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On <strong>au</strong>rait dit qu’il parlait comme dans un rêve.<br />
Ulrika rentra la tête dans les ép<strong>au</strong>les. L’homme allait-il la démasquer ? Disposait-il du pouvoir de<br />
l’abattre là, d’un simple geste ? Il ressemblait plutôt à une sorte de somnambule, mais on ne savait jamais<br />
avec les prêtres.<br />
—Non, j’ai une question plus prosaïque, mon père, répondit Holmann en allant le rejoindre et en tirant<br />
le mor<strong>ce</strong><strong>au</strong> de tissu de sa <strong>ce</strong>inture. Nous avons trouvé <strong>ce</strong>ci durant l’une de nos enquêtes <strong>au</strong> sujet des<br />
vampires. Avez-vous entendu parler d’une lutte entre <strong>ce</strong>rtains de vos frères et <strong>ce</strong>s monstres, ou de l’un<br />
d’eux qui <strong>au</strong>rait pu être blessé dans l’accomplissement de son ministère ?<br />
Le prêtre ouvrit de grands yeux et il sembla soudain bien plus éveillé. Il tendit la main et prit le<br />
mor<strong>ce</strong><strong>au</strong> de tissu pour l’examiner de plus près.<br />
—Mais c’est trempé de sang ! dit-il.<br />
—Tout à fait, mon père, répondit Holmann avec patien<strong>ce</strong>. Et je suis à la poursuite du monstre<br />
responsable de <strong>ce</strong>la. Avez-vous entendu quoi que <strong>ce</strong> soit à <strong>ce</strong> sujet ? Celui qui portait <strong>ce</strong> vêtement<br />
pourrait-il être de votre temple ?<br />
Le prêtre secoua la tête.<br />
—Je n’ai rien entendu de tel, et <strong>au</strong>cun de nos frères n’est porté manquant. Mais <strong>ce</strong>ci…<br />
Il fit courir ses doigts sur le motif brodé.<br />
—Ce n’est pas notre marque. Nous sommes un temple d’<strong>au</strong>gure, notre symbole est le corbe<strong>au</strong>, voyezvous<br />
? Il désigna d’un doigt sa propre poitrine sur laquelle avait été cousue une représentation d’oise<strong>au</strong><br />
noir. Cette rose, c’est le symbole du Jardin de Morr. Nos frères qui tiennent le cimetière la portent.<br />
Le templier Holmann pencha la tête.<br />
—Dans <strong>ce</strong> cas, c’est là que nous allons continuer notre enquête, mon père, dit-il. Nous n’allons pas<br />
vous déranger davantage.<br />
Il reprit le mor<strong>ce</strong><strong>au</strong> de tissu et repartit vers les imposantes portes, Ulrika sur ses talons. Elle poussa un<br />
long soupir lorsqu’elle en franchit le pas et se retrouva dans l’air frais de la nuit.<br />
Ulrika trouva très intéressant de marcher en compagnie d’un chasseur de sorcières. Elle pouvait être une<br />
créature de la nuit, un ennemi héréditaire de toute l’humanité, c’était pourtant d’Holmann dont les gens<br />
semblaient avoir peur. Ils traversèrent le Neuestadt en route vers le Jardin de Morr, les agitateurs de<br />
foule des coins de rue <strong>ce</strong>ssaient leurs diatribes dès qu’ils le voyaient arriver et disparaissaient dans la<br />
première allée. Les étudiants protestataires s’échappaient vers leur collège, les filles de joie et les<br />
mendiants trouvaient soudainement qu’ils avaient <strong>au</strong>tre chose à faire. Même le bourgeois le plus<br />
respectable pâlissait et semblait ne plus savoir où regarder lorsqu’Holmann le croisait.<br />
Ulrika dut dissimiler son sourire à chaque nouve<strong>au</strong> mouvement de fuite. Ce n’était pas vraiment que les<br />
chasseurs de sorcières suspectaient tout le monde, c’était plutôt que tout le monde se sentait coupable<br />
d’une chose ou d’une <strong>au</strong>tre quand ils en croisaient un. Rien d’étonnant à <strong>ce</strong> que <strong>ce</strong>s individus soient le<br />
plus souvent de vieux garçons solitaires. Qui pourrait se détendre assez pour se lier d’amitié avec l’un<br />
d’entre eux ? Sans parler d’une relation plus intime.<br />
Une seule personne osa les approcher, une femme d’âge moyen portant un tablier et une coiffe de<br />
cuisinière et qui hurlait en agitant les bras.<br />
—Chasseur de sorcières ! cria-t-elle. Trouvez mon fils ! Les vampires l’ont pris ! Vous devez le<br />
s<strong>au</strong>ver !<br />
Le cœur d’Ulrika bondit d’espoir lorsqu’Holmann se tourna fa<strong>ce</strong> à la femme. Le monstre avait-il frappé<br />
à nouve<strong>au</strong> ? Parviendraient-ils à l’attraper ? Ce serait un sacré coup de chan<strong>ce</strong>.<br />
—Quand <strong>ce</strong>la s’est-il passé, ma bonne dame ? lui demanda le templier. Avez-vous vu <strong>ce</strong>s monstres ?