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PLAISIR(S) - CREC

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Centre de Recherche sur l’Espagne Contemporaine 53<br />

personnages. Pour parfaire l'effet et faire en sorte que le public soit totalement acquis à la<br />

cause de Torcuato, celui-ci explique son crime dans l'acte IV, épisode d'autant plus émouvant<br />

qu'il donne à Torcuato la possibilité de découvrir qui est son père. Cette découverte des<br />

origines est récurrente dans la littérature larmoyante qui a très bien su exploiter ce qui était à<br />

même d'ébranler facilement le commun des mortels. Ces vagues de tourment successives vont<br />

aboutir à un pic dans le dernier acte, puisque le public va lui aussi craindre de voir Torcuato<br />

exécuté, qu'il partage le chagrin d'un père torturé et assiste à l'évanouissement de Laura. La<br />

fin est, bien entendu, heureuse puisque Torcuato reçoit le pardon de Roi, lui aussi ému. L'état<br />

de soulagement ressenti par le spectateur est alors forcément jouissif. Il l'est d'autant plus que<br />

le public s'est finalement approprié ce morceau de vie ; sans cette participation, il n'y aurait eu<br />

ni peine ni plaisir. Et toutes les comédies larmoyantes sont construites sur ce schéma,<br />

entraînant le spectateur dans un tourbillon de malheurs qu'il n'a pas le temps d'analyser<br />

véritablement pour en discuter la vraisemblance. D'ailleurs, en dépit des objectifs fixés par la<br />

comédie larmoyante et malgré les progrès dus à la révolution théâtrale, la vraisemblance est<br />

rarement la caractéristique première de ce genre. Le choix de certaines conditions sociales<br />

pour les personnages, de prénoms exotiques parfois, et de retournements incroyables montre<br />

que le plaisir devait également se trouver dans une sorte d'évasion.<br />

Finalement, la réaction émotionnelle ne laisse pas le temps à la réflexion. Happé par les<br />

stratagèmes de la mise en scène, le spectateur s'inquiète, pleure, s'attendrit, admire, compatit,<br />

tremble puis verse enfin des larmes de joie lorsque le cauchemar se termine. Le plaisir est<br />

double : les personnages sont sauvés et puis, après tout, ce n'était qu'une fiction !

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