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1 « croyez-vous que Jésus-Christ soit notre sauveur et que par son ...

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Pour l’exemple, l’apocryphe Evangile de Thomas ne fait <strong>que</strong> citer des logias du Galiléen<br />

sans aborder la tragédie de sa passion. Or de <strong>notre</strong> point de vue, les <strong>par</strong>oles <strong>et</strong> les gestes<br />

du <strong>Christ</strong> <strong>son</strong>t subversifs concernant la conception de la divinité qui n’est plus une divinité<br />

vengeresse puis<strong>que</strong> qu’il dit <strong>que</strong> Dieu est bon pour les méchants (cf. le Sermon sur la<br />

montagne - Luc 6 : 35)). Par contre, de manière contradictoire, ces mêmes rédacteurs des<br />

Evangiles interprètent sa passion selon le <strong>par</strong>adigme du <strong>«</strong> juste souffrant » du second Isaïe<br />

qui est, en fait, un <strong>«</strong> bouc émissaire » qui, prenant sur lui les péchés des hommes, apaise la<br />

colère de Dieu <strong>et</strong> le rend plus bienveillant. Et c’est à cause de c<strong>et</strong>te référence à ce<br />

<strong>par</strong>adigme du <strong>«</strong> juste souffrant » du second Isaïe <strong>que</strong> les rédacteurs des Evangiles<br />

canoni<strong>que</strong>s n’ont de cesse de s’en référer à l’Ancien Testament en contradiction avec la<br />

<strong>par</strong>abole christi<strong>que</strong> du <strong>«</strong> vin nouveau <strong>que</strong> l’on ne doit pas m<strong>et</strong>tre dans de vieilles outres ».<br />

Certes, le <strong>Christ</strong> se situe à la suite de l’Ancien Testament <strong>et</strong> il ne rem<strong>et</strong> pas en cause le<br />

<strong>«</strong> décalogue » <strong>et</strong> la différenciation de la loi morale propre à la révélation mosaï<strong>que</strong> mais<br />

concernant la conception de la divinité, la rupture est radicale <strong>et</strong> en rej<strong>et</strong>ant la divinité<br />

vengeresse, il rej<strong>et</strong>te radicalement le sacrificiel qui n’a de sens <strong>que</strong> d’apaiser la colère divine.<br />

Concernant c<strong>et</strong>te conception archaï<strong>que</strong> de la divinité punitive, l’Ancien Testament n’est pas<br />

différent des autres religions païennes de la planète. Il n’est donc pas <strong>que</strong>stion de rej<strong>et</strong>er<br />

entièrement tout l’Ancien Testament à la manière de Marcion pour déboucher sur un<br />

manichéisme où le Dieu de l’Ancien Testament serait un Dieu méchant à l’opposé du Dieu<br />

christi<strong>que</strong> qui serait un Dieu de pure bonté. On verra <strong>que</strong> cela est plus complexe <strong>et</strong> <strong>que</strong> la<br />

solution est venue, dans un premier temps, <strong>par</strong> l’entrée en scène du diable comme on le voit<br />

déjà dans le livre de Job <strong>et</strong> dans un second temps dans l’affirmation origénienne <strong>et</strong><br />

augustinienne du mal conçu comme une <strong>«</strong> privatio boni ». De toute façon, les dires du<br />

pasteur huguenot envoyé <strong>par</strong> Genève au chev<strong>et</strong> de la Reine de Navarre comme quoi c’est<br />

<strong>par</strong> la main de Dieu <strong>que</strong> provient toutes nos afflictions <strong>son</strong>t contredits <strong>par</strong> les dires mêmes<br />

du <strong>Christ</strong> qui, au suj<strong>et</strong> de l’épisode de l’effondrement de la tour de Siloé (Luc 13 : 4),<br />

détrompent ses contemporains en leur disant <strong>que</strong> les pauvres bougres écrasés sous les<br />

décombres ne <strong>son</strong>t en rien punis <strong>par</strong> Dieu au regard de soi-disant péchés. Bien entendu, le<br />

<strong>Christ</strong> n’est pas un rationaliste scientiste comme nous le sommes devenus à <strong>notre</strong> épo<strong>que</strong> <strong>et</strong><br />

pour lui, le malheur est le fait du mal <strong>et</strong> s’il est venu pour nous en libérer, ce n’est pas pour<br />

apaiser la violence coléreuse de <strong>son</strong> père qui, pour lui, n’est <strong>que</strong> pure bonté. En fait,<br />

concernant c<strong>et</strong>te conception de la divinité juge <strong>et</strong> punitive, les positions luthérienne <strong>et</strong><br />

calviniste ne <strong>son</strong>t en rien antagonistes à celle de la Contre-réforme <strong>et</strong> du Concile de Trente.<br />

Ce <strong>son</strong>t uni<strong>que</strong>ment les <strong>«</strong> dissenters » de Luther, les Cas<strong>par</strong> Schwenckfeld, Valentin Weigel<br />

ou Sébastien Franck qui s’opposeront ouvertement au sacrificiel <strong>et</strong> à la divinité punitive :<br />

<strong>«</strong> … rien n’est plus absurde [la thèse prédestinationaliste] <strong>que</strong> supposer un Dieu créant<br />

des hommes qu’il voue lui-même à la damnation. Une cruauté <strong>par</strong>eille serait indigne d’un<br />

animal féroce. L’humanité n’est pas une massa perditionis comme l’affirme Luther. […]<br />

Faudrait-il donc adm<strong>et</strong>tre <strong>que</strong> Dieu ait été réellement courroucé ? qu’il fallait un sacrifice<br />

pour apaiser sa colère ? Quelle ineptie ! Dieu est bon, il est l’amour. […] Non, Dieu n’a<br />

jamais eu besoin de c<strong>et</strong>te victime sanglante – c’est nous tout au plus qui en avons eu<br />

besoin. En eff<strong>et</strong>, l’homme pécheur s’imagine <strong>que</strong> Dieu le condamne; à l’homme charnel<br />

(adami<strong>que</strong>), Dieu ap<strong>par</strong>aît – faussement – comme courroucé ; <strong>et</strong> c’est pour détruire c<strong>et</strong>te<br />

erreur, c<strong>et</strong>te illusion de l’homme <strong>que</strong> le <strong>Christ</strong> est venu nous révéler l’amour du Père<br />

céleste, nous enseigner la vraie foi en Dieu …. ».<br />

A. Koyré Mysti<strong>que</strong>s, spirituels <strong>et</strong> alchimistes au XVI e siècle allemand<br />

Or c<strong>et</strong>te conception tridentine de la messe liée au sacrificiel fut au fondement de la<br />

dogmati<strong>que</strong> catholi<strong>que</strong> jusqu’au concile de Vatican II qui, timidement, tenta de s’en dégager<br />

au grand dam des traditionalistes qui reviennent en force à <strong>notre</strong> épo<strong>que</strong>.<br />

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