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Gabriella se pinça les lèvres.<br />
—Allez voir à pied s’il y a des chasseurs de sorcières, puis revenez me dire.<br />
—Très bien, maîtresse.<br />
Elles entendirent Uwe des<strong>ce</strong>ndre de son siège et partir en courant dans la rue. Les mâchoires d’Ulrika<br />
se crispèrent quand elle regarda à nouve<strong>au</strong> en écartant légèrement deux lattes de bois. Des hommes se<br />
tenaient à l’entrée des ateliers et regardaient les bad<strong>au</strong>ds passer en courant vers le tumulte. Jusque-là,<br />
personne n’avait prêté attention <strong>au</strong> carrosse, mais il suffisait qu’un curieux jette un seul coup d’œil et si<br />
elles étaient découvertes avant le retour d’Uwe, c’en serait fini d’elles, elles seraient emportées par le<br />
torrent humain et exposées <strong>au</strong>x rayons mordants du soleil comme dans un océan de flammes.<br />
Les secondes s’écoulèrent. Elles per<strong>ce</strong>vaient des cris et des hurlements ainsi que des rires en<br />
provenan<strong>ce</strong> de Brukestrasse. La foule se livrait à son horrible ouvrage. Ulrika se demanda si Schenk<br />
n’avait <strong>au</strong>cun remords d’avoir ainsi excité la popula<strong>ce</strong>. Le vieil adage des chasseurs de sorcières était<br />
qu’il valait mieux que dix inno<strong>ce</strong>nts meurent plutôt que de laisser un seul serviteur des ténèbres en<br />
liberté. Eh bien, elle était <strong>ce</strong>rtaine que plus de dix inno<strong>ce</strong>nts avaient péri en <strong>ce</strong>tte journée et elle doutait<br />
que Schenk ait pu mettre ses sales mains sur une seule créature de la nuit. Du moins jusqu’à présent.<br />
Les bruits de pas d’Uwe revinrent et le carrosse se balança un peu quand il monta sur le marchepied<br />
pour parler à travers les persiennes.<br />
—Désolé, maîtresse, dit le cocher un peu essoufflé. Quatre chasseurs de sorcières gardent l’entrée du<br />
pont et tout le secteur est parcouru par des agitateurs.<br />
Gabriella hocha dou<strong>ce</strong>ment la tête, le regard sombre.<br />
—Dans <strong>ce</strong> cas, je suppose que nous devons essayer le Pont de Fer, finalement ? Faites demi-tour.<br />
—Entendu, maîtresse.<br />
Elles l’entendirent remonter sur son siège puis faire claquer les rênes des chev<strong>au</strong>x. Le carrosse se remit<br />
en route et commença un arc de <strong>ce</strong>rcle dans la rue étroite, mais alors qu’il se trouvait en travers de la<br />
voie, Ulrika entendit des cris et des rires ainsi que des bruits de bottes arriver vers eux, de la direction<br />
qu’ils voulaient prendre. Elle regarda par la fenêtre. Cinq jeunes hommes portant des tenues d’apprentis<br />
couraient avec des crochets de métal et des fourches dans les mains, rigolant entre eux et jetant des coups<br />
d’œil dans leur dos. Un large individu avec un tablier de forgeron tentait de les rattraper, soufflant<br />
comme un t<strong>au</strong>re<strong>au</strong>.<br />
—Rendez-moi ça ! leur cria-t-il de sa grosse voix. Elles ont pas encore été payées !<br />
Les jeunes gens lui firent des pieds de nez.<br />
—On en a besoin pour la chasse <strong>au</strong>x vampires, cria un blondinet. Tu vas pas nous empêcher de chasser<br />
les vampires ? Si ?<br />
Ils se retournèrent pour trouver le carrosse en travers du chemin.<br />
—Bouge-nous <strong>ce</strong>tte carriole de richard ! cria le blond.<br />
—Ouais, dégage le passage ! ajouta un <strong>au</strong>tre.<br />
—Désolé, les gars, répondit Uwe. La rue est bloquée par là, alors j’essaye de faire demi-tour.<br />
—Ben t’as mal choisi ton moment, que Ranald te m<strong>au</strong>disse !<br />
Ulrika entendit des chocs et le piétinement des chev<strong>au</strong>x alors que les garçons faisaient le tour du<br />
véhicule par l’avant et l’arrière. L’un deux s<strong>au</strong>ta sur le marchepied, riant toujours <strong>au</strong>tant et essaya de<br />
passer ses doigts entre les lattes de la persienne.<br />
—Et qui se cache là-dedans ? demanda-t-il. C’est peut-être très mignon !<br />
Ulrika lui donna un coup sur les doigts et referma la persienne.<br />
—Aïe ! cria le garçon et elle l’entendit s<strong>au</strong>ter du marchepied. Foutue coincée !<br />
—Allez, Dortman, l’appela l’un de ses amis. Ramène-toi.