1 « croyez-vous que Jésus-Christ soit notre sauveur et que par son ...

Mais, quand les vignerons le virent, ils raisonnèrent entre eux, et dirent : voici l'héritier
; tuons-le, afin que l'héritage soit à nous. Et ils le jetèrent hors de la vigne et le
tuèrent.
Matthieu 20 – 2
Comprendre la passion du Christ de manière vétero-testamentaire au regard du juste
souffrant du second Isaïe, c’est continuer le sacrificiel et si la première alliance impliquait le
sang versé purificateur et dispensateur de grâces, la deuxième alliance devra
nécessairement impliquer aussi le versement du sang, non celui imparfait des taureaux ou
autres animaux mais le sacrifice unique, parfait et vraiment efficace cette fois, le sacrifice du
propre fils de Dieu. C’est le thème de l’Epître aux Hébreux (9 : 11) que les exégètes refusent
de reconnaître être de l’apôtre Paul parce qu’il est manifestement non homogène aux autres
épîtres qui globalement relèvent du mythologème du « mourir et renaître » et de la victoire
sur la mort et non de celui de la mort salvatrice. Le « sacrifice » n’est pas mis au premier
plan car c’est la résurrection qui est centrale même s’il faut bien sûr mourir pour pouvoir
renaître, ressusciter et vaincre la mort. « Mort où est ta victoire ! » écrit l’Apôtre pour qui la
mort identifiée au mal est la non-valeur suprême. Il faut mourir au vieil Adam pour renaître en
Christ et le vieil Adam est l’être de chair identifié à la mort (« l’affection de la chair, c’est la
mort » Romains 8 – 6). Nous avons chez saint Paul, le motif de la « mort de la mort »,
l’autodestruction de la négativité, représentée archétypiquement par le symbole du dragon
qui s’auto-dévore, le serpent qui se mort la queue, le monstre ouroboros alchimique. C’est
chez l’apôtre des Gentils le pendant du « laissez les morts enterrer les morts » de l’Evangile
(Matthieu 8:22). La dogmatique chrétienne est un « pachwork » qui, heureusement, n’est pas
uniquement fondée sur la mort salvatrice. Beaucoup d’auteurs chrétiens médiévaux y font
référence que très secondairement. Mais ne pas être sacrificiel ne veut pas dire que l’on soit
anti-sacrificiel car l’interprétation anti-sacrificielle est difficile si on s’en tient à la notion
devenue très moderne du « bouc émissaire », celle de l’acharnement du « tous contre un ».
En fait, le « juste souffrant » du second Isaïe focalise sur lui la haine commune du groupe et
semble donc être un « bouc émissaire » comme nous l’entendons aujourd’hui. Pour nous
modernes, nous nous indignons de ce mécanisme psychique du « refus de la différence »
mais pour la mentalité religieuse vétéro-testamentaire du second Isaïe, même si le « juste
souffrant » focalise sur lui la haine commune des hommes, il n’en demeure pas moins que
son calvaire apaise la colère de Dieu et renouvelle sa protection et ses bienfaits. De ce fait,
le leitmotiv du Psaumes 118 que l’on retrouve dans les Evangiles et dans les Actes des
Apôtres, peut être interprété de manière contraire :
« La pierre qu’ont rejetée ceux qui bâtissent est devenue la principale de l’angle »
De notre avis, il doit être interprété de manière sacrificielle en tant que Psaumes 118 comme
un équivalent du « juste souffrant », un « bouc émissaire » qui focalisant la haine commune
contre lui, prend sur lui les péchés des hommes, souffre et apaise la colère de Dieu.
Néanmoins, il semble qu’il soit interprété de manière anti-sacrificielle par le Christ dans
l’Evangile car il y ajoute le fait que cette pierre est un « scandalon », une « pierre
d’achoppement » et surtout parce qu’il le situe juste après la parabole des vignerons
assassins :
Jésus dit : Que signifie donc ce qui est écrit ( Psaumes 118 - 22 ) :
La pierre qu'ont rejetée ceux qui bâtissaient
Est devenue la principale de l'angle.
Quiconque tombera sur cette pierre s'y brisera,
et celui sur qui elle tombera sera écrasé ”.
Or cette façon de concevoir le « bouc émissaire » est moderne car elle l’explique par une
projection haineuse sur un objet qui résiste et qui fait retour sur le sujet qui s’auto-détruit.
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