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vivre dans un lieu consacré. Donc, je suis venu seul.
Ulrika n’entendit même pas la moitié de sa réponse.
—Quelle femme ? lui demanda-t-elle en l’attrapant par l’épaule. Qui lui a désigné La Tête de Loup ?
Holmann se dégagea et recula d’un pas.
—Je ne sais pas, je n’étais pas là.
Ulrika souffla un juron. C’était Hermione ? Qui d’autre cela pouvait-il être ? Et pourtant, comme l’avait
suggéré Gabriella, aurait-elle pu être assez stupide pour s’exposer elle-même en dénonçant ses sœurs ?
Ils continuèrent d’avancer et finirent par atteindre le fond de la cuvette. Seule une bande herbeuse les
séparait des cryptes qui entouraient la fontaine. Ulrika s’arrêta et regarda autour d’elle, puis elle se
précipita à l’arrière de l’un des mausolées, Holmann sur ses talons. Des ronces et des rosiers sauvages
montaient à l’assaut de la structure de pierre, les mousses s’étaient incrustées entre les blocs. Ulrika
tendit l’oreille, mais elle n’entendit rien, que ce soit à l’arrière de la crypte ou à l’avant. Elle contourna
le petit édifice et se retrouva dans une allée à moitié recouverte de végétation et qui courait entre cette
crypte et celle d’à côté. Holmann la suivait toujours de près.
Ils approchèrent de la façade et s’accroupirent pour observer le cercle d’édifices. Tous étaient dans un
état de délabrement avancé, le marbre était fissuré et ébréché, les statues érodées par les intempéries,
leurs traits estompés comme ceux de fantômes, les portes de bois ou de bronze attaquées par la corrosion
et la végétation grimpante. L’une d’elles cependant, directement à l’opposé de leur position par rapport à
la fontaine, était grande ouverte. Son portail s’ouvrait comme la gueule d’un monstre, d’où s’échappait la
puanteur de mort en un nuage nauséeux qui semblait tapisser le fond de la cuvette et s’accrocher à la peau
d’Ulrika comme une couche huileuse.
—Ça vient de là, souffla-t-elle au bord de l’écœurement.
Holmann hocha la tête. Il sortit un mouchoir de sous son manteau et le noua sur son nez et sa bouche,
puis il rechargea ses pistolets et en releva les chiens avant de les remettre dans leurs étuis.
—Prêt ! annonça-t-il finalement.
Ils progressèrent courbés en deux, contournèrent le point d’eau asséché et approchèrent de la gueule
noire. Ulrika ne perçut aucun mouvement à l’intérieur ni aucun battement de cœur, mais un vampire n’en
produisait aucun, de toute façon, et pourrait très bien rester aussi immobile qu’un cadavre s’il le voulait.
Ils se placèrent de part et d’autre du portail et écoutèrent à nouveau. Toujours rien. Ulrika fit signe à
Holmann d’attendre, elle se pencha doucement pour regarder à l’intérieur. La petite pièce était carrée,
pas plus de cinq pas de côté, les murs étaient couverts de plaques de cuivre, chacune portant un nom à
moitié effacé par le temps. Au centre, une volée de marches de marbre s’enfonçait et disparaissait dans le
noir. Elle ne vit aucun signe de goules embusquées, ni aucun vampire, uniquement des feuilles mortes
accumulées dans les coins et un peu de boue dans laquelle se dessinaient des empreintes menant à
l’escalier.
Elle se retourna vers Holmann et lui fit signe de la suivre. Ils approchèrent de l’escalier et regardèrent
en bas. Des relents de décomposition sortaient de là comme la fumée d’une cheminée. Les marches
descendaient en ligne droite et donnaient sur un palier avec une porte ouverte qui paraissait être
directement à l’aplomb du mur arrière du mausolée. Le sol au-delà de la porte renvoyait des ombres
dessinées par les flammes orange d’un feu.
—C’est plus grand sous terre qu’en surface, souffla Holmann.
Ulrika approuva d’un signe de tête, puis elle s’engagea dans l’escalier. Holmann dégaina un pistolet et
la suivit. Arrivée au milieu des marches, Ulrika porta à nouveau ses sens devant elle. Elle percevait
maintenant les goules et la chaleur de leurs cœurs corrompus.
—Cinq ou six, murmura-t-elle. Peut-être plus.