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148 <strong>EMPREINTE</strong> <strong>URBAINE</strong> - Les nouveaux espaces urbains<br />
séparées par une paroi en pan-de-bois à grille qui vient se<br />
fixer à l’arrière du poteau de fond recevant les sablières des<br />
façades (61 rue des Charretiers ; 11 rue des Grands-Champs).<br />
Ces constructions sérielles, souvent limitées en hauteur à un<br />
étage, étaient destinées à la petite bourgeoisie ou à des artisans.<br />
Elles peuvent être comparées aux maisons multiples connues<br />
à la fin du 15 e siècle et au 16 e siècle (44) à Bourges (85-87 rue<br />
Mirebeau), à Paris (milieu du 16 e siècle), à Tours (2-18 rue de<br />
la Madeleine, vers 1520-1530), à Rouen (39-45 rue aux Juifs,<br />
réalisées par la ville au début du 16 e siècle ou le lotissement<br />
édifié place du Marché-Neuf par la ville, vers 1531), ou en<br />
Belgique (maison du Pléban à Dinant : 1492-1494d).<br />
Le quartier nord-ouest<br />
Délimité par la rue Bannier à l’est et les rues des Carmes et<br />
Porte-Madeleine au sud, ce quartier correspond à celui qui<br />
fut le plus modelé par l’opération d’urbanisme de 1486, au<br />
travers de la mise en place d’un réseau viaire régulier et de<br />
la création de grands îlots quadrangulaires. L’observation<br />
des élévations montre de nombreux vestiges de maisons<br />
de la première moitié du 16 e siècle aux carrefours des<br />
rues, ce qui pourrait indiquer que le lotissement de ces<br />
îlots s’est d’abord effectué à partir des parcelles d’angles<br />
dont la situation était privilégiée (45) . Tandis que les rues<br />
anciennes et certains axes privilégiés (rue de la Lionne, rue<br />
des Grands-Champs, rue d’Illiers, etc.) sont rapidement<br />
occupés par de nombreuses maisons, dans d’autres secteurs<br />
le rythme de la construction semble avoir été plus lent,<br />
notamment en cœur de certains îlots ou dans les parcelles<br />
situées aux abords de l’enceinte, qui présentent dans la<br />
deuxième moitié du 16 e siècle un tissu urbain aéré par des<br />
terrains libres (46) . Se peut-il que les propriétaires laïcs ou<br />
religieux de ces terrains se soient opposés au développement<br />
de l’habitat ? Ce quartier présente là encore des rues où se<br />
concentrent de grands hôtels, comme la rue d’Illiers (47) ,<br />
alors que d’autres semblent accueillirent des habitations<br />
plus modestes, comme la rue de la Porte-Saint-Jean (48) . La<br />
rue des Carmes quant à elle présente quelques demeures<br />
aux façades ornées de motifs italianisant comme celle du<br />
n° 82 ou celle anciennement du n° 16 (49) . Enfin signalons<br />
plusieurs habitations de la première moitié du 16 e siècle rue<br />
de la Lionne, où grandes demeures (50) (n° 18 bis) côtoient<br />
de petites maisons élémentaires (n° 33), alors que plusieurs<br />
maisons voisines présentent toutes des baies semblables<br />
moulurées de doubles cavets, traduisant certainement une<br />
volonté d’imitation entre les commanditaires (façades des<br />
maisons n° 13, 21, 23, et 33 rue de la Lionne).<br />
La rue de la Bretonnerie<br />
et le quartier nord-est<br />
La rue de la Bretonnerie est une voie ancienne,<br />
probablement d’origine antique (51) , s’appuyant au sud<br />
sur la place de l’Étape, située au débouché de l’ancien<br />
cardo de la ville du Bas-Empire et en limite du quartier<br />
de la cathédrale, pour rejoindre au nord la rue Bannier en<br />
direction de la Beauce ou de Paris. Après la destruction<br />
des faubourgs lors du siège de la ville, l’habitat s’y était<br />
développé progressivement tout au long du 15 e siècle, sous<br />
la forme de petites maisons ou de « masures » au travers<br />
d’un paysage restant fortement marqué par la présence<br />
de nombreux jardins, de vergers et de vignes, comme en<br />
témoignent certains actes notariés. Ainsi, le 20 février 1431,<br />
Jean Porchier, sergent du duc, achetait rue de la Bretonnerie<br />
une « maison et son jardin » (52) . Le 8 octobre 1437, Perrin<br />
Gaillart cède au taillandier Jehan Collinet, moyennant une<br />
rente annuelle de 5 sols parisis, son jardin situé rue des<br />
Maillets (aujourd’hui rue Saint-Anne), jouxtant à l’est les<br />
jardins du couvent des Cordeliers établi sur la rue de la<br />
(44) Pour Bourges : CHAZEL 1997 : p. 20. Pour Paris : BOUDON 1983 : p. 26. Pour Tours : TOULIER,<br />
AQUILON 1980 : p. 47, 51 ; GUILLAUME, TOULIER 1983 : p. 13. Pour Rouen : GAUTHIEZ 1993 : p. 156,<br />
189, 195. Pour la Belgique : HOUBRECHTS 2007 : p. 185.<br />
(45) Certaines de ces maisons d’angles se caractérisent par leur mur pignon placé à l’angle de l’îlot<br />
souvent percé de jours rectangulaires au rez-de-chaussée et d’une baie en arc plein-cintre dans<br />
le comble : 46 rue du Colombier/rue des Grands-Champs ; 9 rue du Grenier-à-Sel/38 rue d’Illiers ;<br />
56 rue d’Illiers/angle rue des Grands-Champs ; 21 rue de la Lionne/9 rue du Bœuf-Saint-Paterne ;<br />
39 rue de la Lionne/rue des Grands-Champs ; 98 rue des Carmes/rue de Limare ; 15 rue Porte-<br />
Saint-Jean/2 bis rue de la Grille ; etc.<br />
(46) Voir la représentation de ce quartier sur le « Vray portraict de la ville d’Orléans » gravé sur bois<br />
par Raymond Rancurel vers 1575 et extrait de la Cosomographie universelle de tout le monde par<br />
Sébastien Münster (Orléans, Bibliothèque municipale, ZH 12).<br />
(47) 52 rue d’Illiers (croisées de la façade sur cour) ; 38 rue d’Illiers/9 rue du Grenier-à-Sel ; à proximité :<br />
11 rue du Grenier-à-Sel.<br />
(48) Exemple de petite maison élémentaire sur parcelle laniérée étroite : 7 rue Porte-Saint-Jean (avec<br />
escalier en vis à noyau sculpté d’une main-courante torsadée). Au n° 16 rue Porte-Saint-Jean,<br />
une maison plus importante présente une façade sur cour avec des baies en arc plein-cintre<br />
moulurées de quart-de-rond (vers 1530-1540). 52 rue Porte-Saint-Jean.<br />
(49) Au 82 rue des Carmes : bâtiment en fond de cour ayant conservé ses baies en arc plein-cintre et<br />
sa corniche soutenue par un modillon en forme de putto ailé. Demeure anciennement 16 rue des<br />
Carmes (détruite en 1940) : avec tourelle d’escalier quadrangulaire aux baies ornées de petits disques<br />
(Orléans, Musée des Beaux-Arts, classeur 310 cartes postales et 137 photos : n° 313-315).<br />
(50) Le n° 18 bis rue de la Lionne est un vaste hôtel en fond de cour avec un petit pavillon d’angle en<br />
brique à jour plein-cintre (années 1540). Remarquons sur le pignon oriental de la maison 39 rue<br />
de la Lionne une recherche de composition symétrique : un jour en arc plein-cintre est rejeté à<br />
chaque extrémité de l’étage.<br />
(51) MAZUY 2005 : p. 17.<br />
(52) Orléans, Archives départementales du Loiret, 3 E 10136.