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ils donc aucun amour propre ? Étaient-ils donc si faibles ? Ou bien était-ce le fait de donner autant de
leur sang qui les affaiblissait ?
Son esprit retourna vers ces semaines passées en compagnie de Krieger, durant leur voyage de Kislev
jusqu’en Sylvanie. Elle aussi avait été faible. Elle aussi l’avait laissé se nourrir. Elle aussi avait été
impatiente que cela recommence, de se sentir plonger dans la douceur de l’impuissance.
Malheureusement, savoir qu’elle n’avait pas valu mieux que cette fille ne calmait pas son mépris pour
elle, ni celui qu’elle ressentait envers elle-même.
—Non, Imma, lui dit-elle finalement. C’est trop tôt. Tu dois retrouver tes forces. J’attends autre chose
de toi.
—Tout ce que vous voudrez, maîtresse. Il vous suffit de le dire.
Ulrika serra les dents et se rassit, hors d’atteinte cette fois-ci.
—Je voudrais que tu réfléchisses, c’est tout. La comtesse Gabriella t’a déjà demandé si Maîtresse
Alfina avait reçu un courrier ou des visiteurs avant d’être assassinée, et tu as répondu que non. Je
voudrais que tu essayes encore de te souvenir. Es-tu certaine de cela ? Se comportait-elle d’une manière
étrange durant les derniers jours ? A-t-elle fait quelque chose d’inhabituel ?
La servante sembla déçue que la conversation soit ainsi détournée de préoccupations plus intimes, mais
elle chercha docilement. Elle croisa les mains sur sa poitrine et s’allongea pour regarder le plafond.
Elle finit pourtant par secouer la tête.
—Je ne me souviens d’aucun visiteur ni d’aucun message, maîtresse, mais il est possible qu’elle en ait
reçu en mon absence. Je lui apportais généralement sa correspondance le soir, à son réveil, mais il
arrivait parfois que je sois sortie ou occupée à nettoyer ses affaires. Le valet devrait pouvoir vous
renseigner, dit-elle avec un geste d’épaules. Et comme je l’ai déjà dit, elle s’était beaucoup nourrie sur
moi cette nuit-là, à tel point que je ne savais pas qu’elle était sortie quand je me suis réveillée. Je
suppose que ce détail pourrait être inhabituel. Elle ne se servait généralement que très peu, car elle était
très ancienne et n’avait pas besoin de plus.
Elle soupira et supplia à nouveau Ulrika du regard.
—Parfois, il se passait des jours entre chaque repas.
Ulrika toussa.
—Penses-tu qu’elle se serait nourrie autant pour que tu ne t’aperçoives pas de son départ ?
Imma fronça les sourcils.
—C’est possible, maîtresse. Si elle désobéissait aux ordres de Dame Hermione, alors il est probable
qu’elle aurait préféré que je ne le sache pas. Je ne l’aurais jamais trahie en allant le répéter, mais les
dames sont parfois suspicieuses et elles n’aiment pas prendre de risques en ce qui concerne leurs secrets.
Ulrika hocha la tête, perdue dans ses pensées. Ainsi, Alfina serait sortie de son propre chef et aurait
tenté de couvrir ses propres traces. Mais pourquoi ? Qu’est-ce qui avait bien pu l’attirer dehors ? Elle
devait avoir reçu une sorte de message ou se trouver dans l’obligation d’agir ainsi. Avait-elle un amant
secret ? Avait-elle comploté avec une autre lignée de vampires ?
Ulrika se retourna vers Imma.
—Et où Maîtresse Alfina gardait-elle son courrier personnel ? Ces choses qu’elle ne voulait pas
laisser voir, par toi ou par messire Aldrich ?
La servante hésita.
—Elle est morte, Imma, lui dit Ulrika avec une pointe d’impatience. Elle n’a plus besoin de ces petits
secrets.
Imma acquiesça, puis elle désigna une armoire ornementée près du lit d’Alfina.
—Il y a une commande cachée. C’est fermé par la magie afin que seule Dame Alfina puisse l’ouvrir.