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∆<br />
Sonate n. 12 en La majeur, opus posthume 120,<br />
D 664<br />
Selon <strong>le</strong>s dires de certains amis, cette Sonate<br />
aurait été composée en 1819, à l’occasion d’un séjour<br />
de Schubert à Steyr. Cette date est parfaitement<br />
plausib<strong>le</strong> : à juste titre, cette œuvre peut être<br />
considérée comme <strong>le</strong> sommet de la première période<br />
créatrice de Schubert, durant laquel<strong>le</strong> – abstraction<br />
faite de « l’évasion vers des sphères romantiques<br />
», intervenue en 1818 – il suivit plus ou<br />
moins <strong>le</strong>s principes stylistiques de Haydn et de<br />
Mozart, tout en <strong>le</strong>ur insufflant un esprit schubertien<br />
: « du vin nouveau dans des outres anciennes<br />
». La Sonate en La majeur constitue<br />
la clé de voûte et <strong>le</strong> sommet de cette évolution ;<br />
nul<strong>le</strong> part ail<strong>le</strong>urs, pas même dans la “mozartienne”<br />
Cinquième Symphonie de Schubert, la<br />
symbiose entre ces deux univers n’a été réalisée de<br />
manière aussi convaincante. Avec des traits d’une<br />
concision mozartienne, cette Sonate dépeint un<br />
charmant paysage printanier schubertien.<br />
A el<strong>le</strong> seu<strong>le</strong>, l’idée de faire débuter la Sonate par<br />
un thème cantabi<strong>le</strong> est mozartienne. De tels<br />
thèmes chantants et se terminant sur la tonique se<br />
retrouvent chez Mozart, au début des Sonates en<br />
Fa majeur, K 332, et en Si bémol majeur, K 333.<br />
Cependant Schubert va encore plus loin que<br />
Mozart, en débutant par une forme Lied en trois<br />
parties, fermée sur el<strong>le</strong>-même, forme apparemment<br />
contraire à tous <strong>le</strong>s principes d’élaboration<br />
d’un premier mouvement de sonate. Un thème de<br />
sonate devait, en effet, être non stabilisé, c’est-à-<br />
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dire encore ouvert à son début, pour permettre<br />
ensuite un développement plus amp<strong>le</strong>. Bien entendu,<br />
Schubert n’ignorait pas cette règ<strong>le</strong> ; déjà<br />
dans ses premières sonates, comme cel<strong>le</strong> en La<br />
mineur, D 537, il en avait tenu compte. Dans <strong>le</strong><br />
« Lied » d’introduction de la Sonate en La majeur,<br />
Schubert a glissé, de manière tout à fait<br />
dissimulée, un élément déstabilisateur : la partie B<br />
est “trop courte” de quatre mesures, de sorte que<br />
<strong>le</strong> thème principal est constitué de 8 + 4 + 8 mesures.<br />
Si <strong>le</strong> thème avait comporté une partie centra<strong>le</strong><br />
norma<strong>le</strong> à huit mesures, c’eût été l’échec dès<br />
<strong>le</strong> départ. Mais en procédant ainsi, Schubert passe<br />
aisément, au moyen d’une gamme en La majeur<br />
(exécutée dans <strong>le</strong> développement en octaves vigoureuses)<br />
au deuxième groupe thématique, qui<br />
jusqu’à la fin de l’exposition, répète trois fois mi<br />
sur <strong>le</strong> “rythme Wanderer” : long-bref-bref-long, et<br />
dont <strong>le</strong> dérou<strong>le</strong>ment se poursuit sous un éclairage<br />
harmonique constamment renouvelé. A la fin du<br />
premier mouvement, <strong>le</strong> beau thème du début est<br />
encore cité une dernière fois dans <strong>le</strong> grave, tel un<br />
adieu, pour se terminer par une inf<strong>le</strong>xion “mozartienne”<br />
: si-la.<br />
Génia<strong>le</strong> est l’idée d’avoir fait débuter <strong>le</strong> deuxième<br />
mouvement par la même inf<strong>le</strong>xion si-la, une<br />
oc-tave au-dessus des notes fina<strong>le</strong>s du premier<br />
mouvement. Et comme si cela ne suffisait pas : <strong>le</strong><br />
troisième mouvement éga<strong>le</strong>ment comporte en son<br />
début <strong>le</strong>s mêmes notes si-la, mais cette fois-ci une<br />
octave au-dessus du deuxième mouvement (et dire<br />
que certains musicologues, pourtant de renom,<br />
déclaraient, il n’y a pas si longtemps encore, que<br />
Schubert composait de manière purement intui-