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La 628-E8 - Octave Mirbeau - Éditions du Boucher

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PRÉFACE<br />

Ce « roman » de l’automobile qu’est <strong>La</strong> <strong>628</strong>-<strong>E8</strong> peut apparaître<br />

alors comme la réalisation tardive, et vigoureusement<br />

actualisée, d’un vague projet remontant à 1891 et évoqué jadis<br />

dans une lettre à Claude Monet, précisément, alors que <strong>Mirbeau</strong><br />

ahanait sur la première mouture <strong>du</strong> Journal d’une femme de<br />

chambre et qu’il sentait douloureusement la nécessité de<br />

dépasser le genre romanesque, trop vulgaire à ses yeux et qui<br />

avait fait son temps : « Je suis dégoûté, de plus en plus, de l’infériorité<br />

des romans, comme manière d’expression. Tout en le simplifiant,<br />

au point de vue romanesque, cela reste toujours une<br />

chose très basse, au fond, très vulgaire; et la nature me donne,<br />

chaque jour, un dégoût plus profond, plus invincible, des petits<br />

moyens […]. Je vais me mettre à tenter <strong>du</strong> théâtre, et puis à réaliser,<br />

ce qui me tourmente depuis longtemps, une série de livres<br />

d’idées pures et de sensations, sans le cadre <strong>du</strong> roman. Le<br />

théâtre, si j’y réussis, fera passer ces livres qui ne se vendront pas<br />

à cent exemplaires. » 1<br />

De la fiction de l’auto à l’autofiction<br />

De fait, « le cadre <strong>du</strong> roman » a bel et bien disparu dans <strong>La</strong><br />

<strong>628</strong>-<strong>E8</strong>, et le récit est bien constitué par la juxtaposition « d’idées<br />

pures et de sensations ». Mais ce que ne prévoyait pas l’écrivain,<br />

seize ans avant la publication de son livre, c’est que ces idées et<br />

ces sensations seraient aussi radicalement conditionnées par le<br />

nouvel outil mis à sa disposition par le progrès technologique en<br />

général, et, en particulier, par des techniciens de génie tels que<br />

Fernand Charron 2 , constructeur de la <strong>628</strong>-<strong>E8</strong>, auquel il rend un<br />

vibrant hommage, contraire aux usages littéraires, et à qui précisément<br />

l’ouvrage est dédié, en guise de provocation à l’encontre<br />

<strong>du</strong> Gotha des Lettres.<br />

1. Correspondance avec Monet, p. 126. « Avec <strong>La</strong> <strong>628</strong>-<strong>E8</strong>, l’impressionnisme a,<br />

selon moi, son chef-d’œuvre », écrit pour sa part Luigi Campolonghi dès la parution<br />

<strong>du</strong> volume (art. cit., p. 221).<br />

2. Sur l’Angevin Fernand Charron, voir l’article d’Alain Gendrault, « <strong>Octave</strong> <strong>Mirbeau</strong><br />

et Fernand Charron », Cahiers <strong>Octave</strong> <strong>Mirbeau</strong>, n° 2, Angers, 1995, pp. 221-226.<br />

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