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La 628-E8 - Octave Mirbeau - Éditions du Boucher

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OCTAVE MIRBEAU<br />

développer également en Allemagne. Il n’est pas de choses qui<br />

ne l’intéressent, et il voudrait que l’Allemagne fût la première en<br />

tout, partout et toujours. Cela le pousse parfois à des actes<br />

désordonnés et vraiment comiques. Il est comme ces parents qui<br />

n’ont de cesse que leurs enfants aient tous les prix de leur classe,<br />

<strong>du</strong>ssent-ils les abrutir, pour le restant de leur vie… Ce n’est pas,<br />

quoi qu’on dise, l’argent qui nous manque, et vous êtes les premiers,<br />

sans le savoir, probablement, à donner à nos banques tout<br />

l’argent qu’elles veulent bien prendre aux vôtres; ce n’est pas la<br />

force motrice, que nous avons à bien meilleur marché que vous;<br />

ce n’est pas, non plus, la persévérance ni même l’entêtement<br />

familier à nos têtes carrées… Non, c’est quelque chose de particulier,<br />

d’inimitable et d’un peu fluide, comme dirait votre Rostand.<br />

<strong>La</strong> spontanéité imaginative, le goût, l’esprit… Oui, voilà…<br />

vous avez <strong>du</strong> goût et de l’esprit… Vos ouvriers sont spirituels, et,<br />

spirituels, ils sont adroits… En France, c’est un de mes plaisirs<br />

que de causer avec eux… Tenez… nos chauffeurs… ce sont parfois,<br />

rarement, des espèces d’ingénieurs vaniteux et gourmés, le<br />

plus souvent des domestiques… Vos chauffeurs, à vous, ce sont<br />

de véritables compagnons de route, alertes et gais… Ah! si nous<br />

avions des ouvriers, comme les vôtres, je vous assure que vous<br />

n’en mèneriez pas large, en France.<br />

Pour répondre à des compliments si flatteurs, et que ma<br />

modestie jugeait exagérés, j’eusse voulu parler de Wagner, de<br />

Bismarck et de Nietzsche. Le moment eût paru propice pour une<br />

apologie de Goethe, de Heine, de Beethoven ou de Schiller… Je<br />

n’étais pas en verve. Je me bornai à louer, assez gauchement, le<br />

Pisporter et les voitures allemandes.<br />

— Sans doute, acquiesça von B… nous avons, non pas de<br />

bonnes voitures, mais une bonne voiture… Nous avons la Mercédès…<br />

J’ai une Mercédès… Il faut bien!…<br />

Après un temps :<br />

— Il faut bien! répéta-t-il, non sans mélancolie… <strong>La</strong> Mercédès<br />

est vite, solide, un peu grossière de mécanique, trop compliquée…<br />

Les pannes en sont terribles… Au bout de six mois<br />

d’usage, elle se dérègle, et fait un bruit de ferrailles… et aussi —<br />

c’est peut-être ce nom espagnol qui me le suggère — un bruit de<br />

castagnettes fort désagréable… Enfin, elle est bonne… On lui<br />

doit certains progrès, d’ingénieux dispositifs, dont les construc-<br />

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