commentariüs in epistolam pauli ad corinthios il - Archive ouverte ...

575 SERMONS 576
nous voler devant les yeux, nous voilà prests à
tourner bride: mais quand il y auroit plus grande
vertu, si est-ce encores que nous avons à batailler
contre beaucoup de vices: et la cognoissance n'est
pas telle que nous ne devions tous les iours prier
Dieu qu'il nous augmente la foy, et qu'il corrige le
reste d'incrédulité qui est en nous.
Voilà donc ce que chacun trouvera en son endroit:
mais si nous regardons la forme que Dieu
tient à conduire son Eglise et la gouverner, il est
certain que nous sommes en aage d'homme. Et
pourquoy? Car nous ne sommes plus detenus sous
la suiettion tant estroitte de la Loy, comme ont
esté les Peres: mais ayans nostre Seigneur Iesus
Christ, nous avons nostre recours à luy quand
nous avons péché. Nous voyons bien que nous
sommes comme souillez de taches et macules devant
Dieu: mais nostre lavement est tout appresté,
tellement qu'estans plongez par foy en la vertu du
sainct Esprit au sang de nostre Seigneur Iesus
Christ, nous sommes purs et nets, et Dieu nous
accepte. Apres nous sommes obligez à la mort
éternelle par les fautes que nous commettons iournellement
contre luy: mais le prix se trouvera en
nostre Seigneur Iesus Christ: car il s'est constitué
pleige pour nous acquitter. Voilà donc comme
nous ne sommes plus sous ceste bride à laquelle
les Peres anciens ont esté suiets, voire au regard
de Dieu et du regime qu'il tient envers nous.
Combien donc que nous sentions nos infirmitez,
cela n'empesche pas que nous ne soyons en aage
d'homme: c'est à dire que Dieu ne nous donne
une plus grande liberté et privilege qu'il n'a pas
fait à ceux qui ont vescu sous la Loy. Voilà en
somme ceste question solue. Et c'est tousiours
pour revenir à ce que i'ay touché, qu'il nous faut
magnifier la grace de Dieu envers nous, d'autant
qu'il nous a eslevez en telle dignité.
Or cependant nous voyons aussi qu'il n'est
point licite de forger un regime nouveau à la poste
des hommes, sous ombre qu'il y a de la rudesse,
ou que beaucoup ne sont point encores capables
d'estre menez et conduits d'une façon plus haute
et plus aiguë. Et nous faut bien noter cela. Car
quand les superstitions qui régnent auiourd'huy en
la Papauté ont prins leur commencement au monde,
ce n'a pas esté avec ces blasphemes diaboliques qui
y sont maintenant. Car autant de ceremonies qu'il
y a en la Papauté, qu'on appelle service de Dieu,
ce sont autant d'idolâtries, ce sont autant d'illusions
de Satan: bref, le tout est detestable devant Dieu.
Et pourquoy? Car ils imaginent que ce sont choses
nécessaires à salut, et qu'ils se peuvent racheter
par ce moyen-là et acquérir la remission de leurs
péchez. Et d'avantage ils obscurcissent nostre Sei­
gneur Iesus Christ et la grace qui nous est
apportée en luy, d'autant qu'ils pensent se racheter
par leurs satisfactions, et par ce moyen usurpent
et ravissent à ceux qui appartiennent au Fils de
Dieu. Voilà donc des vilenies par trop exécrables.
Mais encores quand tous ces badinages qu'ils ont,
ont esté introduits, on n'avoit pas encores des
resveries si lourdes. Mais il y a eu une couverture
qui a esté un peu plus favorable, c'est à sçavoir
que les hommes sont rudes et pesans, et qu'ils ne
peuvent pas comprendre les secrets du royaume
des cieux, sinon qu'on les traitte et les manie à la
façon des petis enfans. Or il est vray (comme
desia nous avons touché) que chacun se doit bien
humilier ayant cognu son infirmité: mais cependant
ce n'est pas à dire que nous choisissions des
façons de faire à nostre fantasie: il nous faut contenter
de ce que Dieu nous a ordonné. Un enfant
ne choisira pas un tuteur à sa teste: il ne luy
seroit pas permis: mais il luy sera donné par le
père: il est vray qu'il y aura d'autres moyens establis
par les loix: mais ici sainct Paul à prins la
similitude qui estoit convenable à l'argument qu'il
traitte. Si donc un père terrien a authorité d'ordonner
des tuteurs à son enfant, comment Dieu
n'aura-il une mesme puissance? Un enfant n'aura
pas licence et ne sera pas dispensé de choisir un
tuteur à son appétit.
Puis qu'ainsi est donc, à quel droict et à quel
titre voulons nous inventer ceci et cela, pour dire,
Nous sommes petis enfans: il faut donc que nous
ayons une façon convenable et propre à nostre rudesse?
Ouy, mais Dieu y a pourveu: et serons
nous plus sages que luy? quoy qu'il en soit, voilà
comme les esprits ont esté si fretillans pour inventer
beaucoup de ceremonies en l'Eglise Chrestienne,
à sçavoir pour ce qu'on voyoit beaucoup de
rudesse au commun peuple. Et bien, il faut bien
qu'on ait -ceci et cela, le Baptesme seroit trop
simple, si on n'y voyoit sinon de l'eau, et ceste
eau-là ne suffirait pas: car il y a beaucoup de
poures idiots qui sont tant hebetez, qui ne comprennent
pas que ce mystère ici veut dire, à sçavoir
que nous soyons renouvelés par nostre Seigneur
Iesus Christ. Il a donc falu avoir du
chre8me, qui représente comme une figure visible
du sainct Esprit. Apres il a falu avoir du luminaire,
après une robe blanche, après du sel, après
ceci, après cela. Et bien voilà le Baptesme bien
orné, voire à la fantasie des hommes: mais ce sont
autant de souilleures: car nostre Seigneur Iesus
Christ qui est la sagesse incomprehensible de Dieu
son Père, n'a il point assez cognu ce qui estoit profitable?
Que les hommes viennent comme de petis
crapaux, et qu'ils cerchent là ie ne sçay quoy, et
qu'ils facent à croire que ce que Iesus Christ a