198 <strong>EMPREINTE</strong> <strong>URBAINE</strong> - Le bâti domestique orléanais au 16 e siècle FIG. 17 Maison anciennement 48 rue des Hôtelleries (détruite) relevé en élévation de la façade antérieure, fin du 16 e siècle (vers 1599 ?). À droite, façade en pierre de la maison dite de Jean Dallibert, 6 place du Châtelet (vers 1540-1550). (dessin de L. Vaudoyer dans : DE BAUDOT, PERRAULT-DABOT 1856 : pl. 89, F, G) 17 18 19 FIG. 18 14 rue Sainte-Catherine façade antérieure (entre 1621 [d]), ossature à losanges, décors de feuilles d’acanthe, sablière unique moulurée et tête du tirant ornée de stries. (photo Laurent Mazuy) FIG. 19 Maison anciennement 10 rue du Coulon (détruite : fin 16 e siècle ou début 17 e siècle ?) galerie sur cour avec termes, aquarelle d’H. Chouppe, « Maison rue du Coulon 10 », 10 juillet 1876. (Orléans, Musée historique et archéologique de l’orléanais)
sablières moulurées du bâtiment postérieur et de la galerie présentent un renflement à la manière d’un entablement à frise bombée. Parmi ces exemples, la maison anciennement 48 rue des Hôtelleries (détruite), se distinguait par l’emploi d’une paroi en grille à poteaux (et potelets pour le surcroît) très espacés et systématiquement sculptés de pilastres sur consoles à volutes, recoupés par l’appui filant des baies (FIG. 17). Par comparaison aux autres exemples datés par dendrochronologie, le millésime de 1599 sculpté dans un écu sur sa façade pourrait bien correspondre à l’année de sa construction (51) . Le pan-de-bois à losanges et son décor Quant aux ossatures dites à losanges, elles se composent d’un réseau très resserré de décharges, de guettes et d’éperons assemblés à mi-bois, qui forme un étroit quadrillage de losanges très décoratif, parfois placé légèrement en retrait par rapport aux éléments de l’armature principale dans les exemples les plus anciens (sablières, poteaux de fenêtres ou de fond : 16 rue de la Poterne, 45 rue de la Charpenterie vers 1580 [d] (52) ). Sur ces deux dernières maisons, ainsi que sur celles du 14 rue Sainte-Catherine (1621 [d]) et anciennement 73 rue de la Charpenterie (début du 17 e siècle), les appuis sont filants, les sablières sont moulurées à l’imitation d’entablement et les réseaux de losange sont séparés par des poteaux sculptés de pilastres des différents ordres de l’architecture classique (53) . Aux 73 rue de la Charpenterie et 14 rue Sainte-Catherine, ces pilastres s’accompagnaient de consoles à volutes sculptées de feuilles d’acanthe et de rosaces en médaillons (FIG. 18). À noter, sur cette dernière maison, les têtes coniques des traditionnels tirants en fer liant les solives du plafond aux sablières participent également au décor : des stries convergent vers le centre à la manière d’un bouton de fleur. Fenêtres et lucarnes Suite à l’évolution des formats des menuiseries, les baies principales aux étages de ces maisons ne possèdent plus de traverses (qui sont intégrées aux châssis) mais conservent des meneaux. Au milieu du 16 e siècle, quelques lucarnes à meneau reprennent les formes des baies géminées visibles dans l’architecture en pierre classique : le linteau est échancré de deux petits arcs plein-cintre (295 rue de Bourgogne ; lucarnes en bois que l’on retrouve sur des édifices en pierre : 6 place du Cardinal-Touchet, 17 rue d’Escures avec planches de rive trilobées « gothiques »). D’autres lucarnes à meneau sont munies d’un poinçon à clef pendante sculptée dans lequel s’assemblent les planches de rives formant un arc plein-cintre (19 place de la Bascule, 14 rue Sainte-Catherine, 73 rue de la Charpenterie, 271 rue de Bourgogne 17 e siècle) ou polylobées (258 rue de Bourgogne). Autres exemples de décors sculptés Enfin citons un dernier exemple de décor remarquable, dans la cour de la maison anciennement 10 rue du Coulon (54) (détruite, fin du 16 e ou première moitié du 17 e siècle), la galerie présentait des supports anthropomorphes, cariatides ou atlantes engainés sur les potelets du garde-corps (FIG. 19), à la manière des termes dont les modèles se diffusent grâce aux traités d’architecture du milieu et de la seconde moitié du 16 e siècle (55) . À titre de comparaison, remarquons que cariatides et atlantes engainés sont utilisés précocement sur les façades de deux maisons en pierre de riches commerçants, en particulier pour orner les jours d’imposte de la porte d’entrée : ils supportent l’entablement à la maison dite de la Coquille 7 rue de la Pierre-Percée (vers 1543-1544 [d]), ou reçoivent l’archivolte à la maison dite de Jean Dallibert (FIG. 17), 6 place du Châtelet (56) (années 1540). D’autres motifs sculptés de la Renaissance classique sont conservés aujourd’hui sur quelques élévations : pilastre à fût cannelé et chapiteau ionique en rez-de-chaussée et modillons à volutes portant l’appui de la fenêtre d’étage (51) Façade dessinée par L. Vaudoyer dans DE BAUDOT, PERRAULT-DABOT 1856 : pl. 89, F. Le millésime est reproduit dans PENSEE 1849 : pl. 60. (52) MAZUY, ALIX, AUBANTON 2006 : p. 21-24. (53) 45 rue de la Charpenterie : pilastres doriques au premier étage et corinthiens au second. 14 rue Sainte-Catherine : pilastres toscans aux fûts couverts de grandes feuilles d’acanthe. 73 rue de la Charpenterie : pilastres corinthiens cannelés, sablière à renfl ement évoquant une frise bombée, les deux entretoises servant d’appuis aux jours hauts sont sculptées de godrons ou de rinceaux. (54) ALIX 2002 : t. 2, p. 170-171. Aquarelle de J.-H. Chouppe, « Maison rue du Coulon 10 », 10 juillet 1876 Orléans, Musée historique et archéologique de l’orléanais, 2626). Aquarelle de J.-L Loyau, « L’intérieur de la cour rue du Coulon n° 10 », 19 e siècle (ibidem, 2812). Lithographie, « Maison rue du Coulon d’après une aquarelle de Joyau (vers 1865) », dans MERLIN (E.), Le vieil Orléans, 30 eauxfortes, 1878, pl. 27. (55) Comme par exemple : les modèles pour cheminées de Sebastiano Serlio, Quarto Libro, 1537 ; certaines planches du recueil gravé de termes de Jacques I er Androuet Du Cerceau, vers 1550-1560 (Paris, Bibliothèque nationale de France, Cab. Est., Ed. 2 d) ; les modèles d’Hugues Sambin, Œuvre de la diversité des termes dont on use en architecture, 1572). Dans la construction en pan-de-bois du Val de Loire, plusieurs exemples de supports anthropomorphes datant du dernier tiers du 16 e siècle sont également connus sur les façades de maisons d’Angers (LETELLIER, BIGUET 1986 : p. 42). 199