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—En arrière ! lui cria-t-elle. Vite !
Elle ouvrit la porte et poussa Ulrika. Le strige s’était remis à avancer et une étrange obscurité
commença à s’étendre tout autour des mains potelées du sorcier et à remplir le boudoir. Rodrik s’élança
au travers en jurant, la louve bondit juste derrière lui, à quelques pouces des coups de griffes du monstre.
Gabriella referma la porte juste devant le strige et fit basculer le verrou. La porte se mit immédiatement
à trembler et à craquer, mais elle tint bon.
—Je me demandais où se trouvait son petit camarade, dit la comtesse en se repliant sans attendre.
Maintenant, je sais.
Après un nouveau craquement, les vrilles d’ombres commencèrent à s’infiltrer tout autour de la porte.
Ulrika regarda autour d’elle à la recherche d’une échappatoire ou de quelque chose qui pourrait les aider.
Ils se trouvaient dans une luxueuse chambre, sans doute celle d’Hermione, avec des fenêtres masquées
par des rideaux sur deux des murs et une paire de grandes portes vitrées qui donnaient sur un balcon sur
sa droite. Un grand lit à baldaquin occupait le mur de gauche, le reste du mobilier était constitué de
chaises, de petites tables et de commodes à tiroirs. Au-dessus, les branches courbes d’un énorme
chandelier se déployaient tels les filaments d’une gigantesque méduse de cristal. Une petite tourelle
circulaire occupait l’un des coins, dans laquelle avait été placée une volière aux barreaux dorés, assez
grande pour contenir un homme. Ulrika soupira tristement quand elle l’aperçut. Si seulement elle avait été
en argent, et assez grande pour y enfermer un monstre.
Un autre craquement et la porte commença à donner de sérieux signes de faiblesse. Les vrilles d’ombre
s’insinuaient toujours plus nombreuses entre les planches.
—Je vais contenir cette obscurité infernale, annonça la comtesse tout en effectuant des gestes de ses
mains. Je vais aussi m’occuper de ce sorcier, mais cela me demandera toute ma concentration. Vous
devrez vous charger du strige.
—Entendu, maîtresse, répondit Ulrika sans quitter la porte des yeux.
—Ne vous inquiétez pas, ajouta Rodrik. J’ai pris sa mesure.
La louve se contenta de grogner et elle se tassa pour bondir.
Puis une vitre fut brisée dans leur dos. Ulrika jeta un coup d’œil par-dessus son épaule, une main
blanche et griffue arrachait un carreau de verre, une autre main en brisa un autre, un pied passa au travers
d’un troisième.
—Qu’est-ce que c’est ? s’alarma Rodrik en se retournant.
La porte vitrée donnant sur le balcon finit par céder et trois silhouettes à moitié nues et déformées
apparurent. Des goules ! D’autres terminaient d’escalader la rambarde du balcon derrière les premières.
—Par les dents et les crocs d’Ursun, jura Ulrika.
Rodrik et la louve se replièrent vers le mur de gauche afin de garder toutes les menaces face à eux.
Ulrika prit Gabriella par le bras et l’entraîna dans la même direction.
—Maîtresse, lui dit-elle. Éloignez-vous du…
La porte finit elle aussi par voler en éclats et l’énorme strige se rua à l’intérieur, entouré par un nuage
d’encre impénétrable. Il avança, des débris de bois tombant de ses épaules pendant que ses serviteurs
tordus pénétraient par les fenêtres brisées et approchaient de toutes parts à travers la chambre.