134 EMPREINTE URBAINE

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204 <strong>EMPREINTE</strong> <strong>URBAINE</strong> - Les espaces religieux de la ville 3 4 grandes baies ajourant le mur oriental (FIG. 2). Certaines caractéristiques architecturales, telles la fluidité des lignes, l’importance de la surface murale ou le dessin simplifié des réseaux de baies, se retrouvent dans des constructions orléanaises, comme Saint-Aignan, ou à Notre-Dame de Cléry. Ainsi, Notre-Dame-de-Recouvrance, par certains aspects, appartient toujours à l’esthétique du gothique flamboyant, en témoignent par exemple les bases prismatiques d’où s’élancent les nervures, ou le voûtement traditionnel à voûte d’ogives des chapelles latérales. Cependant, la multiplication des liernes permet de dessiner des losanges et d’évoquer, par le biais des recoupements, les voûtes à caissons d’Italie (FIG. 3). Ce procédé offre également la possibilité de disposer des clefs pendantes, parfois véritables réductions d’éléments architecturés, pour souligner chaque intersection. Si la voûte d’ogives perdure, les maîtres maçon ressentent néanmoins la nécessité de recourir au nouveau répertoire de profils. Cela se retrouve avec les grandes arcades dont l’arc adopte, comme celui des FIG. 3 Notre-Dame-de-Recouvrance voûte d’une chapelle du collatéral sud (photo Laurent Mazuy) FIG. 4 Notre-Dame-de-Recouvrance portail latéral nord (photo Laurent Mazuy) chapelles, un tracé plein-cintre : la modénature, en dépit de certains effets de pénétration, alterne moulures plates et rondes et présente ainsi un aspect atténué, différent des profils acérés gothiques. De même, l’intrusion d’impostes au sommet des meneaux atteste la volonté d’articuler les remplages des baies et de renoncer à la continuité des lignes. En dépit d’une homogénéité certaine, Notre-Damede-Recouvrance a fait l’objet de plusieurs phases de construction. Ainsi, le clocher, sur lequel s’appuient les arcades de la nef est-il antérieur à cette dernière. Par ailleurs, son portail comporte un encadrement flamboyant : une succession de pinacles, desquels naît une accolade sommée d’un fleuron et à l’extrados orné de choux frisés, encadre une porte surmontée d’une baie, regroupée dans une voussure unique. Cette composition, au fort élan vertical, contraste avec les tracés plein-cintre des arcs intérieurs et plus encore du portail nord, véritable manifeste de la seconde Renaissance (FIG. 4).
Le passage de la première Renaissance à la Renaissance classique à travers l’exemple des portails À proximité immédiate de la cathédrale, le grand Cimetière, vaste quadrilatère (d’environ 105 m x 75 m), possédait sur chacun de ces côtés une galerie couverte dont la construction s’est étalée de 1492 au milieu du 16 e siècle (11) . De grandes arcades, aux piliers reposant sur des bases prismatiques, étaient destinées à recevoir un voûtement d’ogives complété d’une lierne couvert d’une charpente (12) . En dépit des destructions et des modifications apportées au 19 e siècle, l’ancienne porte d’entrée sud-ouest (déplacée) constitue le principal morceau d’architecture de la première Renaissance encore conservé (13) . Des pilastres, couronnés de niches, portent un entablement surmonté d’un fronton (14) et abrite la porte en arc plein-cintre (FIG. 5). Il s’agit d’une composition édiculaire (15) multipliant les emprunts au répertoire « à l’antique ». Rares sont les champs décoratifs laissés nus à l’exception de la frise. Les moulures de l’arc comme le fût des pilastres sont recouverts de motifs italianisants : palmettes, rinceaux, tresses à œillet, candélabres, chutes d’ornements… Toutefois, le maître d’œuvre responsable de cette composition combine les éléments du nouveau répertoire à ses habitudes constructives et ornementales. Ainsi, les niches, en saillie, animent les pilastres qui se prolongent par un ressaut dans la frise et la corniche, elles-mêmes recoupées au centre. On a donc une compartimentation de l’entablement, preuve de la volonté de souligner les lignes ascendantes au détriment des horizontales. Son choix illustre cette « assimilation créatrice » (16) qui résulte de l’originale hybridation entre un savoir-faire gothique et un vocabulaire importé d’outremonts et permet de situer la réalisation de la porte dans les années 1530 (17) . La façade sud de la Salle Saint-Lazare de l’ancien hôtel- Dieu (détruit sous la Monarchie de Juillet), comportait un portail datant de la fin des années 1530 (18) , aujourd’hui en partie remonté dans la cour de l’Hôtel des Créneaux. Deux pilastres au chapiteau corinthien portaient un entablement délimité latéralement par des ressauts (FIG. 6 ET 7). Le décor, moins recouvrant qu’au Grand Cimetière, se concentrait principalement sur la frise, ornée au centre de putti porteurs de guirlandes enserrant un écu (19) , tandis que des (11) JARRY E. 1912 : p. 300-301 et JARRY E. 1915. (12) Un contrat du 4 août 1526 mentionne la charpenterie à poser sur l’une des « galleries neufves », ALIX 2002 : t. II, annexe XXIV, p. 46-47. (13) La galerie orientale comporte, par exemple, une niche à coquille. (14) La porte a fait l’objet de restaurations, notamment ses parties hautes. Si, comme le confi rme l’iconographie ancienne (lithographie de Charles Pensée), un fronton sommait la porte, soit celui-ci était nu, soit il portait un décor qui fut remplacé - à cause des destructions protestantes ? - au 17 e siècle et que l’on observe encore aujourd’hui. (15) Adaptée à une façade d’église, ce type de composition édiculaire se retrouve pour la première fois en France à l’église Saint-Symphorien de Tours construite entre 1526 et 1531 (BAS, GUIGNARD 1909 : p. 330). (16) Cette expression est empruntée à Jean Guillaume (GUILLAUME 1983). (17) Certains auteurs, suivant Vergnaud-Romagnési, attribuaient cet ouvrage à Charles Viart, alias Pierre Biart, affi rmation sans fondement, LESUEUR 1926 : notamment p. 323-327. (18) BOUVIER 1914 : p. 121 et suivantes. FIG. 5 Grand Cimetière ancienne porte d’entrée sud-ouest. (photo Laurent Mazuy) (19) Deux autres écus sont présents sur la frise sans qu’il soit possible de bien préciser, d’après la lithographie, la nature exacte de ces fi gures zoomorphes. 205
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