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Évaluer l'interculturel : problématiques et pistes de travail. in - Users

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Apprendre à co­construire sur le soi <strong>et</strong> l’autre : approche actionnelle <strong>de</strong> l’<strong>in</strong>terculturel<br />

à l’université<br />

Fred Derv<strong>in</strong>, enseignant­chercheur, Département d’étu<strong>de</strong>s françaises, Université <strong>de</strong><br />

Turku, F<strong>in</strong>lan<strong>de</strong><br />

fre<strong>de</strong>r@utu.fi<br />

Résumé (5 lignes)<br />

C<strong>et</strong> article fait part d’une expérience <strong>de</strong> rencontres entre étudiants f<strong>in</strong>nophones<br />

apprentis­experts en étu<strong>de</strong>s françaises <strong>et</strong> <strong>de</strong>s étudiants francophones dans le cadre<br />

<strong>de</strong>squelles ils co­construisent un exposé sur un thème <strong>in</strong>terculturel. Nous analysons le<br />

déroulement <strong>de</strong>s préparations, les positionnements <strong>de</strong>s acteurs <strong>et</strong> les approches<br />

<strong>in</strong>terculturelles r<strong>et</strong>enues pour effectuer la tâche. Un modèle <strong>de</strong> compétences<br />

<strong>in</strong>terculturelles pour l’actionnel est discuté.<br />

Introduction (<strong>in</strong>ter)<br />

La pédagogie <strong>de</strong> l’<strong>in</strong>terculturel en langues étrangères a pris son envol à la f<strong>in</strong> <strong>de</strong>s<br />

années 80 <strong>et</strong> a mené à diverses approches. Parmi celles relevées par les chercheurs<br />

(Abdallah­Pr<strong>et</strong>ceille, 2003 : chapitre IV ; Derv<strong>in</strong>, 2007), l’étu<strong>de</strong> qui suit se place dans<br />

le paradigme <strong>de</strong> l’herméneutique critique (Abdallah­Pr<strong>et</strong>ceille, 1996 ; Dahl <strong>et</strong> al.<br />

2006). C<strong>et</strong>te approche rej<strong>et</strong>te le culturalisme <strong>et</strong> considère les i<strong>de</strong>ntités <strong>et</strong> les cultures<br />

comme <strong>de</strong>s construits <strong>in</strong>stables <strong>et</strong> <strong>in</strong>tersubjectifs. Elle se fon<strong>de</strong> sur une perspective<br />

actionnelle <strong>de</strong>s rencontres avec <strong>de</strong>s « autres », i.e. <strong>de</strong>s membres d’une autre<br />

communauté nationale. Nous nous proposerons d’analyser dans ce qui suit <strong>de</strong>s<br />

situations <strong>de</strong> rencontres entre <strong>de</strong>s étudiants universitaires f<strong>in</strong>nophones <strong>de</strong> première<br />

année en étu<strong>de</strong>s françaises <strong>et</strong> <strong>de</strong>s étudiants francophones en échange en F<strong>in</strong>lan<strong>de</strong>.<br />

Ces rencontres, <strong>in</strong>tégrées dans un cours <strong>de</strong> déconditionnement <strong>in</strong>terculturel, se<br />

déroulent sous la forme d’une tâche qui consiste en la préparation d’un exposé sur la<br />

thématique “être français/être f<strong>in</strong>landais” <strong>et</strong> <strong>de</strong> sa présentation <strong>de</strong>vant la classe. Nos<br />

étudiants étant amenés à étudier dans un pays francophone en Licence <strong>et</strong> étant formés<br />

à développer <strong>de</strong>s compétences <strong>in</strong>terculturelles (dites ‘protéophiliques’ ou<br />

l’appréciation <strong>de</strong> la diversité <strong>de</strong> soi <strong>et</strong> <strong>de</strong>s autres), il est essentiel qu’ils s’habituent à<br />

collaborer avec <strong>de</strong>s francophones <strong>et</strong> à être confrontés directement à l’altérité.<br />

A partir <strong>de</strong> transcriptions d’enregistrements vidéos <strong>de</strong> ces co­constructions, nous<br />

exam<strong>in</strong>erons les stratégies mises en œuvre par les étudiants f<strong>in</strong>landais pour a.<br />

négocier la présentation, b. se positionner dans l’exécution <strong>de</strong> la tâche, <strong>et</strong> c. exposer<br />

leurs avis sur la problématique durant la phase <strong>de</strong> préparation.<br />

La tâche : quelques déf<strong>in</strong>itions (<strong>in</strong>ter)<br />

Qu’est­ce qu’une tâche ? (sous­<strong>in</strong>ter)


Af<strong>in</strong> <strong>de</strong> traiter d’une pédagogie actionnelle <strong>de</strong> l’<strong>in</strong>terculturel, il est essentiel <strong>de</strong> revenir<br />

rapi<strong>de</strong>ment sur la notion <strong>de</strong> tâche 1 . L’enseignement­apprentissage fondé sur ce que<br />

l’on nomme le task­based en anglais a pris un essor considérable <strong>de</strong>puis les années 90<br />

(Skehan 1998, Ellis 2000, cf. Puren 2002 qui parle lui d’une « perspective coactionnelle<br />

co­culturelle »). Le CECR même y fait largement référence (2001 : 15).<br />

Dans la littérature, différentes déf<strong>in</strong>itions <strong>de</strong> la tâche ont été proposées (Johnson,<br />

2003). Par exemple Pica <strong>et</strong> al. (1993) expliquent qu’une tâche est orientée vers un<br />

objectif, qu’elle présuppose une participation directe d’apprenants <strong>et</strong> qu’elle peut<br />

consister en <strong>de</strong>s activités <strong>de</strong> résolution <strong>de</strong> problèmes, <strong>de</strong> prise <strong>de</strong> décision <strong>et</strong><br />

d’échange d’op<strong>in</strong>ion (ibid.). Pour Ellis (2000 : 195), une tâche est un plan <strong>de</strong> <strong>travail</strong><br />

(‘workplan’) qui m<strong>et</strong> en œuvre <strong>de</strong> l’<strong>in</strong>formation a<strong>in</strong>si que <strong>de</strong>s <strong>in</strong>structions sur les<br />

résultats (<strong>et</strong> apprentissages) attendus à partir <strong>de</strong>squelles les apprenants <strong>travail</strong>lent.<br />

Qu’est­ce qu’une ‘bonne’ tâche ? (sous­<strong>in</strong>ter)<br />

De nombreux chercheurs ont tenté <strong>de</strong> déf<strong>in</strong>ir <strong>de</strong>s critères qui déterm<strong>in</strong>ent si une tâche<br />

favorise la coopération/collaboration <strong>et</strong> surtout la négociation du sens (aspects<br />

discursifs) mais aussi, car nous nous plaçons dans le cadre <strong>de</strong> l’enseignementapprentissage<br />

<strong>de</strong>s langues, <strong>de</strong> la forme (aspects l<strong>in</strong>guistiques). Nous r<strong>et</strong>iendrons ce<br />

que Ellis (2003) déf<strong>in</strong>it comme étant <strong>de</strong>s aspects positifs d’une tâche menant à ces<br />

négociations : la tâche suscite <strong>de</strong>s échanges d’<strong>in</strong>formations requises <strong>et</strong> <strong>de</strong>s échanges<br />

doublés d’<strong>in</strong>formations, elle mène à un résultat fermé, elle ne fait pas partie <strong>de</strong>s<br />

activités habituelles <strong>de</strong>s apprenants, elle propose une problématique huma<strong>in</strong>e/éthique,<br />

elle nécessite un mo<strong>de</strong> discursif/narratif <strong>et</strong> elle ne dépend pas d’un seul <strong>et</strong> même<br />

contexte.<br />

Quels sont les impacts d’une bonne tâche ? (sous­<strong>in</strong>ter)<br />

Les impacts d’une bonne tâche sont nombreux <strong>et</strong> ont été largement décrits par la<br />

l<strong>in</strong>guistique appliquée. En termes d’apprentissage d’une langue, Skehan (1998)<br />

explique qu’une bonne tâche <strong>de</strong>vrait perm<strong>et</strong>tre aux apprenants d’améliorer leurs<br />

compétences <strong>de</strong> communication en direct (‘fluency’), leur précision pragmatique <strong>et</strong><br />

une certa<strong>in</strong>e complexité dans la production langagière (en termes <strong>de</strong> structures<br />

l<strong>in</strong>guistiques par exemple).<br />

Quant à Willis (1996 : 35­36), elle justifie le recours aux tâches dans l’enseignementapprentissage<br />

en proposant, entre autres, qu’elles perm<strong>et</strong>tent aux apprenants <strong>de</strong><br />

construire leur confiance en eux dans l’<strong>in</strong>teraction en langues étrangères mais aussi<br />

dans l’accomplissement d’une tâche, qu’elle leur donne la possibilité <strong>de</strong> s’adonner à<br />

une <strong>in</strong>teraction spontanée, <strong>de</strong> négocier les tours <strong>de</strong> parole, d’essayer diverses<br />

stratégies <strong>de</strong> communication, <strong>et</strong>c.<br />

Actionnel <strong>et</strong> <strong>in</strong>terculturel : vers <strong>de</strong>s compétences protéophiliques (<strong>in</strong>ter)<br />

Pour notre conception <strong>de</strong> l’<strong>in</strong>terculturel, l’un <strong>de</strong>s apports majeurs <strong>de</strong> l’actionnel <strong>et</strong> du<br />

task­based est l’apprentissage <strong>de</strong> la construction <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’acceptation <strong>de</strong><br />

l’<strong>in</strong>tersubjectivité (Ellis, 2000 : 204­205). L’approche <strong>de</strong> l’<strong>in</strong>terculturel r<strong>et</strong>enue peut<br />

1 Pour une théorie <strong>de</strong> la tâche, nous renvoyons aux contributions <strong>de</strong> Rosen, Coste <strong>et</strong> Puren dans ce<br />

volume <strong>et</strong> à Johnson (2003).


se résumer à partir <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux notions : le déconditionnement <strong>in</strong>terculturel <strong>et</strong> les<br />

compétences protéophiliques. Le déconditionnement <strong>in</strong>terculturel 2 est un aspect<br />

transversal du curriculum qui tente d’amener les étudiants à « observer, décrire <strong>et</strong><br />

analyser, voire s’auto­analyser, opérer une distanciation <strong>et</strong> une décentration,<br />

<strong>in</strong>tervenir, agir » (Abdallah­Pr<strong>et</strong>ceille, 2003 : 75), en ayant recours, entre autres, à <strong>de</strong>s<br />

métho<strong>de</strong>s d’analyse <strong>de</strong>s discours, <strong>de</strong> l’énonciation <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’anthropologie (cf. Derv<strong>in</strong>,<br />

2006 : 114 pour une discussion approfondie sur le déconditionnement). La démarche<br />

se fon<strong>de</strong> à la fois sur une formation théorique (Derv<strong>in</strong> & Johansson, 2007), <strong>de</strong>s<br />

démarches <strong>in</strong>terrogatives <strong>et</strong> d’analyse <strong>de</strong> situations <strong>de</strong> rencontres <strong>et</strong> <strong>de</strong> mise en fiction<br />

<strong>de</strong> soi <strong>et</strong> <strong>de</strong>s autres (Derv<strong>in</strong> & Suomela­Salmi, 2007 & à paraître). La démarche<br />

rej<strong>et</strong>te le comparativisme <strong>et</strong> le culturalisme comme outils méthodologiques.<br />

Le modèle <strong>de</strong> compétences qui gui<strong>de</strong> les étudiants dans leurs apprentissages est celui<br />

<strong>de</strong>s compétences protéophiliques <strong>et</strong> représente une synthèse <strong>de</strong>s critiques que nous<br />

avons apportées aux modèles <strong>de</strong> compétences <strong>in</strong>terculturelles disponibles en<br />

didactique (communication entre <strong>in</strong>dividus <strong>et</strong> non entre cultures, rôle primordial <strong>de</strong><br />

l’<strong>in</strong>terlocuteur <strong>et</strong> du contexte 3 dans la démonstration <strong>de</strong> compétences, <strong>in</strong>stabilité <strong>de</strong>s<br />

co­constructions i<strong>de</strong>ntitaires dans l’<strong>in</strong>teraction… cf. Derv<strong>in</strong>, 2007 : 115­117 ; Dirba,<br />

2007).<br />

Les métho<strong>de</strong>s d’enseignement­apprentissage <strong>et</strong> d’analyse utilisées sont à la fois « <strong>in</strong><br />

vitro » : l’étudiant exam<strong>in</strong>e, analyse <strong>et</strong> tire <strong>de</strong>s conclusions à partir <strong>de</strong> textes (romans<br />

autobiographiques, épiso<strong>de</strong>s <strong>de</strong> podcast,… ) <strong>et</strong> « <strong>in</strong> vivo » : en situations <strong>de</strong> rencontres<br />

dans la classe, via <strong>in</strong>tern<strong>et</strong>, via la visioconférence, en situation d’échanges... (Derv<strong>in</strong>,<br />

2007). L’<strong>in</strong> vivo, obj<strong>et</strong> d’étu<strong>de</strong> privilégié <strong>de</strong> l’actionnel dans l’<strong>in</strong>terculturel, sera<br />

exam<strong>in</strong>é ici.<br />

Description du corpus (<strong>in</strong>ter)<br />

Le corpus a été recueilli dans le cadre d’un proj<strong>et</strong> national f<strong>in</strong>landais qui s’<strong>in</strong>téresse à<br />

l’évaluation <strong>de</strong>s compétences langagières <strong>et</strong> <strong>in</strong>terculturelles (ECC­Lang, 2005­2007,<br />

cf. www.ecc­lang.fi). Une v<strong>in</strong>gta<strong>in</strong>e <strong>de</strong> préparations d’exposés <strong>et</strong> <strong>de</strong> présentations<br />

afférentes entre nos étudiants <strong>et</strong> <strong>de</strong>s francophones sur la question « être français, être<br />

f<strong>in</strong>landais, qu’est­ce que cela signifie ? » ont été filmées <strong>et</strong> transcrites au pr<strong>in</strong>temps<br />

2007 4 . Nous ne r<strong>et</strong>iendrons ici que six présentations enregistrées à l’université <strong>de</strong><br />

Turku, qui avaient été <strong>in</strong>sérées dans le cadre d’un cours <strong>in</strong>titulé regards croisés<br />

franco­f<strong>in</strong>landais (cf. Derv<strong>in</strong> & Johansson, 2007 : 146­148). L’hypothèse adjacente<br />

était que les étudiants allaient pouvoir m<strong>et</strong>tre en pratique les savoir­faire (analyses<br />

discursives <strong>et</strong> énonciatives <strong>de</strong>s co­constructions i<strong>de</strong>ntitaires) <strong>et</strong> le savoir­agir (prendre<br />

<strong>de</strong>s décisions à partir <strong>de</strong> ces analyses pour agir) <strong>de</strong>s compétences protéophiliques. Les<br />

préparations étaient effectuées en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la classe.<br />

Tableau 1 – <strong>de</strong>scription du corpus (sous <strong>in</strong>ter)<br />

Groupes Thème Durée<br />

2<br />

Pour une <strong>de</strong>scription complète du curriculum <strong>et</strong> <strong>de</strong>s compétences générales <strong>de</strong>s apprentis­experts <strong>de</strong><br />

français à Turku, cf. Derv<strong>in</strong> & Johansson, 2007.<br />

3<br />

Cf. d’ailleurs les suggestions d’Ellis (2000 : 207) sur le beso<strong>in</strong> d’<strong>in</strong>clure le contexte dans l’analyse<br />

<strong>de</strong>s tâches.<br />

4<br />

Voir les <strong>in</strong>structions <strong>de</strong> la tâche sur www.ecc­lang.fi


Groupe 1 (G1) Stéréotypes sur les Français <strong>et</strong> les F<strong>in</strong>landais 23:08<br />

Groupe 2 (G2) Le c<strong>in</strong>éma f<strong>in</strong>landais versus c<strong>in</strong>éma français : les images<br />

<strong>de</strong>s <strong>in</strong>dividus véhiculés par ces c<strong>in</strong>émas<br />

14:30<br />

Groupe 3 5<br />

(G3)<br />

Critiques <strong>de</strong> son propre pays 15:45<br />

Groupe 4 (G4) La politesse 20:58<br />

Groupe 5 (G5) Etre français, être f<strong>in</strong>landais 14:03<br />

Groupe 6 (G6) La nourriture f<strong>in</strong>landaise <strong>et</strong> française 23:23<br />

Af<strong>in</strong> d’analyser les transcriptions du corpus, nous avons découpé chaque préparation<br />

en microcontextes. C<strong>et</strong>te métho<strong>de</strong> <strong>in</strong>spirée <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> Hermans (2001) perm<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />

relever le répertoire <strong>de</strong>s différentes positions <strong>de</strong>s participants à une <strong>in</strong>teraction.<br />

Positionnements (<strong>in</strong>ter)<br />

Le déroulement <strong>de</strong> la tâche est lié directement aux positions adoptées par les<br />

participants. Ces positions sont <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux types : métatextuelles (les participants parlent<br />

<strong>de</strong> l’exposé) <strong>et</strong> <strong>de</strong> contenu. Les F<strong>in</strong>landais remplissent le plus grand nombre <strong>de</strong><br />

positions :<br />

Métatextuelles :<br />

­ ils prennent l’<strong>in</strong>itiative <strong>de</strong> gui<strong>de</strong>r <strong>et</strong> d’encadrer la planification <strong>de</strong> l’exposé,<br />

­ ils présentent les documents qu’ils ont trouvés pour faire l’exposé (sauf G5),<br />

­ ils partagent (récitent dans certa<strong>in</strong>s cas) ce qu’ils vont dire pendant l’exposé.<br />

De contenu :<br />

­ ils posent quelques questions <strong>de</strong> contenu aux francophones (sur la France ou leurs<br />

perceptions <strong>de</strong> certa<strong>in</strong>s aspects f<strong>in</strong>landais, par ex. G2 F<strong>in</strong>2 6 : « qu’est­ce que vous<br />

pensez <strong>de</strong>s F<strong>in</strong>landais après avoir vu c<strong>et</strong> film <strong>de</strong> Kaurismäki ? »),<br />

­ ils discutent un peu sur <strong>de</strong>s thématiques (à l’<strong>in</strong>itiative du francophone qui leur pose<br />

<strong>de</strong>s questions).<br />

Quant aux francophones, leurs positions sont relativement réduites <strong>et</strong> passives :<br />

Métatextuelles :<br />

­ ils posent quelques questions sur le déroulement <strong>de</strong> l’exposé (au début, par ex. G4,<br />

F1 : « quel est mon rôle ? »)<br />

De contenu :<br />

­ ils répon<strong>de</strong>nt aux questions <strong>de</strong>s étudiantes,<br />

­ ils posent un grand nombre <strong>de</strong> questions sur la F<strong>in</strong>lan<strong>de</strong> (ex : G3, F1 : « est­ce qu’il<br />

faut parler f<strong>in</strong>nois pour s’<strong>in</strong>tégrer ? ») <strong>et</strong> un peu sur le déroulement <strong>de</strong> l’exposé (au<br />

début),<br />

­ ils commentent les documents que leur sont montrés <strong>et</strong> les idées présentées par les<br />

étudiants.<br />

Enf<strong>in</strong>, on notera que les francophones sont peu <strong>in</strong>terpelés pour effectuer <strong>de</strong>s<br />

corrections langagières. A<strong>in</strong>si, en tout, quelques language related episo<strong>de</strong>s (Swa<strong>in</strong> &<br />

Lapk<strong>in</strong>, 1998 : 326), durant lesquels les étudiants parlent <strong>de</strong> la langue qu’ils<br />

5<br />

Le groupe 3 est le seul groupe qui comprenait un étudiant, les autres groupes étaient composés<br />

uniquement d’étudiantes.<br />

6<br />

Les transcriptions <strong>de</strong>s préparations suivent un modèle orthographique. Pour chaque groupe, les<br />

participants ont les <strong>in</strong>itiales suivantes : pour les F<strong>in</strong>landais, F<strong>in</strong>1, F<strong>in</strong>2,… <strong>et</strong> les francophones F1, F2…<br />

(ordre d’apparition).


produisent, se corrigent, ou s’<strong>in</strong>terrogent sur celle­ci avec le francophone, ont été<br />

i<strong>de</strong>ntifiés dans G6 uniquement.<br />

Déroulement <strong>de</strong> la tâche : symptômes <strong>de</strong> la non­rencontre ? (<strong>in</strong>ter)<br />

Parmi les six groupes r<strong>et</strong>enus, l’accomplissement <strong>de</strong> la tâche se fait <strong>de</strong> façon<br />

hétéroclite. Quelques étapes <strong>et</strong> microcontextes sont similaires néanmo<strong>in</strong>s : au début,<br />

les étudiants f<strong>in</strong>landais exposent leurs <strong>problématiques</strong> (G5, F<strong>in</strong>1 : « nous allons<br />

donner la manière nous allons faire c<strong>et</strong> exposé nous allons donner notre avis sur<br />

comment sont les F<strong>in</strong>landais, comment sont les français ») <strong>et</strong> vérifient que le<br />

francophone sait <strong>de</strong> quoi il va s’agir (G1, F<strong>in</strong> 1 : « alors c’est ici les <strong>in</strong>structions, estce<br />

que vous savez sur ces choses rien ou ? »). Egalement, le même microcontexte <strong>de</strong><br />

gestion <strong>de</strong>s tours <strong>de</strong> parole pour l’exposé a été i<strong>de</strong>ntifié dans G1 <strong>et</strong> G5 au début, G4 <strong>et</strong><br />

G6 au milieu <strong>et</strong> G3 à la f<strong>in</strong>. Malgré les tentatives d’une étudiante <strong>de</strong> G2, la gestion <strong>de</strong>s<br />

tours n’est pas vraiment réalisée dans ce groupe. On note aussi un microcontexte<br />

récurrent qui <strong>in</strong>troduit <strong>de</strong>s questions­réponses sur la France <strong>et</strong> la F<strong>in</strong>lan<strong>de</strong> ou l’op<strong>in</strong>ion<br />

<strong>de</strong>s participants. Enf<strong>in</strong>, il est surprenant que seuls trois groupes sur six proposent un<br />

microcontexte <strong>de</strong> présentation (G1 & G6 se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt leurs noms, G4 échange sur le<br />

cours) <strong>et</strong> <strong>de</strong> socialisation (G6, F<strong>in</strong>1 <strong>de</strong>man<strong>de</strong> au francophone pourquoi il parle<br />

suédois). Les autres passent directement à la tâche.<br />

Les groupes 3 <strong>et</strong> 5 sont les seuls groupes à avoir le même profil dans le déroulement<br />

<strong>de</strong> la tâche. Les étudiants <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux groupes ont déjà préparé le contenu <strong>de</strong> chaque<br />

<strong>in</strong>tervention avant la phase <strong>de</strong> préparation <strong>et</strong> la négociation <strong>de</strong>s tours <strong>de</strong> parole se fait<br />

entre eux. Ils proposent simplement au francophone <strong>de</strong> prendre en charge la<br />

conclusion. A<strong>in</strong>si, G5 prend très peu en compte le francophone. Par exemple, au<br />

début <strong>de</strong> la préparation, F<strong>in</strong>1 tente d’amorcer un dialogue très bref <strong>et</strong> artificiel avec<br />

lui :<br />

F<strong>in</strong>1 : euh est­ce que vous avez quelques idées que vous voulez parler ?<br />

F1 : euh les F<strong>in</strong>landais <strong>et</strong> les Français donc ? Ben euh les F<strong>in</strong>landais sont<br />

plutôt euh <strong>de</strong>s personnes gentilles mais on a du mal à enf<strong>in</strong> elles sont pas c’est<br />

difficile <strong>de</strong> leur parler euh enf<strong>in</strong> elles sont un peu fermées<br />

F<strong>in</strong>1 : euh d’accord euh est­ce que nous avons pensé ce qui va parler<br />

premièrement <strong>et</strong>…<br />

De son côté, G3 dialogue un peu avec le francophone mais <strong>de</strong> façon relativement<br />

mécanique (après chaque présentation <strong>de</strong>s thèmes r<strong>et</strong>enus, chaque étudiant <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

au francophone : « c’est comme ça aussi en France ? »). Au bout <strong>de</strong> 11 m<strong>in</strong>utes 30,<br />

G3 commence à s’<strong>in</strong>terroger sur le partage <strong>de</strong>s tours alors qu’ils viennent déjà chacun<br />

<strong>de</strong> donner leurs idées <strong>et</strong> arguments sur leur problématique dans un ordre qui semble<br />

avoir été programmé.<br />

Pour les autres groupes, c’est différent. Dans G1, <strong>et</strong> dès le début, les étudiantes<br />

échangent sur les tours <strong>de</strong> parole pour l’exposé avec le francophone (celui­ci ne fait<br />

que répéter le contenu <strong>de</strong>s propositions <strong>de</strong> F<strong>in</strong>1). La préparation <strong>de</strong> G1 se compose à<br />

la fois <strong>de</strong> métatexte <strong>et</strong> <strong>de</strong> questions­réponses sur la F<strong>in</strong>lan<strong>de</strong> <strong>et</strong> la France (F1 « ça<br />

vous dérange pas que qu<strong>in</strong>ze heures <strong>de</strong> nuit dans une journée ? ») <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s<br />

étudiantes mais surtout du francophone. En tout, ils réussissent à s’entendre sur un<br />

plan <strong>et</strong> les tours <strong>de</strong> parole pour l’exposé avant la f<strong>in</strong> <strong>de</strong> la préparation (tout comme<br />

plus tardivement chez G4 <strong>et</strong> G6).


Le groupe 2 est tout à fait <strong>in</strong>téressant car une étudiante f<strong>in</strong>landaise ne cesse <strong>de</strong><br />

rappeler à l’ordre les <strong>de</strong>ux Français qui comparent <strong>et</strong> discutent <strong>de</strong>s thématiques – sans<br />

faire <strong>de</strong> planification ou <strong>de</strong> négociation <strong>de</strong>s tours. Elle dit a<strong>in</strong>si : « Ok, qu’est­ce que<br />

nous allons dire <strong>de</strong>… » (3:30), « est­ce que nous voulons dire que le film f<strong>in</strong>landais<br />

ou français veut faire ou qu’est­ce que nous allons parler ? » (5:14), « qu’est­ce que<br />

nous voulons dire <strong>de</strong>vant la classe ? » (10:16)… A la f<strong>in</strong> <strong>de</strong> la préparation, les<br />

étudiantes <strong>et</strong> les <strong>de</strong>ux francophones réussissent toutefois à co­construire <strong>de</strong>s<br />

conclusions <strong>in</strong>téressantes sur la thématique.<br />

En bref, on observe donc un déséquilibre entre les <strong>in</strong>vités francophones (qui sont<br />

souvent guidés) <strong>et</strong> les étudiants f<strong>in</strong>landais mais aussi <strong>de</strong> grosses différences dans le<br />

déroulement <strong>de</strong> la tâche ­ même si les <strong>in</strong>structions étaient les mêmes.<br />

Quel(s) <strong>in</strong>terculturel(s) ? (<strong>in</strong>ter)<br />

Quatre types différents d’approches <strong>de</strong> la thématique <strong>de</strong>s regards <strong>in</strong>terculturels ont été<br />

i<strong>de</strong>ntifiés dans le corpus. En général, tous les francophones <strong>et</strong> <strong>de</strong>ux groupes<br />

d’étudiants (G4 <strong>et</strong> G5) ont recours à <strong>de</strong>s stéréotypes, représentations <strong>et</strong> commentaires<br />

<strong>et</strong>hnocentriques. Par exemple, à la f<strong>in</strong> <strong>de</strong> la préparation, G4 tire une conclusion<br />

commune avec le francophone que les F<strong>in</strong>landais sont mo<strong>in</strong>s polis que les Français.<br />

G5 est le groupe où les stéréotypes sont exploités le plus. Néanmo<strong>in</strong>s, <strong>de</strong>ux étudiantes<br />

r<strong>et</strong>iendront ici notre attention. F<strong>in</strong>1 ne cesse <strong>de</strong> « m<strong>in</strong>iaturiser » (Sen, 2006 : XVI) les<br />

Français <strong>et</strong> les F<strong>in</strong>landais mais, lorsqu’elle explique ce qu’elle va présenter, elle<br />

affirme que « je vais parler aussi que nous sommes tous <strong>in</strong>dividus <strong>et</strong> c’est difficile à<br />

généraliser les gens » (F<strong>in</strong>1). Quant à F<strong>in</strong>3 (G5), elle est la seule <strong>de</strong> tout le corpus à<br />

refuser tout bonnement <strong>de</strong> dire quoi que ce soit, en se justifiant <strong>de</strong> la sorte : « je ne<br />

sais pas j’ai essayé <strong>de</strong> penser quelque chose mais c’est c’est tout stéréotypique je ne<br />

sais pas vraiment ce que je pense <strong>de</strong>s Français je ne connais pas beaucoup <strong>de</strong>s<br />

Français <strong>et</strong> je ne peux pas dire les stéréotypes ».<br />

Les autres groupes sont plus neutres :<br />

G3 <strong>et</strong> G6 se fon<strong>de</strong>nt sur <strong>de</strong>s statistiques sur le taux <strong>de</strong> chômage <strong>et</strong> d’alcoolisme <strong>et</strong> sur<br />

<strong>de</strong>s éléments culturels ‘<strong>de</strong>scriptibles’ (les plats f<strong>in</strong>landais) pour l’exposé. Les<br />

commentaires ne semblent alors que très peu stéréotypés car les généralités sont<br />

‘soutenues’ par une autorité. Toutefois, ce sont toujours ces éléments qui poussent le<br />

francophone à avoir recours à <strong>de</strong>s généralités. Par exemple, dans la conversation<br />

suivante, l’étudiant français construit un modèle <strong>de</strong> repas quotidiens en F<strong>in</strong>lan<strong>de</strong>, à<br />

partir d’un élément doxique (« j’ai entendu dire.. : ») :<br />

F<strong>in</strong>2: est­ce que vous trouvez que l’heure <strong>de</strong>s repas en F<strong>in</strong>lan<strong>de</strong> c’est...<br />

F: l’heure <strong>de</strong>s repas?<br />

F<strong>in</strong>2: oui<br />

F: ca c’est <strong>in</strong>téressant<br />

F<strong>in</strong>1: quoi?<br />

F: l’heure <strong>de</strong>s repas<br />

F<strong>in</strong>1: ah<br />

F. vous avez dans une journée combien <strong>de</strong> repas?<br />

F<strong>in</strong>1 & 2: ça dépend


F: parce que moi j’ai entendu dire qu’il y en avait 4<br />

F<strong>in</strong>1: 4?<br />

F: oui il y en avait un le mat<strong>in</strong> p<strong>et</strong>it déjeuner un pour le déjeuner un autre<br />

autour <strong>de</strong> 4 ou 5 heures <strong>et</strong> puis un autre autour <strong>de</strong> 9h<br />

F<strong>in</strong>2: mais pendant le soir c’est peut être comme le p<strong>et</strong>it­déjeuner<br />

F: d’accord c’est pas un repas parce que en France on fait un gros repas à midi<br />

un p<strong>et</strong>it repas a 4h c’est généralement sucré <strong>et</strong> puis un gros repas le soir autour<br />

<strong>de</strong> 20h.<br />

De son côté, une étudiante <strong>de</strong> G1 (F<strong>in</strong>1) semble rem<strong>et</strong>tre en question l’effusion <strong>de</strong><br />

stéréotypes du francophone en lui posant <strong>de</strong>ux questions déstabilisantes. Une <strong>de</strong> ces<br />

questions vient à la suite d’un échange entre F<strong>in</strong>2 <strong>et</strong> F1 :<br />

F1 : tu trouves <strong>de</strong>s choses sur les Français ?<br />

F<strong>in</strong>2 : J’écris la cuis<strong>in</strong>e française <strong>et</strong> les Français sont fiers <strong>de</strong> leur pays <strong>et</strong> <strong>de</strong> la<br />

langue française <strong>et</strong> la politesse <strong>et</strong> les Français en général sont un peu en r<strong>et</strong>ard<br />

F<strong>in</strong>1 : mais est­ce que stéréotypiquement on pense qu’il y a <strong>de</strong>s différences<br />

entre les Français du nord <strong>et</strong> du sud comme c’est un grand pays quand même ?<br />

A la suite <strong>de</strong> cela, le Français fait un long monologue dans lequel il explique les<br />

différences entre les gens du nord <strong>et</strong> du sud <strong>de</strong> la France (alors qu’avant il avait parlé<br />

<strong>de</strong> la catégorie large les Français). On a ici un acte <strong>de</strong> co­déconstruction activé par la<br />

F<strong>in</strong>landaise <strong>et</strong> discuté par le francophone 7 .<br />

Pour f<strong>in</strong>ir ce passage en revue <strong>de</strong>s gestions <strong>de</strong> l’<strong>in</strong>terculturel, prenons le Groupe 2.<br />

Les <strong>de</strong>ux Françaises qui participent à la préparation parlent beaucoup <strong>et</strong> généralisent<br />

sur certa<strong>in</strong>s aspects <strong>de</strong>s sociétés f<strong>in</strong>landaises <strong>et</strong> françaises. Les <strong>de</strong>ux F<strong>in</strong>landaises<br />

<strong>in</strong>terviennent peu, par exemple seulement pour rem<strong>et</strong>tre le groupe sur les rails en<br />

rappelant la problématique (F<strong>in</strong>1 : « est­ce que c’est l’image que nous F<strong>in</strong>landais ont<br />

<strong>de</strong>s Français ou… »). A la f<strong>in</strong> <strong>de</strong> la préparation (avant que l’on vienne les chercher<br />

pour faire la présentation), elles co­construisent le résultat suivant :<br />

F2 : peut être que les réalisateurs ils déf<strong>in</strong>issent l’i<strong>de</strong>ntité d’un pays ?<br />

F1 : (…) tout n’est pas vrai <strong>et</strong> (que) peut être le réalisateur a cherché à<br />

exagérer peut­être certa<strong>in</strong>s côtés euh aussi après que c’est du c<strong>in</strong>éma c’est pas<br />

la réalité (… )<br />

F<strong>in</strong>2 : <strong>et</strong> puis c’est plusieurs types <strong>de</strong> c<strong>in</strong>émas mais est­ce que on peut dire<br />

qu’ils ont différentes idées sur la nationalité ou l’i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong>s F<strong>in</strong>landais ou <strong>de</strong>s<br />

Français <strong>et</strong> puis si on voit seulement un certa<strong>in</strong> type <strong>de</strong> c<strong>in</strong>éma on a une vue<br />

très limitée<br />

F1 : donc il faut prendre du recul.<br />

Les francophones <strong>et</strong> les F<strong>in</strong>landaises réussissent a<strong>in</strong>si à tirer une conclusion <strong>de</strong> type<br />

protéophilique. En ce sens, l’un <strong>de</strong>s objectifs a bien été atte<strong>in</strong>t.<br />

Implications pour la rencontre (<strong>in</strong>ter)<br />

7 La déconstruction mène toutefois à une nouvelle recatégorisation.


Pour conclure, on est en droit <strong>de</strong> se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si la tâche était ‘bonne’. Selon les<br />

critères établis par Ellis (2000 : 200), l’élaboration <strong>de</strong> la tâche n’a pas toujours été<br />

efficace. Par exemple, l’élément primordial d’échange doublée d’<strong>in</strong>formations (ibid.)<br />

n’a pas été respecté parce que ce sont surtout les étudiants f<strong>in</strong>landais qui ont transmis<br />

l’<strong>in</strong>formation qu’ils avaient trouvée. En outre, même s’il y a eu quelques moments<br />

d’échanges, l’impression générale est qu’ils n’étaient pas riches. Enf<strong>in</strong>, l’aspect social<br />

<strong>de</strong> la rencontre a été largement <strong>in</strong>exploré. Plusieurs explications sont possibles. Tout<br />

d’abord, les enjeux <strong>de</strong> la préparation étaient différents pour les participants : pour les<br />

F<strong>in</strong>landais, la tâche faisait partie <strong>de</strong> leurs cours, pour les francophones, ce n’était<br />

qu’une simple visite. Alors que les étudiants f<strong>in</strong>landais étaient bien préparés<br />

(documents, arguments, idées… ), les francophones ne semblaient pas toujours au<br />

courant <strong>de</strong> ce qui allait se passer (même si les mêmes <strong>in</strong>structions leur avaient été<br />

données).<br />

Des implications pratiques pourraient ai<strong>de</strong>r à recadrer l’expérience <strong>et</strong> à mener<br />

davantage à <strong>de</strong> la collaboration (« the mutual engagement of participants <strong>in</strong> a<br />

coord<strong>in</strong>ated effort to solve the problem tog<strong>et</strong>her », Roschelle & Teasley, 1995 : 70)<br />

qu’à <strong>de</strong> la coopération (ce qui s’est fait entre les F<strong>in</strong>landais). La phase <strong>de</strong> préparation<br />

pourrait être précédée d’<strong>in</strong>teraction par e­mail ou par (vidéo)chat entre tous les<br />

participants, pour : faire connaissance (<strong>et</strong> pas simplement être l’étranger <strong>de</strong> passage),<br />

discuter du soi <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’autre, diviser les tâches (qui trouve quoi ?), s’entendre sur une<br />

problématique commune (nos étudiants l’ont toujours ‘imposée’ aux francophones),<br />

<strong>et</strong>c. Après l’exposé, une discussion au se<strong>in</strong> du groupe sur le déroulement serait<br />

également utile. En outre, tout un <strong>travail</strong> en amont sur la manière <strong>de</strong> rencontrer l’autre<br />

(se présenter, apprendre à l’<strong>in</strong>clure dans le discours co­construit <strong>et</strong> à l’écouter… ) est<br />

davantage nécessaire.<br />

Qu’en est­il du protéophilique ? L’analyse a montré que les résultats sont très<br />

mitigés 8 . A aucun moment, un étudiant n’a remis en question ou déconstruit <strong>de</strong> façon<br />

explicite les discours culturalistes omniprésents dans les préparations (bien que cela<br />

se fasse constamment dans la classe). Bien sûr, cela est difficile pour l’étudiant car il<br />

risque alors <strong>de</strong> perdre la face <strong>et</strong> <strong>de</strong> faire perdre celle du francophone, en passant pour<br />

un ‘moraliste’ (le savoir­agir/réagir pose <strong>de</strong> gros problèmes aux étudiants à ce sta<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> l’apprentissage). Pourtant, la tâche a <strong>de</strong>s avantages dans une réflexion postérieure.<br />

Si les préparations sont filmées, on peut proposer aux étudiants <strong>de</strong> les visionner pour<br />

eux­mêmes, d’exam<strong>in</strong>er <strong>et</strong> <strong>de</strong> déconstruire le déroulement <strong>de</strong> la tâche, leur propre<br />

discours <strong>et</strong> celui <strong>de</strong>s autres sur la thématique (savoir­faire I <strong>et</strong> II). Relier formellement<br />

les critères <strong>et</strong> les impacts d’une bonne ‘tâche’ (Willis (1996 : 35­36), Skehan, 1998)<br />

au modèle <strong>de</strong> compétences protéophiliques semble être l’une <strong>de</strong>s bonnes voies vers la<br />

rencontre car plus les objectifs formels (la ‘tâche’) <strong>et</strong> d’apprentissage (les savoir­faire<br />

à développer) sont clairs <strong>et</strong> reliés, plus les participants (les apprenants <strong>de</strong> langues<br />

comme les ‘natifs’) ont <strong>de</strong> chance d’apprécier les diversités <strong>de</strong> chacun (Sen, 2006) <strong>et</strong><br />

d’aller au­<strong>de</strong>là <strong>de</strong> visions culturalistes.<br />

Bibliographie (<strong>in</strong>ter)<br />

8 Nous avions déjà tiré c<strong>et</strong>te conclusion dans Derv<strong>in</strong> (2007). Le discours sur l’<strong>in</strong>terculturel ne peut être<br />

qu’<strong>in</strong>stable car il est contextuel, co­construit <strong>et</strong> ‘victime’ <strong>de</strong> violences symboliques (par ex. en situation<br />

hiérarchique).


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