commentariüs in epistolam pauli ad corinthios il - Archive ouverte ...

653 SUR L'EPITRE AUX GALATES. 654
ce qui reluit n'est par or (comme on dit). Il faut
donc sonder si la vérité y est. Et ainsi notons ce
qui nous est ici remonstré par sainct Paul, c'est à
sçavoir que ce n'a pas esté seulement pour un coup
qu'en l'Eglise de Dieu il y a eu un Ismael qui a
molesté Isaac : mais qu'auiourd'huy nous voyons le
semblable: et que les enfans de Dieu seront opprimez
et foulez aux pieds par ceux qui n'ont que ce
titre de primogeniture, et séduisent les simples
sous ceste ombre-là, et cachent toutes leurs puantises
et pollutions par ces belles couleurs qu'ils prétendent.
Mais quoy qu'il en soit, apprestons nous
au combat, dit sainct Paul, et que nostre foy ne
soit point abatue, quand nous verrons l'orgueil de
ceux qui sont ennemis de la vérité de Dieu, voire
ennemis domestiques, qui ne sont pas comme les
Turcs et Payens, mais tiennent garnison en l'Eglise,
et veulent estre encores les Prélats et les plus grans
supposts: quoy qu'il en soit, ne soyons point estonnez
pour cela, voyans que nous avons esté munis
par l'exemple de nostre père Isaac, à ce que
nous persistions constamment, quand nous avons
esté régénérez de la pure semence que Dieu approuve,
et par laquelle nous sommes faits ses enfans
legitimes et héritiers du royaume des cieux.
Mais ici on pourroit trouver estrange que sainct
Paul dit' qu'Isaac a esté persécuté d'Ismael son
frère: car Moyse recite seulement qu'au iour que
Isaac devoit estre sevré, et au banquet qui se fit,
Ismael se rioit comme un moqueur. Il n'est pas
dit qu'il y ait eu persecution d'Ismael sur Isaac,
selon le tesmoignage de Moyse: seulement il s'est
moqué estant desia-en aage, et pensant "bien avoir
un degré beaucoup plus haut qu'Isaac, d'autant
qu'il e8toit parvenu desia en cognoissance. Or s'il
n'y a eu que simple moquerie et risée, il ne semble
point que sainct Paul deust appeler cela persecution.
Mais il nous faut noter que les persecutions
des enfans de Dieu ne sont point 'seulement par
le glaive, par les feux, par les tortures, par les
prisons ou par quelques autres tormens du corps:
mais quand ils sont navrez des reproches que vomissent
les incrédules et ennemis de la vérité de
Dieu. Et si nous prattiquions bien ce qui est dit
au Pseaume, nous ne trouverions point estrange
ceste façon de parler dont sainct Paul use ici : car
quand il est dit que les opprobres, qui se iettent
sur la maiesté de Dieu, doivent revenir sur nous,
c'est pour monstrer qu'en cest endroit nous devons
estre délicats quand nous oyons que le nom de
Dieu est vilipendé, et qu'on derogue à son honneur
en façon que ce soit. Si on touche quelqu'un
de nous en sa renommée, il en sera fasché et esmouvera
querelle: nous verrons que pour un mot
de travers, les espees seront desgainees tous les
coups par gens choleres, et tout cela sous ombre
qu'il faut maintenir son honneur.- Si on mesdit
de nos parens, nous serons eschauffez en telles passions
qu'on ne nous pourra appaiser. Or donc quand
Dieu sera outragé, que sa maiesté sera ainsi en opprobre
en la bouche des hommes, devons nous
souffrir cela sans estre esmeus en cholere et en
passions? Et voilà pourquoy aussi il est dit quête
zèle de la maison de Dieu nous doit manger,
que nous ne devons pas estre seulement affectionnez
pour estre faschez quand on deroguera à la maiesté
de nostre Dieu, que la doctrine de salut sera
corrompue, que l'Eglise sera mise en dissipation:
mais que cela nous doit ronger le coeur. Suivant
cela maintenant, il est dit qu'Ismael a persécuté
Isaac. Si on demande, Et comment? avoit-il ni
géhenne, ni feu, ni glaive pour luy couper la gorge?
Rien de tout cela: mais il s'est mocqué de'la promesse
qui avoit esté donnée d'Isaac: car il estoit
notamment dit, Ismael vivra : mais il n'est pas pourtant
fils de la promesse : c'est en Isaac que le monde
sera bénit. Voilà donc Iesus Christ qui estoit enclos
en la personne d'Isaac, et par consequent toute
espérance de salut. Ismael par ses mocqueries a
navré, voire d'une playe mortelle, les enfans d'adoption
et tous fidèles, quand il a eu ainsi en desdain
et en opprobre le souverain bien et félicité.
Nous voyons donc maintenant ce que sainct
Paul a entendu, et comment nous avons à pratiquer
ceste doctrine, c'est que nous soyons appareillez
à ces combats intérieurs, que non seulement
nous sçachions que les Turcs et Payens seront adversaires
de l'Evangile: mais les hypocrites qui
anéantissent en tant qu'en eux est, la doctrine de
grace qui leur est offerte en nostre Seigneur Iesus
Christ, pour abolir toute dignité et toute la reverence
qui y est, en ce que nous devons magnifier
la pure libéralité de Dieu, à fin que nous cognoissions
que là gist tout nostre bien: que nous soyons
(di-ie) apprestéz à soustenir ces combats par les
ennemis domestiques qui se vanteront d'estre enfans
de Dieu, qui seront mesmes eslevez pardessus
nous, qui mettent en avant leur primogeniture,
comme si sous ceste ombre là* nous devions estre
du tout opprimez et abatus. Mais il y a encores
plus, c'est à sçavoir que nous soyonB touchez au
vif et angoissez voyans la doctrine de Dieu estre
ainsi corrompue. Il est vray que de nature nous
fuyons tousiours le mal qui nous est contraire,
comme les persecutions du corps: mais cependant
si ne faut-il pas que nous soyons tellement enveloppez
en ce monde, que nous ne préférions l'héritage
celeste à tout ce que nous estimons estre si
desirable. Et ainsi quand le nom de Dieu sera
blasphémé, qu'on taschera d'abolir la doctrine de
vie, que là nous sentions une telle angoisse en
nous, que nous ne le puissions souffrir, voire moins