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1 « croyez-vous que Jésus-Christ soit notre sauveur et que par son ...

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Le <strong>Christ</strong>, psychanalyste ?<br />

Nous venons de voir <strong>que</strong> le <strong>«</strong> sang qui r<strong>et</strong>ombe sur nos têtes » n’a pas chez le <strong>Christ</strong> c<strong>et</strong>te<br />

valeur magi<strong>que</strong> sacrificielle mais qu’au contraire il impli<strong>que</strong> un r<strong>et</strong>our d’une projection<br />

négative, celle du <strong>«</strong> bouc émissaire » au sens moderne du terme. Certes, on pourrait<br />

objecter <strong>que</strong> le terme de projection, terme central de la psychanalyse <strong>que</strong> Ja<strong>que</strong>s Lacan<br />

associe à l’ordre symboli<strong>que</strong> langagier est un terme moderne, donc anachroni<strong>que</strong> <strong>par</strong><br />

rapport à un texte de près de deux millénaires. Pourtant, la métaphore évangéli<strong>que</strong> de la<br />

paille <strong>et</strong> de la poutre traduit simplement <strong>et</strong> indéniablement c<strong>et</strong>te réalité psychi<strong>que</strong> de la<br />

projection. Pour la psychanalyse, il y a un temps narcissi<strong>que</strong> où le jugement moï<strong>que</strong> sur<br />

autrui se r<strong>et</strong>ourne contre le suj<strong>et</strong> lui-même. De là, le <strong>«</strong> <strong>vous</strong> serez jugés du jugement dont<br />

<strong>vous</strong> jugez ». Le <strong>Christ</strong> ne dit pas simplement <strong>que</strong> les pharisiens <strong>son</strong>t hypocrites mais qu’ils<br />

<strong>son</strong>t métaphori<strong>que</strong>ment <strong>«</strong> aveugles », c’est à dire qu’ils construisent à leurs yeux <strong>et</strong> aux yeux<br />

du monde un per<strong>son</strong>nage de respectabilité sociale alors <strong>que</strong> leur <strong>«</strong> intérieur » est tout à<br />

l’opposé. Ce qui ne veut pas dire <strong>que</strong> les pharisiens trompent les autres en étant conscients<br />

eux-mêmes de leur forfaiture. <strong>«</strong> Aveugle » veut dire inconscient :<br />

<strong>«</strong> Pharisien aveugle ! purifie d’abord le dedans de la coupe pour <strong>que</strong> le dehors aussi<br />

devienne pur. […] Vous ressemblez à des sépulcres blanchis : au-dehors ils ont belle<br />

ap<strong>par</strong>ence mais au dedans ils <strong>son</strong>t pleins d’ossements de morts <strong>et</strong> d’impur<strong>et</strong>és de toutes<br />

sortes » (Matthieu 23 : 26) .<br />

C<strong>et</strong>te façon de voir correspond à une topi<strong>que</strong> psychi<strong>que</strong> bien <strong>par</strong>ticulière qui est, en<br />

psychanalyse, la topi<strong>que</strong> junguienne opposant l’âme contaminée <strong>par</strong> l’ombre opposé à la<br />

Per<strong>son</strong>a à la<strong>que</strong>lle s’identifie le moi (cf. la théorisation junguienne in <strong>«</strong> Dialecti<strong>que</strong> du moi <strong>et</strong><br />

de l’inconscient »). C<strong>et</strong>te opposition entre le moi <strong>et</strong> l’inconscient détermine une ambivalence<br />

psychi<strong>que</strong> névroti<strong>que</strong> <strong>que</strong> reconnaît le <strong>Christ</strong> lorsqu’il dit <strong>«</strong> Que votre <strong>par</strong>ole <strong>soit</strong> oui, oui ou<br />

non, non ; ce qu’on y ajoute vient du malin » (Matthieu 5 :37). On sait <strong>que</strong> l’humain peut<br />

vouloir consciemment de la main droite <strong>et</strong> se m<strong>et</strong>tre inconsciemment le bâton dans les roues<br />

de la main gauche. Les Evangiles contiennent la métaphore de la mai<strong>son</strong> construite sur du<br />

sable qui tend à être détruite au profit d’une construction plus solide <strong>et</strong> incorruptible ; ce qui<br />

impli<strong>que</strong> un processus de transformation psychi<strong>que</strong> m<strong>et</strong>tant en acte une force de destruction<br />

nécessaire à la remise en cause du <strong>«</strong> faux-self ». L’ombre négative qui s’oppose à la<br />

Per<strong>son</strong>a est généralement proj<strong>et</strong>ée sur nos nombreuses <strong>«</strong> têtes de turcs » mais il arrive <strong>que</strong><br />

le <strong>«</strong> refoulé proj<strong>et</strong>é » fasse r<strong>et</strong>our, m<strong>et</strong>te le suj<strong>et</strong> dans l’ambivalence <strong>et</strong> lui détruise la<br />

Per<strong>son</strong>a, la mai<strong>son</strong> construite sur du sable. Mais c<strong>et</strong>te négativité n’a de sens <strong>que</strong> pour<br />

perm<strong>et</strong>tre un processus de transformation intérieur qui se symbolisait, à une épo<strong>que</strong> préscientifi<strong>que</strong>,<br />

<strong>par</strong> le processus alchimi<strong>que</strong> comme CG Jung, à la suite de Herbert Silberer, l’a<br />

montré. La recherche du <strong>«</strong> Royaume du Père qui est en nous <strong>et</strong> <strong>par</strong>mi nous » dont <strong>par</strong>le le<br />

<strong>Christ</strong> est un processus intérieur psychologi<strong>que</strong> <strong>et</strong> non une <strong>«</strong> justification » magi<strong>que</strong> du fait<br />

de la foi en <strong>Christ</strong> sachant, néanmoins, <strong>que</strong> celui-ci est une figure intérieure centrale dans ce<br />

processus mysti<strong>que</strong>. Tout enfant masculin attribue au <strong>par</strong>ent de <strong>son</strong> sexe <strong>son</strong> futur être<br />

adulte d’insertion dans le groupe social, c’est le <strong>«</strong> mon papa, il est pompier » mais à <strong>par</strong>tir de<br />

l’adolescence, au moment de l’accession à la fonction génitale, fonction de l’espèce, le suj<strong>et</strong><br />

humain se re-approprie ce per<strong>son</strong>nage d’insertion sociale <strong>que</strong> CG Jung dénomme la<br />

Per<strong>son</strong>a au<strong>que</strong>l le moi s’identifie. C<strong>et</strong> être social adulte avec ses normes <strong>et</strong> ses idéaux se<br />

caractérise <strong>par</strong> trois fonctions : la fonction professionnelle, la fonction matrimoniale <strong>et</strong> la<br />

fonction <strong>par</strong>entale, toutes trois <strong>son</strong>t avec la fonction génitale au service du groupe social<br />

sous l’égide de la figure du maître pour assurer la pérennité du groupe. Néanmoins, c<strong>et</strong>te<br />

structuration adulte n’est pas la <strong>«</strong> fin des fins » de tout développement psychi<strong>que</strong>. L’être<br />

adulte avec sa fonction paternelle attribue à l’enfant un autre être, infantile celui-là<br />

d’ap<strong>par</strong>tenance à une communauté située sur une autre scène <strong>que</strong> la scène sociale. C’est<br />

en cela <strong>que</strong> le <strong>Christ</strong> dit qu’il faut redevenir comme un enfant <strong>et</strong> se faire eunu<strong>que</strong> pour entrer<br />

dans le <strong>«</strong> Royaume du Père » qui est en ce monde mais pas de ce monde.<br />

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