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493 SUR L'EPITRE AUX GALATES. 494 devons à nostre Dieu : comme si un homme a gourmande tout son bien, et qu'il n'ait plus rien de quoy payer, sera il quitte de ses detes pour cela? Si on dit que ce n'est pas nostre faute, si est. Car d'autant que nous sommes corrompus en Adam, le péché originel nous tient assez conveincus devant Dieu et coulpables: tellement que ce n'est point excuse de dire, le suis infirme, ou bien du tout pervers, et ie ne puis mesmes avoir une seule bonne pensée comme sainct Paul le declare. Il est vray que nous ne pouvons avoir une seule bonne pensée: et que nostre coeur est plein de rebellion et de malice: que toutes nos affections sont ennemies à Dieu. L'Escriture parle ainsi, mais quoy qu'il en soit, nous ne laissons pas d'estre tousiours obligez à nostre devoir. Ainsi notons que la Loy nous est commandée, combien qu'il nous soit impossible de la faire et accomplir. Et sans cela aussi sainct Paul ne diroit pas au 8. chap, des Rom. a. 3 que Dieu a parfait par le moyen de nostre Seigneur Iesus Christ ce qui estoit impossible à la Loy. Quand il use de ce mot, il monstre bien que nous ne pouvons pas observer tout ce que Dieu nous commande. Car si nous en pouvions venir à bout, il est certain que nous serions iustifiez par ce moyen-là. Il est dit que tous ceux qui accompliront la Loy, ils vivront en icelle. S'il se pouvoit trouver un homme qui l'accomplist, il vivroit : mais sainct Paul prend cest argument la puis après pour monstrer que c'est un abus de cuider obtenir iustice en observant la Loy: car nul n'en peut venir à bout comme il est requis. Or donc quant à ce passage cognoissons que sainct Paul presuppose que nul ne peut accomplir la Loy, combien qu'il s'efforce: et mesmes encores qu'il soit gouverné par l'Esprit de Dieu, si est-ce que jamais il n'en pourra venir à bout durant ceste vie caduque, d'autant que Dieu nous distribue par mesure sa grace. Il est vray qu'il nous pourroit bien donner telle perfection qu'il n'y auroit que redire en toute nostre vie, que nous aurions une pleine conformité et plus qu'Angélique à tous ses commandemens : mais combien qu'il nous tienne en sa conduite, combien qu'il nous reforme et nous change, et qu'il nous réduise à l'obéissance de sa volonté, si e8t-ce toutesfois qu'il n'y a point de perfection. Et pourquoy? Il nous veut tousiours tenir en ceste bride d'humilité: il veut que nous cognoissions nos faiblesses et que nous en gémissions devant luy: que nous passions condamnation, sçachans que nous sommes tousiours redevables. D'au; tant donc que Dieu ne nous donne point durant ceste vie présente une telle perfection comme elle seroit requise pour observer entièrement toute sa Loy, voilà pourquoy nous ne pouvons iamais accomplir ce qu'il nous a commandé. Or puis qu'ainsi est que nous ne pouvonB pas l'accomplir, voici la sentence qui foudroyé sur nos testes, que maudit sera celuy qui n'aura accompli toutes ces choses. Il nous faut bien noter ce mot ici : car il n'est pas dit, maudit sera celuy qui aura reietté la Loy, et qui n'en aura rien observé: mais maudit sera celuy qui ne s'en sera point acquité de poinct en poinct et rie à rie (comme i'ay dit). Et voilà pourquoy aussi sainct laques afin de rabbattre l'orgueil des hommes, dit que celuy qui aura defailli en un seul poinct sera coulpable de tout. Nous trouverons cela bien rude de prime face. Et comment? que Dieu oublie tout le bien que nous aurons fait, si nous avons commis une seule faute? et entre les hommes cela sera réputé cruel, voire mais il y a la raison que sainct laques adiouste, Celuy qui a défendu de meurtrir, il a aussi bien défendu de paillarder: celuy qui a défendu de desrober, a aussi défendu tout le reste. Quand donc ie cuideray avoir satisfaict à Dieu, si ie me suis abstenu de larcin, et que cependant ie soye un paillard, n'ay-ie point violé la- maiesté de Dieu? Et ainsi il nous faut laisser tous ces partages: car si nous voulons apporter à Dieu une portion et laisser l'autre, que sera-ce? Nous voyons que les uns sont adonnez à un vice, et les autres à l'autre, chacun donc voudra avoir congé et se dispenser sous ombre qu'il feroit ceci ou cela, encores qu'il defaillist en quelque autre endroit. Mais Dieu n'a point séparé ses commandemens: il n'a point dit à l'un, Tu ne desroberas point, et à l'autre, Tu ne paillard eras point: mais il a dit à tous sans exception, Abstenez-vous de paillardise, abstenezvous de larcin et de meurtre: il faut donc que nous examinions nostre vie, non point à un seul précepte, mais à toute la Loy. Or regardons maintenant si nous en trouverons où il n'y ait que redire. Voilà donc comme il nous faut estre du tout confus, cependant que nous avons à nous iuger selon la Loy. Car s'il faloit entrer en ce conte-là, il est certain qu'Abraham qui a esté le plus excellent qu'on puisse choisir d'entre les hommes, celuy là ne laisseroit point d'estre damné. Or puis qu'ainsi est, retenons bien qu'il nest plus question de disputer: car les Papistes ne font que se mocquer quand ils parlent de la- iustice de la foy, et qu'ils gazouillent, comme si Dieu estoit un petit enfant.. Gardons - nous de telle outrecuidance: mais que nous concevions une telle frayeur quand Dieu prononce cest arrest si horrible, Que maudits sont tous ceux qui n'accompliront point tout ce qui est escrit, que nous soyons là tremblans devant sa maiesté, et que mesmes chacun soit son iuge: et que nous passions condamnation volontaire, et que estans convaincus de toutes nos pouretez, nous
495 SERMONS 496 gémissions voyans que tout nous défaut, et que nous embrassions cependant la iustice laquelle nous est offerte par nostre Seigneur Iesus Christ, prenans là tout nostre contentement et repos. Or nous nous prosternerons devant, la maiesté de nostre bon Dieu en cognoissance de nos fautes, le prians qu'il nous les face tellement sentir, que ce soit non seulement pour luy en demander pardon avec une vraye repentance, mais aussi pour le prier GALATES. Chap. Ill v. 11—14. Nous avons veu que si les hommes ne sont plus qu'insensez, maugré qu'ils en ayent, il faut bien qu'ils cerchent leur salut en nostre Seigneur Iesus Christ. Car s'ils se tiennent à la Loy, ils ne trouveront là que damnation, comme il a esté monstre: et que chacun est assez convaincu par son experience. Et de faict, quand sainct Paul en l'Epistre aux Romains veut monstrer que les hommes s'abusent trop lourdement, se fians en leurs propres mérites, il dit que la Loy ne peut apporter que ire et vengeance de Dieu. Car combien que desia nous soyons condamnez assez, devant que Dieu a ouvert la bouche pour prononcer sentence aucune contre nous, si est-ce toutesfois que nostre mal est encores engrave par la Loy, quand il est dit, que si nous sommes transgresseurs d'un seul article, nous sommes ennemis de Dieu et faut que son ire soit enflambee sur nous. Que gagnerons nous à disputer davantage, quand cest arrest a esté prononcé par le iuge celeste? Il n'y a appel ni réplique. Ainsi donc pour avoir une vraye cognoissance de l'Evangile, sçachons qu'il nous faut tenir du tout à nostre Seigneur Iesus Christ, à fin que nous n'ayons autre fiance de salut qu'en sa pure miséricorde, et pour ce faire qu'un chacun regarde à sa vie: car si les hommes s'examinent sans hypocrisie et fiction, il est certain que la cause sera tantost vuidee. Les Papistes ne veulent nullement accorder que la seule foy nous rende agréables à Dieu, c'est pour ce que iamais ils n'ont senti à bon escient que c'estoit de venir à conte devant le siege iudicial de Dieu, mais ils ont esté comme gazouillans en l'ombre. Il ne se faut donc point esbahir s'ils ne se pardonnent tout: mais voici comme nous serons amenez à la vérité et à la pure et droite religion: c'est que chacun regarde quelle est sa vie. Or il est certain que DIXHUITIEME SERMON. qu'il nous supporte tout le temps de nostre vie, iusques à ce qu'il nous ait retirez en son royaume. Et cependant que de plus en plus il nous reforme par son sainct Esprit, à fin que nous ayons tesmoignage d'estre vrayement du nombre de ses enfans, quand nous aurons esté ainsi gouvernez en sa crainte, et que nous ne cercherons sinon à nous adonner du tout à luy. Ainsi nous dirons tous, Dieu tout puissant, père celeste etc. s'il n'y avoit à dire qu'une seule minute, nous voilà desia coulpables de mort éternelle. Or est-il ainsi qu'un chacun se trouvera pécheur: non seulement pour un, mais pour cent mille: non point en une seule faute, mais en des espèces infinies. Quand nous aurons cognu tant de misères en nous, Dieu en cognoit encores plus sans comparaison que nous ne pouvons pas faire: car il voit beaucoup plus clair que nous, comme dit sainct lean en sa Canonique. Voilà donc le procès tout vuidé. Voilà la sentence donnée, que nous ne pouvons pas estre iustifiez par la Loy, mais par la seule foy. Or maintenant l'Apostre poursuit ce propos et use d'un autre argument, c'est que si nous cerchons iustice en la Loy, elle sera toute diverse à celle que les enfans de Dieu et ses eleus obtiennent par foy. Car quelle est la iustice de la Loy (dit-il)? Qui fera ses choses il vivra en icelles: c'est à dire quiconque obéit à Dieu et fait ses commandemans, il aura salut pour son loyer. Voilà une belle promesse: mais de quoy nous profiteraelle? Si nous voulons essayer de faire ce qui nous est commandé en perfection, il est certain que chacun verra que Dieu nous monstre nostre condamnation tant plus grieve, comme s'il l'avoit mise au devant. Quel seroit nostre salut, s'il le faloit cercher en nous mesmes et le desservir? Quand donc nous avons que Dieu est prest de rémunérer tous ceux qui l'auront servi et honoré en observant sa Loy, et que la vie éternelle leur est apprestee, il nous semble bien devant qu'estre venus plus outre, que nous avons gagné merveilles. Quoy? Voilà Dieu qui s'oblige à nous et nous monstre que nous sommes asseurez de l'héritage de paradis, . moyennant que nous le servions, accomplissans sa volonté: mais quand nous aurons fait comparaison de nostre vie avec sa doctrine, nous trouverons que Dieu en se monstrant si liberal et bénin envers nous, de s'obliger quand nous l'aurons servi, et
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gémissions voyans que tout nous défaut, et que<br />
nous embrassions cependant la iustice laquelle nous<br />
est offerte par nostre Seigneur Iesus Christ, prenans<br />
là tout nostre contentement et repos.<br />
Or nous nous prosternerons devant, la maiesté<br />
de nostre bon Dieu en cognoissance de nos fautes,<br />
le prians qu'<strong>il</strong> nous les face tellement sentir, que<br />
ce soit non seulement pour luy en demander pardon<br />
avec une vraye repentance, mais aussi pour le prier<br />
GALATES. Chap. Ill v. 11—14.<br />
Nous avons veu que si les hommes ne sont<br />
plus qu'<strong>in</strong>sensez, maugré qu'<strong>il</strong>s en ayent, <strong>il</strong> faut<br />
bien qu'<strong>il</strong>s cerchent leur salut en nostre Seigneur<br />
Iesus Christ. Car s'<strong>il</strong>s se tiennent à la Loy, <strong>il</strong>s<br />
ne trouveront là que damnation, comme <strong>il</strong> a esté<br />
monstre: et que chacun est assez conva<strong>in</strong>cu par<br />
son experience. Et de faict, quand sa<strong>in</strong>ct Paul en<br />
l'Epistre aux Roma<strong>in</strong>s veut monstrer que les<br />
hommes s'abusent trop lourdement, se fians en<br />
leurs propres mérites, <strong>il</strong> dit que la Loy ne peut<br />
apporter que ire et vengeance de Dieu. Car combien<br />
que desia nous soyons condamnez assez, devant<br />
que Dieu a ouvert la bouche pour prononcer<br />
sentence aucune contre nous, si est-ce toutesfois<br />
que nostre mal est encores engrave par la Loy,<br />
quand <strong>il</strong> est dit, que si nous sommes transgresseurs<br />
d'un seul article, nous sommes ennemis de Dieu et<br />
faut que son ire soit enflambee sur nous. Que<br />
gagnerons nous à disputer davantage, quand cest<br />
arrest a esté prononcé par le iuge celeste? Il<br />
n'y a appel ni réplique. A<strong>in</strong>si donc pour avoir<br />
une vraye cognoissance de l'Evang<strong>il</strong>e, sçachons qu'<strong>il</strong><br />
nous faut tenir du tout à nostre Seigneur Iesus<br />
Christ, à f<strong>in</strong> que nous n'ayons autre fiance de<br />
salut qu'en sa pure miséricorde, et pour ce faire<br />
qu'un chacun regarde à sa vie: car si les hommes<br />
s'exam<strong>in</strong>ent sans hypocrisie et fiction, <strong>il</strong> est certa<strong>in</strong><br />
que la cause sera tantost vuidee. Les Papistes ne<br />
veulent nullement accorder que la seule foy nous<br />
rende agréables à Dieu, c'est pour ce que iamais<br />
<strong>il</strong>s n'ont senti à bon escient que c'estoit de venir<br />
à conte devant le siege iudicial de Dieu, mais <strong>il</strong>s<br />
ont esté comme gazou<strong>il</strong>lans en l'ombre. Il ne se<br />
faut donc po<strong>in</strong>t esbahir s'<strong>il</strong>s ne se pardonnent tout:<br />
mais voici comme nous serons amenez à la vérité<br />
et à la pure et droite religion: c'est que chacun<br />
regarde quelle est sa vie. Or <strong>il</strong> est certa<strong>in</strong> que<br />
DIXHUITIEME SERMON.<br />
qu'<strong>il</strong> nous supporte tout le temps de nostre vie,<br />
iusques à ce qu'<strong>il</strong> nous ait retirez en son royaume.<br />
Et cependant que de plus en plus <strong>il</strong> nous reforme<br />
par son sa<strong>in</strong>ct Esprit, à f<strong>in</strong> que nous ayons tesmoignage<br />
d'estre vrayement du nombre de ses enfans,<br />
quand nous aurons esté a<strong>in</strong>si gouvernez en<br />
sa cra<strong>in</strong>te, et que nous ne cercherons s<strong>in</strong>on à nous<br />
<strong>ad</strong>onner du tout à luy. A<strong>in</strong>si nous dirons tous,<br />
Dieu tout puissant, père celeste etc.<br />
s'<strong>il</strong> n'y avoit à dire qu'une seule m<strong>in</strong>ute, nous vo<strong>il</strong>à<br />
desia coulpables de mort éternelle. Or est-<strong>il</strong> a<strong>in</strong>si<br />
qu'un chacun se trouvera pécheur: non seulement<br />
pour un, mais pour cent m<strong>il</strong>le: non po<strong>in</strong>t en une<br />
seule faute, mais en des espèces <strong>in</strong>f<strong>in</strong>ies. Quand nous<br />
aurons cognu tant de misères en nous, Dieu en<br />
cognoit encores plus sans comparaison que nous<br />
ne pouvons pas faire: car <strong>il</strong> voit beaucoup plus<br />
clair que nous, comme dit sa<strong>in</strong>ct lean en sa Canonique.<br />
Vo<strong>il</strong>à donc le procès tout vuidé. Vo<strong>il</strong>à<br />
la sentence donnée, que nous ne pouvons pas estre<br />
iustifiez par la Loy, mais par la seule foy.<br />
Or ma<strong>in</strong>tenant l'Apostre poursuit ce propos<br />
et use d'un autre argument, c'est que si nous<br />
cerchons iustice en la Loy, elle sera toute diverse<br />
à celle que les enfans de Dieu et ses eleus obtiennent<br />
par foy. Car quelle est la iustice de la Loy<br />
(dit-<strong>il</strong>)? Qui fera ses choses <strong>il</strong> vivra en icelles:<br />
c'est à dire quiconque obéit à Dieu et fait ses<br />
commandemans, <strong>il</strong> aura salut pour son loyer. Vo<strong>il</strong>à<br />
une belle promesse: mais de quoy nous profiteraelle?<br />
Si nous voulons essayer de faire ce qui nous<br />
est commandé en perfection, <strong>il</strong> est certa<strong>in</strong> que<br />
chacun verra que Dieu nous monstre nostre condamnation<br />
tant plus grieve, comme s'<strong>il</strong> l'avoit mise<br />
au devant. Quel seroit nostre salut, s'<strong>il</strong> le faloit<br />
cercher en nous mesmes et le desservir? Quand<br />
donc nous avons que Dieu est prest de rémunérer<br />
tous ceux qui l'auront servi et honoré en observant<br />
sa Loy, et que la vie éternelle leur est apprestee,<br />
<strong>il</strong> nous semble bien devant qu'estre venus plus<br />
outre, que nous avons gagné merve<strong>il</strong>les. Quoy?<br />
Vo<strong>il</strong>à Dieu qui s'oblige à nous et nous monstre<br />
que nous sommes asseurez de l'héritage de par<strong>ad</strong>is, .<br />
moyennant que nous le servions, accomplissans sa<br />
volonté: mais quand nous aurons fait comparaison<br />
de nostre vie avec sa doctr<strong>in</strong>e, nous trouverons<br />
que Dieu en se monstrant si liberal et bén<strong>in</strong> envers<br />
nous, de s'obliger quand nous l'aurons servi, et