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La 628-E8 - Octave Mirbeau - Éditions du Boucher

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LA <strong>628</strong>-<strong>E8</strong><br />

— Allons donc! Louise était une excellente femme… Elle<br />

aimait à s’amuser, sans en avoir l’air. Comme elle serait contente,<br />

d’être au milieu de nous!<br />

— Elle était si brave… leitmotivait, d’une voix de plus en plus<br />

pâteuse, le malheureux veuf…<br />

Il arriva, à la fin, qu’ayant épuisé tous les cafés et tous les<br />

bouges, nous échouâmes dans un restaurant de nuit… Il était<br />

bruyant… Des femmes dégrafées, des jeunes gens ivres, chantaient,<br />

dansaient aux sons de la musique des laoutars roumains.<br />

— Du champagne! <strong>du</strong> champagne! commanda Hoockenbeck<br />

qui, entré dans la salle, sa cravate dénouée, et son chapeau de<br />

travers, prit la taille d’une petite brune… Mais je crois bien que<br />

ce fut seulement pour assurer son équilibre… En suite de quoi, il<br />

alla rouler sur une banquette…<br />

À six heures <strong>du</strong> matin — j’ai honte de l’avouer, mais il faut<br />

bien l’avouer —, je me réveillai dans un fiacre, à la porte de mon<br />

hôtel. Le veuf ronflait à mes côtés. Je sortis sans bruit, et donnai<br />

l’adresse d’Hoockenbeck au cocher. Je ne m’aperçus que plus<br />

tard que je m’étais trompé : c’était l’adresse d’un mauvais lieu.<br />

Brave Hoockenbeck! Il y est peut-être encore…<br />

Vive l’armée belge!<br />

Le plus comique — tout est toujours le plus comique en Belgique<br />

—, c’est l’armée belge. L’armée belge est bien plus terrible<br />

à voir que l’armée allemande, non par le nombre de ses soldats,<br />

mais par la chamarrure de ses uniformes. Elle rappelle — en<br />

beaucoup plus hippodrome — les plus splendides moments de<br />

l’Épopée napoléonienne. Il ne lui manque que ses guerres et ses<br />

victoires, et Monsieur d’Esparbès 1 , pour les chanter. Les Belges<br />

n’ont pas osé aller jusque-là…<br />

Sur la place de l’Hôtel de Ville, ce matin, six soldats, des cavaliers.<br />

Gros, gras, lourds, la moustache longue et épaisse, le torse<br />

bombé sous un dolman vert que passementent, sur la poitrine,<br />

1. Georges d’Esparbès (1863-1944), dessinateur, journaliste, et romancier,<br />

auteur d’écrits chantant l’épopée napoléonienne (<strong>La</strong> Légende de l’aigle, 1893) et la<br />

gloire militaire : Le Régiment (1898), <strong>La</strong> Légion étrangère (1901), etc.<br />

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