commentariüs in epistolam pauli ad corinthios il - Archive ouverte ...

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que c'est d'estre Chrestiens, c'est à sçavoir que
l'homme soit du tout confus en soy, cognoissant
qu'il n'apporte que péché et malediction. Et au
reste qu'il vienne à Dieu, qu'il se sente desnué de
tous mérites, à fin d'estre revestu de la grace de
nostre Seigneur Iesus Christ, car il ne suffit point
d'estre confus en nous, comme nous voyons que
Cain estant comme en Géhenne, confesse sa faute:
voire mais ce n'est sinon avec desespoir, et par
consequent qu'il n'y a que murmures et blasphemes
à l'encontre de Dieu. Autant en est-il de tous
reprouvez. Mais il faut que nous goustions tellement
l'amour de nostre Dieu, que nous puissions
nous appuyer dessus, et que nous soyons certifiez
qu'il nous recevra en venant à l'Evangile: voire
en y venant en telle confiance que ce soit, non
pas pour ce que nous le cuidons ou que nostre
fantasîe est telle : mais pour ce qu'il nous l'a
promis, et que nous ne pouvons estre frustrez
nous attendant à luy, et nous tenans asseurez de
sa parole.
Voilà en somme que c'est d'estre de la foy:
car il nous faut tousiours regarder la dispute que
sainct Paul mené. Il combat contre ceux qui pretendoyent
d'acquérir iustice devant Dieu par les
oeuvres de la Loy. S'il n'y avoit que ce mot là,
estre de la foy, et que nous ne regardissions point
quel argument sainct Paul a ici à traitter, ceste
façon de parler nous seroit obscure. Mais quand
nous voyons que sainct Paul notamment declare
que tous ceux qui prétendent d'acquérir grace envers
Dieu par leurs mérites sont enflez d'orgueil,
et que leur présomption leur ferme la porte de
Paradis, et que Dieu ne daigne pas les regarder
pour ce qu'ils le fraudent de l'honneur qui luy
appartient, et qu'ils se veulent comme revestir de
ses plumes, et qu'ils sont sacrileges en le despouillant
de sa iustice, pour ce que sainct Paul
traitte cest argument là, maintenant il n'y a nulle
difficulté qu'ils n'estiment tous ceux là estre de la
foy qui s'estans deffiez d'eux mesmes, sont du tout
désespérez, et neantmoins retournent à Iesus Christ,
s'arrestent à luy, et s'y appuyent et espèrent entièrement.
Ceux là donc sont les vrays enfans
d'Abraham. Or regardons maintenant combien il
y a peu de Chrestiens au monde. Il est vray que
ce mot trottera en la bouche de chacun: mais cependant
on le profane vilainement: et faudra bien
que Dieu désavoue tous ceux qui prétendent ainsi
d'estre des siens, comme en la Papauté chacun se
fondera sur son baptesme, et il est certain que là
nous avons du costé de Dieu un gage infallible de
nostre salut. Mais quoy? ils ne prennent que le
signe visible et le séparent de nostre Seigneur
Iesus Christ. Or il est vray que les Papistes ne
cognoissent rien de ce qui est ici monstre par
sainct Paul : et qui pis est, ils ont leur franc arbitre,
leurs mérites, leurs satisfactions: ils ont ces badinages-là,
voire ces abominations que le diable a
forgées, au lieu du service de Dieu, lequel ils
mettent sous le pié et le falsifient'; ils sont donc
convaincus assez ouvertement'de n'avoir nulle Chrestienté
en eux.
Or de nostre part combien que nous n'ayons
pas les idolatries et superstitions qui régnent entre
les Papistes, si est-ce que nous ne sommes pas
fondez tellement en l'Evangile qu'un chacun puisse
franchement s'offrir à Dieu, et que nous l'invoquions
en pleine liberté, nous laissans conduire paisiblement
par luy: mais nous en verrons beaucoup qui
sont poures bestes. Il est vray qu'ils protesteront
assez de ne rien tenir de ces abus et superstitions
du Pape: mais quand on leur parle des rudimens
de l'Evangile et des principes, ils ne sçavent que
c'est. Les autres qui cuident estre grans clercs,
quand ce viendra à l'examen monstreront qu'il n'y
a eu qu'hypocrisie, et qu'ils ont parlé comme pies
en cage (ainsi qu'on dit), d'autant plus donc nous
faut-il bien retenir ce qui nous est ici remonstré
par sainct Paul, c'est à sçavoir que nous ne pouvons
pas estre enfans d'Abraham ni membres de
l'Eglise, sinon que nous y venions avec la foy de
l'Evangile, tellement qu'un chacun renonce à ce
qu'il avoit conceu d'opinion de ses mérites, et que
nous sçachions que nous sommes du tout damnez
estans comme abysmez en desespoir : que nous
ayons nostre refuge à la pure grace de Dieu et à
la miséricorde qu'il nous propose en nostre Seigneur
Iesus Christ: que nous venions nous plonger
en ce sang qu'il a espandu pour nostre purgation:
que nous cognoissions que là toutes nos dettes
nous sont quittées: que l'ire de Dieu et sa vengeance
est appaisee, tellement que nous ne pouvons
faillir de le trouver propice. Mais pour mieux
comprendre jceoi, regardons aussi comment Abraham
a creu à Dieu: et il nous faut avoir la deffinition
de ce mot de foy, pour ce que sans cela toute
ceste doctrine seroit comme inutile. Et desia nous
avons déclaré que les Papistes, quand ils combatent
contre nous, ne sçavent pourquoy et n'ont nulle
adresse: mais ils heurtent à tort et à travers et à
l'aventure. Car iamais n'ont entendu que c'estoit
de foy et le monstrent assez: ie di les plus grans
docteurs: car ils diront que la foy est de croire en
Dieu, et s'ils croyent en Dieu, aussi font les diables.
Or quand sainct Paul parle ici de la foy, il n'entend
pas que nous ayons seulement quelque conjecture
qu'il y a un Dieu regnant au ciel : mais qu'il
faut que nous le tenions comme nostre Père: que
nous en soyons tout asseurez en vertu des promesses
qu'il nous donne : que nous soyons tellement
conjoints à nostre Seigneur Iesus Christ, que nous