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—C’est exact, Hermione, intervint Dagmar avec timidité. Mathilda irait-elle jusqu’à prendre ce
risque ?
—Les chasseurs ne cherchent pas parmi les pauvres ! s’écria Hermione. Ils n’y cherchent pas les
nôtres, en tout cas ! Ne voyez-vous pas le but qu’elle poursuit ? Mathilda tue Rosamund et Karlotta, et les
chasseurs de sorcières font le reste du travail pour elle. Bientôt, toutes ses riches sœurs établies au nord
du fleuve auront été découvertes et tuées, et elle restera la dernière Lahmiane à Nuln. La reine n’aura
d’autre choix que de la désigner comme chef de la ville ! Elle frissonna de dégoût. Elle viendra vivre
chez moi ! Elle dormira dans mes draps ! Elle mettra mes robes !
—Quelle horreur, commenta la comtesse Gabriella avec un léger sourire.
Hermione enroula le mouchoir avec les touffes de poils à l’intérieur, puis remit le tout dans le repli de
sa manche.
—Je n’attendrai pas qu’elle attaque, dit-elle en levant le menton. Nous devons frapper avant elle. Nous
allons chez elle cette nuit, tous ensemble, et la tuerons dans son repaire, avec toute sa clique barbare.
Dagmar ouvrit de grands yeux et recula du clavecin.
—Vous voulez que nous nous battions ? Que nous la tuions ?
—N’allez-vous pas vous défendre, ma sœur ? ricana Hermione. Vous l’avez déjà fait, non ?
—Plus depuis des siècles, répondit Dagmar. Plus depuis ma renaissance. Depuis, j’ai toujours utilisé…
d’autres armes pour gagner mes batailles.
Hermione toisa la silhouette replète de Dagmar.
—De telles armes ne fonctionneront pas contre Mathilda, j’en ai peur, lui dit-elle. Il vous faudra
aiguiser vos griffes.
Elle se tourna ensuite vers sa gouvernante qui patientait discrètement près de la porte.
—Otilia, faites approcher les carrosses. Nous sortons.
—S’il vous plaît, Hermione, tenta Gabriella alors qu’Otilia sortait après une révérence. Ne nous
précipitons pas. La reine n’appréciera pas. Ses lois ont toujours été d’interdire les guerres entre nous.
—Et Mathilda a brisé cette loi ! rétorqua Hermione.
—Mais ne devrions-nous pas avertir la reine auparavant ? insista Gabriella. Je me sentirais bien mieux
si cette opération recueillait son assentiment.
—Allez-vous laisser une autre d’entre nous se faire assassiner le temps que sa réponse arrive ?
s’emporta Hermione. Non. Je ne vais pas risquer l’existence de mes sœurs. Nous partons. Allez.
Elle pivota sur ses talons et se dirigea vers la porte.
Ulrika vit Gabriella serrer les poings, mais elle se décida finalement à la suivre.
—Dans ce cas, ma sœur, permettez-moi de suggérer que nous l’entendions avant l’exécution. Ne
pourrions-nous pas entendre ce que Mathilda aura à dire pour sa défense avant de prononcer la sentence ?
—Mais oui ! approuva Dagmar, visiblement très heureuse de pouvoir éviter cette confrontation. C’est
ce qu’il faut faire. Entendons-la d’abord !
—L’entendre ? demanda Hermione sans même se retourner. Et pour quelle raison ? Elle ne fera que
mentir, de toute façon !
—Pour que nous puissions dire à notre reine que nous l’avons fait ! répondit Gabriella. Vous savez
aussi bien que moi que même si sa mort est justifiée, nous aurons à répondre à certaines questions. Et je
voudrais être la mieux préparée possible pour y répondre.
Cet argument fit hésiter Hermione. Elle s’arrêta sur le pas de la porte et se retourna vers Gabriella, le
regard soudain rempli de doutes.
—Je n’avais pas pensé à cela. Il y aura une enquête.
La comtesse hocha la tête.