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—Que Ranald me vienne en aide ! bredouilla-t-il. Qui es-tu ? Épargne-nous !<br />
Ulrika éclata de rire puis elle lui arracha le bâton des mains avant de l’attraper par le col et de le<br />
soulever du sol neigeux d’une seule main, malgré un poids qui devait être le double du sien.<br />
Elle montra les crocs.<br />
—Je vais te saigner à blanc !<br />
—Ulrika ! l’appela une voix dans son dos.<br />
Elle se figea et regarda par-dessus son ép<strong>au</strong>le.<br />
La comtesse Gabriella se tenait juste en lisière des arbres et posait sur elle son regard glacé.<br />
—Qu’est-<strong>ce</strong> que je t’ai dit ?<br />
Ulrika, comprenant le déplaisir de la comtesse, baissa la tête, puis regarda <strong>au</strong>tour d’elle. Elle serra les<br />
lèvres d’embarras. Les bandits avaient été littéralement mis en piè<strong>ce</strong>s. Elle n’avait pas tué sans passion,<br />
mais les avait massacrés et s’était apprêtée à boire le sang de <strong>ce</strong>lui qu’elle tenait à bout de bras.<br />
Elle baissa à nouve<strong>au</strong> les yeux.<br />
—Je… je suis désolée, maîtresse, murmura-t-elle, puis elle laissa retomber le chef sur le sol avant de<br />
lui briser le cou.<br />
Elle fit un premier pas hésitant vers la comtesse, le corps de l’homme retomba mollement parmi <strong>ce</strong>ux<br />
de ses camarades morts.<br />
—Je me suis laissée emporter, dit-elle avant de baisser les yeux vers sa robe. Elle était déchirée,<br />
tâchée de boue et de sang. Et j’ai abîmé votre jolie robe, ajouta-t-elle avec la voix d’une petite fille<br />
devant sa mère.<br />
—La robe est le cadet de mes soucis, répondit la comtesse. Comprends-tu pourquoi j’ai hésité à<br />
t’emmener avec moi ? Rester maîtresse de soi dans des circonstan<strong>ce</strong>s calmes et mesurées est une chose,<br />
c’en est une <strong>au</strong>tre lorsqu’on voyage de par le monde. Même pour me défendre, tu dois rester discrète. Si<br />
<strong>ce</strong> massacre s’était déroulé en pleine ville, il y <strong>au</strong>rait eu be<strong>au</strong>coup de témoins. Nous devons étouffer une<br />
crise, pas en provoquer une <strong>au</strong>tre, est-<strong>ce</strong> que tu comprends ?<br />
—Oui, maîtresse, souffla Ulrika, les yeux rivés <strong>au</strong> sol.<br />
Elle en voulait un peu à la comtesse de lui faire <strong>ce</strong>s remontran<strong>ce</strong>s, mais elle ne pouvait pourtant pas<br />
nier qu’elle s’était laissée emporter après avoir promis que <strong>ce</strong>la n’arriverait pas.<br />
—Pardonnez-moi. Cela n’arrivera plus.<br />
—Assure-t’en, en effet.<br />
Rodrik écarta ses chevaliers et posa sur Ulrika un regard dur. Il se tenait le bras droit, un carre<strong>au</strong><br />
d’arbalète y était fiché, juste <strong>au</strong>-dessus de l’ép<strong>au</strong>le.<br />
—Elle <strong>au</strong>rait dû rester dans le carrosse, maîtresse. Nous n’avions besoin d’<strong>au</strong>cune aide.<br />
Gabriella regarda sa blessure.<br />
—En effet, c’est parfaitement clair, répondit-elle.<br />
—En fait, nous <strong>au</strong>rions pu nous en sortir si elle n’avait pas mis le p<strong>au</strong>vre Quentin dans <strong>ce</strong>t état, grogna<br />
le chevalier. À nous tous, nous les <strong>au</strong>rions repoussés.<br />
—Mais je n’en doute pas, mon cher Rodrik, lui dit la comtesse en lui tapotant la joue lorsqu’elle passa<br />
devant lui. Mon champion ne m’a jamais fait déf<strong>au</strong>t.<br />
Rodrik parut tout ragaillardi de <strong>ce</strong> compliment, <strong>ce</strong> qui ne l’empêcha pas de lan<strong>ce</strong>r à Ulrika un regard en<br />
coin lorsqu’elle suivit la comtesse dans le carrosse.