Vastin LESPY & Paul RAYMOND - IEO París - Free
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156 PEY<br />
juilletl884. Dans le brasier (du feu de<br />
joie) mettons trois pierres: l'une contre le<br />
sort, l'autre contre la male-mort, la troisième<br />
contre les sorcières. — Dans le canton<br />
de Guéret (Creuse), on danse autour<br />
du feu de joie de la Saint-Jean, en jetant<br />
aussi des pierres dans le brasier. Mais<br />
là, c'est dans l'intention de faire venir<br />
les raves grosses comme ces pierres. D'où<br />
l'expression « piler les raves » (pila las<br />
rabas), pour signifier danser. Rev. des l.<br />
rom., juin 1884, p. 271. Qui Peyredanha<br />
Ihebara, Cent escutz y trouhara. D.B.<br />
Qui Peyredagna lèvera, cent écus trouvera<br />
dessous. La promesse du dicton n'a<br />
encouragé personne à tenter de soulever<br />
une énorme pierre qui servait jadis de limite<br />
à la lande du Pont-Long. C'est un bloc<br />
de rocher (poudingue) qui se trouve à<br />
Viellenave (cant. d'ArthezJ depuis le<br />
bouleversement de la période glaciaire.<br />
L'imagination populaire explique autrement<br />
la présence de cette pierre en ce<br />
lieu : le diable la transportait pour la<br />
construction du pont d'Orthez ; il la laissa<br />
choir, et une puissance plus forte que la<br />
sienne l'empêcha de la mouvoir de nouveau.<br />
— Pèyre mabedisse n'amasse pas<br />
mousse . Pierre souvent remuée , de la<br />
mousse n'est velée (couverte), g.meurier,<br />
xvie siècle. — Au sujet de ce proverbe, il<br />
n'est pas sans intérêt de reproduire ici<br />
l'extrait suivant du Temps, 26 nov. 1882:<br />
« Un membre éminent de l'Université, M.<br />
Michel Bréal, nous fait l'honneur de nous<br />
adresser la lettre suivante :<br />
« En lisant<br />
votre Vie à la campagne, je suis resté<br />
chagrin de vous voir employer comme tout<br />
le monde, c'est-à-dire à contre-sens, le<br />
proverbe : Pierre qui roule n'amasse pas<br />
de mousse ! Comme agriculteur, je n'aurais<br />
pas attendu cela de vous. Le but que<br />
poursuivent les pierres serait donc d'amasser<br />
de la mousse? Je crois plutôt que,<br />
pour les gens simples qui ont inventé<br />
nos proverbes, la mousse c'était l'ennemi<br />
; la pierre qui roule échappe à la<br />
mousse, reste luisante et polie. L'homme<br />
qui change souvent de métier, de société<br />
et de séjour, garde l'esprit alerte et brillant.<br />
Tel est, sauf meilleur avis, le sens<br />
que je trouve dans ce dicton. » — La leçon<br />
nous tombait de si haut, le raisonnement<br />
sur lequel elle s'appuyait nous semblait<br />
tellement juste, qu'elle nous a rempli de<br />
chagrin à notre tour et aussi de confu-<br />
sion. Nous nous sommes endormi avec la<br />
mauvaise humeur d'un homme qui sent sa<br />
conscience chargée d'un nouvel « impair.»<br />
Cependant, il faut bien le lui confesser,<br />
PEY<br />
notre contrition et notre honte n'ont pas<br />
tenu contre les réflexions nocturnes, et<br />
nous nous sommes éveillé, décidé à te-<br />
nii-, avec le vidrjum pecus, pour l'interprétation<br />
condamnée du proverbe : Pierre<br />
qui roule n'amasse pas de mousse ; nous<br />
allons essayer de lui exposer pourquoi.<br />
Nous pourrions nous faire un argument<br />
du verbe amasser, puisqu'on n'amasse généralement<br />
que ce qui est précieux, ou<br />
du moins que l'on se propose de conserver<br />
; mais nous n'ignorons pas qu'il a été<br />
employé pour ramasser . La Fontaine a<br />
dit dans sa fable l'Huître et les Plaideurs<br />
: «L'un se baissoit déjà pour amasser<br />
la proie ». Nous ne prétendrons donc<br />
pas que la mousse puisse être considérée<br />
comme un trésor, même pour un simple<br />
caillou; mais doit-on davantage voir en<br />
elle « un ennemi » ? Nous ne le croyons<br />
pas. Elle est l'inéluctable livrée de lâge<br />
mûr dans cette fraction du monde minorai,<br />
du roc superbe qui élève ses dentelures<br />
au niveau des nuages, comme de<br />
l'humble gravier caché entre deux touffes<br />
de gazon : la mousse, c'est la barbe de<br />
la pierre. Si charmantes que soient les<br />
joues fraîches et satinées de l'enfant,<br />
elles n'en aboutiront pas moins au hérissement.<br />
11 y a même parmi nous des avantageux<br />
pour trouver que cette ornemen -<br />
tation poilue ne leur sied pas mah A dire<br />
vrai, les rochers nous semblent autrement<br />
autorisés à s'enorgueillir de leur<br />
parure veloutée de mousse et de lichen :<br />
ils doivent se croire d'autant moins déconsidérés<br />
par cet envahissement, que<br />
les seuls de leur ordre qui en soient<br />
absolument exempts et restent « luisants<br />
et polis », ce sont les galets incessamment<br />
roulés de flots en flots, si tourmentés,<br />
que ce fut probablement leur sort<br />
qui donna lieu à cet autre proverbe : —<br />
» Malheureux comme les pierres.» —Nous<br />
comptons surtout sur des raisons d'ordre<br />
purement moral pour convaincre notre<br />
bienveillant critique. Il nous semble trèsimprobable<br />
que les gens simples qui ont<br />
inventé les proverbes se soient décidés à<br />
préconiser les changements de métier, de<br />
séjour, de société, comme un moyen de<br />
garder l'esprit alerte et brillant, et cela<br />
parce que ce moyen était en contradiction<br />
flagrante avec le trait le plus nettement<br />
caractérisé du tempérament national d'à -<br />
lors, l'humeur casanière. Au temps où<br />
La Bruyère traçait de nos paysans le<br />
pathétique croquis que vous savez, ils<br />
puisaient dans leur horreur de l'émigration<br />
la force de soutenir leur mi-