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sur le jardin éclairé par la lune, sur sa gauche brûlait un feu généreux dans une cheminée de marbre
décorée de sculptures de dragons et de chevaliers. Un escalier en colimaçon montait jusqu’à une galerie
et permettait d’accéder au premier étage.
Les gardes conduisirent Ulrika vers l’âtre devant lequel la comtesse Gabriella et Mathilda étaient
agenouillées, les mains enchaînées dans le dos tout comme elle, et dangereusement proches des flammes.
Devant elles, les regardant de haut, se tenait Dame Hermione, elle agitait de sa main délicate son éventail
de Cathay. Ses gentilshommes formaient un demi-cercle derrière elle, von Zechlin était à sa droite, son
bras gauche entouré de bandages, son visage griffé de partout. Rodrik était à sa gauche, lui aussi portait
quelques bandages. Famke se tenait un peu à l’écart et se rongeait ses ongles minces et bien tenus.
Gabriella lança à Ulrika un regard attristé quand les arbalétriers la firent s’agenouiller près d’elle,
mais elle ne dit rien. C’était Mathilda qui parlait, et pas d’une manière mesurée.
—Mais je suis pas venue pour vous tuer, foutue tarée ! criait-elle. C’est vous qui m’avez invitée à venir
ici ! Votre message disait que vous vouliez parler de paix !
Hermione la gifla avec son éventail refermé.
—Je n’ai rien dit de tel ! Il ne peut y avoir aucune paix entre nous ! Pas maintenant que vous avez tué
Dagmar et les autres !
—Mais c’est pas moi ! s’offusqua Mathilda. Pourquoi j’aurais fait ça ?
—Je croyais que vous aviez dit que c’était moi qui avait tué Dagmar ! intervint Gabriella. Il faudrait
savoir ce que vous dites !
—Vous l’avez fait toutes les deux ! rétorqua Hermione. Vous avez conspiré contre moi depuis le tout
début !
Ulrika n’y tint plus.
—Maîtresses ! cria-t-elle avec une voix qu’elle avait dû utiliser la dernière fois lorsqu’elle avait
commandé une unité de cavalerie de son père. J’ai des preuves que le tueur n’est aucune de nous ! Et
qu’il est en route pour venir ici-même !
Tous les regards se tournèrent vers elle.
—Comment osez-vous interrompre vos supérieures, demoiselle ! siffla Hermione.
—Qui est-ce ? la coupa Gabriella. Quelles sont ces preuves ?
Ulrika promena les yeux sur toute l’assemblée, s’attendant à ce que tout le monde lui crie dessus, mais
même Hermione semblait désireuse de l’écouter.
—Le tueur est un énorme monstre mort-vivant dont le repaire se trouve dans une crypte du Jardin de
Morr dans le district du temple. Son complice, ou maître ou même serviteur, je ne sais pas quelle relation
existe entre eux deux, est un sorcier capable de dissimuler le monstre même à nos yeux. J’ai trouvé le
cercueil de cette bête et les livres du nécromancien dans la crypte.
—Et nous sommes supposées croire cette histoire simplement parce vous venez nous la raconter ?
ricana Hermione. Vous êtes la créature de votre maîtresse, après tout !
—J’ai dit que j’avais des preuves ! cria Ulrika, puis elle continua avant qu’Hermione n’eût le temps de
respirer. Dans le bureau du nécromancien, j’ai trouvé des notes rédigées par un espion. Elle parcourut à
nouveau du regard toutes les personnes présentes. Quelqu’un ici présent qui l’a renseigné sur le moindre
de nos mouvements. Quelqu’un qui savait que Madame Dagmar serait seule dans son carrosse la nuit où
elle a été tuée. Quelqu’un qui savait que Mathilda viendrait même sans être invitée.
Hermione et ses gentilshommes commencèrent à se regarder les uns les autres avec un air suspicieux.
—L’une de ces notes se trouve dans mon gilet, dit Ulrika à Hermione. Je vous la donnerais bien, mais
mes mains sont entravées.
—Je vais vous la chercher, proposa Otilia qui était restée près de la porte.