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134 EMPREINTE URBAINE

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La flèche,<br />

chef-d’œuvre de charpenterie<br />

Comme plus tard à la cathédrale de Beauvais (2) , et plutôt<br />

que de poursuivre la reconstruction des transepts par de<br />

nouvelles façades ou la nef, on dressa en 1511 une flèche<br />

gigantesque à la croisée.<br />

« le clocher (la plus rare pièce qui se pust voir) estoit posé<br />

sur le milieu de ladite Eglise, Et élevé depuis l’entablement<br />

de la Charpenterie, en haut de trente sept toises, Et avoit<br />

de hauteur depuis le pavé jusqu’au faîste en tout cinquante<br />

quatre toises. Il était artistiquement travaillé Et embelli de<br />

plusieurs ornements de plomb doré Et argenté, comme aussi<br />

les enfaisteaux de toute la couverture estoient de plomb doré<br />

avec des fleurs de semblable matière qui paraissoient au dessus<br />

avec fort bonne grâce : et la Croix dudit Clocher qui estoit de<br />

cuivre doré, estoit posée sur une pomme qui avoit dix pieds de<br />

circonférance pareillement de cuivre doré fort poli et reluisant »<br />

(Annales écclesiae Aurelianensis de Charles de La Saussaye<br />

(1615) reprises par Symphorien Guyon dans son « Histoire<br />

d’Orléans » en 1647).<br />

Cette boule de plus de trois mètres de diamètre couronnant<br />

la flèche avait impressionné Rabelais qui la décrit en 1532 :<br />

« Pour cela, l’on fit dix-sept grosses boules de cuivre, plus grosses<br />

que celle qui est à Rome sur l’aiguille de Virgile (3) , agencées de<br />

telle façon qu’on les ouvrait par le milieu et qu’on les fermait<br />

avec un ressort. Dans l’une entra un de ses serviteurs portant<br />

une lanterne et un flambeau allumé, et Pantagruel l’avala<br />

comme une petite pilule. (...) De ces pilules d’airain vous en<br />

avez une à Orléans, sur le clocher de l’église Sainte-Croix… »<br />

(Pantagruel, Livre Second, chapitre 33)<br />

C’est contre cet orgueilleux ouvrage, illustré par le tableau des<br />

échevins (milieu 16 e ?) et la gravure sur bois de 1600 (4) , que se<br />

concentra la haine des réformés. Le 24 mars 1568, par l’usage<br />

simultané de la mine sur les piliers de croisée et la traction<br />

d’attelages d’hommes et de chevaux, la flèche s’effondra en<br />

emportant l’ensemble de la croisée et du chœur.<br />

Du « Grand Abatis » ne demeurèrent debout que les parties<br />

basses du chœur et les chapelles rayonnantes (fin 13 e<br />

siècle), la sacristie (début 14 e siècle) et les 4 e et 5 e travées de<br />

la nef (16 e siècle) préservées sur toute leur hauteur grâce à<br />

la présence du massif occidental roman.<br />

De la flèche disparue (FIG. 1) subsiste tout autour de la<br />

croisée du transept de la cathédrale reconstruite un système<br />

de contrebutement inégalé : des arcs boutants diagonaux<br />

stabilisent la croisée et s’enchevêtrent avec les arcs boutants<br />

perpendiculaires aux quatre vaisseaux (5) .<br />

La nef<br />

Élévations intérieures<br />

La nef centrale possède une élévation à trois niveaux :<br />

grandes arcades, triforium, fenêtres hautes.<br />

Le triforium, avec sa balustrade percée de quatre-feuilles<br />

et orné de lancettes trilobées, est suffisamment archaïsant<br />

pour citer sans doute le modèle rayonnant du chœur<br />

du 13 e siècle alors que les bases prismatiques des piliers,<br />

les moulures à nez de cochon des nervures et l’absence<br />

de chapiteaux procèdent du vocabulaire du gothique<br />

flamboyant finissant.<br />

Dans les voûtes des bas-côtés (6) , sont conservées les clefs<br />

à armoiries de chanoines décédés l’un en 1531 l’autre en<br />

1570. Dans le premier collatéral, les portes d’accès aux<br />

escaliers de fond en comble ont conservé une sculpture<br />

flamboyante de gâbles et de figures en haut-relief qui<br />

portent les stigmates des conflits religieux.<br />

Charpente<br />

La charpente de la nef (FIG. 2 ET 3) est à chevrons formant<br />

fermes. Les quatre travées centrales, épargnées par le<br />

saccage de 1568, possèdent des poinçons richement<br />

sculptés (bagues issues du répertoire du gothique<br />

flamboyant). Par le système à deux niveaux de faux entraits<br />

et le contreventement longitudinal à deux niveaux de sousfaitières,<br />

le modèle de charpente est très proche de celui de<br />

la nef de Saint Eustache à Paris.<br />

(2) La campagne de reconstruction de la fl èche remonte à 1563-1569. Elle s’effondre de nouveau<br />

en 1573.<br />

(3) Il s’agit probablement de l’obélisque du Vatican, le seul de Rome demeuré debout au début du 16 e<br />

siècle. La boule qui le couronnait avant son déplacement du cirque de Néron en 1586 était supposée<br />

abriter les cendres de Jules César.<br />

(4) Gravure servant de frontispice à la circulaire imprimée en 1600 pour annoncer le Jubilé de Sainte-<br />

Croix (Paris, Bibliothèque nationale de France - estampes, Va.9i.)<br />

(5) La fl èche actuelle, la quatrième qu’ait connue l’édifi ce, a été érigée par Boeswildvald en 1858 sur<br />

le modèle de celle d’Amiens, datant de 1533. Elle n’a pas le gigantisme de la première.<br />

(6) Elles furent préservées de la campagne de 1793 qui marqua la suppression des « signes de la féodalité<br />

et de la superstition » grâce à la présence à cet emplacement de la loge abritant la maquette<br />

de la cathédrale.<br />

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