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<strong>EMPREINTE</strong> <strong>URBAINE</strong> - Le bâti domestique orléanais au 16 e siècle<br />
chambrée qui comporte un corps de moulures contrastées<br />
formant larmier, comme par exemple au 32 rue des<br />
Pastoureaux (bâtiment sur cour, vers 1520-1530) où la<br />
doucine est surmontée d’un listel jouant le rôle de coupelarme<br />
(10) . La moulure convexe du larmier est fréquemment<br />
couverte de motifs d’imbrications (écailles) et s’accompagne<br />
parfois d’une frise de motifs répétitifs (arceaux au 54 rue<br />
de la Charpenterie, vers 1530-1540 [d]). Les extrémités du<br />
corps de moulures de la sablière de chambrée s’achèvent<br />
souvent dans la gueule d’un animal sculpté (FIG. 2), qui<br />
constitue le seul motif singulier de la façade (11) . À l’instar<br />
des pans-de-bois de plusieurs régions (Normandie,<br />
Bourgogne, Val de Loire, Berry, etc.), cet engoulant forme<br />
un bon motif d’amortissement des moulures de la sablière,<br />
qui a perdu le rôle effrayant et le caractère symbolique qu’il<br />
pouvait revêtir en tant que décor dans certaines églises. Cet<br />
ornement d’origine médiéval reste d’un emploi courant<br />
jusqu’au début du 17 e siècle à Orléans où il est associé à<br />
des motifs classiques (12) . Il est d’un usage très prisé dans<br />
la première moitié du 16 e siècle puisqu’il orne également<br />
les poutres des plafonds d’une quinzaine d’habitations en<br />
pierre ou plusieurs entraits de lucarnes.<br />
Les cas où le décor s’étend à la sablière de plancher<br />
correspondent à des exemples antérieurs à la fin du<br />
15 e siècle : frise de fleurs à quatre pétales au 64-66 rue<br />
de la Charpenterie (1466 [d]) ; frise de gros trilobes se<br />
développant sur les deux sablières superposées au 266 rue<br />
de Bourgogne (entre 1473-1488 [d]).<br />
Traitement sculpté des fenêtres d’étages<br />
et des panneaux pleins : pinacles et accolades<br />
Hormis les sablières, le décor se concentrait principalement<br />
autour des fenêtres. La mise en valeur la plus simple consiste<br />
à les orner d’une moulure, un chanfrein, parfois amorti<br />
par un petit congé triangulaire, qui adoucit les angles<br />
des encadrements tout en favorisant la pénétration de la<br />
lumière vers l’intérieur (13) . Les appuis des croisées et demicroisées<br />
sont systématiquement moulurés et leur partie<br />
supérieure vient déborder sur le devant des piédroits (14) . Un<br />
décor sculpté permet également la valorisation des fenêtres<br />
principales dont les piédroits sont ornés de pinacles à<br />
crochets (15) sur bases prismatiques, reliés par des accolades<br />
situées sur les traverses (FIG. 1 ET 2). Pour les croisées, la partie<br />
supérieure du meneau était sculptée d’un fleuron, tandis<br />
qu’un court pinacle était sculpté sur le potelet central<br />
de l’allège (FIG. 7). Dans certaines maisons, ces motifs de<br />
couvrement s’étendent sur les autres éléments de la structure<br />
afin de mettre en valeur les panneaux pleins : les poteaux<br />
d’étage reçoivent des pinacles et les entretoises séparant les<br />
panneaux de croix de Saint-André sont sculptées d’un arc<br />
surbaissé ou d’un arc en accolade (FIG. 5 ET 6). Comme sur<br />
les traverses, ces gâbles présentent un tracé assez aplati de<br />
manière à s’adapter à la hauteur réduite de l’entretoise.<br />
Si ce décor « gothique » peut-être restitué sur de nombreuses<br />
façades sur rue où il a été bûché au 18 e ou 19 e siècle lors<br />
de l’agrandissement des fenêtres ou de l’installation des<br />
lattis pour enduits couvrants (16) , en revanche, il subsiste en<br />
partie ou dans son intégralité sur quelques rares élévations<br />
situées en position secondaire et n’ayant jamais été<br />
(10) Cependant, il subsiste quelque exemples de façade à sablière unique. Au 264 rue de Bourgogne,<br />
exemple le plus ancien attesté par la dendrochronologie (première moitié du 15 e siècle), la sablière<br />
unique est moulurée dans sa partie supérieure d’un quart-de-rond dégagé par une moulure<br />
concave. Au 4 rue de la Cholerie (façade postérieure, milieu ou seconde moitié du 15 e siècle),<br />
la doucine ornant la sablière unique retombe à l’aplomb des arêtes de chaque poteau du niveau<br />
inférieur : elle dessine ainsi une série d’arcs déprimés dont les écoinçons renferment un motif :<br />
bouillon de feuillage, petit visage humain, etc.<br />
(11) Sculptures d’engoulants conservées : 264 rue de Bourgogne (remaniement du comble entre<br />
1493-1524 [d]), 32 rue du Poirier (1524 [d]). Sculptures bûchées ayant laissé des traces : 11 rue<br />
de Vaudour (1507 [d]), 54 rue de la Charpenterie, etc.<br />
(12) Pour l’utilisation du motif de l’engoulant, ALIX 2008 : p. 28-37. Sur les pans-de-bois, l’exemple le<br />
plus tardif se trouve sur la sablière unique du premier étage de la maison 258 rue de Bourgogne<br />
(pan-de-bois à grille : entre 1596-1621 [d] et certainement autour de 1602) : le motif a été bûché<br />
mais il subsiste trois écailles du cou sur l’about est de la sablière. la même date, il orne les pièces<br />
de bois formant linteau des devantures de boutiques de certaines maisons en pierre ou en brique<br />
et pierre (4 place du Châtelet ; anciennement 3 place du Châtelet, détruite).<br />
(13) Pour les fenêtres, les exemples de moulures plus complexes sont très rares : petit cavet surmonté<br />
d’un quart-de-rond au 266 rue de Bourgogne (entre 1473-1488 [d]) et au 4 rue de la Cholerie (milieu<br />
ou seconde moitié du 15 e siècle).<br />
(14) Exemples conservés partiellement : demi-croisées du 33 rue de l’Empereur (maison sud, 1493 [d]),<br />
croisées du 35 rue de l’Empereur (maison nord, 1483 [d]). La moulure bûchée en partie supérieure<br />
se composait, de bas en haut, d’une bande surmontée d’un quart-de-rond et d’un cavet. Au 32 rue<br />
des Pastoureaux, l’appui est encore sculpté d’un motif de torsade.<br />
(15) Les pinacles relevés sur plusieurs maisons de la fi n du 15 e et du début du 16 e siècle présentent de<br />
fortes similitudes (largeurs et proportions identiques) : le corps passe du plan carré au plan polygonal<br />
(à 45°) insuffl ant un effet de dynamisme, tandis qu’au sommet les couronnes de crochets<br />
sont régulièrement espacées (FIG. 14).<br />
(16) Décors bûchés ou détruits. Motifs cantonnés aux baies : 103 rue de Bourgogne, 124 rue de Bourgogne/1<br />
rue du Bourdon-Blanc, 126 rue de Bourgogne, 260 rue de Bourgogne (poteaux à pinacles en<br />
remplois sur les extrémités des étages), 62-66 rue de la Charpenterie, 4 place du Châtelet (façade<br />
postérieure, enduite dans la deuxième moitié du 20 e siècle), 32 rue de la Charpenterie, 54 rue de<br />
la Charpenterie, 37 rue des Charretiers, 10 rue de la Cholerie (maison nord), 7 rue de l’Écu-d’Or,<br />
35 rue de l’Empereur (maison nord), 3 et 5 rue du Petit-Puits, 15 rue du Poirier, 2 rue de la Poterne<br />
(façade postérieure), 48 rue Sainte-Catherine, 64 rue Sainte-Catherine (poteaux à pinacles en<br />
remploi dans l’allège du deuxième étage), 9 rue de la Tour (façade postérieure), 11 rue de Vaudour,<br />
anciennement 30 rue des Hôtelleries (jouxtant l’ancienne chapelle Saint-Jacques), anciennement<br />
51 rue des Hôtelleleries, anciennement 1 rue de la Vieille-Peignerie (détruite). Motifs s’étendant<br />
sur les panneaux pleins : 109 rue de Bourgogne, 221 rue de Bourgogne, 280-282 rue de Bourgogne,<br />
10 rue de la Cholerie (maison sud), 33 rue Étienne-Dolet, 18 rue des Pastoureaux/28 rue<br />
Étienne-Dolet, anciennement 20 rue de l’Empereur (détruite en 1844), anciennement 3 place du<br />
Marché-à-la-Volaille (rive sud de la place du Châtelet, détruite au 19 e siècle), maison anciennement<br />
située entre la rue Saint-Étienne et l’impasse Sainte-Colombe.