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—Est-ce une manière de remercier quelqu’un qui vient de vous sauver la vie, templier ? lui demanda-telle.
Il la fixait, sa main tremblait.
—Pourquoi me tourmentes-tu de la sorte, monstre ? Pourquoi joues-tu avec moi ? Pourquoi tu ne me
tues pas pour en finir une bonne fois pour toutes ?
Ulrika n’en croyait pas ses oreilles. Elle abaissa son épée.
—Je ne sais pas. C’est en effet ce que je devrais faire et j’ai bien failli vous tuer il y a moins d’une
minute, et puis…Elle ouvrit les bras pour lui montrer les goules mortes. Et puis, j’ai préféré faire ça.
—Pourquoi ? demanda Holmann. Dans quel but ignoble veux-tu me garder en vie ?
—Mais aucun, Herr Holmann, soupira-t-elle. Aucun. Je… je n’arrive tout simplement pas à vous tuer.
Sa bouche se tordit en une petite grimace. Il semble que j’ai de… l’affection pour vous.
—Ne me mens pas, monstre, cria Holmann. Les créatures de la nuit n’éprouvent pas ce genre de
sentiment. Elles n’ont pas de cœur !
—C’est aussi ce que j’ai entendu durant ma vie, répondit Ulrika, autant à son attention que pour ellemême.
Mais je me suis aperçue du contraire maintenant que je suis morte. Cela me ferait-il si mal s’il
n’était pas là ? dit-elle en désignant sa poitrine.
Holmann se mit à rire nerveusement.
—Tu cherches à m’amadouer avec tes belles paroles. Tu ne me feras pas abaisser mon arme.
Ulrika le regarda, le front plissé, une pensée venait de s’imposer à elle.
—Alors pourquoi n’avez-vous pas encore tiré, templier ? lui demanda-t-elle. Les chasseurs de
sorcières sont eux aussi réputés pour ne pas avoir de cœur.
Holmann la regarda et le tremblement dans sa main s’accentua.
—Saloperie ! cria-t-il. Traînée !
Puis, dans un râle qui était tout autant un sanglot, il retourna son pistolet contre sa tempe.
—Non ! cria Ulrika, et elle bondit dans sa direction.
Le pistolet tira à l’instant même où elle lui agrippa le poignet et elle roula au sol avec lui, sans savoir
s’il était mort ou toujours en vie. Elle s’agenouilla près de lui et abaissa les yeux. Son bras était recourbé
sur son visage, sa main tenait mollement le pistolet désormais vide. Elle écarta son bras, puis soupira de
soulagement. Son visage était un peu noirci par la poudre et son sourcil légèrement roussi, mais la balle
semblait l’avoir raté. Il vivait, même s’il ne paraissait pas lui en être reconnaissant.
Il dégagea son bras et roula de côté pour se détourner d’elle.
—Laissez-moi !
—Templier Holmann, dit-elle. Friedrich…
—J’ai tué ma propre famille à cause de ses péchés, sanglota-t-il. Mon père et ma mère ! Et pourtant, je
n’arrive pas à vous tuer. Il se couvrit le visage se ses mains. Je ne mérite pas d’être un templier de
Sigmar. Je ne mérite même pas de vivre.
Ulrika resta là où elle était. Elle aurait voulu le réconforter, mais elle savait que le toucher n’aurait rien
arrangé.
—Et moi non plus, je n’arrive pas à vous tuer, dit-elle doucement. Pourtant, vous m’avez dénoncée,
menacé mes semblables et mis le feu à tout un quartier.
Trois battements de cœurs attirèrent son attention en lisière des cyprès. D’autres goules étaient là. Elle
se leva et ramassa sa rapière.
—Debout, templier Holmann, dit-elle. Il nous reste du travail à faire.
Les goules commencèrent à descendre en couinant et en poussant des petits cris. Holmann leva la tête
en les entendant et grogna, mais il accepta de se lever à son tour.