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VULGARISATION SCIENTIFIQUE - Colloque Sciences médias et ...

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la méthode (l'ordre de succession des opérations à faire) qui la sous-tend. Le profane<br />

par contre ne peut prétendre au mieux qu'à une accumulation de type culturel des<br />

résultats de c<strong>et</strong>te pratique tels que les lui présente la vulgarisation, résultats qui sont :<br />

les connaissances scientifiques. Celles-ci acquièrent en même temps une existence<br />

objective, c'est à dire une existence d'obj<strong>et</strong>s culturels, le terme d'obj<strong>et</strong> impliquant à la<br />

fois une certaine opacité <strong>et</strong> une complète indépendance par rapport aux règles de leur<br />

manipulation par un suj<strong>et</strong>. La science participe ici à la "mémoire du monde" (Moles, 67 :<br />

68) ou constitue, selon l'expression de Popper (68 : 335) "le tiers monde", celui des<br />

connaissances scientifiques existant indépendamment de tout suj<strong>et</strong> psychologique dans<br />

les bibliothèques nationales <strong>et</strong> universitaires. 58 Détachées des contextes spécifiques qui<br />

les ont fait apparaître, ces connaissances sont fragmentaires, réductibles aux mots qui<br />

semblent les condenser comme par magie dans la littérature de vulgarisation. Face au<br />

vulgarisateur, le profane, qui sans doute peut parfois acquérir une culture<br />

véritablement encyclopédique (certains autodidactes semblent effectivement tout<br />

savoir) se trouve en fait engagé dans une relation pédagogique fondée sur la<br />

mémorisation des connaissances où le mythe du surhomme possédant un cerveauordinateur<br />

fait son apparition (Cf. notamment les publicités pour les développements<br />

"prodigieux" , "extraordinaires" , "surprenants", de la mémoire que l'on trouve à la pelle<br />

dans les revues comme Science <strong>et</strong> Vie <strong>et</strong> <strong>Sciences</strong> <strong>et</strong> Avenir 59 ).<br />

Bref, le profane ne peut prétendre qu'à une tête ""bien pleine" au lieu de la tête "bien<br />

faite" que préconisait Montaigne. Ce qui ne veut pas dire que l'enseignement est seul à<br />

pouvoir produire les têtes "bien faites", mais c'est quand même lui qui détient le<br />

privilège quasi-exclusif de la transmission des méthodes utilisé dans les sciences. Dans<br />

l'enseignement même le plus théorique, la transmission du savoir n'est pas détachée des<br />

principes qui préside à son élaboration. Le problème pour celui qui apprend, n'y est<br />

donc pas tant celui d'une simple mémorisation des connaissances, que celui de<br />

l'acquisition d'une pratique (formelle, expérimentale ou linguistique), une sorte de<br />

conditionnement méthodologique qui perm<strong>et</strong> à la pensée de saisir ses obj<strong>et</strong>s sans que<br />

ceux-ci en impliquent immédiatement la qualité subjective. Transformées en obj<strong>et</strong>s, les<br />

connaissances posent aussitôt au suj<strong>et</strong> la question de leur manipulation par un suj<strong>et</strong>.<br />

Dans l'enseignement au contraire, le savoir n'est là que pour objectiver le suj<strong>et</strong> luimême,<br />

c'est à dire le transformer en un obj<strong>et</strong> conformé de telle façon qu'il puisse en<br />

devenir le médiateur, loi, les connaissances objectives ne le sont que parce qu'elles sont<br />

objectivantes. Dans la vulgarisation scientifique, les mêmes connaissances sont objectivées,<br />

prêtes à participer à ce que Moles (67 : 32) a appelé avec bonheur "l'ameublement de<br />

58 C'est sur l'existence de ce Third World que Popper voudrait fonder une épistémologie objective qui serait<br />

censée éviter aussi bien le "psychologisme" bachelardien que le "sociologisme" kuhnien.<br />

59 On pourrait nous reprocher de mentionner la publicité à l'intérieur d'un argument pédagogique alors<br />

qu'elle se trouve à l'extérieur des parties rédactionnelles des revues qui seules peuvent prétendre avoir une<br />

valeur instructive. A voir cependant la constance avec laquelle ces publicités apparaissent dans la<br />

vulgarisation, on ne peut qu'en déduire qu'elles en constituent un soutien financier appréciable <strong>et</strong> qu'il serait<br />

difficile d'en nier les eff<strong>et</strong>s sur la relation pédagogique elle-même.<br />

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