strong>-<strong>Pierre</strong><br />
<strong>Bille</strong> le braconnier montagnard devenu<br />
chasseur d’images… Comme naguère le<br />
canadien Crew Owl dans sa cabane abandonnée,<br />
il passe solitaire la plus grande<br />
partie de son temps et comme lui, il apporte<br />
le témoignage <strong>du</strong> chasseur repenti.<br />
Nulle sensiblerie d’ailleurs dans cette<br />
résolution prise un jour devant une<br />
marmotte agonisante de déposer à jamais<br />
le fusil. Nul abandon non plus ! Le Monde<br />
sauvage de l’Alpe suffit à prouver que le<br />
chasseur d’images conserve pour un plaisir<br />
accru le meilleur de la chasse. Cette<br />
recherche passionnée des pistes dans la<br />
neige, ces patients travaux d’approche,<br />
cette observation tour à tour admirative,<br />
amusée ou attendrie des hardes, des<br />
Remerciements à<br />
Thérèse <strong>Bille</strong>, Jean-Claude Praz, Bertrand<br />
Posse, Mathieu Emonet, Lucien Dubuis et<br />
Alexandre Mejenski qui ont permis la réalisation<br />
de ce DVD et <strong>du</strong> livret qui l’accompagne, ainsi<br />
qu’à Memoriav pour la restauration des films,<br />
au Service de la Culture de l’<strong>Etat</strong> <strong>du</strong> <strong>Valais</strong>,<br />
à Interreg IV ( projet Archivalp ) et à la Loterie<br />
romande pour leur soutien.<br />
couples, des nichées, ces sportives randonnées,<br />
ce contact sans cesse renoué<br />
avec la nature à l’état pur, ne sont-ils<br />
pas très souvent les mobiles premiers<br />
<strong>du</strong> chasseur tout court, pour qui l’arme<br />
n’est au fond qu’un alibi et un maintien ?<br />
Il a fallu quatre années de travail à<br />
<strong>Bille</strong> pour nous offrir le plus riche des<br />
bestiaires alpestres ; des florilèges<br />
aussi, car ce braconnier se double d’un<br />
poète, il ne se contente pas des beaux<br />
panoramas pour cartes postales ou des<br />
silhouettes zoologiques pour collections<br />
édifiantes. Il chante le rythme des<br />
saisons, des mues et des migrations,<br />
des sauts et des envols des <strong>du</strong>els et<br />
des amours, c’est tout le cycle de l’alpe<br />
que boucle pour nous son splendide<br />
documentaire et, fait absolument exceptionnel,<br />
ce magicien ne triche pas ».<br />
Le fonds <strong>René</strong>-<strong>Pierre</strong> <strong>Bille</strong> est conservé à la<br />
Médiathèque <strong>Valais</strong> – Martigny. Il est composé<br />
de films, de photographies, d’appareils,<br />
de bandes-son et de documentation. Plus de<br />
renseignements : www.mediatheque.ch<br />
Réalisation et montage <strong>René</strong>-<strong>Pierre</strong> <strong>Bille</strong><br />
Montage final Anne Zen-Ruffinen<br />
Authoring Nicolas Brun<br />
Conception DVD et livret Anne Michellod et Geraldine Roels<br />
© 2010 Médiathèque <strong>Valais</strong> – Martigny www.mediatheque.ch<br />
<strong>Pierre</strong> Milly, pour Connaissance <strong>du</strong> Monde<br />
www.bernardmoix.ch