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Tout ceci, mon très aimable confrère, sans préjudice de la sincère amitié que je vous ai vouée depuis
l'heureux jour où j'ai eu l'avantage de vous connaître.
Recevez, etc
H. LAIDET. — Février 1854.
Cette lettre demeura sans réponse dans le journal; mais j'en reçus une manuscrite, par la poste,
quelques jours après; lettre précieuse, que je garde soigneusement, mais que je ne rends pas publique,
ne voulant en aucune manière désobliger un ami.
La polémique en resta là:
Et le combat finit faute d'un combattant.
On voit que ce n'est pas d'aujourd'hui que je suis opposé aux innovations modernes. Les occupations
médicales m'avaient toujours détourné de reprendre la discussion: et d'ailleurs l'occasion ne s'offrant
pas favorable, j'y avais presque renoncé mais puisqu'on m'attaque à cette heure, lorsque je suis très
inoffensif, il faut bien que je me défende et que j'expose au public les raisons péremptoires de mon
opposition.
Voulez-vous que nous traduisions ensemble, en français, quelques phrases, comme exemples
d'orthographe provençale moderne? Les voici:
J'ai acheté deux cheval qui sont jeune, bon et beau.
Ces homme sont très original.
PHRASES AMPHIBOLOGIQUES:
Plus d'honneur que d'honneur (s?).
Femme (s?) vertueuse, vous serez bénie.
Homme (s?) méchant, vous serez maudit.
Je vais dîné. J'ai dîné.
Etc., etc., etc.
Un de mes amis, faisant partie de la société des poètes provençaux modernes; l'un des plus spirituels,
des plus agréables, des plus sensibles; plusieurs fois couronné dans les concours; a fait paraître un joli
volume dont il a eu la bonté de me faire hommage. Ce livre charmant contient des poésies délicieuses
que j'ai lues avec le plus vif plaisir. Mais, quelle orthographe!.. Jugez-en par le titre de la couverture:
AMOUR E PLOUR.
Qu'a-t-il voulu dire? Va-t-il chanter son amour ou ses amours? l'amour ou les amours? un pleur ou les
pleurs?
— Amphibologie.
Et pourtant cet aimable poète est plein de cœur, de grâce?
de naturel et d'imagination... mais, je le répète, quelle orthographe de règle!... quel dommage qu'un
esprit aussi poétique ait adopté cette erreur orthographique!
Puisque je suis en train de discuter et de prouver la vérité, la légitimité de la cause que je défends, je
prendrai la liberté de parler d'un autre poète provençal (et français aussi) qui a bien voulu me faire
l'honneur de m'offrir l'échange d'une de ses œuvres nombreuses avec la mienne (il a déjà écrit 36,OOO
vers et il espère aller jusqu'à 1OO,OOO, si Dieu lui prête vie). J'ai accepté cet échange avec
empressement et reconnaissance, car il est très avantageux pour moi sous tous les rapports. C'est dans
ce livre que j'ai trouvé, en guise de préface, une lettre que cet auteur a écrite à M. Pierre Larousse, pour
le remercier d'un article biographique qu'il lui a consacré dans son grand Dictionnaire du XIXe siècle.
Voici quelques passages de cette lettre:
— Je profiterai de l'occasion qui m'est offerte, en parlant de la langue provençale, pour aborder
quelque peu la question orthographique.
Les poètes provençaux s'étaient divisés en deux camps: les uns, que nous appellerons, si vous voulez,
les classiques, persistaient à charger notre idiome de lettres parasites et inutiles qui en détruisaient
l'harmonie et les gracieuses assonances (Depuis si longtemps, on ne s'en était pas aperçu!); les autres,