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<strong>EMPREINTE</strong> <strong>URBAINE</strong> - Le bâti domestique orléanais au 16 e siècle<br />
enduites : façade donnant sur une ruelle ou une impasse, ou<br />
façade postérieure ouvrant sur une cour (17) . L’exemple le plus<br />
ancien de ce type de décor à pinacles est attesté à la maison<br />
de Jacques Boucher (dite maison de Jeanne d’Arc), trésorier<br />
du duc, anciennement 33-37 rue du Tabour (première<br />
moitié du 15 e siècle, détruite en 1940 (18) ). En définitif, ces<br />
sculptures ornaient une quarantaine de maisons à panneaux à<br />
croix de Saint-André (soit la moitié du corpus des habitations<br />
présentant ce type d’ossature), et il n’a été observé que sur<br />
une seule maison dont la façade est en pan-de-bois à grille (9<br />
rue Stanislas-Julien : pinacles sur piédroits des baies, première<br />
moitié du 16 e siècle (19) ).<br />
Ces pinacles reposent sur des bases prismatiques, parfois<br />
portées par de petits culots, fréquemment en forme de<br />
pyramide renversée simplement moulurée (20) . À partir des<br />
années 1520, ils pouvaient également être figurés (visages ou<br />
petits personnages en buste) (21) et ils se retrouvent dans les<br />
intérieurs d’habitations en pierre contemporaines, notamment<br />
autour des portes piétonnes percées dans des cloisons en<br />
pan-de-bois à grille et surmontées d’un linteau orné d’une<br />
accolade : cloison au 12 rue Notre-Dame-de-Recouvrance<br />
(couloir au rez-de-chaussée du corps de bâtiment postérieur),<br />
cage d’escalier au 4 rue des Trois-Maillets (1527 [d]) ou<br />
cloison au 15 rue de l’Ételon (couloir du rez-de-chaussée) (22) .<br />
Dans ces trois exemples, il s’agit toujours de personnages<br />
assez stéréotypés : un homme encapuchonné (FIG. 8), une<br />
représentation d’un noble ou d’un bourgeois la tête coiffée<br />
d’un chapeau, un putto ailé présentant parfois un objet,<br />
comme un écu (23) . Enfin, c’est également à partir des années<br />
1520 que certains culots en façade reçoivent des motifs de<br />
feuilles imbriquées, qui se répètent sur les bagues des pinacles<br />
(32 rue des Pastoureaux, 32 rue du Poirier) (FIG. 4 ET 7).<br />
Les maisons d’angle<br />
Les maisons situées à l’angle de deux rues étaient<br />
couramment valorisées, puisqu’elles bénéficiaient d’une<br />
situation privilégiée avec un certain recul permettant<br />
d’observer leur décor. Ainsi, le poteau cornier, constitué<br />
d’un bois long, peut recevoir un traitement sculpté dont<br />
les motifs se répètent sur toute sa hauteur. Aux étages<br />
du 124 rue de Bourgogne/1 rue du Bourdon-Blanc<br />
(1501 [d]), chaque face du poteau comporte deux pinacles<br />
sur bases prismatiques qui sont reliés par de petites<br />
arcatures « flamboyantes » semblables à des réseaux de baies<br />
miniaturisées. La tête de ce poteau est légèrement élargie<br />
et traitée comme un support mouluré (cavet et chanfrein<br />
obliques descendent sur l’arête externe du poteau). Des<br />
pinacles ornaient également les poteaux corniers des façades<br />
de la maison anciennement située entre la rue Saint-Étienne<br />
et l’impasse Sainte-Colombe. Sur la maison 23 rue du Poirier/<br />
rue de l’Empereur (milieu ou deuxième tiers du 16 e siècle),<br />
le décor bûché du poteau cornier ne peut être restitué avec<br />
précision mais il s’apparente à un pilastre. Ce décor était<br />
renforcé par les deux poteaux d’étage situés à proximité,<br />
un sur chaque façade, sculpté d’un pilastre à fût lisse et<br />
(17) Décors conservés. Sur ruelle ou impasse : 4 rue de la Cholerie, 32 rue du Poirier (1524 [d]). Sur<br />
cour : 14 place du Châtelet (1497 [d]), 282 rue de Bourgogne (vers 1505 [d]), 32 rue des Pastoureaux<br />
(façade du bâtiment postérieur). Au 83 rue de la Charpenterie (1479 [d]), seuls les pinacles<br />
ornant le piédroit oriental de la demi-croisée située à chaque étage ont été épargnés du bûchage<br />
puisqu’ils étaient protégés par un enduit posé lors d’une campagne de réfection du hourdis de la<br />
tourelle d’escalier jouxtant la façade.<br />
(18) JARRY 1909 : p. 54-55.<br />
(19) La façade principale sur cour de la maison anciennement située entre la rue Saint-Étienne et l’impasse<br />
Sainte-Colombe forme un cas particulier : le rez-de-chaussée à croix de Saint-André ornées<br />
de pinacles et d’accolades était surmonté d’un haut surcroît en pan-de-bois à grille également<br />
sculpté (vers 1500). De grandes pièces obliques (éperons) décorées de moulures s’assemblaient<br />
dans des poteaux sculptés de pinacles de plans quadrangulaires et munis de crochets (façades<br />
démontées au début des années 1960 ; 4 photographies conservées aux Archives départementales<br />
du Loiret, Cliché vue 506-509 ; une gravure dans : HUET, PIGELET 1900: p. 209).<br />
(20) Notons qu’au 83 rue de la Charpenterie, les bases prismatiques ne reposent pas sur un culot mais<br />
comportent une plinthe très développée en hauteur.<br />
(21) Exemples de culots fi gurés : 54 rue de la Charpenterie (vers 1530-1540 [d]), anciennement 1 rue<br />
de la Vieille-Peignerie (détruite), anciennement 20 rue de l’Empereur (détruite en 1844).<br />
(22) ALIX 2002: t. 2, p. 85.<br />
FIG. 8<br />
4 rue des<br />
Trois-Maillets<br />
(maison en<br />
pierre de taille)<br />
cloison nord<br />
de la cage<br />
d’escalier du<br />
second étage,<br />
culot est de la<br />
porte d’entrée<br />
représentant<br />
un acrobate<br />
ou un fou<br />
(1527 [d]).<br />
(photo Clément Alix)<br />
(23) Ces représentations caractéristiques de la sculpture du « gothique fl amboyant », souvent stéréotypées,<br />
se remarquent très fréquemment sur les édifi ces en pierre de la même époque, où elles ornent<br />
les culots des larmiers enveloppant des croisées et des demi-croisées (ALIX 2008 : p. 22-24).