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encore, ce critique estimait, plus loin dans son article,
la musique instrumentale de Schubert plus
élevée que ses Lieder ! « …Considérant les qualités
et les défauts de ces chants, nous avons toujours
supposé que M. Schubert serait encore plus heureux
dans le genre qui n’a pas d’autres lois que celles de
toute bonne musique tout court – dans la musique
instrumentale, surtout dans ses formes plus vastes
et plus libres. Notre supposition se confirme entièrement
avec cette Première Grande Sonate. Celle-ci
est d’une grande richesse d’inventions mélodiques
et harmoniques vraiment nouvelles et originales ;
d’une richesse d’expression égale et encore plus diversifiée
; ingénieuse et persévérante dans la réalisation,
notamment dans la conduite de l’ensemble des
voix, et pourtant d’un bout à l’autre de la vraie musique
pour pianoforte… ». Quel bonheur de lire ce
commentaire, comparé aux absurdités qu’on a
écrites jusqu’à nos jours sur la prétendue incapacité
de Schubert dans le domaine de la musique
instrumentale !
Déjà le thème principal du premier mouvement
est d’une expressivité et d’une profondeur particulières.
il se présente sous forme de dialogue (en quoi
il ressemble aux deux Sonates précédentes) : à un
motif chantant, à l’unisson, au rythme finement
profilé, “répond” une phrase d’accords, d’abord avec
une répétition “douce” des sons, ensuite, après le
deuxième appel, avec un cri douloureux – comment
interpréter autrement ce crescendo aspirant vers le
haut, aboutissant à une dissonance ? L’ensemble a
le caractère d’un pressentiment sombre. Dans son
excellente biographie de Schubert, Brigitte Massin
parle d’un « thème d’ensevelissement ». La suite est
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une marche harmonique assez longue sur la dominante
mi qui se décharge dans un thème de marche
martelé de manière inexorable. Vu sous l’aspect de
la forme, on pourrait appeler ce nouveau motif un
« groupe de transition ». Mais en vérité il s’agit déjà
de la deuxième idée dont le staccato s’oppose, dans
un contraste extrême, à la « douceur » du thème initial.
Et là où l’on attendrait, après la modulation, le
vrai second thème, apparaît à nouveau le thème
initial en Ut mineur, variante en mineur de la tonalité
relative ! Le thème de l’épilogue, en Ut majeur,
oppose directement des fragments des deux thèmes
en entraînant le premier dans le rythme de marche
du second. impossible de décrire ici tous les
“voyages” du thème principal et son éclatement final
(exceptionnellement selon les principes de
Beethoven) dans le développement, qui ne quitte
pas le mode mineur. Après une longue évolution,
elle s’interrompt sur la dominante de Fa dièse mineur.
Ce qui suit maintenant ressemble à une continuation
du développement (= partie des conflits) :
après un silence apparaît le thème principal, en
imitation canonique, dans le plus tendre ppp, suivi
de fragments en Fa dièse mineur, La mineur et sur
la dominante de Ut mineur (sol à la basse). De là,
une modulation à la manière du Voyage d’hiver nous
conduit, dans une gradation constante, en passant
par si bémol et ut dièse vers mi pour arriver une
nouvelle fois au deuxième motif, « motif de
marche ». Développement et réexposition ont entièrement
fusionné (rétrospectivement, on pourrait
cependant considérer la courte apparition du thème
principal en La mineur, citée tout à l’heure, comme
le début de la réexposition). Mais ce qui a l’air d’un