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152 <strong>EMPREINTE</strong> <strong>URBAINE</strong> - Les nouveaux espaces urbains<br />
La façade sud du corps principal résulte d’un remaniement<br />
intervenu probablement à la fin du chantier comme le<br />
confirme l’étude de la charpente de comble (62) : elle était<br />
originellement prévue en retrait vers nord, et le mur actuel<br />
correspond à une avancée gagnée sur l’espace de la cour (63) .<br />
Ce corps de bâtiment principal est jouxté à l’ouest par<br />
deux courtes ailes perpendiculaires, bordant la rue<br />
des Huguenots, une en retour sur la cour (au sud) et<br />
l’autre donnant sur le jardin (au nord). L’aile sud, peutêtre<br />
à usage d’offices, se remarque notamment pour sa<br />
charpente semblable à celle du corps principal, mais<br />
surtout pour sa salle en rez-de-chaussée couverte de deux<br />
voûtes d’ogives moulurées de cavets reposants sur des<br />
culots géométriques (64) . L’aile en retour nord correspond<br />
visiblement à un remaniement intervenu rapidement<br />
après l’édification du corps de logis principal (65) ; sa partie<br />
inférieure ouvrait sur le jardin par une série d’arcades pleincintre<br />
formant peut-être un portique.<br />
Le gros-œuvre de l’ensemble est constitué de parements de<br />
briques liées par des joints rubanés. Certaines boutisses sont<br />
foncées afin de créer un dessin de losanges noirs, à l’image<br />
des appareils mixtes polychromes ornant les résidences<br />
aristocratiques du val de Loire (aile Louis XII du château de<br />
Blois, château de Gien reconstruit pour Anne de Beaujeu,<br />
etc.). Le motif varie seulement sur la façade sur jardin,<br />
où ces losanges sont imbriqués à l’intérieur de losanges<br />
plus grands. La pierre est réservée aux chaînes d’angles,<br />
aux corniches et aux encadrements de baies moulurés de<br />
doubles tores séparés par des gorges. Le décor sculpté des<br />
façades extérieures est formé de motifs italianisants : frises<br />
d’oves avec ou sans dards, de feuilles d’eau, ou de rosaces<br />
ornant les corniches des tourelles d’escaliers ou les culs-delampe<br />
des échauguettes. Sur l’escalier d’honneur (tourelle<br />
ouest), ces motifs sont encore mêlés à des éléments issus<br />
du répertoire « flamboyant » : limon orné d’arcades en<br />
anse de panier portées par des colonnettes engagées sur<br />
culots feuillagés ou figurés, à chapiteaux corinthiens et<br />
aux fûts animés de cannelures torses (FIG. 6) ; noyau sculpté<br />
d’une arcature trilobée avec colonnettes engagées sur<br />
bases prismatiques (FIG. 7), ressemblant beaucoup à celui<br />
de l’escalier du château de Chaumont-sur-Loire (vers<br />
1510) ; motifs de tresse à œillets sur le noyau et le limon ;<br />
voûte à huit quartiers dont les nervures s’élancent depuis<br />
le noyau (FIG. 8), rappelant la voûte du grand escalier du<br />
logis Louis XII à Blois (vers 1500). Ainsi, de par son<br />
plan, ses distributions et son décor, la « Grande maison »<br />
de François Brachet constitue un des exemples les plus<br />
FIG. 9<br />
intéressants de la première Renaissance orléanaise. Edifié<br />
sur un grand terrain vierge, le constructeur ne fut pas gêné<br />
par les contraintes parcellaires, lui permettant ainsi de bien<br />
détacher de la voirie ce vaste hôtel qui s’apparente ici à un<br />
manoir.<br />
(62) Dates d’abattage des chevrons couvrant cette avancée : 1505-1506[d].<br />
Hôtel de Janot le Bouteiller,<br />
17 rue de la Bretonnerie<br />
façade antérieure<br />
(photo Laurent Mazuy)<br />
(63) À l’ouest, l’échauguette a été englobée dans la nouvelle toiture. À l’est, la nouvelle façade est<br />
venue s’appuyer contre l’échauguette. Afi n d’effectuer un chaînage d’angle entre ces deux éléments,<br />
l’une des assises du cul-de-lampe fut modifi ée : les nouvelles pierres furent sculptées<br />
d’une frise de rosaces, alors qu’il s’agissait originellement d’oves (visibles à l’extérieur).<br />
(64) Il reste diffi cile de voir si les clefs de voûtes sculptées aux armes de Brachet et de sa femme<br />
Françoise Ruzé sont authentiques ou si elles ont été plaquées ultérieurement.<br />
(65) Comme l’indique le fragment de corniche sculpté d’une cordelière sur la façade nord du corps<br />
principal qui a été masqué par la construction du comble de cette aile en retour.