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tive, incapab<strong>le</strong> qu’il était d’écrire une vraie sonate<br />

!). Cet Andante intime et poétique est d’une<br />

tel<strong>le</strong> beauté poignante, empreinte d’humilité, que<br />

toute analyse semb<strong>le</strong>rait superflue. Là éga<strong>le</strong>ment,<br />

Schubert, tout en préservant tota<strong>le</strong>ment son identité,<br />

renoue avec <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>urs modè<strong>le</strong>s mozartiens<br />

: <strong>le</strong> même rythme fondamental, qui, avec une<br />

accentuation incorrecte, pourrait être perçu<br />

comme une mesure à 6/8, se trouve déjà dans<br />

l’Andante de la Sonate en Ut majeur de Mozart, K<br />

330, joyau, lui aussi, de la littérature pianistique.<br />

Ensuite, <strong>le</strong> troisième mouvement est dominé<br />

par une mesure de caractère dansant à 6/8, authentiquement<br />

mozartienne, à ceci près que<br />

Schubert modifie <strong>le</strong> rythme usuel de sicilienne ou<br />

de gigue d’une manière toute particulière et, à ma<br />

connaissance, sans précédent. Le deuxième<br />

thème “corrige” ce “faux” rythme de gigue et en<br />

fait…une valse viennoise ! Pour compenser cette<br />

frivolité, <strong>le</strong> développement s’en tient à une stricte<br />

polyphonie en imitations. La réexposition débute<br />

– semblab<strong>le</strong> en cela à la Sonata Faci<strong>le</strong>, K<br />

545, de Mozart – à la sous-dominante en lieu et<br />

place de la tonique. « Commodité de composition<br />

» diront volontiers certains commentateurs :<br />

il est bien connu, en effet, que dans ces cas, il<br />

suffit de transposer simp<strong>le</strong>ment note pour note<br />

afin de conclure sans difficulté dans la tonalité<br />

principa<strong>le</strong>. Mais ici, Schubert n’a pas cédé à une<br />

tel<strong>le</strong> facilité : une intrusion soudaine de Fa majeur<br />

remet en question toute cette commodité,<br />

produit de nouveaux développements harmoniques<br />

et aboutit enfin à une conclusion tona<strong>le</strong>ment<br />

satisfaisante.<br />

88<br />

∆<br />

Sonate n. 13 en La mineur, opus posthume 143,<br />

D 784<br />

Une sonate ? Bien plus qu’une sonate : un drame<br />

psychologique, la représentation d’une tragédie.<br />

Rarement musique trouva une expression aussi directe<br />

et pour ainsi dire aussi peu sophistiquée. Le<br />

premier mouvement semb<strong>le</strong> être assemblé par des<br />

blocs et constitué, en majeure partie, de motifs<br />

d’une ou deux mesures, fréquemment séparés par<br />

des pauses, des sanglots s’amplifiant pour aboutir à<br />

des cris de dou<strong>le</strong>ur : l’âme est dépouillée, mise à nu.<br />

Seul Moussorgsky, des générations après, a été capab<strong>le</strong><br />

d’exprimer semblab<strong>le</strong> chose. C’est grâce aux<br />

indications d’Edwin Fischer que nous connaissons<br />

la parenté de cette sonate avec <strong>le</strong> Lied Der Zwerg (“Le<br />

nain”), D 771, composé à la même époque, alors que<br />

Schubert était chez lui, malade et alité. De prime<br />

abord, ce Lied semb<strong>le</strong> posséder une structure toute<br />

différente, cependant à <strong>le</strong> considérer (et à l’écouter)<br />

de plus près, nous nous apercevons qu’il repose<br />

comme ce premier mouvement de la sonate, sur un<br />

motif rythmique obsessionnel et constamment répété,<br />

composé dans la tonalité “sombre” de La mineur<br />

: « Et il p<strong>le</strong>ure, p<strong>le</strong>ure comme si <strong>le</strong> chagrin devait<br />

rapidement <strong>le</strong> rendre aveug<strong>le</strong>… ». Mais ensuite,<br />

dans ce mouvement de la Sonate – à la différence du<br />

Lied – se produit un mirac<strong>le</strong> : sans transition, s’élève<br />

de la dépression la plus profonde, un « motif solide<br />

comme un roc » dans la tonalité de Mi majeur, fortissimo<br />

et pour <strong>le</strong>quel je ne trouve d’autres paro<strong>le</strong>s<br />

que « non confundar in æternum ! » ou encore cel<strong>le</strong>s<br />

de Martin Luther King « we shall overcome… ». Et

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