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A Nightmare On Hopi Street par Jean-Baptiste Lenglet

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A <strong>Nightmare</strong> <strong>On</strong> <strong>Hopi</strong> <strong>Street</strong><br />

<strong>par</strong><br />

<strong>Jean</strong>-<strong>Baptiste</strong> <strong>Lenglet</strong>


L’écran de télé est noir. Quelques zébrures vidéo le<br />

<strong>par</strong>sèment, dues à la lecture de la VHS. Une musique, une<br />

vieille rengaine déconstruite, émerge insidieusement et le<br />

film commence... Directement, en cut :<br />

INT.CHAUFFERIE.NUIT<br />

Un homme est en train de marcher dans une chaufferie mal<br />

éclairée. <strong>On</strong> entend sa respiration, lourde, au premier<br />

plan d’un décor de tuyaux rouillés. Il porte un vieux pull<br />

rouge. Ses mains sont exagérément brunies, traces d’une<br />

brûlure à plusieurs degrés. L’homme s’arrête, se baisse et<br />

lentement ramasse un paquet en lambeaux. Il reprend sa<br />

marche. Il se dirige vers un établi crasseux. Au-dessus de<br />

la table il déplie le paquet et plusieurs objets en<br />

tombent, dont un couteau et diverses lames. L’homme<br />

ramasse le couteau. Il prend un gant, un rasoir. Étape <strong>par</strong><br />

étape, il se façonne une paire de gants effrayants, c’est<br />

l’outil qui va hanter les rêves du film : l’homme aiguise<br />

ses lames, y joint des articulations en acier, et ainsi de<br />

suite, jusqu’à se fabriquer deux gants munis de longues<br />

griffes effilées... Alors qu’il les enfile primitivement,<br />

il crie, rauque, et sur une musique hypnotique le titre<br />

ap<strong>par</strong>aît, <strong>par</strong> clignotements :<br />

A NIGHTMARE ON ELM STREET<br />

(LES GRIFFES DE LA NUIT)<br />

Sur un cri de femme, un drap blanc est transpercé <strong>par</strong> les<br />

griffes de l’homme. Une jeune fille ap<strong>par</strong>aît, devant un<br />

fond aveuglant de lumière. Elle est inquiète, presque<br />

effrayée, en robe de chambre. Elle regarde la caméra, se<br />

met à marcher vers l’avant, pénètre un long couloir<br />

sombre. Elle court maintenant, se retournant <strong>par</strong> moments<br />

la peur d’être poursuivie.<br />

FREDDY<br />

(en voix-off)<br />

Tina... Tina!<br />

(il rit sourdement)<br />

Tina...<br />

Tina s’arrête. Un bruit soudain retentit, et se retournant<br />

un mouton détale dans le couloir. Terrifiée elle crie.<br />

Tina reprend la course, se glisse entre les conduits de<br />

chauffage. Elle sursaute, encore, à bout de nerf. <strong>On</strong><br />

entend Freddy qui pouffe. Par intermittence, il commence à<br />

ap<strong>par</strong>aître. Tina continue, ralentissant la marche. Elle<br />

arrive dans une salle plus vaste que les autres, à<br />

l’ap<strong>par</strong>ence un atelier d’ouvrier. Freddy, caché derrière<br />

un tuyau, fait grincer ses griffes. Contre l’acier les<br />

crisse. Tina tressaute. Freddy transperce le drap blanc,<br />

le lacèrant verticalement. Il le franchit en criant, et<br />

arrive devant Tina. Tina panique, s’enfuie. Elle court<br />

poursuivie <strong>par</strong> le monstre, et rentre dans une allée pour


se cacher, mais rentre dans un cul-de-sac. Au fond, un<br />

énorme fourneau brûle. Acculée, Tina crie désespérément,<br />

elle crie, alarmée. Freddy surgit dans son dos. Tout à<br />

coup derrière elle, il la saisit et <strong>par</strong> derrière la coupe.<br />

INT.CHAMBRE DE TINA.NUIT<br />

Tina se réveille en tressautant. Sa mère frappe à la porte<br />

et ouvre.<br />

LA MÈRE DE TINA<br />

Ça va Tina?<br />

TINA<br />

C’était un cauchemar<br />

LA MÈRE DE TINA<br />

Et pas un p’tit regarde moi ça!<br />

Tina baisse la tête et regarde sa robe de chambre. Elle<br />

découvre de larges lacérations au niveau du ventre.<br />

Incrédule, elle touche les déchirures. Franchissant la<br />

porte, un homme en caleçon s’adresse à sa mère :<br />

UN HOMME<br />

Allez, tu reviens te pieuter oui<br />

ou merde?<br />

LA MÈRE DE TINA<br />

(le repoussant)<br />

Attends deux secondes...<br />

UN HOMME<br />

(agacé)<br />

Oh...<br />

LA MÈRE DE TINA<br />

(se retournant vers Tina)<br />

Tu devrais t’tailler les ongles.<br />

Ou alors ne plus faire de<br />

cauchemars... L’un ou l’autre.<br />

La mère sort et referme la porte de la chambre. Tina de<br />

nouveau seule attrape le crucifix de dessus son lit, le<br />

serre contre la poitrine.<br />

EXT.JARDIN.JOUR<br />

En fondu-enchaîné, plan sur une pelouse ensoleillée. La<br />

caméra cadre des jeunes filles qui jouent à la corde à<br />

sauter. Elles chantonnent :<br />

VOIX D’ENFANTS<br />

Une, deux, Freddy te coupera en<br />

deux... Trois, quatre, remonte<br />

2.


EXT.LYCÉE.JOUR<br />

VOIX D’ENFANTS<br />

chez toi quatre à quatre... Cinq,<br />

six, n’oublie pas ton crucifix...<br />

Sept, huit, surtout ne dors plus<br />

la nuit. Neuf, dix, il est caché<br />

sous ton lit.<br />

Une voiture décapotable se gare au bord de la rue. Tina<br />

est à l’intérieur avec deux amis : une jeune fille, Nancy,<br />

et Glen, le petit ami de Nancy.<br />

TINA<br />

C’était vachement flippant. Même<br />

réveillée je croyais le sentir<br />

là, dans ma chambre.<br />

Ils sortent de la voiture, emportant leurs affaires de<br />

classe.<br />

NANCY<br />

Une, deux, Freddy te coupera en<br />

deux, ça devait être lui.<br />

TINA<br />

C’est ça, c’était comme le truc<br />

qu’on chantait quand on était<br />

petites. C’était l’enfer, j’ai<br />

jamais fait un cauchemar <strong>par</strong>eil.<br />

NANCY<br />

Ben ça c’est marrant, j’en ai<br />

fait un moi aussi, figure-toi.<br />

Un deuxième jeune homme, Rod, s’approche du groupe.<br />

ROD<br />

(attrapant Tina à l’épaule)<br />

Et moi ce matin je me suis<br />

réveillé en bandant pour toi. Et<br />

ton nom était gravé sur ma queue.<br />

TINA<br />

(se dégageant)<br />

Ah oui et bien Tina j’te rappelle<br />

que c’est un mot de quatre<br />

lettres, et sur ton machin y a<br />

pas assez de place.<br />

ROD<br />

(faisant un bras d’honneur à<br />

Tina)<br />

Hé j’me casse, tu m’fous vraiment<br />

les boules!<br />

Tina lui tire la langue, en réponse, Glen se marre.<br />

3.


TINA<br />

(s’adressant à ses deux<br />

amis)<br />

Naah... Bonjour la classe!<br />

NANCY<br />

Il est dingue amoureux de toi.<br />

TINA<br />

Il est fou! Enfin bref, j’ai pas<br />

pu me rendormir cette nuit.<br />

(s’arrêtant soudain)<br />

Et toi, racontes.<br />

NANCY<br />

Parlons d’autre chose. C’est pas<br />

la fin du monde un cauchemar. Ça<br />

sert à rien de faire ça. C’est<br />

normal!<br />

GLEN<br />

(caressant la chevelure de<br />

Nancy)<br />

La prochaine fois que t’en fais<br />

un, tu n’as qu’à te dire : je<br />

suis en train de rêver. A ce<br />

moment-là, tu te réveilleras.<br />

Pour moi, ça a marché.<br />

(il embrasse Nancy sur les<br />

lèvres)<br />

La cloche du lycée résonne. Glen laisse les deux filles,<br />

et s’élance vers l’entrée.<br />

TINA<br />

(criant à Glen)<br />

Toi aussi tu as eu un cauchemar<br />

cette nuit?<br />

(se tournant vers Nancy)<br />

Il va peut-être y avoir un<br />

tremblement de terre, ça<br />

déclenche des phénomènes très<br />

bizarres.<br />

Nancy souriante met son bras autour des épaules de Tina et<br />

les copines s’en vont en classe.<br />

INT.MAISON DE TINA.NUIT<br />

Nancy et Glen sont dans le salon de Tina.<br />

TINA<br />

Vous êtes vachement sympas d’être<br />

venus ce soir. Quand j’ai su que<br />

ma vieille rentrait pas j’ai eu<br />

les j’tons.<br />

4.


NANCY<br />

T’en fais pas, Glen et moi on va<br />

rester avec toi.<br />

TINA<br />

(regardant Glen)<br />

C’est pas vrai qu’sa mère lui a<br />

permis de coucher ici?<br />

NANCY<br />

Hé non, tu penses bien! Il a<br />

trouvé une ruse...<br />

(elle rie, s’étendant dans<br />

le canapé)<br />

Pendant que les deux filles <strong>par</strong>lent, Glen compose un<br />

numéro sur le téléphone de la table basse.<br />

GLEN<br />

(répondant à Tina)<br />

Je lui ai demandé si je pouvais<br />

passer la nuit chez ma tante qui<br />

habite près de l’aéroport. Et<br />

j’ai une cassette d’effets<br />

spéciaux.<br />

(montrant à Tina une<br />

cassette audio)<br />

Glen décroche le combiné d’une main et insère de l’autre<br />

la cassette dans une chaîne Hi-fi.<br />

GLEN<br />

Allô m’man? Oui, j’suis chez<br />

Mary!<br />

Glen déclenche la lecture de la cassette : les enceintes<br />

produisent un avion au décollage.<br />

GLEN<br />

Hein? Ah bah oui c’est les<br />

avions... J’aimerai pas habiter<br />

ici tu sais... Oui elle est là,<br />

elle t’embrasse.<br />

(il fait un geste complice<br />

aux deux filles)<br />

J’te rappelle demain matin. Oui<br />

d’accord, oui.<br />

Une pétarade de moto remplace la piste d’aéroport. Glen<br />

regarde le lecteur décontenancé. Nancy et Tina s’amusent<br />

de la situation.<br />

GLEN<br />

Euh... C’est des mecs qui<br />

déconnent avec des bagnoles dans<br />

la rue.<br />

(bruit de crash)<br />

5.


GLEN<br />

Ah! Il vient d’y avoir un<br />

accident, faut qu’j’aille voir!<br />

La bande-son change encore, et désormais une femme appelle<br />

à l’aide. Elle pousse des cris aigus, comme victime d’un<br />

film d’horreur. Nancy, que ces hurlements agacent, appuie<br />

sur plusieurs boutons et met la cassette en marche<br />

arrière. Divers bruitages, cloches, explosion, ambiance de<br />

guerre, s’enchaînent en rafale. Nancy et Tina rient<br />

hilares.<br />

GLEN<br />

Oui oui, d’accord. Oui maman,<br />

j’appelle la police! Bon<br />

d’accord, j’appelle...<br />

(il réussit à arrêter la<br />

cassette)<br />

Hein, non, c’est des voisins qui<br />

s’battent, mais moi ça va... A<br />

d’main matin!<br />

Glen raccroche. Nancy et Tina :<br />

NANCY<br />

Toi, tu devrais faire du cinéma.<br />

Chapeau!<br />

TINA<br />

GLEN<br />

(s’en allant dépité)<br />

Arf, la crise.<br />

NANCY<br />

(s’adressant à Tina, avec<br />

entrain)<br />

Tu vois, j’te l’avais dit que tu<br />

t’sentirais mieux.<br />

TINA<br />

Toute la journée j’ai pas arrêté<br />

de revoir son visage. Et ses<br />

affreux ongles.<br />

NANCY<br />

Ses affreux ongles?<br />

(Tina acquiesce de la tête)<br />

C’que tu viens de dire à<br />

l’instant m’a fait me rappeler le<br />

cauchemar que j’ai eu cette nuit.<br />

TINA<br />

(maintenant sérieuse)<br />

C’était quoi ton cauchemar?<br />

6.


Glen se fige.<br />

NANCY<br />

Il y avait un mec, avec un vieux<br />

pull vert et rouge.<br />

TINA<br />

Et tu as vu ses ongles?<br />

NANCY<br />

Oui, il arrêtait pas de les faire<br />

crisser sur tout. C’était pas des<br />

ongles ni des griffes, c’était<br />

carrément des lames de couteau<br />

qu’il avait au bout des doigts.<br />

J’oublierai jamais le bruit que<br />

ça faisait. Ça faisait comme ça :<br />

criii...<br />

Nancy mime le crissement des griffes...<br />

TINA<br />

(gravement)<br />

Nancy, on a fait le même<br />

cauchemar, toutes les deux.<br />

Glen revient de la cuisine avec un bol rempli de chips. Il<br />

s’intercale entre les deux :<br />

GLEN<br />

Non, c’est pas possible.<br />

Un bruit émis du jardin stoppe la discussion. Glen se<br />

retourne vers la porte-fenêtre du salon.<br />

Quoi?<br />

TINA<br />

GLEN<br />

(regardant de nouveau Tina)<br />

Non... rien.<br />

TINA<br />

Y a quelqu’un dans la cour?<br />

NANCY<br />

J’ai rien entendu.<br />

TINA<br />

Si, j’ai entendu du bruit.<br />

Ils se lèvent et se dirigent peu rassurés vers la porte.<br />

Glen l’ouvre. Ils sortent, tendus. Des chiens aboient en<br />

hors champ.<br />

7.


GLEN<br />

Attendez.<br />

(les filles restent dans<br />

l’entrée)<br />

Si j’te mets la main dessus, j’te<br />

casse la gueule... Minou minou?<br />

Des branches craquent.<br />

GLEN<br />

Minou minou minou minou?<br />

Surgissant d’un bosquet Rod se projette contre Glen. Il<br />

l’abat au sol d’un seul coup, tandis que Nancy et Tina<br />

hurlent de surprise.<br />

ROD<br />

(imitant un joueur de<br />

football américain)<br />

Et grâce à un plaquage<br />

miraculeux, Rodney Lane l’empêche<br />

de marquer l’essai! Dans les<br />

tribunes, la foule en délire<br />

applaudit la vedette!<br />

Nancy et Tina accourent vers Glen et Rod.<br />

TINA<br />

(à Rod)<br />

Qu’est-ce que tu viens foutre<br />

ici?<br />

ROD<br />

(marchant vers Tina)<br />

J’viens faire la paix, c’est pas<br />

interdit? Ta mère est là je<br />

suppose?<br />

TINA<br />

Bien sûr. Fais voir ça?<br />

ROD<br />

(montrant à Tina la griffe<br />

de jardinage qu’il tient<br />

dans la main)<br />

Génial non?<br />

(il mime un crissement, puis<br />

jette l’outil dans<br />

l’obscurité)<br />

Et qu’est-ce que vous foutez là<br />

tous les trois, vous alliez faire<br />

une <strong>par</strong>touze?<br />

GLEN<br />

Tu penses vraiment qu’au cul!<br />

Rod sort un cran d’arrêt, le pointe en direction de Glen.<br />

8.


NANCY<br />

(s’intercalant entre Glen et<br />

Rod)<br />

Je reste dormir chez Tina ce<br />

soir. Moi seulement.<br />

(elle s’em<strong>par</strong>e du couteau)<br />

Glen s’apprêtait à re<strong>par</strong>tir.<br />

ROD<br />

(se retournant vers Tina,<br />

satisfait)<br />

Hé hé, t’as vu la tête qu’il<br />

fait?<br />

GLEN<br />

(lui faisant une grimace)<br />

Et qu’est-ce qu’elle a ma tête?<br />

ROD<br />

(prenant Tina <strong>par</strong> le bras,<br />

ignorant Glen)<br />

Toi, ta mère n’est pas à la<br />

maison.<br />

(se retournant maintenant<br />

vers Nancy et Glen)<br />

Bon, nous deux on a des trucs à<br />

se dire.<br />

Rod enlace Tina et l’emmène vers la maison.<br />

Rod...<br />

NANCY<br />

ROD<br />

(aux anges)<br />

<strong>On</strong> prend le plumard de sa mère.<br />

<strong>On</strong> vous laisse... tout le reste!<br />

Tina et Rod rentrent dans la maison.<br />

NANCY<br />

(regardant Glen)<br />

J’crois qu’on ferait mieux d’se<br />

barrer.<br />

TINA<br />

(ouvrant la porte-fenêtre,<br />

comme lui répondant)<br />

Hé Nancy, vous restez hein? Me<br />

laissez pas toute seule avec ce<br />

cinglé! Tu restes, hein?<br />

Rod bâillonne Tina la prenant <strong>par</strong> derrière. Elle glousse,<br />

et il la traîne en direction de l’escalier. Dans le<br />

jardin, Glen embrasse Nancy, la serrant contre un mur.<br />

9.


NANCY<br />

Écoute... c’est pas le moment. <strong>On</strong><br />

est venu pour être aux côtés de<br />

Tina avant tout.<br />

Glen la relâche, déçu.<br />

GLEN<br />

Pourquoi un simple cauchemar la<br />

met dans un <strong>par</strong>eil état?<br />

NANCY<br />

Parce que le mec était vraiment<br />

flippant!<br />

Glen et Nancy rentrent dans la maison. Glen ferme le<br />

loquet. Nancy scrute le jardin, soucieuse.<br />

INT.MAISON DE TINA.NUIT<br />

10.<br />

Plus tard dans la nuit. Glen est allongé sur le canapé du<br />

salon l’œil ouvert. Rod et Tina font l’amour, bruyamment,<br />

ce qui l’empêche de dormir.<br />

TINA<br />

(en voix off, jouissant)<br />

Oh, qu’est-ce que tu m’plais!<br />

Fatigué et lassé, Glen change de position.<br />

GLEN<br />

(soufflant)<br />

Oh faut pas s’faire chier...<br />

INT.CHAMBRE DE LA MÈRE DE TINA.NUIT<br />

Rod et Tina viennent de jouir. Rod se pousse de dessus<br />

Tina, et s’étend à côté d’elle, détendu.<br />

TINA<br />

(radieuse)<br />

Ahhhh... Je savais bien<br />

qu’t’étais pas complètement nul.<br />

ROD<br />

Tu t’sens mieux à présent?<br />

TINA<br />

(caressant le torse de Rod)<br />

Tarzan faire du bien à Jane.<br />

ROD<br />

<strong>On</strong> n’est plus fâché?


TINA<br />

<strong>On</strong> n’est plus fâché.<br />

ROD<br />

Bon... Terminé les cauchemars<br />

pour toi et moi alors.<br />

TINA<br />

(que la remarque étonne)<br />

Toi aussi t’as fait un cauchemar?<br />

ROD<br />

Ça arrive aussi aux mecs tu<br />

sais... Les gonzesses ont pas le<br />

monopole.<br />

Rod tire la couverture et se blottit contre le bord,<br />

tournant le dos à Tina.<br />

INT.CHAMBRE DE TINA.NUIT<br />

11.<br />

Nancy est dans le lit de Tina. Elle n’arrive pas à dormir.<br />

Le crucifix de Tina tombe étrangement du mur... Nancy tend<br />

la main et le ramasse. Elle le regarde. Elle le met à ses<br />

côtés, s’endort.<br />

EXT.MAISON DE TINA.NUIT<br />

Dans un long mouvement d’ap<strong>par</strong>eil, la caméra fait un<br />

travelling du jardin jusqu’à la chambre où sommeillent Rod<br />

et Tina.<br />

INT.CHAMBRE DE LA MÈRE DE TINA.NUIT<br />

Un bruit sec réveille Tina. Alors qu’elle va pour se<br />

rendormir, de nouveau le même bruit contre la fenêtre, de<br />

pierre que l’on aurait lancé.<br />

Rod?<br />

TINA<br />

(secouant Rod)<br />

Tina sort du lit, inquiète. Elle regarde <strong>par</strong> la fenêtre.<br />

Le jardin semble vide. Une pierre vient soudain frapper la<br />

fenêtre sous ses yeux. Tina sursaute, et une deuxième<br />

pierre est lancée qui brise le carreau.<br />

FREDDY<br />

(en voix-off)<br />

Tina...<br />

TINA<br />

(apeurée)<br />

Ça suffit les conneries... Qui<br />

est là?


INT.CHAMBRE DE TINA.NUIT<br />

12.<br />

Dans un long grincement la silhouette de Freddy se sculpte<br />

au-dessus de Nancy, s’incarnant derrière un drap blanc.<br />

Ses griffes tirent sur la toile, la saillent, presque la<br />

déchirant. Mais Nancy se réveille et la silhouette<br />

dis<strong>par</strong>aît. Nancy prend le crucifix qu’elle avait posé sur<br />

la table, regarde l’objet. Elle frappe quelques coups<br />

contre le mur pour signifier sa présence à Tina.<br />

N’obtenant pas de réponse, elle se rendort.<br />

EXT.MAISON DE TINA.NUIT<br />

Tina sort de la maison, en robe de chambre. Elle allume la<br />

lumière extérieure.<br />

TINA<br />

Répondez : qui est là?<br />

FREDDY<br />

(en voix-off)<br />

Tina...<br />

Tina marche dans le jardin, regardant autour d’elle.<br />

FREDDY<br />

(en voix-off)<br />

Tina.<br />

TINA<br />

(perdant patience)<br />

Mais qui est là?<br />

Tina finit de franchir le jardin. Elle arrive dans une<br />

allée. Il pleut doucement, ce qui réverbère une lumière<br />

bleutée contre le bitume. Le temps se suspend. Un<br />

couvercle de poubelle roule le long de l’allée, et finit<br />

<strong>par</strong> tomber. L’ombre de Freddy ap<strong>par</strong>aît, se dessinant sur<br />

la palissade :<br />

FREDDY<br />

Tina. (il rie gravement)<br />

Merde.<br />

TINA<br />

Freddy fait face à Tina. Ses bras s’allongent<br />

démesurément, jusqu’à atteindre les bords de l’allée.<br />

Ricanant, il s’approche de Tina, ses griffes grinçant<br />

contre les deux bordures.<br />

TINA<br />

Pitié mon dieu...


FREDDY<br />

(l’interrompant)<br />

C’est moi... Dieu. Regarde!<br />

13.<br />

Freddy exhibe ses griffes. Tina se retourne et s’enfuie,<br />

poursuivie <strong>par</strong> Freddy qui gesticule. Il la suit en faisant<br />

des mouvements ridicules. Soudain, dans un effet de<br />

champ-contrechamp, il se matérialise devant elle<br />

l’horrifiant. En sens inverse elle se met à courir, se<br />

ruant vers chez elle. Elle rentre précipitamment dans le<br />

jardin, le traverse de nouveau. La caméra garde le cadre.<br />

Comme dans un tour de magie, Freddy jaillit de derrière un<br />

arbre.<br />

FREDDY<br />

Tina!<br />

(sa voix roule)<br />

Regarde ceci...<br />

Tina, presque arrivée devant l’entrée, se retourne, et<br />

Freddy lui montre une de ses mains. D’un coup sec il la<br />

tranche avec ses griffes : du sang vert jaillit de la main<br />

coupée, <strong>par</strong> soubresauts. Tina, épouvantée. Elle tente<br />

d’ouvrir la porte.<br />

TINA<br />

Nancy! Nancy, ouvre-moi! Nancy!<br />

Freddy attrape Tina et la fait tomber <strong>par</strong> terre. Tina<br />

lutte pour se protéger, et elle attrape le visage de<br />

Freddy qui soudain se déchire, tombant comme un masque que<br />

l’on arracherait. Le visage s’en va et révèle une sinistre<br />

ébauche, une tête de mort mal faite, marionnette grotesque<br />

qui rie à la manière d’une mécanique.<br />

Non!!!<br />

TINA<br />

INT.CHAMBRE DE LA MÈRE DE TINA.NUIT<br />

Nancy se débat violemment sous son drap et ses mouvements<br />

réveillent Rod.<br />

TINA<br />

Au secours!<br />

Sous le drap, la caméra la montre en plein corps à corps<br />

avec Freddy. Rod saute hors du lit et regarde effaré le<br />

drap bouger. Quand enfin il retire le drap, Tina gigote<br />

seule en plein cauchemar.<br />

Tina!<br />

ROD<br />

D’un coup invisible, la robe de chambre de Tina se<br />

déchire. La peau se lacère, et s’inonde de sang.


Tinaaa!!<br />

ROD<br />

14.<br />

Le sang continue de jaillir de Tina. Saisie <strong>par</strong> une force<br />

inconnue, elle est prise en l’air et lévite. Elle tape<br />

Rod, le bousculant au sol, puis est jetée contre le mur.<br />

Rod stupéfait la regarde. Elle est traînée jusqu’au<br />

plafond, et Rod crie son nom pendant qu’elle se convulse,<br />

dans l’angle.<br />

ROD<br />

(désespéré)<br />

Tina! Tina! Tina! Tina! Tina!<br />

INT.CHAMBRE DE TINA.NUIT<br />

ROD<br />

(en voix-off)<br />

Tina!<br />

Les cris de Rod réveillent Nancy.<br />

INT.CHAMBRE DE LA MÈRE DE TINA.NUIT<br />

Tina!<br />

ROD<br />

Relâchée <strong>par</strong> la force Tina chute du plafond et vient<br />

s’écraser contre le lit. Le choc libère une ample giclée<br />

de sang qui éclabousse la chambre.<br />

Ohhh...<br />

ROD<br />

INT.MAISON DE TINA.NUIT<br />

Nancy frappe contre la porte frénétiquement.<br />

Tina!<br />

NANCY<br />

ROD<br />

(criant en voix-off)<br />

Je t’tuerai! Qui a fait ça?<br />

Glen bouscule Nancy.<br />

NANCY<br />

(à Glen)<br />

Ah! Tu m’as fait peur!


INT.CHAMBRE DE LA MÈRE DE TINA.NUIT<br />

15.<br />

Nancy et Glen forcent la porte et pénètrent dans la<br />

chambre. Avec effroi ils découvrent le tableau macabre qui<br />

vient d’être ébauché. Tina gît au sol, sans vie, au noyau<br />

d’une explosion de sang.<br />

GLEN<br />

Oh non, merde!<br />

Nancy observe la scène les larmes aux yeux. Rod a dis<strong>par</strong>u<br />

de la chambre. Il a laissé la fenêtre grande ouverte. Des<br />

sirènes de police ap<strong>par</strong>aissent en bande-son. Nancy enrage,<br />

muette.<br />

EXT.COMMISSARIAT.NUIT<br />

L’inspecteur de police arrive au commissariat, accompagné<br />

d’un policier.<br />

L’INSPECTEUR DE POLICE<br />

Qui c’était?<br />

UN POLICIER<br />

La fille s’appelait Tina Gray, et<br />

elle habitait là-bas. Son père<br />

s’est barré il y a dix ans et sa<br />

mère est à Las Vegas, avec un<br />

p’tit ami, et on essaie de la<br />

joindre.<br />

L’INSPECTEUR DE POLICE<br />

Et que dit le légiste?<br />

UN POLICIER<br />

L’arme était du genre rasoir,<br />

enfin on a fouillé la baraque<br />

mais on n’a rien trouvé.<br />

Ils franchissent la porte du commissariat.<br />

INT.COMMISSARIAT.NUIT<br />

UN POLICIER<br />

Oh c’est sans doute son p’tit ami<br />

qui a fait ça.<br />

L’INSPECTEUR DE POLICE<br />

Lieutenant? Où est-ce qu’elle<br />

est?<br />

LE LIEUTENANT<br />

Dans mon bureau.


UN POLICIER<br />

Lui s’appelle Rod Lane... une<br />

espèce de musicien, on l’a déjà<br />

arrêté pour des histoires de, de<br />

drogue... ou, d’bagarres.<br />

L’INSPECTEUR DE POLICE<br />

Oui d’accord je vois.<br />

(soucieux, à lui même)<br />

Mais qu’est-ce qu’elle foutait<br />

là-bas?<br />

UN POLICIER<br />

(lui répondant)<br />

Ben, elle y habitait!<br />

INT.BUREAU DU LIEUTENANT.NUIT<br />

16.<br />

Nancy est assise dans le bureau avec sa mère. L’inspecteur<br />

entre, suivi du policier.<br />

L’INSPECTEUR DE POLICE<br />

(<strong>par</strong>lant au policier)<br />

... Il ne s’agit pas d’elle...<br />

(s’adressant maintenant à<br />

Nancy)<br />

Non, c’est de toi qu’je <strong>par</strong>le.<br />

L’inspecteur caresse les cheveux de Nancy. C’est son père.<br />

Il se retourne vers la mère de Nancy, son ancienne femme,<br />

et l’interroge :<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

Alors qu’est-ce qu’elle foutait<br />

là, avec les autres?<br />

LA MÈRE DE NANCY<br />

(le fixant dans les yeux)<br />

Surtout ne dis pas bonsoir!<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

Marge...<br />

(s’adressant sèchement au<br />

policier)<br />

Laissez-nous.<br />

(à Nancy)<br />

Alors, comment tu vas ma chérie?<br />

NANCY<br />

Ça va, papa.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

Bon, je ne vais pas t’interroger<br />

tout de suite, il faut d’abord<br />

que tu t’remettes. Mais<br />

j’aimerais bien savoir ce que tu


LE PÈRE DE NANCY<br />

foutais chez les Gray avec tes<br />

copains, au lieu de dormir à la<br />

maison. Et en plus avec un<br />

détraqué notoire comme Lane!<br />

NANCY<br />

Écoute, Rod n’est pas un<br />

détraqué!<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

Alors, tu as une explication pour<br />

son acte?<br />

NANCY<br />

(baissant la tête)<br />

Non...<br />

MARGE<br />

Ap<strong>par</strong>emment il était très jaloux.<br />

Nancy m’a dit qu’ils s’étaient<br />

engueulés.<br />

NANCY<br />

C’était pas grave leur<br />

engueulade!<br />

MARGE<br />

Et un meurtre, ça n’est pas grave<br />

non plus?<br />

NANCY<br />

(pleurant)<br />

T’es dégueulasse, j’t’interdis de<br />

dire ça!<br />

(séchant ses larmes)<br />

J’te l’répète. A mon avis leur<br />

engueulade c’était rien d’grave.<br />

Tu sais Tina... elle avait rêvé<br />

que ça allait lui arriver.<br />

Quoi?<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

NANCY<br />

Elle avait fait un cauchemar...<br />

où un type essayait de la tuer.<br />

C’est pour ça qu’on y est allé<br />

m’man!<br />

(sanglotant)<br />

Elle avait peur de dormir toute<br />

seule!<br />

Nancy pleure la tête dans les mains.<br />

17.


INT.MAISON DE NANCY.JOUR<br />

Dans la cuisine, Marge pré<strong>par</strong>e un petit-déjeuner en<br />

regardant les informations. La télévision présente le<br />

meurtre de Tina :<br />

SPEAKER<br />

Selon les enquêteurs, la victime,<br />

Christina Gray, âgée de 15 ans,<br />

s’était querellée avec son ami<br />

Rod Lane. Une véritable chasse à<br />

l’homme a été déclenchée pour le<br />

retrouver. Quant à l’arme du<br />

crime, un rasoir, ou autre<br />

instrument extrêmement<br />

tranchant...<br />

Nancy arrive dans le couloir et la remarquant, Marge<br />

éteint la télé. Nancy entre dans la cuisine.<br />

MARGE<br />

Où vas-tu ma chérie?<br />

Au lycée.<br />

NANCY<br />

MARGE<br />

Je t’ai entendu te retourner dans<br />

ton lit toute la nuit. Tu ferais<br />

mieux de rester à la maison,<br />

aujourd’hui.<br />

NANCY<br />

Il faut que j’aille au lycée<br />

maman, sinon je vais devenir<br />

folle à rester assise là-haut.<br />

MARGE<br />

Est-ce que tu as dormi?<br />

NANCY<br />

Ah, j’dormirai en classe! J’ai<br />

b’soin, de bouger tu comprends?<br />

MARGE<br />

Tu rentres directement?<br />

NANCY<br />

Promis, directement.<br />

MARGE<br />

D’accord.<br />

(elle l’embrasse au front)<br />

NANCY<br />

À ce soir.<br />

18.


MARGE<br />

À ce soir.<br />

Nancy ouvre la porte, sort de la maison.<br />

EXT.RUE.JOUR<br />

19.<br />

Nancy marche dans la rue. Elle remarque qu’un homme en<br />

costard noir la surveille au loin, derrière un arbre. Elle<br />

reprend sa marche, l’air normale. Lorsqu’elle se retourne,<br />

l’homme a dis<strong>par</strong>u. Rod plonge sur elle, surgissant<br />

soudainement d’un buisson. Il bâillonne Nancy et<br />

l’entraîne avec lui :<br />

ROD<br />

J’vais pas t’faire de mal! J’vais<br />

pas... t’faire de mal!<br />

Nancy se dégage de Rod.<br />

ROD<br />

Les salauds, ils vont<br />

m’assassiner.<br />

NANCY<br />

Non, personne ne t’assassinera.<br />

Est-ce que c’est toi?<br />

ROD<br />

(secouant la tête)<br />

J’l’ai pas touché!<br />

NANCY<br />

Tu hurlais, comme un malade.<br />

ROD<br />

(se défendant)<br />

<strong>On</strong> n’était pas tout seul!<br />

NANCY<br />

La porte était fermée à clef de<br />

l’intérieur!<br />

ROD<br />

Arrête de m’regarder comme si tu<br />

t’attends à ce que j’te saute sur<br />

le poil! J’suis pas j’té j’te<br />

dis.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(ap<strong>par</strong>aissant, le pistolet<br />

au poing)<br />

<strong>On</strong> n’bouge plus, tu m’entends?<br />

Là, sois gentil, fais exactement<br />

ce que j’te dis.


20.<br />

Le père de Nancy a Rod dans son viseur. Rod se lève au<br />

ralenti. Se retournant brusquement, il s’enfuit dans la<br />

rue, à peine debout. Alors que le père s’apprête à le<br />

poursuivre Nancy s’interpose :<br />

Non!<br />

NANCY<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(sifflant entre ses dents)<br />

Petite conne...<br />

Rod court pieds nus dans la rue. Des sirènes de police<br />

l’entourent, une voiture surgit en dérapant. Rod est<br />

encerclé.<br />

UN POLICIER<br />

(pointant son pistolet)<br />

Bouge pas! Vas-y ça y est, tu<br />

l’tiens.<br />

UN POLICIER<br />

Allez attrape le. Allez, couche<br />

toi.<br />

UN POLICIER<br />

J’te dis d’te coucher!<br />

UN POLICIER<br />

Tu t’allonges oui?<br />

UN POLICIER<br />

Ah regardez inspecteur, un cran<br />

d’arrêt.<br />

Rod est au sol, les mains menottées.<br />

ROD<br />

J’ai rien fait. C’est pas moi qui<br />

l’ai tué, Nancy!<br />

NANCY<br />

(sortant des buissons)<br />

Papa!<br />

Le père se retourne.<br />

NANCY<br />

(outrée)<br />

Tu t’es servi d’moi!<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

De toute façon tu n’crois pas que<br />

tu aurais mieux fait de rester à<br />

la maison?<br />

Nancy s’en va, irritée.


LE PÈRE DE NANCY<br />

Nancy! Nancy! Oh... Nancy!<br />

ROD<br />

(à l’arrière-plan)<br />

Mais vous m’faites mal bordel!<br />

INT.SALLE DE CLASSE.JOUR<br />

L’ENSEIGNANTE DE LITTÉRATURE<br />

Ce que nous voyons... n’est pas<br />

toujours l’image du réel. Ainsi<br />

selon Shakespeare il existe<br />

quelque <strong>par</strong>t, qui opère dans la<br />

nature, et jusque dans la nature<br />

humaine, un élément de<br />

pourrissement. Un chancre, selon<br />

ses propres mots. La réaction<br />

d’Hamlet, face à ce<br />

pourrissement, et aux mensonges<br />

de la Reine, est de creuser les<br />

choses, pour déterrer la vérité.<br />

C’est l’image du fossoyeur.<br />

Toujours creuser, sous la<br />

fausseté des ap<strong>par</strong>ences. Cela<br />

s’applique aussi, mais<br />

différemment, à Jules César.<br />

John, lisez nous cela s’il vous<br />

plaît.<br />

21.<br />

Un élève se lève et va au tableau. Il regarde la classe.<br />

Au fond de la salle Nancy l’écoute, affalée sur son<br />

bureau.<br />

JOHN<br />

Euh... Dans la fière et très<br />

noble ville de Rome, peu de temps<br />

avant la chute de César, les<br />

tombes des cimetières furent<br />

soudain dépeuplées, et les morts,<br />

vêtus de leurs suaires, se<br />

répandirent dans les rues de la<br />

ville. <strong>On</strong> observa des puits de<br />

sang, et la nature même du<br />

soleil, et de l’éther, se trouva<br />

bouleversée. L’empire de<br />

Neptune...<br />

Nancy, amorphe, ferme les yeux.<br />

TINA<br />

(d’une voix d’outre tombe)<br />

Nancy...<br />

Nancy se réveille. Tina se tient rouge de sang, à<br />

l’intérieur d’un sac mortuaire.


Nancy...<br />

TINA<br />

Nancy craintive regarde autour d’elle. Les élèves sont<br />

concentrés. La lecture se poursuit :<br />

JOHN<br />

(d’une voix soudainement<br />

plus grave, comme<br />

s’adressant à Nancy)<br />

Oh Dieu je tiendrai tout entier<br />

dans la coquille d’une noix... et<br />

je pourrai me prétendre maître de<br />

l’espace infini. Si je n’avais<br />

pas ces atroces cauchemars...<br />

Nancy sort précautionneusement de la salle de classe.<br />

Tina?<br />

NANCY<br />

22.<br />

Au milieu du couloir Tina gît dans une mare de sang,<br />

enveloppée dans son sac trans<strong>par</strong>ent. Une main invisible la<br />

soulève et la tire. Elle dis<strong>par</strong>aît derrière le mur. Nancy<br />

apeurée marche, longeant la traînée de sang.<br />

Tina!<br />

NANCY<br />

Nancy se met à courir. Tournant dans le couloir adjacent,<br />

elle percute une étudiante et l’envoie au sol. Nancy<br />

hurle.<br />

UNE ÉTUDIANTE<br />

(d’une voix d’outre tombe)<br />

Où est votre billet?<br />

NANCY<br />

(angoissée)<br />

Allez vous faire foutre!<br />

Nancy reprend sa course.<br />

FREDDY<br />

Hé, Nancy!<br />

Nancy se retourne, l’étudiante lui fait signe. À la place<br />

de sa main, c’est la griffe de Freddy qui bouge.<br />

UNE ÉTUDIANTE<br />

(avec la voix de Freddy)<br />

Ici il est interdit de courir...<br />

(elle ricane)<br />

Nancy reprend sa course. Elle descend dans un escalier,<br />

continuant de suivre la traînée de sang.


Tina?<br />

NANCY<br />

23.<br />

Nancy arrive au sous-sol. Elle erre, et se retrouve dans<br />

une salle remplie de machines. Au fil de sa marche le<br />

lycée s’est transformé en chaufferie.<br />

Tina?<br />

NANCY<br />

Les yeux de Freddy glissent derrière un tuyau.<br />

NANCY<br />

Tina? Tina?<br />

Freddy ap<strong>par</strong>aît, au fond de la salle.<br />

NANCY<br />

Qui êtes-vous?<br />

D’un geste enchaîné, Freddy soulève son pull et se lacère<br />

la poitrine. Du sang jaune en jaillit, grouillant de vers<br />

blancs. Freddy ricane et s’approche de Nancy. Il la<br />

terrifie. Nancy essaie de s’enfuir, mais derrière elle<br />

tout est condamné. Freddy rie horriblement. Freddy fait<br />

grincer ses griffes contre les tuyaux. Nancy réussit enfin<br />

à s’enfuir et file à travers les conduits. Elle court, au<br />

hasard. Tournant pour s’échapper, elle pénètre<br />

malheureusement un cul-de-sac, et Freddy déjà derrière<br />

elle bloquant toute issue...<br />

FREDDY<br />

(faisant crisser ses<br />

griffes)<br />

Tu vas crever!<br />

Freddy marche vers Nancy, les griffes en l’air.<br />

NANCY<br />

Mais c’est un cauchemar!<br />

FREDDY<br />

Viens embrasser Freddy...<br />

NANCY<br />

Va t’faire foutre!<br />

Freddy remue sa langue dégueulasse. Paniquée Nancy abat<br />

son bras sur un tuyau de la chaufferie. Le conduit est<br />

brûlant et lui calcine la chair. Elle se réveille,<br />

hurlante, dans la salle de classe. Les élèves et<br />

l’enseignante se retournent ensemble :<br />

L’ENSEIGNANTE DE LITTÉRATURE<br />

(accourant)<br />

Nancy! Nancy calmez-vous! Je vais<br />

appeler votre mère. C’est fini,


L’ENSEIGNANTE DE LITTÉRATURE<br />

tout va bien. Voilà,<br />

asseyez-vous.<br />

NANCY<br />

Non. (ramassant ses affaires)<br />

J’ai rien, ça va. Ça va.<br />

Ça va?<br />

EXT.LYCÉE.JOUR<br />

L’ENSEIGNANTE DE LITTÉRRATURE<br />

UNE ÉTUDIANTE<br />

(en a<strong>par</strong>té)<br />

Mais qu’est-ce qui lui a pris?<br />

NANCY<br />

Oui oui, je crois que j’vais<br />

rentrer.<br />

L’ENSEIGNANTE DE LITTÉRATURE<br />

(troublée)<br />

Mais attendez! Nancy, votre<br />

billet...<br />

(se retournant vers les<br />

autres élèves)<br />

Bon... on reprend.<br />

Nancy sort du lycée. Elle sanglote, toujours en état de<br />

choc.<br />

Non!<br />

NANCY<br />

(à elle-même)<br />

24.<br />

Touchant son bras, Nancy remarque une trace rouge de sang.<br />

C’est la brûlure du tuyau, stigmate encore frais du<br />

précédent cauchemar.<br />

INT.COMMISSARIAT.SOIR<br />

Nancy est assise devant la cellule de Rod. Il a les traits<br />

tirés, semble à bout.<br />

NANCY<br />

Qu’est-ce qui s’est passé après?<br />

ROD<br />

(fatigué)<br />

J’t’ai raconté. J’y voyais rien<br />

mais il y avait un autre mec,<br />

dans l’lit, sous les couvertures.


NANCY<br />

(incrédule)<br />

Enfin comment veux-tu que<br />

quelqu’un d’autre soit rentré<br />

dans le lit sans que vous vous en<br />

aperceviez?<br />

ROD<br />

J’en sais foutre rien! J’savais<br />

bien que tu m’croirez pas de<br />

toute façon.<br />

NANCY<br />

De quoi il avait l’air? Tu as vu<br />

sa tête?<br />

Non.<br />

ROD<br />

(au fond de sa cellule)<br />

NANCY<br />

(agacée)<br />

Alors comment sais-tu que vous<br />

n’étiez pas seuls, Tina et toi?<br />

ROD<br />

(revenant vers elle)<br />

Parce qu’il l’a massacré sous mes<br />

yeux!<br />

NANCY<br />

(sèche)<br />

Et t’es pas foutu de le décrire?<br />

ROD<br />

Bordel d’non, j’l’ai pas vu,<br />

lui... Tout c’que j’ai vu,<br />

c’étaient les coupures. À chaque<br />

fois une série.<br />

NANCY<br />

Hein? Comment ça, une série?<br />

ROD<br />

(très troublé)<br />

Ben c’était, comme s’il y avait<br />

eu... quatre lames de rasoir...<br />

qui la tailladaient en même<br />

temps. Mais on les voyait pas...<br />

Tu sais, j’aurais peut-être pu<br />

lui sauver la vie... si j’avais<br />

réagi tout de suite... J’ai cru<br />

qu’c’était encore un cauchemar.<br />

J’en avais fait un terrible la<br />

veille. Dedans il y avait, il y<br />

avait un gars... Il avait des<br />

lames... à la place des doigts.<br />

25.


Rod montre sa main à travers les barreaux. Nancy<br />

s’éloigne, horrifiée.<br />

ROD<br />

Tu crois, tu crois qu’j’l’ai tué?<br />

NANCY<br />

(secouant la tête, la voix<br />

faible)<br />

Non...<br />

26.<br />

Nancy frappe à la porte, marquant la fin de la visite. Un<br />

garde ouvre et elle s’en va, laissant Rod.<br />

INT.MAISON DE NANCY.NUIT<br />

Nancy est en train de prendre un bain, lasse.<br />

NANCY<br />

(se murmurant à elle-même)<br />

Une, deux, Freddy te coupera en<br />

deux... Trois, quatre, remonte<br />

chez toi quatre à quatre. Cinq,<br />

six, n’oublie pas ton crucifix.<br />

Sept, huit... et surtout ne dors<br />

pas... la nuit.<br />

(elle s’endort petit à<br />

petit)<br />

Neuf, dix, il est caché...<br />

sous... ton lit...<br />

Des griffes métalliques émergent de l’eau. La main de<br />

Freddy se dirige vers le visage de Nancy, pour l’écorcher,<br />

mais Marge frappe à la porte et la main dis<strong>par</strong>aît.<br />

MARGE<br />

(en voix-off)<br />

Nancy?<br />

NANCY<br />

Oui maman?<br />

MARGE<br />

Ne t’endors pas dans la<br />

baignoire, c’est des coups à se<br />

noyer.<br />

NANCY<br />

Oh, j’ai pas deux ans.<br />

MARGE<br />

Mais ça arrive tous les jours. Je<br />

t’ai servi un bon bol de lait<br />

dans la cuisine.


NANCY<br />

(exaspérée <strong>par</strong> sa mère)<br />

Un bon bol de lait... Super...<br />

Marge s’en va tandis que Nancy se rendort. Une force la<br />

tire subitement sous l’eau, de dessous le bain. La<br />

baignoire n’a comme plus de fond, elle semble infinie.<br />

Nancy se démène, enveloppée <strong>par</strong> les rires de Freddy.<br />

NANCY<br />

(réussissant à sortir la<br />

tête de l’eau)<br />

Au secours!<br />

27.<br />

Freddy tire de nouveau Nancy vers le fond de l’eau. Nue,<br />

elle s’enfonce, luttant contre la noyade. Marge affolée<br />

arrive et frappe à la porte.<br />

MARGE<br />

(inquiète)<br />

Nancy?<br />

Nancy se débat toujours avec le bain. L’eau étouffe ses<br />

cris. Finalement, elle arrive à reprendre le dessus et<br />

sort un bras.<br />

MARGE<br />

(s’attaquant à la porte)<br />

J’arrive chérie.<br />

Maman!<br />

NANCY<br />

Marge débloque la serrure de la salle de bain. Nancy<br />

maintenant est réveillée, debout, hors de l’eau. Elle se<br />

sèche tranquillement avec une serviette. Marge entre dans<br />

la salle de bain :<br />

NANCY<br />

(anticipant sa réaction)<br />

Maman, ça va.<br />

Ça va?<br />

MARGE<br />

NANCY<br />

Ça va, oui.<br />

MARGE<br />

(tremblante)<br />

Mais je t’ai entendu hurler! Tu<br />

criais, tu m’appelais...<br />

NANCY<br />

Non c’est bon. Je suis tombée en<br />

sortant de la baignoire... Maman.


MARGE<br />

Tu vois, j’te l’avais dit. Le<br />

nombre d’accidents qui ont lieu<br />

dans les salles de bain...<br />

NANCY<br />

Oui, je sais mais... ça va bien<br />

maintenant. Excuse-moi j’t’ai<br />

fait peur...<br />

MARGE<br />

(séchant Nancy, maintenant<br />

rassurée)<br />

Mais non... Bon, j’vais t’ouvrir<br />

ton lit, d’accord?<br />

NANCY<br />

Oui, j’enfile mon pyjama.<br />

MARGE<br />

(chaleureuse)<br />

C’est ça...<br />

28.<br />

Marge sort de la salle de bain. Nancy referme la porte,<br />

et, préoccupée, finit <strong>par</strong> ouvrir l’armoire de la<br />

pharmacie. Elle fouille dans des paquets de médicaments, à<br />

la recherche de pilules anti-somnolence. Les trouvant elle<br />

en prend une boîte, songeuse.<br />

INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

Nancy est allongée dans son lit, dormant à moitié. Elle<br />

regarde un étrange film d’horreur à la télé. Par vagues,<br />

le tueur pourchasse une jeune femme, qui crie, s’échappant<br />

et inlassablement recommence la séquence. Nancy éteint<br />

l’écran, fatiguée <strong>par</strong> la boucle. Elle sort du lit, va à la<br />

fenêtre. Tandis qu’elle l’ouvre, Glen en surgit, sortant<br />

des rosiers de la pergola :<br />

GLEN<br />

(malicieux)<br />

Salut!<br />

Hi!<br />

NANCY<br />

(sursautant)<br />

GLEN<br />

La lumière était allumée... je<br />

savais qu’t’étais là!<br />

NANCY<br />

(reprenant ses esprits)<br />

Y a des moments où c’est chiant<br />

qu’t’habites juste en face.


GLEN<br />

(haussant le ton)<br />

Tu m’laisses entrer ou non,<br />

merde! Avec ces saloperies de<br />

rosiers, j’ai des épines plein<br />

les pieds.<br />

NANCY<br />

(chuchotant)<br />

Dépêche toi avant qu’on te voit.<br />

Aïe!<br />

Chut.<br />

GLEN<br />

NANCY<br />

GLEN<br />

J’me suis cogné.<br />

NANCY<br />

Tais-toi, ma mère n’est pas<br />

encore couchée!<br />

Glen, en pyjama, s’allonge sur le lit de Nancy.<br />

NANCY<br />

(désignant le lit)<br />

Te gène pas, hein?<br />

GLEN<br />

(allant s’asseoir sur une<br />

chaise)<br />

T’as craqué pendant le cours de<br />

littérature, il <strong>par</strong>aît?<br />

NANCY<br />

Ouais, ç’a été l’horreur.<br />

GLEN<br />

T’as toujours pas dormi?<br />

NANCY<br />

Pas vraiment.<br />

GLEN<br />

(lui prenant le bras)<br />

Qu’est-ce que tu as au bras?<br />

NANCY<br />

J’me suis cramée au lycée.<br />

(se regardant dans un<br />

miroir)<br />

Oh... regarde un peu la gueule<br />

que j’ai...<br />

(se tournant vers Glen)<br />

Est-ce que tu as refait des<br />

cauchemars hier soir?<br />

29.


GLEN<br />

(secouant la tête)<br />

Non, dormi comme un loir.<br />

NANCY<br />

Tu crois que c’est possible de<br />

voir dans un rêve des choses qui<br />

vont arriver?<br />

Non.<br />

GLEN<br />

(après réflexion)<br />

NANCY<br />

Tu crois au croque-mitaine?<br />

GLEN<br />

Non. Rod a tué Tina, tu l’sais<br />

comme moi.<br />

NANCY<br />

(inspirée)<br />

J’ai un service un peu bizarre à<br />

te demander...<br />

GLEN<br />

(sentant le mauvais tour)<br />

Oh oh.<br />

NANCY<br />

C’est vraiment pas difficile.<br />

Bon, j’vais m’endormir et essayer<br />

de trouver quelqu’un. Toi,<br />

j’voudrais qu’tu sois là. À côté<br />

de moi, sans m’quitter des yeux.<br />

D’accord?<br />

GLEN<br />

(mimant le croque-mitaine)<br />

Youhouhouhouhou.<br />

D’accord?<br />

OK.<br />

NANCY<br />

GLEN<br />

(concédant)<br />

NANCY<br />

Surtout déconne pas, c’est grave.<br />

Il faut absolument qu’je sache.<br />

GLEN<br />

(persuasif)<br />

D’accord, compte sur moi.<br />

30.


NANCY<br />

Eteins la lumière.<br />

Glen éteint la lumière.<br />

NANCY<br />

Voilà ce que nous allons faire.<br />

GLEN<br />

L’obscurité est propice...<br />

NANCY<br />

Rhoo... arrête tes conneries et<br />

écoute-moi.<br />

EXT.MAISON DE NANCY.NUIT<br />

Nancy sort de la maison. Elle marche dans la rue, en<br />

pyjama. Un rythme synthétique berce la bande-son.<br />

NANCY<br />

(s’adressant derrière elle)<br />

Glen? Tu es toujours là?<br />

Glen sort de derrière un arbre.<br />

GLEN<br />

Bien sûr que oui!<br />

NANCY<br />

Bon... on continue.<br />

31.<br />

Glen retourne dans sa cachette, Nancy reprend la marche.<br />

Elle <strong>par</strong>court une allée sombre. Au-dessus d’une porte,<br />

Nancy regarde une vitre cassée. Des chiens aboient. Elle<br />

pousse la porte, qui ouvre sur un jardin embrumé. Le<br />

jardin donne sur le commissariat. Nancy court vers le<br />

bâtiment, vers une fenêtre éclairée au rez-de-chaussée. Y<br />

<strong>par</strong>venant, elle s’agenouille. Elle regarde à travers les<br />

barreaux de la fenêtre et voit Rod, endormi dans sa<br />

cellule. Rod est seul mais, la porte du couloir s’ouvre<br />

et, Freddy entre, doucement...<br />

NANCY<br />

(se retournant, inquiète)<br />

Glen? Glen!<br />

Nancy regarde Freddy approcher la cellule de Rod.<br />

NANCY<br />

(désormais criant)<br />

Glen!!<br />

Le corps de Freddy traverse les barreaux de la cellule.<br />

Nancy tape sur la fenêtre.


NANCY<br />

(paniquée)<br />

Oh Rod, attention! Fais attention<br />

Rod!<br />

Freddy soulève lentement le drap de Rod et pendant ce<br />

temps ricane, regardant Nancy.<br />

NANCY<br />

Rod!<br />

(se retournant)<br />

Glen!<br />

(se retournant)<br />

Dans la cellule, Nancy voit Rod qui se réveille.<br />

NANCY<br />

(se retournant)<br />

Glen!<br />

Devant elle, Tina est ap<strong>par</strong>ue. Elle est dans son sac<br />

mortuaire. Tina lui adresse un geste engourdi :<br />

TINA<br />

(sépulcrale)<br />

Nancy... Nancy...<br />

32.<br />

Un scolopendre sort de sa bouche en gros plan. Blottis<br />

contre une poubelle, des serpents s’entortillent dans la<br />

boue.<br />

Nancy...<br />

TINA<br />

NANCY<br />

(s’éloignant pas à pas)<br />

Glen!<br />

Nancy...<br />

TINA<br />

NANCY<br />

Réveille toi!<br />

Nancy...<br />

TINA<br />

NANCY<br />

(longeant une palissade)<br />

Est-ce que tu es là?<br />

FREDDY<br />

(en voix-off, gravement)<br />

Tu m’as appelé?<br />

Freddy jaillit de la haie contre laquelle se tenait Nancy.<br />

Nancy s’enfuit subitement en criant, poursuivie <strong>par</strong>


33.<br />

Freddy. Elle traverse une allée qui débouche sur sa<br />

maison. Nancy court et ouvre la porte. Elle monte quatre à<br />

quatre les marches de l’escalier, mais l’escalier est<br />

bizarre, semble flasque et soudain, englue la moquette<br />

dans les pieds de Nancy. Nancy est bloquée, prise. Elle<br />

n’arrive plus à avancer et panique. Freddy brise le<br />

carreau de la porte d’entrée.<br />

TINA<br />

(sépulcrale, en voix-off)<br />

Nancy... Je t’en prie<br />

sauve-moi... des griffes de...<br />

FREDDY<br />

(d’une voix ruisselante)<br />

... Freddy!<br />

Freddy ouvre la porte. Nancy se libère et termine de<br />

monter l’escalier. Elle court vers sa chambre.<br />

NANCY<br />

(criant)<br />

Glen!<br />

Elle ouvre la chambre, referme. Se retournant de la porte<br />

elle découvre Glen, qui dort paisiblement.<br />

NANCY<br />

(se fixant dans le miroir)<br />

Ce n’est qu’un rêve, ce n’est pas<br />

vrai. Ce n’est qu’un rêve, ce<br />

n’est pas vrai. Ce n’est qu’un...<br />

Freddy, hurlant, jaillit du miroir qui explose fracassé.<br />

Il saisit Nancy et la jette violemment sur le lit.<br />

NANCY<br />

(luttant)<br />

Glen!<br />

Freddy et Nancy tombent en roulant, en bas du lit. Freddy<br />

saisit Nancy <strong>par</strong> la gorge et la soulève lourdement.<br />

Glen!<br />

NANCY<br />

D’un coup au menton, Nancy réussit à repousser Freddy qui<br />

tombe à terre. Elle se jette sur le lit et prend un<br />

oreiller, pour se protéger des griffes qui la menacent.<br />

Relevé, Freddy lacère d’un geste puissant l’oreiller.<br />

Nancy hurle. Au milieu des plumes, la créature<br />

cauchemardesque se trémousse. Freddy rigole, saute sur<br />

Nancy. Freddy va pour la frapper au visage, lorsque<br />

soudain le réveil sonne :


Non!<br />

NANCY<br />

(se réveillant)<br />

Glen se réveille tandis que Nancy crie, encore sous<br />

l’effet du rêve.<br />

NANCY<br />

(reprenant son souffle,<br />

accusatrice)<br />

Glen... Glen espèce de salaud!<br />

GLEN<br />

(sortant du sommeil)<br />

Ben quoi?<br />

NANCY<br />

J’t’avais demandé de<br />

m’surveiller. C’est tout ce<br />

qu’t’avais à faire, rester près<br />

de moi et me réveiller, si jamais<br />

tu voyais que le cauchemar<br />

recommençait... Et monsieur<br />

s’endort!<br />

(le frappant à la jambe)<br />

Salaud! Tu m’as laissé tomber!<br />

MARGE<br />

(en voix-off)<br />

Nancy?<br />

Glen se précipite à la fenêtre.<br />

GLEN<br />

Merde, ta mère! Aie!<br />

Chut...<br />

NANCY<br />

34.<br />

Glen dis<strong>par</strong>aît derrière la fenêtre, s’enfonçant <strong>par</strong>mi les<br />

roses.<br />

NANCY<br />

Toi reste là, bouge pas.<br />

Nancy se recouche vite et prend un air endormi. Marge<br />

ouvre la porte. Elle allume la lumière, les cheveux encore<br />

ébouriffés <strong>par</strong> le sommeil.<br />

MARGE<br />

Ça va chérie?<br />

NANCY<br />

Oui, juste un cauchemar. T’en<br />

fais pas, j’me rendors tout de<br />

suite.


MARGE<br />

(essoufflée d’avoir accouru)<br />

Bon, si tu as besoin de moi tu<br />

m’appelles, hein?<br />

NANCY<br />

(fermant les yeux)<br />

D’accord.<br />

35.<br />

Marge éteint la lumière, ferme la porte. Une fois seule,<br />

Nancy ouvre les yeux. Elle se redresse :<br />

Glen?<br />

NANCY<br />

Glen ne répond pas. Solitaire, une plume d’oreiller flotte<br />

dans le cadre vide de la fenêtre.<br />

EXT.COMMISSARIAT.NUIT<br />

Nancy et Glen courent vers l’entrée du commissariat.<br />

GLEN<br />

Tu peux me dire ce qu’on vient<br />

foutre ici?<br />

NANCY<br />

Tais-toi, suis-moi.<br />

GLEN<br />

J’te suis.<br />

Nancy et Glen franchissent la porte d’entrée.<br />

INT.COMMISSARIAT.NUIT<br />

NANCY<br />

(s’adressant au policier à<br />

l’accueil)<br />

Sergent, il faut qu’je <strong>par</strong>le à<br />

Rod Lane.<br />

LE SERGENT<br />

(blagueur)<br />

Écoute, si j’ai choisi de<br />

travailler de nuit, c’est pour<br />

être un peu peinard...<br />

NANCY<br />

(avec fermeté)<br />

C’est extrêmement urgent.


INT.CELLULE DE ROD.NUIT<br />

36.<br />

Pendant que Rod dort, une forme curieuse se met à bouger<br />

sous son drap. Le rire de Freddy sonne dans la cellule, et<br />

le drap s’enroule sur lui-même. Le drap devient alors<br />

comme une corde, qui s’approche doucement de la tête de<br />

Rod.<br />

INT.COMMISSARIAT.NUIT<br />

GLEN<br />

(persuasif)<br />

Écoutez, nous avons de bonnes<br />

raisons de penser qu’il se passe<br />

des choses étranges ici.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(sortant de son bureau)<br />

Ça, je suis tout à fait de cet<br />

avis.<br />

NANCY<br />

(fatiguée)<br />

Tu es encore là toi?<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

J’ai une enquête sur un meurtre à<br />

régler, et j’ai horreur des<br />

affaires de meurtres, surtout<br />

ceux auxquels ma fille est mêlée,<br />

mais toi, qu’est-ce que tu fiches<br />

ici? Tu as vu l’heure qu’il est?<br />

Tu devrais être couchée.<br />

NANCY<br />

J’veux voir si rien n’est arrivé<br />

à Rod.<br />

LE SERGENT<br />

Nancy, tu peux me faire<br />

confiance! Il est tranquillement<br />

en train de dormir, ne<br />

t’inquiètes pas!<br />

INT.CELLULE DE ROD.NUIT<br />

Le drap continue de s’enrouler délicatement autour de la<br />

gorge de Rod.


INT.COMMISSARIAT.NUIT<br />

NANCY<br />

(suppliante)<br />

Sois gentil, descends regarder.<br />

Je t’en prie, vas-y.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(cédant à sa fille)<br />

D’accord.<br />

(et plus sèchement)<br />

Garcia, donne-moi les clés.<br />

LE SERGENT<br />

(cherchant les clés)<br />

Bon... Alors où je les ai foutues<br />

ces clés?<br />

INT.CELLULE DE ROD.NUIT<br />

37.<br />

Le drap enserre désormais le cou du garçon. Rod se<br />

réveille, et brusquement, le drap se tend et l’éjecte hors<br />

du lit. Rod tente de se défendre mais rien n’y fait le<br />

drap l’attire inexorablement, le pendant dur au-dessus du<br />

sol.<br />

ROD<br />

Ahhh... Au secours! Au secours!<br />

Au secours!<br />

Le sergent ouvre la porte du couloir.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(apercevant Rod)<br />

Nom de dieu!<br />

La corde brise la nuque de Rod.<br />

Rod!<br />

NANCY<br />

Le sergent et le père de Nancy pénètrent dans la cellule.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(saisissant le corps de Rod)<br />

Vite! Coupe-moi ça!<br />

LE SERGENT<br />

Tenez-lui les jambes, je l’tiens.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

Je l’tiens!<br />

LE SERGENT<br />

(reculant)<br />

J’n’ai jamais vu un truc<br />

<strong>par</strong>eil...


LE PÈRE DE NANCY<br />

Tiens, prends-le Garcia.<br />

LE SERGENT<br />

Oui je l’ai!<br />

Tu l’as?<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

LE SERGENT<br />

Oui j’le tiens.<br />

38.<br />

Ils posent Rod. Nancy sanglote, sous le regard exorbité du<br />

cadavre.<br />

EXT.CIMETIERE.JOUR<br />

Une foule élégante, la famille de Rod et quelques invités,<br />

assiste à l’enterrement. Le cimetière est clairsemé de<br />

palmiers.<br />

LE PASTEUR<br />

Des cendres aux cendres, de la<br />

poussière à la pousière. Puisse<br />

Dieu prendre son âme sous sa<br />

garde. L’histoire de sa vie, et<br />

de sa mort, illustrent<br />

l’avertissement des saintes<br />

Ecritures : celui qui vivra <strong>par</strong><br />

le glaive, périra <strong>par</strong> le glaive.<br />

Mais rappelons nous aussi la mise<br />

en garde de notre seigneur : vous<br />

serez jugés, ainsi que vous avez<br />

jugés. Que l’âme de Rod Lane,<br />

repose en paix.<br />

Les cloches sonnent.<br />

EXT.EGLISE DU CIMETIERE.JOUR<br />

Nancy est seule, assise sur le <strong>par</strong>vis de l’église. Marge<br />

s’approche d’elle.<br />

MARGE<br />

Allez viens, on rentre.<br />

(accompagnant Nancy vers la<br />

voiture)<br />

Allez, monte.<br />

Le père de Nancy sort du cimetière, marchant vers elles.<br />

NANCY<br />

(à son père)<br />

L’assassin court toujours, tu<br />

sais...


LE PÈRE DE NANCY<br />

Tu crois que ce n’est pas lui qui<br />

a tué Tina? Qui alors?<br />

NANCY<br />

(s’asseyant dans la voiture)<br />

J’sais pas qui c’est. Il a le<br />

visage brûlé, et il a un p’tit<br />

chapeau sur la tête. Il a un pull<br />

rouge et vert, dégueulasse. Et il<br />

a des lames au bout des doigts,<br />

comme des griffes géantes.<br />

Son père referme la portière.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(s’adressant à Marge)<br />

Ne l’envoie pas à l’école, elle a<br />

besoin de quelques jours de<br />

repos, pour se remettre du choc.<br />

MARGE<br />

(catégorique)<br />

J’ai une bien meilleure idée! Je<br />

vais la conduire à l’hôpital.<br />

Marge rentre dans la voiture et démarre. La voiture<br />

s’éloigne, laissant le père contrarié.<br />

INT.HÔPITAL.JOUR<br />

39.<br />

Marge a emmené Nancy dans l’Institut Katja, une clinique<br />

spécialisée dans l’étude des troubles du sommeil. Nancy<br />

est allongée dans une chambre d’hôpital, entourée de<br />

docteurs. Ils pré<strong>par</strong>ent une petite série de tests.<br />

NANCY<br />

(relevant sa tête)<br />

Vous n’avez qu’à me donner un<br />

médicament, pour m’empêcher de<br />

rêver?<br />

LE DOCTEUR<br />

Tout le monde a besoin de rêver<br />

tu sais, si on ne rêve pas, on<br />

meurt (se tapotant un stylo contre<br />

la tempe)<br />

Bon, on y va?<br />

NANCY<br />

Non... (regardant Marge)


MARGE<br />

Je t’en prie, Nancy. Aie<br />

confiance.<br />

NANCY<br />

Ce n’est pas qu’j’ai pas<br />

confiance, c’est que...<br />

(regardant Marge puis le<br />

docteur)<br />

d’accord...<br />

Nancy ferme les yeux.<br />

NANCY<br />

(résignée)<br />

Allons-y.<br />

Marge embrasse sa fille.<br />

INT.HÔPITAL.JOUR<br />

MARGE<br />

(à l’infirmière)<br />

Merci mademoiselle.<br />

40.<br />

De l’autre côté, à travers une vitre, Marge et le docteur<br />

observent Nancy qui dort.<br />

LE DOCTEUR<br />

Ça dure depuis combien de temps?<br />

MARGE<br />

Depuis les meurtres. Elle allait<br />

<strong>par</strong>faitement bien avant. Elle<br />

confond ses rêves avec le réel.<br />

LE DOCTEUR<br />

En tout cas,<br />

l’électro-encéphalogramme est<br />

normal. Non rien à signaler.<br />

C’est juste une enfant tout à<br />

fait normale, qui vient de...<br />

traverser deux journées<br />

d’horreur. Ça y est... Elle s’est<br />

endormie.<br />

MARGE<br />

Enfin...<br />

(elle regarde les lignes que<br />

trace<br />

l’électro-encéphalogramme)<br />

À quoi ça correspond les rêves?<br />

LE DOCTEUR<br />

Hum... Ce sont des mystères! Un<br />

incroyable tour de magie de


LE DOCTEUR<br />

l’organisme. Franchement... nous<br />

ignorons ce qu’ils sont et nous<br />

ne savons pas d’où ils<br />

proviennent.<br />

(les lignes de<br />

l’électro-encéphalogramme se<br />

stabilisent)<br />

Voilà... Elle dort profondément à<br />

présent. Le rythme cardiaque est<br />

élevé, c’est le résultat de son<br />

angoisse, autrement elle est bien<br />

décontractée. Tout a l’air<br />

normal... elle devrait se mettre<br />

à rêver d’une minute à l’autre.<br />

(sur un moniteur, zoom sur<br />

le visage fermé de Nancy)<br />

Ralentissement des ondes bêta.<br />

(derrières ses paupières,<br />

les yeux de Nancy se mettent<br />

à bouger)<br />

Accélération du mouvement<br />

oculaire. Elle rêve certainement<br />

maintenant. Et, c’est un rêve<br />

agréable. Les <strong>par</strong>amètres sont<br />

normaux. Un cauchemar donnerait<br />

une déflexion de... plus ou<br />

moins... cinq ou six. Là, elle<br />

est à trois.<br />

Dans son sommeil, Nancy a soudain des à-coups. En<br />

bande-son, des bruitages aigus.<br />

MARGE<br />

(inquiète)<br />

Que se passe-t-il, docteur?<br />

Nancy gémit de l’autre côté de la vitre.<br />

MARGE<br />

Elle dort ou elle est réveillée?<br />

LE DOCTEUR<br />

Je n’ai jamais vu de poussées<br />

aussi fortes!<br />

Nancy a des spasmes.<br />

MARGE<br />

Où en est-elle?<br />

LE DOCTEUR<br />

J’en sais rien...<br />

Les lignes de l’électro-encéphalogramme sont de plus en<br />

plus irrégulières, voguant sur une montée d’angoisse.<br />

41.


MARGE<br />

Elle rêve?<br />

42.<br />

Nancy se soulève dans son lit en criant. Le docteur affolé<br />

se précipite dans la chambre. Marge lui emboîte le pas et<br />

accourt auprès de Nancy.<br />

MARGE<br />

(saisissant Nancy)<br />

C’est maman! C’est maman Nancy,<br />

c’est maman.<br />

Nancy se réveille, le regard vide.<br />

MARGE<br />

Ma chérie...<br />

(prenant une mèche de<br />

cheveux devenus blancs)<br />

Ses ch’veux!<br />

LE DOCTEUR<br />

Pardon excusez-moi, je vais<br />

juste...<br />

Non!<br />

NANCY<br />

(apercevant la seringue du<br />

docteur)<br />

LE DOCTEUR<br />

... te faire une piquure.<br />

NANCY<br />

(repoussant le docteur)<br />

Non!!!<br />

MARGE<br />

(qui saisit le bras<br />

ensanglanté de Nancy, griffé<br />

jusqu’à la chair)<br />

Regardez son bras! Faites quelque<br />

chose!<br />

LE DOCTEUR<br />

Une compresse!<br />

MARGE<br />

(s’adressant à Nancy)<br />

Que s’est-il passé? Ma chérie!<br />

LE DOCTEUR<br />

Ce n’est rien, là...<br />

NANCY<br />

(sortant lentement le<br />

chapeau de Freddy de dessous<br />

son drap)


NANCY<br />

J’ai rapporté quelque chose avec<br />

moi de mon cauchemar...<br />

MARGE<br />

Où as-tu trouvé ça?<br />

NANCY<br />

J’lui ai pris, il l’avait sur la<br />

tête...<br />

Marge regarde sans la comprendre.<br />

INT.MAISON DE NANCY.JOUR<br />

MARGE<br />

(<strong>par</strong>lant au téléphone)<br />

Elle prétend qu’elle le lui a<br />

pris sur la tête pendant son<br />

rêve... Non je n’suis pas<br />

cinglée, je l’tiens là, dans ma<br />

main. Mais je n’sais pas d’où il<br />

vient c’chapeau!<br />

(apercevant Nancy qui<br />

approche)<br />

À tout à l’heure.<br />

43.<br />

Marge raccroche précipitamment et pose comme si de rien<br />

n’était. Nancy entre dans la cuisine. Elle prend un mug.<br />

MARGE<br />

Tu n’as encore pas fermé l’œil de<br />

la nuit? Tu sais que le docteur a<br />

dit que si tu ne dormais pas...<br />

NANCY<br />

(lui coupant la <strong>par</strong>ole)<br />

Je deviendrais encore plus<br />

cinglée?<br />

MARGE<br />

Je n’crois pas que tu l’sois...<br />

(énervée)<br />

Et arrête de boire du café!<br />

Nancy s’écarte de sa mère.<br />

NANCY<br />

Alors? Tu as demandé à papa de<br />

faire examiner le chapeau?<br />

MARGE<br />

J’ai jeté cette saleté à la<br />

poubelle. Je ne sais pas où tu<br />

l’as trouvé ni ce que tu cherches<br />

à prouver.


Marge gifle Nancy.<br />

NANCY<br />

(affirmative)<br />

Ce que je cherche à prouver,<br />

comme tu dis, c’est ce que j’ai<br />

appris chez le spécialiste. Rod<br />

n’a pas tué Tina... Et il ne<br />

s’est pas pendu. C’est<br />

l’assassin... Il vient nous<br />

pourchasser dans notre sommeil...<br />

MARGE<br />

(s’éloignant)<br />

Mais ce n’est que ton<br />

imagination, Nancy.<br />

NANCY<br />

(sortant le chapeau de<br />

Freddy du tiroir où sa mère<br />

l’a caché)<br />

Et ça, c’est mon imagination?<br />

Touche ça...<br />

MARGE<br />

(essayant de lui reprendre<br />

le chapeau)<br />

Donne-moi cette saloperie.<br />

NANCY<br />

Il y a même son nom dessus,<br />

regarde! Fred Krueger, maman.<br />

Fred Krueger! Est-ce que c’est<br />

mon imagination? Si tu sais qui<br />

c’est, dis-le moi, <strong>par</strong>ce que<br />

maintenant c’est moi qu’il veut<br />

tuer!<br />

MARGE<br />

Nancy, aie confiance en moi,<br />

j’t’en prie. Si tu dormais tu te<br />

sentirais beaucoup mieux...<br />

NANCY<br />

(montrant le bandage sur son<br />

bras)<br />

J’me sentirait mieux? C’est ça<br />

que tu appelles se sentir mieux?<br />

Je devrais peut-être carrément me<br />

soûler la gueule avec toi... Une<br />

fois qu’on a sa dose plus rien ne<br />

peut vous atteindre on est en<br />

sécurité, hein?<br />

MARGE<br />

(attristée)<br />

Fred Krueger ne peut rien contre<br />

44.


MARGE<br />

toi, Nancy. Il est mort. Tu peux<br />

m’croire. J’en suis sûre.<br />

NANCY<br />

(s’approchant de sa mère)<br />

Alors depuis le début tu<br />

connaissais ce type... Et tu t’es<br />

comportée comme si j’inventais,<br />

comme si j’vous mentais?<br />

MARGE<br />

Tu es malade... Tu t’imagines des<br />

choses qui n’existent pas, tu...<br />

Pour te remettre tu as besoin de<br />

sommeil, ce n’est pas plus<br />

compliqué que ça.<br />

NANCY<br />

(hurlant en jetant au sol la<br />

bouteille de lait que Marge<br />

lui tend)<br />

Je r’fuse de dormir!<br />

Nancy s’éloigne vers la porte d’entrée.<br />

MARGE<br />

Nancy! Ce n’est qu’un cauchemar!<br />

NANCY<br />

(d’un ton sec)<br />

Ça va, ça suffit.<br />

Nancy sort de la maison en claquant la porte.<br />

EXT.CANAUX.JOUR<br />

45.<br />

Glen et Nancy marchent le long d’un canal, bordés <strong>par</strong> des<br />

palmiers et des clôtures résidentielles. Glen ouvre le sac<br />

d’un fast-food, ils s’engagent sur un pont en bois.<br />

GLEN<br />

Ah... moi quand j’flippe je<br />

mange.<br />

NANCY<br />

Et si tu peux pas bouffer, tu<br />

dors.<br />

GLEN<br />

J’faisais ça oui, avant. Mais...<br />

plus maintenant.<br />

Glen et Nancy s’arrêtent au milieu du pont. Glen boit son<br />

soda à la paille.


GLEN<br />

Tu sais c’que les Balinais<br />

appellent l’art des rêves?<br />

Non.<br />

NANCY<br />

GLEN<br />

(sirotant)<br />

Hmm, c’est dingue ce qu’ils font<br />

dans leurs rêves. Imagine que tu<br />

rêves que tu es en train de<br />

tomber.<br />

Alors?<br />

NANCY<br />

GLEN<br />

Bon. Au lieu de hurler... au lieu<br />

de flipper, tu t’dis bon...<br />

(Glen déballe un hamburger)<br />

... je n’ai qu’à m’imaginer que<br />

je me promène au pays des rêves,<br />

alors j’en profite pour<br />

rapporter... un poème ou une<br />

chanson.<br />

(sur un ton pédagogue)<br />

Tout leur art et leur littérature<br />

viennent de là! Au réveil ils<br />

prennent des notes... L’art pour<br />

les rêves.<br />

NANCY<br />

(ayant une idée)<br />

Et si en plein milieu d’un rêve<br />

ils rencontrent un monstre, que<br />

font-ils?<br />

GLEN<br />

(sûr de lui)<br />

Ils lui tournent le dos. Privé de<br />

leur énergie, il dis<strong>par</strong>aît.<br />

NANCY<br />

Mais si ils font pas ça, que<br />

deviennent-ils?<br />

GLEN<br />

(amusé)<br />

Ceux-là ne se réveillent pas pour<br />

raconter la suite!<br />

NANCY<br />

Ah... Génial.<br />

46.<br />

Nancy a sorti un polycopié qu’elle feuillette pendant que<br />

Glen mange. Glen le remarque, et lit le titre de la page<br />

de garde :


Nancy s’éloigne.<br />

GLEN<br />

Comment fabriquer des<br />

bombes, et des pièges<br />

anti-personnels?<br />

(à Nancy)<br />

Pourquoi tu lis ces conneries?<br />

NANCY<br />

(malicieuse)<br />

Hum, j’m’intéresse à la survie!<br />

Salut.<br />

GLEN<br />

(prenant une bouchée)<br />

Hm, tu commences à m’inquiéter<br />

toi!<br />

EXT.MAISON DE NANCY.TOMBÉE DE LA NUIT<br />

Nancy arrive devant chez elle. Stupéfaite, elle réalise<br />

que sa mère a profité de son absence pour arranger la<br />

façade.<br />

NANCY<br />

(à elle-même)<br />

Quelle conne!<br />

47.<br />

Nancy s’approche de la porte. <strong>On</strong> remarque des barreaux en<br />

fer sur toutes les fenêtres. La pergola et les rosiers<br />

jonchent au sol, arrachés. Nancy entre dans la maison.<br />

INT.MAISON DE NANCY.SOIR<br />

Nancy claque la porte d’entrée.<br />

NANCY<br />

(criant)<br />

Maman?<br />

Sortant mollement de la cuisine, Marge ap<strong>par</strong>aît en<br />

peignoir. Elle s’allume une cigarette.<br />

NANCY<br />

Pourquoi les barreaux aux<br />

fenêtres?<br />

MARGE<br />

(prenant une bouffée)<br />

Pour être en sécurité.<br />

NANCY<br />

En sécurité? De quoi on doit<br />

avoir peur!


MARGE<br />

Pas de quoi, de qui.<br />

Marge ouvre une porte donnant sur un escalier.<br />

Viens à la cave, avec moi, je<br />

vais te raconter.<br />

Nancy, à présent calmée, suit Marge dans l’escalier.<br />

INT.CAVE DE LA MAISON DE NANCY.SOIR<br />

48.<br />

Au milieu de la cave, Marge ouvre la grille d’une vieille<br />

cheminée couverte de suie.<br />

MARGE<br />

Tu veux savoir qui était Fred<br />

Krueger? C’était un tueur, une<br />

saloperie qui a tué une vingtaine<br />

de gosses, ici autrefois. Des<br />

enfants du quartier.<br />

NANCY<br />

(s’agenouillant)<br />

Oh maman...<br />

MARGE<br />

<strong>On</strong> était tous morts de peur quand<br />

il était en liberté. Mais quand<br />

il a été pris c’est devenu encore<br />

pire.<br />

Marge fouille dans la cheminée et en retire un paquet,<br />

enroulé dans du tissu usé.<br />

NANCY<br />

<strong>On</strong> l’a foutu en prison?<br />

MARGE<br />

Ça a engraissé les avocats et le<br />

juge s’est fait un nom, mais il<br />

manquait une signature, sur un<br />

des documents de police, et il a<br />

été remis en liberté.<br />

NANCY<br />

Qu’est-ce que vous avez fait,<br />

alors?<br />

MARGE<br />

Avec d’autres <strong>par</strong>ents on a<br />

recherché ce monstre après sa<br />

libération. <strong>On</strong> l’a retrouvé<br />

planqué dans une chaufferie<br />

abandonnée, où il tuait les<br />

gamins...


NANCY<br />

(encourageant sa mère)<br />

Continue.<br />

MARGE<br />

<strong>On</strong> a apporté de l’essence... et<br />

on l’a répandu sur le sol,<br />

<strong>par</strong>tout, avec une petite coulée<br />

jusqu’à la porte... Et on a<br />

attendu que les flammes aient<br />

tout brûlé.<br />

Marge fume quelques bouffées de sa cigarette. Nancy est<br />

immobile, choquée.<br />

MARGE<br />

(rassurante)<br />

Il ne peut rien contre toi. Je<br />

l’ai tué tu entends, il est mort.<br />

(déballant alors le paquet<br />

qu’elle tenait sur ses<br />

genoux)<br />

J’ai même encore ses lames!<br />

49.<br />

Marge montre le gant de Freddy à Nancy. Nancy est prise de<br />

nausées sur une bande-son distordue. Une réverbération de<br />

cloches élastiques amplifie son vertige.<br />

MARGE<br />

C’est de l’histoire ancienne...<br />

(rangeant les gants)<br />

Tu peux dormir...<br />

INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

Un walkman aux oreilles, Glen regarde la télévision. Le<br />

téléphone sonne. Glen pose ses écouteurs et décroche.<br />

Allô?<br />

GLEN<br />

NANCY<br />

(en voix-off)<br />

Salut.<br />

GLEN<br />

Ohh. Comment ça va?<br />

NANCY<br />

(en voix-off)<br />

Ça va.


INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

Nancy regarde <strong>par</strong> la fenêtre.<br />

NANCY<br />

Mets toi près de la fenêtre, ta<br />

voix m’a l’air de venir de<br />

tellement loin...<br />

INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

Glen se met à la fenêtre.<br />

INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

Ah, c’est nettement mieux.<br />

(elle sourit)<br />

INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

GLEN<br />

Ah dis-donc, ta mère t’a<br />

carrément bouclée! Jusqu’aux<br />

barreaux aux fenêtres! Ça fait<br />

combien de jours qu’tu dors pas?<br />

INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

Ça va bientôt faire une semaine.<br />

INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

NANCY<br />

(en voix-off)<br />

Et j’ai lu dans un bouquin que le<br />

record, c’est onze jours.<br />

INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

Écoute Glen, je sais qui c’est.<br />

INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

Qui donc?<br />

GLEN<br />

50.


INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

Le sadique!<br />

INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

Tu sais?<br />

Oui.<br />

GLEN<br />

NANCY<br />

(en voix-off)<br />

INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

Et je suis sûr qu’après moi tu es<br />

le suivant sur la liste.<br />

Moi?<br />

GLEN<br />

(en voix-off)<br />

INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

GLEN<br />

Et pourquoi il s’en prendrait à<br />

moi?<br />

NANCY<br />

(en voix-off)<br />

Pose pas de questions.<br />

INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

J’ai simplement besoin que tu<br />

m’aides à le coincer au moment où<br />

j’le ramènerai.<br />

INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

GLEN<br />

Où tu le ramèneras? D’où?<br />

51.


INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

Mais de mon cauchemar!<br />

INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

GLEN<br />

(la prenant à moitié au<br />

sérieux)<br />

Et comment tu comptes faire?<br />

NANCY<br />

(en voix-off)<br />

Comme pour son chapeau.<br />

INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

J’m’accroche à lui et me tu<br />

m’réveilles juste à ce moment.<br />

INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

GLEN<br />

Non mais t’es malade? Tu peux pas<br />

le faire sortir de ton rêve.<br />

INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

Et si j’y arrive pas, alors ça<br />

voudra dire que c’est moi qui<br />

suis complètement cinglée.<br />

INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

GLEN<br />

Je peux t’le dire dès maintenant,<br />

t’es folle à lier.<br />

(puis, tendrement)<br />

Je t’aime quand même.<br />

INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

Bien! Alors prouve-le, en<br />

assommant le type dès qu’tu<br />

l’verras.<br />

52.


INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

Quoi?<br />

GLEN<br />

NANCY<br />

(en voix-off)<br />

T’es bouché ou quoi?<br />

INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

J’attrape le type de mon rêve, et<br />

toi tu m’réveilles quand tu<br />

m’vois m’débattre. Je le ramène<br />

avec moi et tu lui fous un coup<br />

avec c’que t’as sous la main!<br />

INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

GLEN<br />

Avec quoi veux-tu que je lui tape<br />

dessus?<br />

NANCY<br />

(en voix-off)<br />

Ben tu choisis euh... une batte<br />

de base-ball tiens.<br />

INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

Rendez-vous devant chez moi à<br />

minuit. Et le plus important...<br />

INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

GLEN<br />

(légèrement inquiet)<br />

Le plus important?<br />

INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

Quoi que tu fasses jusque-là,<br />

surtout, fais attention, t’endors<br />

pas... Minuit?<br />

53.


INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

Glen raccroche le téléphone. Il s’allonge sur son lit,<br />

ennuyé.<br />

GLEN<br />

Oh, merde! Minuit, moi et ma<br />

batte de base-ball! Tu <strong>par</strong>les<br />

d’un con!<br />

(il remet ses écouteurs)<br />

INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

54.<br />

Nancy est assise à son bureau. Elle regarde une vieille<br />

photo de famille. Luttant pour ne pas s’endormir, elle<br />

prend plusieurs cachets anti-somnolence et les avale d’un<br />

coup.<br />

INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

La mère de Glen frappe à la porte de sa chambre.<br />

LA MÈRE DE GLEN<br />

Glen? Chéri!<br />

Elle frappe de nouveau puis ouvre la porte. Glen est<br />

endormi, la télévision allumée et le casque du walkman aux<br />

oreilles. La mère éteint la télé.<br />

LA MÈRE DE GLEN<br />

Glen. (elle le secoue)<br />

Glen!<br />

Glen sursaute et enlève ses écouteurs.<br />

LA MÈRE DE GLEN<br />

Comment peux-tu à la fois,<br />

écouter ta musique et regarder la<br />

télévision.<br />

GLEN<br />

Oh, la télé, j’regarde l’image,<br />

c’est tout. Le son je l’coupe.<br />

Miss Etats-Unis va s’mettre à<br />

poil ce soir.<br />

LA MÈRE DE GLEN<br />

(le sermonant)<br />

Tu n’l’entendras pas si tu n’as<br />

pas le son.<br />

GLEN<br />

Tu sais, pour ce qu’elle a à<br />

dire...


LA MÈRE DE GLEN<br />

J’t’en prie, fais pas l’malin,<br />

Glen. (lui caressant les cheveux)<br />

J’aimerais que tu t’couches, il<br />

est presque minuit. Dieu sait que<br />

nous avons assez eu d’émotions<br />

depuis quelques jours...<br />

GLEN<br />

J’me couche. Vous y allez aussi?<br />

LA MÈRE DE GLEN<br />

Bientôt, oui. Mais toi aussi<br />

hein, tu t’couches?<br />

55.<br />

La mère de Glen quitte la chambre. Glen se frotte les yeux<br />

pour essayer de se réveiller. Il regarde son réveil : il<br />

est onze heures quarante-deux.<br />

INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

Marge est assise au chevet de Nancy :<br />

MARGE<br />

Tout va bien maintenant, ma<br />

chérie. Le cauchemar est fini.<br />

J’t’en prie.<br />

(elle lui caresse la joue)<br />

D’accord.<br />

NANCY<br />

Nancy s’endort, les yeux fermés. S’en allant de la<br />

chambre, Marge récupère les tasses et la cafetière que<br />

Nancy avait laissées traîner. Marge éteint la lumière et<br />

ferme la porte. Nancy ouvre les yeux. Elle se lève. Elle<br />

sort une machine à café qu’elle avait dissimulé dessous<br />

son lit. Nancy se remplit une tasse et la boit rapidement.<br />

Elle ouvre sa penderie, se déshabille, enfile une chemise.<br />

Elle va à la fenêtre. De l’autre côté de la rue, dehors,<br />

le père de Glen boit une canette de bière. Nancy<br />

mécontente baisse les stores.<br />

EXT.MAISON DE GLEN.NUIT<br />

Le père de Glen regarde en direction de la chambre de<br />

Nancy. La mère de Glen le rejoint, un mug à la main.<br />

LA MÈRE DE GLEN<br />

Ne regarde pas comme ça!<br />

LE PÈRE DE GLEN<br />

Tu sais c’que j’crois? J’crois<br />

qu’la gosse d’en face est<br />

complètement givrée.


LA MÈRE DE GLEN<br />

(rigolant)<br />

Non... <strong>On</strong> n’dit pas ça, c’est<br />

méchant, la pauvre gosse... Tu<br />

veux <strong>par</strong>ler des barreaux?<br />

(secouant la tête)<br />

Marge a raison de prendre des<br />

précautions, après tout... elles<br />

vivent toutes seules. Et Nancy<br />

avait l’air si... si nerveuse ces<br />

jours-ci!<br />

LE PÈRE DE GLEN<br />

Ouais ben tu diras tout c’que tu<br />

voudras, moi, je n’veux pas que<br />

notre fils continue à la voir.<br />

INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

56.<br />

Nancy panse le bandage à son bras. Sa brûlure s’est remise<br />

à saigner. Elle regarde discrètement à travers la fenêtre.<br />

<strong>On</strong> entend le tic-tac de l’horloge. Nancy se lève, enfile<br />

un blouson, et va pour sortir de sa chambre. Mais à peine<br />

a-t-elle entre ouvert la porte qu’elle aperçoit sa mère<br />

dans le couloir. Marge est en train de sortir une<br />

bouteille d’alcool du placard. Elle s’adosse et boit à la<br />

bouteille. Nancy referme la porte en douceur, retourne<br />

dans sa chambre. Elle saisit son téléphone et compose le<br />

numéro de Glen.<br />

INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

Le téléphone sonne. Glen dort allongé, la télévision sur<br />

les genoux, le casque aux oreilles.<br />

INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

(impatiente)<br />

Allons, Glen réponds.<br />

INT.MAISON DE GLEN.NUIT<br />

La mère et le père de Glen sont dans le salon. La mère<br />

décroche le téléphone.<br />

LA MÈRE DE GLEN<br />

Allô? Oh... Une minute.<br />

(s’adressant au père, en<br />

a<strong>par</strong>té)<br />

C’est elle, elle veut <strong>par</strong>ler à<br />

Glen.


LE PÈRE DE GLEN<br />

Mais lui <strong>par</strong>ler de quoi?<br />

LA MÈRE DE GLEN<br />

(<strong>par</strong>lant dans le combiné)<br />

De quoi veux-tu lui <strong>par</strong>ler,<br />

Nancy? Ne quitte pas.<br />

(au père, en a<strong>par</strong>té)<br />

Elle dit que c’est personnel,<br />

très personnel... et très<br />

important.<br />

LE PÈRE DE GLEN<br />

(se dirigeant vers le<br />

téléphone)<br />

Passe-la-moi.<br />

(<strong>par</strong>lant dans le combiné)<br />

Hé il dort, rappelez-le demain.<br />

(il raccroche sèchement)<br />

Il faut savoir être ferme avec<br />

les gosses, allez viens. Tiens<br />

moi je sais ce qu’j’vais faire.<br />

57.<br />

Le père de Glen débranche le téléphone et éteint la<br />

lumière. Il suit ensuite sa femme, qui monte les marches<br />

de l’escalier.<br />

INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

Nancy essaie d’appeler Glen, en vain. Brutalement elle<br />

raccroche le téléphone.<br />

Occupé!<br />

NANCY<br />

Nancy se dirige vers sa fenêtre. Elle regarde la chambre<br />

de Glen, toujours allumée.<br />

NANCY<br />

Glen... Ne t’endors pas Glen,<br />

j’t’en supplie... Oh putain.<br />

(elle retourne s’asseoir sur<br />

le lit)<br />

Ohh...<br />

Soudain le téléphone sonne. Nancy décroche.<br />

Glen?<br />

NANCY<br />

Par le combiné elle entend le bruit contre du métal des<br />

griffes de Freddy, qui grincent. Elle raccroche en criant.<br />

D’un geste maladroit, elle arrache le fil.


NANCY<br />

Oh il manquait plus qu’ça... Et<br />

si il veut m’appeler<br />

maintenant...<br />

58.<br />

Nancy pose le téléphone sur le lit. Elle se dirige vers la<br />

porte et l’entre ouvre. Le couloir est vide. Elle entend<br />

le téléphone qui sonne au rez-de-chaussée. Elle franchit<br />

la porte lorsque le téléphone de sa chambre se remet à<br />

sonner. Elle se retourne, interloquée, et regarde le<br />

téléphone cassé sonnant. Elle se rapproche lentement,<br />

décroche.<br />

Allô?<br />

NANCY<br />

FREDDY<br />

(en voix-off)<br />

Ton p’tit ami c’est moi<br />

maint’nant.<br />

Une langue monstrueuse surgit du combiné et gigote sous le<br />

regard de Nancy. Terrifiée elle crie, et jette le<br />

téléphone au sol. Elle l’écrase furieusement, en panique.<br />

NANCY<br />

(regardant vers la fenêtre)<br />

Mon p’tit ami?<br />

Nancy se met soudainement à courir, et descend les<br />

escaliers vers la porte d’entrée. Elle va pour l’ouvrir<br />

mais le loquet est fermé.<br />

Non!<br />

NANCY<br />

MARGE<br />

(allongée sur un canapé dans<br />

l’obscurité, une bouteille<br />

d’alcool à la main)<br />

C’est fermé. À double tour à<br />

triple tour c’est... fermé. J’ai<br />

bouclé toute la maison. Nancy<br />

j’te promet que cette nuit tu<br />

dormiras, que tu le veuilles ou<br />

pas.<br />

NANCY<br />

(marchant vers sa mère)<br />

Donne-moi la clé, merde!<br />

MARGE<br />

Je n’l’ai pas.<br />

(se désignant)<br />

J’l’ai même pas sur moi, tu vois?


NANCY<br />

(frappant le cannapé,<br />

dépitée)<br />

Rhaa!<br />

INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

Glen est endormi sur son lit, le casque toujours aux<br />

oreilles. La télévision est allumée.<br />

SPEAKER<br />

Et bien il est maintenant minuit,<br />

c’est l’heure de vous dire bonne<br />

nuit, et à demain, sur KGFM.<br />

59.<br />

Alors que la transmission se termine, les bras de Freddy<br />

jaillissent des draps et attrapent Glen, l’emportant dans<br />

le lit.<br />

GLEN<br />

(hurlant)<br />

Non! Non! Non! Maman! Maman!<br />

Glen dis<strong>par</strong>aît à l’intérieur du matelas, comme aspiré <strong>par</strong><br />

un trou noir.<br />

INT.MAISON DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

(criant désespérément,<br />

pleurant)<br />

Glen! Glen!<br />

INT.CHAMBRE DE GLEN.NUIT<br />

Par le trou que le corps a laissé dans le matelas, une<br />

fontaine de sang jaillit. Elle asperge le plafond sans<br />

jamais vouloir s’arréter. La mère de Glen ouvre la porte<br />

en criant. Elle regarde devant elle, incrédule. Le plafond<br />

est un déluge de sang. Elle hurle sous le choc, le regard<br />

qui vacille devant l’inondation, devant le paysage<br />

insoutenable de l’intérieur de son fils pulvérisé.<br />

EXT.MAISON DE GLEN.NUIT<br />

Une ambulance débarque précipitamment.<br />

UN AMBULANCIER<br />

Viens me donner un coup de main!<br />

UN POLICIER<br />

C’est pas un brancard qu’il faut,<br />

c’est une éponge.


UN POLICIER<br />

Et ben c’est pas trop tôt! Et au<br />

premier.<br />

UN POLICIER<br />

Allons messieurs, pressons-nous!<br />

UNE FEMME<br />

Vite, vite!<br />

Hey!<br />

Vite...<br />

UN POLICIER<br />

UNE FEMME<br />

Le père de Nancy se gare. Il sort de sa voiture, marche<br />

vers la maison.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

Me dites pas qu’il a remis ça...<br />

UN POLICIER<br />

Inspecteur... Excusez-moi de,<br />

vous avoir réveillé mais je...<br />

n’ai jamais rien vu d’aussi<br />

horrible de ma vie. J’préférais<br />

venir vous chercher d’autant<br />

que... vous habitiez le quartier.<br />

Le légiste est en haut mais... ça<br />

m’étonnerait...<br />

60.<br />

Le père de Nancy se retourne et regarde vers la maison de<br />

sa fille. Il la voit qui l’observe depuis sa fenêtre. Il<br />

lui fait un signe de la main, et Nancy lui répond à<br />

distance. Il la scrute, pensif, puis se tourne et s’en va<br />

vers le lieu du crime.<br />

INT.MAISON DE GLEN.NUIT<br />

Le rez-de-chaussé est rempli de policiers qui s’affairent.<br />

Un d’eux pose un seau sur le sol pour récupérer le sang<br />

qui goutte, du plafond, depuis la chambre de Glen.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(prenant le père de Glen <strong>par</strong><br />

le bras)<br />

Vous étiez là monsieur?<br />

LE PÈRE DE GLEN<br />

(voyant le sang qui continue<br />

de couler)<br />

Oh mon dieu...


UN POLICIER<br />

(en voix-off)<br />

Allô? Ouais j’te l’passe tout de<br />

suite. Inspecteur? Votre fille.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(prenant le combiné du<br />

téléphone)<br />

Nancy?<br />

INT.MAISON DE NANCY.NUIT<br />

Nancy est dans le salon.<br />

NANCY<br />

Allô, papa? Je sais c’qui s’est<br />

passé.<br />

INT.MAISON DE GLEN.NUIT<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

Je n’suis pas encore monté<br />

là-haut.<br />

NANCY<br />

(en voix-off)<br />

Mais tu sais qu’il est mort, non?<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

D’après ce qu’on m’dit, oui.<br />

INT.MAISON DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

Écoute papa, j’ai une proposition<br />

à te faire. J’t’en prie,<br />

écoute-moi bien.<br />

INT.MAISON DE GLEN.NUIT<br />

Nancy.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

NANCY<br />

(en voix-off)<br />

Je vais retourner chercher celui<br />

qui l’a tué...<br />

61.


INT.MAISON DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

(sanglotant)<br />

Toi tiens-toi prêt à l’arrêter<br />

quand j’le ramènerais avec moi,<br />

d’accord?<br />

INT.MAISON DE GLEN.NUIT<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

Mais tu n’as qu’à me dire qui<br />

c’est, et je m’occupe de lui.<br />

INT.MAISON DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

Fred Krueger est l’assassin.<br />

INT.MAISON DE GLEN.NUIT<br />

NANCY<br />

(en voix-off)<br />

Et je suis la seule à pouvoir le<br />

coincer, il est dans chacun de<br />

mes rêves...<br />

INT.MAISON DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

Alors dans vingt minutes je, je<br />

veux qu’tu viennes ici, et que tu<br />

enfonces la porte. Tu es<br />

d’accord?<br />

INT.MAISON DE GLEN.NUIT<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

Oui, d’accord.<br />

INT.MAISON DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

Dans vingt minutes, c’est-à-dire<br />

à minuit et demi. C’qui m’...<br />

c’qui m’donne le temps<br />

d’m’endormir, avant de le<br />

retrouver.<br />

62.


INT.MAISON DE GLEN.NUIT<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

Écoute, mais oui ça c’est une<br />

excellente idée... c’est surtout<br />

de sommeil que tu as besoin.<br />

INT.MAISON DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

Mais j’peux compter sur toi?<br />

INT.MAISON DE GLEN.NUIT<br />

UN POLICIER<br />

(s’adressant au père de<br />

Nancy)<br />

Ils vous attendent en haut,<br />

inspecteur.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(reprenant le combiné)<br />

Oui oui oui je vais v’nir, mais<br />

surtout, tache de te reposer un<br />

peu, hein?<br />

INT.MAISON DE NANCY.NUIT<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(en voix-off)<br />

D’accord?<br />

D’accord.<br />

NANCY<br />

INT.MAISON DE GLEN.NUIT<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

J’t’embrasse mon p’tit.<br />

(s’adressant au policier)<br />

Parker, vous restez dehors et<br />

vous surveillez la maison de ma<br />

fille. S’il se passe quelque<br />

chose, vous m’appelez.<br />

UN POLICIER<br />

S’il se passe quoi, <strong>par</strong> exemple?<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(hésitant)<br />

Je n’en sais rien. De toute<br />

façon, je n’veux pas qu’elle<br />

vienne ici. Dans l’état où elle<br />

63.


LE PÈRE DE NANCY<br />

est, elle ne tiendrait jamais le<br />

choc.<br />

Le père de Nancy se dirige vers l’escalier.<br />

INT.MAISON DE NANCY.NUIT<br />

64.<br />

Nancy pré<strong>par</strong>e des pièges d’après son polycopié sur les<br />

bombes anti-personnelles : elle perce une ampoule, bricole<br />

un circuit électrique, tend un fil dans le salon, et<br />

au-dessus d’une porte installe une lourde masse, qu’elle<br />

relie à un mécanisme.<br />

INT.MAISON DE GLEN.NUIT<br />

Le père de Nancy arrive devant la chambre de Glen. Un<br />

policier en sort.<br />

Là aussi.<br />

UN POLICIER<br />

UN POLICIER<br />

(s’adressant au père de<br />

Nancy)<br />

Qui a pu faire ça, inspecteur?<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(abassourdi)<br />

Ah j’en sais rien. Que dit le<br />

médecin légiste?<br />

UN POLICIER<br />

Il s’est enfermé aux chiottes, il<br />

dégueule.<br />

INT.CHAMBRE DE LA MÈRE DE NANCY.NUIT<br />

Nancy est au chevet de Marge.<br />

MARGE<br />

Je sais que j’aurai du t’en<br />

<strong>par</strong>ler avant.<br />

NANCY<br />

(prenant la main de sa mère)<br />

Ça fait rien va, dors maman, tout<br />

se passera bien.<br />

MARGE<br />

Je voulais juste te protéger. Je<br />

ne comprenais pas que tu tenais à<br />

savoir. Tu vas au-devant des<br />

choses. C’est dans ta nature. Tu


MARGE<br />

es faîtes comme ça. Mais <strong>par</strong>fois,<br />

on a envie de foutre le camp, tu<br />

comprends?<br />

(elle prend une bouteille<br />

d’alcool, la ferme et la<br />

pose sur une table basse)<br />

NANCY<br />

Je t’aime tu sais?<br />

MARGE<br />

Moi aussi je t’aime, ma puce.<br />

65.<br />

Nancy borde sa mère et l’embrasse sur la joue. Elle éteint<br />

la lumière, s’en va.<br />

MARGE<br />

Bonne nuit...<br />

INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

Nancy s’approche de sa fenêtre, un réveil à la main.<br />

UN POLICIER<br />

(en voix-off)<br />

Hé! Il est là, je l’ai!<br />

NANCY<br />

(regardant son réveil)<br />

À nous deux, Krueger. <strong>On</strong> joue sur<br />

ton terrain.<br />

Dans la rue, l’ambulance quitte la maison de Glen. Nancy<br />

baisse les stores et se couche dans son lit.<br />

NANCY<br />

(fermant les yeux)<br />

À l’heure où je vais m’endormir<br />

je te prie Seigneur, de protéger<br />

mon âme, et si je meurs avant le<br />

réveil... fais moi la grâce de la<br />

prendre en ta sainte garde.<br />

Nancy regarde la montre à son poignet. Il est minuit<br />

vingt. Elle appuie et déclenche un compte à rebours.<br />

SPEAKER<br />

(d’une voix électronique)<br />

Compte à rebours sonore pour dix<br />

minutes!<br />

Nancy s’allonge. Elle regarde le plafond, résolue.


Nancy s’endort...<br />

NANCY<br />

(en voix-off)<br />

Et s’ils rencontrent un monstre<br />

dans leurs rêves?<br />

GLEN<br />

(en voix-off)<br />

Ils lui tournent le dos. Ils le<br />

privent d’énergie et il<br />

dis<strong>par</strong>aît.<br />

NANCY<br />

(en voix-off)<br />

Que deviennent ceux qui ne le<br />

font pas?<br />

GLEN<br />

(en voix-off)<br />

Ils ne sont jamais revenu pour le<br />

raconter.<br />

INT.MAISON DE NANCY.NUIT<br />

66.<br />

Nancy descend l’escalier. Elle marche dans le<br />

rez-de-chaussée. Elle ouvre une porte, descend dans la<br />

cave. Elle ouvre la porte de la cheminée où sa mère a<br />

caché les gants de Freddy. Nancy en sort le paquet mais en<br />

le secouant, elle s’aperçoit que les gants ont dis<strong>par</strong>u. <strong>On</strong><br />

entend le bruit d’une porte qui s’ouvre. Nancy va au fond<br />

de la cave, ouvre une porte, qui mène vers un autre<br />

sous-sol. Elle descend les marches de l’escalier.<br />

TINA<br />

(en voix-off)<br />

Tu as vu le même monstre que moi<br />

dans ton rêve...<br />

FREDDY<br />

(en voix-off)<br />

Cette nuit... je te tue.<br />

(il rigole sourdement)<br />

Nancy descend maintenant des escaliers métalliques en<br />

colimaçon. Des cris étouffés bourdonnent en hors champ.<br />

Nancy marche dans la chaufferie abandonnée de Freddy.<br />

TINA<br />

(en voix-off)<br />

Nancy...<br />

Nancy descend une échelle. Elle est au coeur de la<br />

chaufferie.


NANCY<br />

Krueger!<br />

(sa voix se répercute en<br />

échos)<br />

C’est moi!<br />

67.<br />

Nancy s’enfonce dans un couloir sombre, qui donne sur un<br />

autre couloir, plus éclairé. De la vapeur sort des<br />

nombreux tuyaux de chauffage. Elle continue d’avancer, et<br />

se retrouve dans une salle plus espacée, l’atelier de<br />

Freddy. Nancy voit un crucifix sous un matelas, elle le<br />

prend. Freddy ap<strong>par</strong>aît derrière un tuyau. Nancy ne<br />

l’aperçoit pas, encore, et marche. Elle arrive devant un<br />

four au pied duquel gît le casque de Glen, rouge de sang.<br />

Elle se baisse et le ramasse. Le jette, se retourne, puis<br />

marche.<br />

NANCY<br />

(décidée)<br />

Montre-toi, arrête de t’cacher,<br />

espèce de salaud!<br />

Nancy agacée, regarde sa montre et son compte à rebours<br />

qui défile. Freddy jaillit, de nulle <strong>par</strong>t, incarnant son<br />

angoisse. Nancy court soudain, criant, poursuivie <strong>par</strong><br />

Freddy. Hurlante, elle tombe d’un escalier en colimaçon et<br />

se retrouve tombant dans son jardin, chutant de sa<br />

chambre. Elle atterrie secouée au milieu des rosiers.<br />

NANCY<br />

(se relevant, repoussant les<br />

rosiers)<br />

Saletés!<br />

(s’adressant autour d’elle)<br />

Où es-tu? Où te caches-tu,<br />

Krueger? Je sais qu’tu es là!<br />

SPEAKER<br />

(d’une voix électronique)<br />

Reste dix secondes! Neuf, huit,<br />

sept, six...<br />

Nancy!<br />

FREDDY<br />

Freddy sort de dessous les rosiers.<br />

SPEAKER<br />

(d’une voix électronique)<br />

... cinq<br />

NANCY<br />

(se jetant sur Freddy)<br />

Cette fois je vais te tuer! Te<br />

tuer!!


INT.CHAMBRE DE NANCY.NUIT<br />

NANCY<br />

... Te tuer!!<br />

68.<br />

Nancy se réveille, se débattant furieusement tandis que le<br />

réveil sonne. Inquiète elle prend conscience, désem<strong>par</strong>ée,<br />

de l’absence de Freddy. Une voiture de police tinte au<br />

loin. Nancy se relève, les mains dans les cheveux :<br />

NANCY<br />

(à elle-même)<br />

C’est moi qui suis folle...<br />

Mais Freddy émerge criant de dessous le lit. Les griffes<br />

en avant, il se jette sur Nancy qui l’évite de peu.<br />

Acculée dans un coin, dans l’instant elle saisit une<br />

cafetière et la jette au visage de Freddy, qui tombe<br />

contre le lit abasourdi. Nancy s’échappe de la chambre.<br />

Elle ferme la porte derrière elle et tend un fil, qu’elle<br />

relie à la poignée.<br />

NANCY<br />

(à travers la porte)<br />

Allez vas-y Krueger! Enfonce-là<br />

cette porte, rattrape-moi si tu<br />

peux!<br />

Freddy frappe contre la porte pendant que Nancy se<br />

dérobant, ouvre une fenêtre. Elle interpelle les gens dans<br />

la rue :<br />

NANCY<br />

(s’agrippant aux barreaux)<br />

Au secours, j’le tiens! Papa!<br />

J’le tiens, j’l’ai enfermé! Papa!<br />

Où es-tu?<br />

EXT.MAISON DE GLEN.NUIT<br />

UN POLICIER<br />

(répondant à Nancy)<br />

T’affole pas, y a plus de<br />

dangers! <strong>On</strong> a bouclé le quartier!<br />

NANCY<br />

Appelez mon père, espèce de<br />

connard!<br />

INT.MAISON DE NANCY.NUIT<br />

Nancy dévale l’escalier. Elle essaie d’ouvrir la porte<br />

d’entrée fermée à clé.


Papa!<br />

NANCY<br />

Avec un <strong>par</strong>apluie Nancy fracasse la vitre du haut.<br />

NANCY<br />

Dépèche-toi, il est là j’l’ai<br />

coincé! Vite il va m’tuer moi<br />

aussi!<br />

69.<br />

A l’étage Freddy finit <strong>par</strong> ouvrir la chambre. Ce faisant<br />

il déclenche un des pièges de Nancy, et une énorme masse<br />

le frappe au ventre. Gémissant il titube, et tombe<br />

<strong>par</strong>-delà la rambarde. Il s’écrase en bas de la cage<br />

d’escalier. Nancy crie mais l’enjambe.<br />

NANCY<br />

(invitant Freddy)<br />

Allez viens Freddy, essaie<br />

d’m’attrapper!<br />

FREDDY<br />

(se relevant)<br />

Connasse, je vais t’couper en<br />

deux!<br />

En s’avançant vers Nancy, Freddy butte contre un fil<br />

qu’avait tendu Nancy. Un deuxième piège lui explose dans<br />

le dos, il s’affale. Nancy brise une fenêtre :<br />

NANCY<br />

(criant vers l’extérieur)<br />

Au secours! Viens vite papa!<br />

Viiite!<br />

EXT.MAISON DE GLEN.NUIT<br />

UN POLICIER<br />

(hésitant)<br />

Je ferai mieux de prévenir<br />

l’inspecteur.<br />

INT.MAISON DE NANCY.NUIT<br />

Freddy s’est relevé et s’approche de Nancy enragé. Nancy<br />

l’évite, hurlant. Elle descend dans la cave en éteignant<br />

les lumières.<br />

FREDDY<br />

Ah je vais te faire jouir moi, tu<br />

vas voir!<br />

(toussotant)<br />

Où es-tu passée?<br />

Nancy saisit à la hâte une bonbonne pleine d’essence. Elle<br />

s’approche de Freddy <strong>par</strong> derrière :


Ici!<br />

NANCY<br />

(lui jetant la bonbonne au<br />

visage)<br />

70.<br />

La bonbonne explose, et libère le liquide sur le corps de<br />

Freddy.<br />

FREDDY<br />

Non, non!!<br />

Nancy allume une boîte d’allumettes et la lance sur<br />

Freddy, qui se transforme instantanément en torche<br />

humaine. En poussant des râles incohérents, Freddy<br />

gesticule à la poursuite de Nancy. Alors qu’il a presque<br />

monté l’escalier, Nancy lui assène un coup sur le visage<br />

et il retombe, dégringolant jusqu’au bas de la cave. Nancy<br />

ferme la porte derrière elle. Freddy, bloqué dans la cave,<br />

se consume gigotant de douleur. Au rez-de-chaussée Nancy<br />

crie à travers une fenêtre :<br />

NANCY<br />

Ca y est, j’l’ai eu! Dépêche toi<br />

papa! Papa? Où es-tu?<br />

EXT.MAISON DE GLEN.NUIT<br />

Le père de Nancy sort en courant de la maison de Glen.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(s’adressant à un policier)<br />

Vite, appelle-moi les autres!<br />

UN POLICIER<br />

D’accord. Jeff! Garcia! V’nez<br />

vite on a besoin de vous!<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(se ruant vers la porte<br />

d’entrée)<br />

Nancy!<br />

NANCY<br />

(derrière la porte)<br />

Papa! Fais vite papa, vite...<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(essayant de l’ouvrir)<br />

C’est fermé!<br />

NANCY<br />

Enfonce la porte!<br />

UN POLICIER<br />

Faites attention, inspecteur!


LE PÈRE DE NANCY<br />

Ça y est, on y est presque!<br />

INT.MAISON DE NANCY.NUIT<br />

71.<br />

À l’intérieur l’incendie se propage. La fumée envahit la<br />

maison.<br />

NANCY<br />

C’est Krueger.<br />

Les policiers réussissent à enfoncer la porte.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(prenant Nancy dans ses<br />

bras)<br />

Nancy!<br />

NANCY<br />

(se dégageant)<br />

Papa...<br />

Nancy!<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

Les policiers suivent Nancy. Des flammes sortent de la<br />

porte de la cave, grande ouverte.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(indiquant l’escalier de la<br />

cave)<br />

Dépêchez-vous <strong>par</strong> ici, vite!<br />

Les policiers descendent vers le feu.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

(restant en haut)<br />

Vite, éteignez-moi ça.<br />

Nancy se retourne, regarde le salon.<br />

NANCY<br />

Oh, mon dieu.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

Nancy, mais qu’est-ce qu’il y a?<br />

Nancy et son père découvrent des traces de pas, en feu,<br />

sur la moquette du salon. Les pas se dirigent jusque vers<br />

l’escalier.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

Parker! Monte vite! Ça crame<br />

aussi là-haut!


UN POLICIER<br />

(en voix-off)<br />

D’accord, j’arrive!<br />

Nancy suit les traces, et monte l’escalier.<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

Nancy, mais explique-moi bon<br />

dieu!<br />

NANCY<br />

Il s’en prend à maman!<br />

INT.CHAMBRE DE LA MÈRE DE NANCY.NUIT<br />

72.<br />

Nancy entre dans la chambre de sa mère et horrifiée, elle<br />

découvre Freddy en flammes. Il est sur le lit. Nancy prend<br />

une chaise, frappe Freddy dans le dos. Il s’effondre sur<br />

le corps de Marge. Le père de Nancy accourt. Il jette une<br />

couverture sur les flammes.<br />

NANCY<br />

Attention, attention il est en<br />

dessous!<br />

Le père de Nancy enlève la couverture et l’on découvre le<br />

corps de Marge calciné. Une brume surnaturelle se met à<br />

flotter et le cadavre de Marge s’enfonce dans le lit,<br />

dis<strong>par</strong>aissant, progressivement happé <strong>par</strong> l’au-delà. Nancy<br />

et son père glacés assistent au spectacle. Marge<br />

engloutie, le lit se remet en place, comme si rien n’avait<br />

eu lieu. Nancy se jette sur le lit. Elle le frappe comme<br />

jamais, désespérée, impuissante :<br />

NANCY<br />

Maman! Maman! Maman! Oh...<br />

(se retournant vers son<br />

père)<br />

Est-ce que tu m’crois maintenant?<br />

UN POLICIER<br />

(arrivant <strong>par</strong> derrière)<br />

<strong>On</strong> a éteint le feu en bas.<br />

Le père se retourne encore hagard.<br />

UN POLICIER<br />

Ça va inspecteur?<br />

Le père de Nancy referme la porte au nez du policier.<br />

Grave, il prend Nancy dans ses bras.<br />

NANCY<br />

(le regardant)<br />

Ça va aller. Redescend<br />

maintenant. J’te rejoins dans une<br />

minute.


Le père de Nancy ouvre la porte et sort.<br />

UN POLICIER<br />

Inspecteur, elle n’a rien?<br />

LE PÈRE DE NANCY<br />

Non non, rien!<br />

73.<br />

Nancy s’approche du lit. La porte de la chambre se ferme<br />

subitement, Nancy sursaute et se retourne. Dans son dos,<br />

le lit redevient vaporeux. Une forme humaine se dessine<br />

sous le drap, le visage plein de sang.<br />

NANCY<br />

(immobile)<br />

Je sais qu’tu es là, Freddy...<br />

Des griffes transpercent le drap et Freddy le traverse, se<br />

reconstituant.<br />

FREDDY<br />

(s’approchant de Nancy)<br />

Tu croyais t’être débarrassée de<br />

moi, hein?<br />

NANCY<br />

J’te connais bien maintenant,<br />

Freddy.<br />

FREDDY<br />

Ah alors... je vais te tuer...<br />

NANCY<br />

(serrant les dents)<br />

Il est trop tard, Krueger. Je<br />

sais comment te faire<br />

dis<strong>par</strong>aître. Tu n’es qu’un<br />

cauchemar. Je sais que tu es déjà<br />

mort. Je sais que tu n’existes<br />

que dans mon sommeil.<br />

(se retournant, faisant face<br />

à Freddy)<br />

Rends-moi mes amis et ma mère,<br />

Krueger!<br />

FREDDY<br />

(lentement)<br />

Tu t’fous de moi?<br />

NANCY<br />

Je te reprends toute l’énergie<br />

que j’t’ai donnée. Tu n’es rien.<br />

(lui tournant le dos)<br />

Tu n’existes pas!


74.<br />

Nancy fait mine de s’en aller. Elle met la main sur la<br />

poignée. Freddy s’apprête à lui asséner un terrible coup<br />

de griffe quand dans un ultime flash, il dis<strong>par</strong>aît en<br />

fondu, criant, se désintégrant, s’évanouissant dans le<br />

film...<br />

EXT.MAISON DE NANCY.JOUR<br />

Nancy ouvre la porte d’entrée et regarde dans le jardin.<br />

NANCY<br />

Quel soleil! C’est éblouissant!<br />

Marge sort de la maison derrière elle.<br />

MARGE<br />

Il y a bien longtemps qu’il<br />

n’avait pas fait si beau.<br />

NANCY<br />

Tu t’sens mieux?<br />

MARGE<br />

(radieuse)<br />

Oh oui, mille fois mieux, merci!<br />

Quand on n’se rappelle plus ce<br />

qu’on a fait la veille, il ne<br />

faut plus boire. Cette fois je te<br />

l’jure, je ne touche plus à<br />

l’alcool. Ça ne me tente vraiment<br />

plus.<br />

(elle prend Nancy <strong>par</strong> les<br />

joues)<br />

Est-ce que je t’ai empêchée de<br />

dormir hier soir? T’as l’air<br />

complètement crevée.<br />

NANCY<br />

(lui souriant)<br />

Non, j’ai dû dormir un peu<br />

trop...<br />

MARGE<br />

Allez, à tout à l’heure...<br />

NANCY<br />

À tout à l’heure.<br />

Une voiture donne un coup de klaxon. Marge pousse<br />

affectueusement sa fille dans sa direction, et Nancy court<br />

rejoindre ses amis.<br />

La voilà.<br />

TINA


NANCY<br />

Salut les copains!<br />

GLEN<br />

(ouvrant la portière)<br />

C’est dingue ce brouillard!<br />

MARGE<br />

Oh, maintenant je n’m’étonne plus<br />

de rien...<br />

ROD<br />

(saluant Marge)<br />

Au revoir!<br />

Nancy embrasse Glen.<br />

TINA<br />

(prenant Nancy <strong>par</strong> les<br />

épaules)<br />

J’adore ton bermuda.<br />

75.<br />

Glen rabat le toit de sa voiture décapotable, qui tape la<br />

tête de Nancy, déclenchant un fou rire général.<br />

NANCY<br />

Ben qu’est-ce qu’il lui prend! Ha<br />

ha ha!<br />

Glen regarde le toit de sa voiture se fermer, un peu<br />

inquiet.<br />

ROD<br />

Qu’est-ce que c’est que ces<br />

conneries?<br />

La voiture ne répond plus et se ferme toute seule. Les<br />

portières se bloquent.<br />

GLEN<br />

(frappant le volant)<br />

Hé! Elle fait ça toute seule!<br />

TINA<br />

Glen! Fais pas l’con!<br />

GLEN<br />

C’est pas moi, j’t’ai dit!<br />

Les vitres se remontent.<br />

ROD<br />

Mais qu’est-ce qu’elles ont ces<br />

f’nêtres?


NANCY<br />

(prise de panique)<br />

Non! Maman!<br />

Elle regarde sa mère qui lui fait un signe de la main,<br />

toujours souriante.<br />

La voiture démarre.<br />

NANCY<br />

Non! Maman! Maman!<br />

GLEN<br />

Mais qu’est-ce qu’il se passe?<br />

NANCY<br />

(en voix-off)<br />

Maman!<br />

76.<br />

Marge sourit, en observant la voiture qui dis<strong>par</strong>aît au<br />

coin de la rue. Au bord de la route, sur la pelouse, trois<br />

jeunes filles jouent à la corde à sauter. Elles chantent :<br />

VOIX D’ENFANTS<br />

Une, deux, Freddy te coupera en<br />

deux...<br />

La main de Freddy fracasse brusquement la vitre et<br />

attrappe Marge à la gorge. Marge hurle tandis que Freddy<br />

l’aspire dans la maison.<br />

VOIX D’ENFANTS<br />

... Trois, quatre, remonte chez<br />

toi quatre à quatre. Cinq, six,<br />

n’oublie pas ton crucifix...<br />

Sept, huit, surtout ne dors pas<br />

la nuit... Neuf, dix, il est<br />

caché sous ton lit...<br />

L’image s’efface, dans un long fondu au noir. Défilant<br />

verticalement, du bas vers le haut, le générique de fin<br />

ap<strong>par</strong>aît à l’écran.<br />

© <strong>Jean</strong>-<strong>Baptiste</strong> <strong>Lenglet</strong> 2012.

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