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La 628-E8 - Octave Mirbeau - Éditions du Boucher

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OCTAVE MIRBEAU<br />

meilleure école où se fortifie leur arrogance nationale. Le<br />

dimanche, les pères doivent con<strong>du</strong>ire leurs enfants à Givet, et je<br />

les entends qui leur disent :<br />

— Voyez, comme nous faisons trembler le monde!<br />

De son côté, un officier français, devant qui je m’étonnais de<br />

ce luxe guerrier, m’a expliqué ceci :<br />

— Il ne faut plus, au cours des luttes futures, qu’on puisse<br />

encore s’écrier : « Ah! voici les Belges. Nous sommes foutus! »<br />

Et que de casernes!… Quelles immenses esplanades pour<br />

l’évolution des troupes!… Que de soldats!<br />

J’ai vu défiler des bataillons et des bataillons d’infanterie. En<br />

tenue de campagne et clairon sonnant, sans doute ils revenaient<br />

d’une reconnaissance, peut-être d’un combat. Et j’ai admiré leur<br />

allure martiale, leur souple entraînement… Nous sommes bien<br />

gardés, allez!… Tout me fait croire aujourd’hui que, devant un<br />

tel déploiement de forces, un tel hérissement de défenses,<br />

l’armée belge nous laissera tranquilles, désormais.<br />

« Si tu veux la paix… », dit la Sottise des nations.<br />

On rêve pour Nancy le tiers seulement des travaux patriotiques<br />

exécutés à Givet… Il est vrai que, là-bas, ce ne sont que les<br />

Allemands…<br />

Une famille d’automobilistes<br />

Revenus de notre surprise, bien sûrs de n’être pas dérangés<br />

par une attaque soudaine des corps d’armée belges, nous passâmes<br />

la soirée assez gaiement, dans un hôtel propre, très recommandé<br />

par le Touring Club, où l’on nous servit de la cuisine<br />

simple et modeste, de la cuisine de siège. Les truites de la Meuse,<br />

annoncées sur la carte, furent, au dernier moment, remplacées<br />

par une plus humble friture de gardons, et l’on substitua de la<br />

charcuterie au rosbif promis; tout cela de si bonne grâce que<br />

nous fûmes enchantés de notre dîner.<br />

Près de nous, était attablée toute une famille : le père et la<br />

mère, la fille, le fils. Ils étaient arrivés, un peu avant nous, en<br />

automobile aussi… Partis de Paris, depuis trois jours, ils avaient<br />

été arrêtés, dans des endroits peu habitables, par toute sorte<br />

d’accidents… Ils en parlaient avec aigreur… <strong>La</strong> mère, surtout, se<br />

plaignait amèrement de la machine :<br />

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